"Au fond, Tarik Ramadan, il n'est ni affreux, ni sympathique. Je suis beaucoup plus choqué par des traîtres juifs comme les Brauman et autres. Alors évidemment, Monsieur Mermet, le journaliste Brejnievien, Monsieur Langlois, le chef de Politis, quelques autres, ils savent dire les choses autrement. Et c'est comme ça qu'on peut pas les coincer ceux-là. Ces gens là me semblent infiniment plus méprisables, infiniment plus répugnants." Alexandre Adler
[Alexandre Adler est ditorialiste au Figaro, collaborateur du site Internet pro-israélien proche-orient.info (que dirige Élisabeth Schemla), conseiller du président du Conseil Représentatif des Institutions juives de France, et "expert" omnipotent sur les chaînes de télévision françaises (Arte, France 2, etc..) et sur Radio France Culture. Il a tenu ces propos le lundi 13 octobre 2003, dans un entretien avec Elisabeth Schemla diffusé sur le site Internet de cette dernière.]
                                       
                       
Point d'information Palestine N° 231 du 24/11/2003
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Pierre-Alexandre Orsoni (Président) - Monique Barillot (Trésorière)
Association loi 1901 déclarée à la Préfecture des Bouches-du-Rhône sous le N° 0133099659
Rédaction : Pierre-Alexandre Orsoni et Marcel Charbonnier
                                              
Si vous ne souhaitez plus recevoir nos Points d'information Palestine, ou nous indiquer de nouveaux destinataires, merci de nous adresser un e-mail à l'adresse suivante : lmomarseille@wanadoo.fr. Ce point d'information est envoyé directement à un réseau strictement privé de 8114 destinataires et n'est adossé à aucun site internet.
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Consultez régulièrement les sites francophones de référence :
http://www.solidarite-palestine.org - http://www.paix-en-palestine.org - http://www.protection-palestine.org
www.presse-palestine.org - http://www.vigie-media-palestine.org - http://www.acrimed.org
http://www.reseauvoltaire.net - http://www.mom.fr/guides/palestine/palestine.html - http://www.ism-france.org
NOUVEAU : http://www.association-belgo-palestinienne.be
                                               
Au sommaire
              
Dernières parutions
1. De Beyrouth à Jénine, quatorze soldats israéliens racontent de Irit Gal et Ilana Hammerman aux éditions La Fabrique
2. Les coulisses de la terreur de Richard Labevière aux éditions Grasset
3. La nouvelle islamophobie de Vincent Geisser aux éditions La Découverte 
                       
Rendez-vous
1. DIJON - Palestine, mais presque ! du mercredi 26 au dimanche 30 novembre 2003 à Dijon (21) dans le cadre du Festival des Cyclopédies
2. MARSEILLE - Rencontre avec Waji El Ayassa et Jamalat le vendredi 28 novembre 2003 à 20H15 à Espace - 22, rue Mathieu Stilatti - Marseille 3°
3. BRUXELLES - Rencontre "Au-delà du mur, perspectives de paix" le samedi 29 novembre à partir de 17H00 au Passage 44 - 44, boulevard du Jardin Botanique - 1000 Bruxelles
4. MARSEILLE - Présentation de l'association "Grandir à Gaza" le samedi 29 novembre à partir de 17H00 à L'Equitable Café - 27, rue de la Loubière - Marseille 6°
                             
Réseau
1. Composition du nouveau gouvernement palestinien (12 novembre 2003)
2. D’Oslo à Genève : le retour des imposteurs par Pierre-Yves Salingue (2 novembre 2003)
3. Condamnation des attaques anti-juifs par l'Union Générale des Etudiants de Palestine - Unité de Paris (21 novembre 2003)
4. Le Mrap condamne l'agression perpétrée contre son secrétaire général (14 novembre 2003)
5. Harcèlement judicière - Un communiqué du Mouvement Justice pour la Palestine (1er novembre 2003)
6. Quand le sage montre la lune par Sylvia Cattori (3 novembre 2003)
7. Observatoire du Lobby Israélien – La Ligue de Défense Juive s’installe aux Pays-Bas par Miral Assuli on The Electronic Intifada le lundi 22 septembre 2003 [traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier]
8. Il n’y a qu’un seul choix, qu’on le veuille ou non par Ken Heller (mars 2003) sur le site de la Ligue de Défense Juive hollandaise [http://www.jdlholland.tk] [traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier]
                                              
Revue de presse
1. Israël : l'armée accusée - Une arme très meurtrière aurait été utilisée dans un raid sur Gaza par Jean-Luc Allouche in Libération du vendredi 21 novembre 2003
2. Défense : Premier F-16.I pour Israël in Air et Cosmos (hebdomadaire français) du vendredi 21 novembre 2003
3. Bush campe sur ses positions par Jean-Christophe Ploquin in La Croix du mercredi 19 novembre 2003
4. Palestine : juste un autre plan de paix ? par Valérie Féron in 24 heures (quotidien suisse) du lundi 17 novembre 2003
5. Orient arabe : le nouveau paradigme US par Hichem Ben Yaïche on Vigirak [http://vigirak.com] le lundi 17 novembre 2003
6. "Si la famine guette, en Cisjordanie, suivez mon regard : Israël", dit la Croix-Rouge par Amos Harel, Aluf Benn et Yoav Stern in Ha'Aretz (quotidien israélien) du  dimanche 16 novembre 2003 [traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier]
7. L'amputation des oliviers palestiniens, arme des colons israéliens dans la conquête territoriale par Gilles Paris in Le Monde du 13 novembre 2003
8. Sharon indésirable à Ankara in L'Intelligent - Jeune Afrique du mercredi 12 novembre 2003
9. Bertrand Delanoë reçu par Yasser Arafat Dépêche de l'agence Associated Press du lundi 10 novembre 2003, 09h24
10. Le temps est venu de supprimer l'Autorité Palestinienne par Gideon Levy in Ha’Aretz (quotidien israélien) du dimanche 9 novembre 2003 [traduit de l'hébreu par Michel Ghys]  
11. La double exclusion des réfugiés palestiniens par Mouna Naïm in Le Monde du samedi 8 novembre 2003
12. Des policiers passent à tabac deux Arabes de Nazareth par l’Association Arabe pour les Droits de l’Homme le samedi 8 novembre 2003 [traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier]
13. A Kamani, un Israélien juif agresse des citoyens arabes par l’Association Arabe pour les Droits de l’Homme le samedi 8 novembre 2003 [traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier]
14. Le ministre irakien des Émigrés a quitté le Liban humilié - La grossière et dangereuse erreur de Beyrouth à l’encontre de Bagdad par Ziyad Makhoul in L'Orient - Le Jour (quotidien libanais) du vendredi 7 novembre 2003
15. Peut-on arrêter Sharon ? par Patrick Seale in L'intelligent - Jeune Afrique du vendredi 7 novembre 2003
16. De l’Afrique du Sud à la Palestine par Leila Farsakh in Le Monde diplomatique du mois de novembre 2003
17. Enfants qui meurent, enfants qui tuent par Leah Tsemel in Le Monde diplomatique du mois de novembre 2003
18. Les gens et la politique - Alibis et berceuses par Akiva Eldar in Ha'Aretz (quotidien israélien) du jeudi 6 novembre 2003 [traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier]
19. Sniper riposte à Sarkozy - Faute de recevoir des "excuses publiques", les rappeurs menacent d'une plainte en diffamation le ministre de l'Intérieur qui avait jugé leurs textes "antisémites, racistes et injurieux" par Philippe Mathon sur le portail Bouygues Telecom mis en ligne le mercredi 5 novembre 2003 
20. L'éclaircie par Régine Deforges in L'Humanité du mercredi 5 novembre 2003
21. A la culotte - Des caleçons de deuxième main pour les soldats de Tsahal in Marianne du lundi 3 novembre 2003
22. Israël est la plus grande menace pour la paix, selon les Européens (sondage) Dépêche de l'Agence France Presse du lundi 3 novembre 2003, 14h02
23. Israël outré qu’un sondage effectué auprès de citoyens de l’Union européenne le qualifie de menace pour la paix par Peter Beaumont in The Observer (hebdomadaire britannique) du dimanche 2 novembre 2003 [traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier]
24. Une petite fenêtre pour une prison à ciel ouvert par Valérie Féron in L'Humanité du samedi 1er novembre 2003
25. Fernand Thuil : "La volonté de paix est très forte chez les Palestiniens" entretien réalisé par Valérie Féron in L'Humanité du samedi 1er novembre 2003
26. L'Association "Au service des hommes" par Valérie Féron in L'Humanité du samedi 1er novembre 2003
27. La guerre américaine en Irak : Encore une bataille pour protéger les intérêts israéliens ? par Delinda C. Hanley in Washington Report on Middle East Affairs (mensuel américain) du mois d'octobre 2003 [traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier]
28. L'avocate et la kamikaze in L'Intelligent - Jeaune Afrique du vendredi 31 octobre 2003
29. L'Oscar 2004 du film étranger pour la Palestine ? in L'Intelligent - Jeaune Afrique du vendredi 31 octobre 2003
30. Le mur par Michel Habib-Deloncle in Refa N°66 (septembre-octobre 2003)
31. Des fusées, du napalm, des torpilles et des gros mensonges : L’attaque israélienne contre le USS Liberty, revisitée par Jeffrey St. Clair on Counterpunch le vendredi 24 octobre 2003 [traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier]
32. Lionel Brisson, représentant onusien à Gaza, témoigne sur le raid israélien : "120 maisons ont été détruites en 72 heures à Rafah" entretien réalisé par ar Jean-Luc Allouche in Libération du mercredi 15 octobre 2003
33. Propagandes par Denis Sieffert in Politis du jeudi 9 octobre 2003
34. Israël est en train de perdre la partie par Richard Cohen in The Washington Post (quotidien américain) du vendredi 7 octobre 2003 [traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier]
35. Proche-Orient : la paix est dans la rupture par Yézékiel Ben-Ari, Edgar Morin, Véronique Nahoum-Grappe et François Tanguy in Libération du lundi 29 septembre 2003
36. Dans tous ses états - Portrait d'Ilan Halévy, 60 ans. Juif et Palestinien, proche d'Arafat et ex-ministre de Mahmoud Abbas. Endosse toutes ses contraditions. par Christophe Ayad in Libération du mercredi 17 septembre 2003
37. Le credo d’une vie par Azmi Bishara in Al-Ahram Weekly (hebdomadaire égyptien) du jeudi 4 septembre 2003 [traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier]
38. Un ex-chef du Mossad prône la libération de Barghouti Dépêche de l'agence Reuters du jeudi 4 septembre 2003, 18h12
39. Le tabou israélien… 55 ans déjà par Isabelle Humphries Diffusé sur le réseau What Matters [http://www.whatmatters.org.uk] le jeudi 15 mai 2003 [traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier]
                                          
Document
- "Jeteur de pierres" paroles de la chanson du groupe musical Sniper extrait de l'album "Gravé dans la roche"
                                           
Dernières parutions

                                          
1. De Beyrouth à Jénine, quatorze soldats israéliens racontent de Irit Gal et Ilana Hammerman
aux éditions La Fabrique

[14 euros - 208 pages - ISBN : 2913372309]
Intellectuels et officiers de carrière, garagiste, chanteur de rock, architecte urbaniste - servants de chars, pilotes de chasse, parachutistes - quatorze acteurs israéliens de la guerre du Liban de 1982 témoignent, vingt ans après. Ils racontent, d'une manière étonnamment convergente dans la diversité, les événements qui font désormais partie de l'histoire : les combats confus et meurtiers autour des camps de réfugiés de Tyr, le siège et le bombardement de Beyrouth, l'entrée dans Beyrouth ouest, le massacre de Sabra et Chatila. Et c'est l'un des intérêts du livre que de nous rafraîchir la mémoire sur ces horreurs.
Mais ce qui rend ces témoignages poignants, c'est ce que chacun exprime comme doute et comme angoisse morale, après toutes ces années. L'un est hanté par l'image d'une petite fille blonde qui apparaît derrière la porte qu'il vient de défoncer à coups de crosse ; l'autre se souvient que, de son avion, il a lancé toute la nuit des fusées éclairantes sans savoir qu'il illuminait le massacre de Sabra et Chatila ; un autre encore ne peut oublier le jour où le général commandant la division lui a dit en face : " Vous n'avez pas compris, ce sont des Arabes qui tuent des Arabes, on ne s'en mêle pas. "
Ce qui émerge, c'est l'image de soldats disciplinés - aucun n'a refusé d'obéir - mais torturés par le doute sur une armée qu'ils pensaient moralement irréprochable. Et ils sont plusieurs à penser que " tout a commencé là ", et en particulier la guerre au milieu de populations civiles : " Il y a une ligne directe qui mène de Beyrouth à Jénine. "
Ilana Hammerman est traductrice et écrivain. Elle a traduit en hébreu, entre autres, Céline, Camus, Flaubert, Nietzsche, Kafka et Garcìa Marquez. Elle a publié plusieurs ouvrages sur la théorie littéraire, notamment sur le national-socialisme et la littérature allemande, et sur l'activité littéraire dans les territoires occupés.
Irit Gal est journaliste et directrice de programmes à la télévision israélienne. Elle a tourné plusieurs films documentaires, entre autres sur le centre nucléaire israélien de Dimona, et, en 1999, un film sur la guerre du Liban, couronné au festival de cinéma de Jérusalem.
Ce livre a été traduit de l'hébreu par Catherine Neuvéglise.
                   
2. Les coulisses de la terreur de Richard Labevière
aux éditions Grasset
[22 euros - 366 pages - ISBN : 2246634512]

Depuis le 11 Septembre 2001, l'administration Bush mène une "guerre sans fin" contre le terrorisme. D'après l'auteur de ce document à la fois décapant dans sa vision du monde placé sous "la coupe américaine" et bien informé, par une enquête menée d'Islamabad à Dubaï en passant par Genève et ses secrets bancaires, cette guerre impitoyable est un prétexte : "Elle peut servir d'alibi à n'importe quelle aventure politico-militaire. Il y a eu la deuxième guerre contre l'Irak. C'est aussi au nom de la lutte antiterroriste que le président américain et le président israélien Ariel Sharon ont écarté Yasser Arafat, qui demeure pourtant le président élu du peuple palestinien".
Au service de sa thèse, l'auteur emploie les moyens de l'investigation et remonte dans le passé : de la préparation des attentats du 11 septembre aux tentatives de relance du processus de paix israélo-palestinien, d'une diplomatie de la négociation entre services secrets occidentaux et islamistes à la carte des nouveaux intérêts pétroliers, c'est à une plongée dans les entrailles du terrorisme, et surtout à travers le territoire des compromissions et des ambiguïtés américaines, que Richard Labevière nous entraîne.
Richard Labevière est chef du service de politique internationale à Radio France International. Il est l'auteur chez Grasset de Les dollars de la terreur, Les Etats-Unis et les islamistes, paru en janvier 1999.
- Prologue -
Ce livre est une enquête. Il prolonge des recherches engagées en 1992. Grâce à l'intérêt et à la confiance de Laure Adler, historienne, elles ont abouti à la publication d'un bilan intermédiaire : Les Dollars de la terreur - Les Etats-Unis et les islamistes, paru chez Grasset en janvier 1999. A l'époque, la mouvance Ben Laden n'intéressait qu'un petit cercle d'initiés, sinon les avocats des financiers mis en cause. Depuis le 11 septembre 2001, évidemment, le cercle s'est un peu élargi, mais aussi beaucoup distordu, en raison de la nouvelle idéologie consubstantielle à la croisade contre la terreur, devenue guerre sans fin, et par conséquent hégémonique. Il convenait donc de poursuivre le travail de terrain, de revenir aux faits, tout en intégrant les données historiques sans lesquelles on ne voit rien.
Fabrice Del Dongo était à Waterloo et pourtant il n'a vu que de la fumée et des chevaux. D'autres étaient "embarqués" à Kaboul, à Bassorah, à Kerbala, à Bagdad, à Jérusalem ou à Bethléem. Qu'ont-ils vu? En son temps et avec une grandiloquence tout esthétique, Maurice Clavel revendiquait la pratique d'un journalisme transcendantal. Ce temps a changé, nous ramenant à plus de modestie, donc à l'immanence. Les essais de compréhension du phénomène terroriste, de ses figures contemporaines et de ses évolutions requièrent un examen serré, des enquêtes de terrain et une analyse politique sans concession. L'objectif du terrorisme est de terroriser. Bien que composite et parfois hors sens, cette visée finit toujours par atteindre le champ politique. Elle s'exprime dans des conditions économiques locales précises. De sa compréhension dépendent les réponses, politiques elles aussi, à apporter.
Comme l'écrit avec limpidité le politologue Alain Chouet, "en tout état de cause, et quelles que soient l'étendue et l'horreur des pertes et dégâts subis, il convient de ne pas sanctifier la lutte antiterroriste, ni de la transformer en croisade qui ne ferait que justifier, par effet miroir, les appels au jihad. Enfin, il restera à apporter une réponse à l'excellente question posée par le président George Walker Bush au lendemain du 11 septembre, question passée pratiquement inaperçue de la presse et à laquelle personne, pas même lui, n'a songé à ce jour à répondre : "Pourquoi nous haïssent-ils donc tant ?"" La question sans réponse a vite été recouverte par les affirmations incantatoires du bon droit de la civilisation contre la barbarie. La question a vite été broyée par les rouages de la machine infernale de la guerre sans fin. Ce sont quelques-uns de ces rouages qu'on se propose de reconstituer.
On ne mène pas ce genre de travail seul. Anouchka Fernet, étudiante en relations internationales, alimente depuis des années les questions qui orientent cette enquête. Lectrice et correctrice indispensable, Marie-Noël Rio en a supervisé l'ensemble avec une rigueur tout hégélienne. Alain Chouet m'a fait bénéficier de sa grande expérience; enfin notre ami commun, le cheikh D.T.T. (vallée de l'Hadramaout au Yémen) éclaire, depuis le début, de toute sa sagesse et de son immense savoir, mes recherches dans le monde arabe.
Beaucoup de fonctionnaires, d'officiers, de financiers et de diplomates arabes, européens et américains ont accepté de me recevoir. Toujours en poste, la plupart d'entre eux ne peuvent être nommément cités pour des raisons évidentes. Ils se reconnaîtront. Je tiens à les remercier pour leur patience et leur générosité.
Mounir Salem et Walid Charara, infatigables archivistes des mémoires du Soudan, de l'Egypte, de l'Arabie Saoudite, du Liban et de la Palestine, m'ont fait partager une partie de leur science. Alexandra Richard, pour laquelle Dubaï n'a pas de secret, a été d'un indispensable secours.
Les remarques avisées de Bernard d'Anjou, politologue spécialiste du monde arabe, et de Didier Poussin, avocat, expert en finance internationale, m'ont beaucoup apporté. Les conseils et l'aide de Pierre-Marcel Favre, homme et éditeur libre, me sont toujours très précieux. Enfin, Bruno Jeanmart, psychanalyste, me fait encore bénéficier de son écoute symptomale.  A toutes et à tous, je dis ma profonde gratitude.
                               
3. La nouvelle islamophobie de Vincent Geisser
aux éditions La Découverte
[6,40 euros - 128 pages - ISBN : 2707140600]

Du livre haineux d’Oriana Fallacci aux « provocations » de Michel Houellebecq, en passant par certaines déclarations d’intellectuels et éditorialistes de renom, l’islam fait depuis peu l’objet de critiques violentes qui se nourrissent de tous les amalgames, notamment avec le terrorisme islamiste : l’idée se répand, confortée par les thèses de Samuel Huntington sur le « choc des civilisations », que l’islam est une religion dangereuse et qu’il représente une menace pour la France et ses valeurs. À partir d’une enquête approfondie et d’une analyse de la rhétorique antimusulmane, Vincent Geisser s’attache à mettre en lumière les anciens et les nouveaux registres de l’islamophobie « à la française », du mépris chrétien pour la religion musulmane à la xénophobie de l’extrême droite, en passant par l’offensive des « intégristes de la laïcité » ou la haine de l’Arabo-musulman dans certains milieux juifs radicaux : la crainte et la haine du musulman semblent avoir progressivement succédé à celles de l’« Arabe », mêlant haine religieuse, racisme et peur des nouvelles « classes dangereuses », les jeunes de banlieues.
Vincent Geisser est chercheur à l’Institut de recherches et d’études sur le monde arabe et musulman (CNRS) et enseigne à l’Institut d’études politiques d’Aix-en-Provence. Il est l'auteur de Ethnicité républicaine, Presses de Sciences po (1997), Diplômés maghrébins d’ici et d’ailleurs, CNRS Éditions (2000), Le Syndrome autoritaire. Sociologie de la Tunisie de Bourguiba à Ben Ali (en collaboration), Presses de Sciences po (2003).
                                                           
Rendez-vous

L'Agenda des rendez-vous "Palestine", en France, en Belgique, au Canada, au Luxembourg, au Maroc et en Suisse est quotidiennement mis à jour sur l'excellent et indispensable site de Giorgio Basile "Solidaires du peuple palestinien" à l'adresse suivante : http://www.solidarite-palestine.org/agenda.php3
                                          
1. DIJON - Palestine, mais presque ! du mercredi 26 au dimanche 30 novembre 2003
à Dijon (21) dans le cadre du Festival des Cyclopédies

Deuxième édition du festival international pluridisciplinaire des Cyclopédies organisée par les étudiants en management culturel de l'IUP Denis Diderot, cet événement est l'occasion pour des artistes de tous horizons de présenter leurs créations autour du thème de la Palestine. L'occasion aussi pour des artistes palestiniens de faire découvrir leur art au public dijonnais, et de montrer que malgré le conflit, il existe une vie artistique dynamique et de qualité dans cette région du monde.
PROGRAMME :
- OUVERTURE DU FESTIVAL - Vernissage de l'exposition de Jean-Luc MOULÈNE - l'IUP DENIS DIDEROT - 17h - Mercredi 26 novembre 2003.
- DE LA GUERRE À LA PAIX (création) - Parcours théâtral de Jean-Pierre RENAULT - Mise en scène : Guy MARTINEZ - Tarif : 5 euros - Lieu communiqué lors de la réservation, 19h - Mercredi 26 novembre, 20h - Jeudi 27 et vendredi 28 novembre, 18h - Samedi 29 novembre.
- MAHATTAAT - Performance musicale et visuelle de Kamilya JUBRAN alliant musique traditionnelle, électronique et vidéo. Tarif : 8,50 euros - L'USINE 21h30 - Mercredi 26 novembre.
- Eric FERRAND : INSTALLATION SONORE (création) - Au détour d'une rue, laissez-vous surprendre par des sons venus d'ailleurs... Accès libre - QUARTIER DE LA CHOUETTE - 17h30 - Jeudi 27 et vendredi 28 novembre.
- TWO STUPID DOGS - Chorégraphie contemporaine d'Emanuel GAT entrecoupée d'intermèdes musicaux interprétés par MWR (Israël), jeune groupe de hip-hop qui clôturera la soirée par un concert. Tarif : 13 euros - GRAND THÉÂTRE (sous réserve) - 20h - Jeudi 27 novembre.
- NUIT CINÉMA - "Rêves et Silence" d'Omar Al QATTAN, "Le conte des trois diamants" de Michel KHLEIFI, "Couvre-feu" de Rashid MASHARAWI - Tarif : 8 euros - L'USINE - 20h - Jeudi 27 novembre.
- ENTRESORTS DU PUDDING THÉÂTRE (théâtre de rue, création) Accès libre - RUE JULES MERCIER - Entre 17h30 et 21h30 - Vendredi 28 novembre.
- NOUS NE DISONS ADIEU À RIEN - de Dominique DEVALS d'après des textes de Mahmoud DARWICH - Tarif : 5 euros - ATHÉNEUM - 20h30 - Vendredi 28 novembre.
- L'ÉCRITURE EN EXIL - Table ronde avec Mustafa ATEEK - SALON RÉGIONAL DU LIVRE (Palais des Etats) - 11h - Samedi 29 novembre.
- WELCOME.COM - Présentation/conférence interactive d'un voyage d'un genre différent - IUP DENIS DIDEROT (Amphi Drouot) - 14h - Samedi 29 novembre.
- LECTURES - 14h - Mustafa ATEEK - 15h - Textes de Mahmoud DARWICH par Dominique DEVALS - Tarif : 3 euros - BUS THÉÂTRE - Samedi 29 novembre.
- Mustafa ATEEK et Ahmad DARI - Récital musique et poésie - Tarif : 5 euros - BUS THÉÂTRE - 16h30 - Samedi 29 novembre.
- DuOud - La rencontre de deux amoureux de musique orientale traditionnelle et de rythmes électroniques - Tarif : 10 euros - LA VAPEUR - 21h30 - Samedi 29 novembre.
- En permanence du 26 au 30 novembre (gratuit) : diaporama de Taysir BATNIJI et exposition de calligraphies d'Ahmad DARI (La Causerie des Mondes, 16 rue Vauban), vidéos de Taysir BATNIJI, de Jean-Pierre RENAULT et installation de Jean-Luc MOULENE (IUP Denis Diderot), vidéos de Ronnie RAMIREZ, de Laurent Van LANCKER, exposition (sous réserve) de "The League of Palestinian Artists" (ORANGERIE).
[Renseignements et réservations : 03 80 58 98 36 - Pass 3 spectacles : 18 euros]
                                
2. MARSEILLE - Rencontre avec Waji El Ayassa et Jamalat le vendredi 28 novembre 2003 à 20H15
à Espace - 22, rue Mathieu Stilatti - Marseille 3°
Waji El Ayassa, militant palestinien de l'ONG DWRC (Democracy and Workers' Rights Center), aide en Palestine occupée les salariés et les exclus à s'auto-organiser pour défendre leurs droits. Jamalat est une militante syndicaliste et féministe palestinienne. Tous deux viennent de participer au FSE. Cette rencontre est organisée à l'initiative de SUD Education (04 et 13) et du mouvement Résister.
                           
3. BRUXELLES - Rencontre "Au-delà du mur, perspectives de paix" le samedi 29 novembre à partir de 17H00
au Passage 44 - 44, boulevard du Jardin Botanique - 1000 Bruxelles
L’Association Belgo-Palestinienne organise une soirée intitulée «Au-delà du mur, perspectives de paix»: conférences et rencontres politiques sur les thèmes suivants :
- 17H30 : Par dessus le mur - avec Abdel Rahman TAMIMI (PHG) et Rima AWAD (PARC)
- 19h : Murmures de paix - avec llan HALEVI - Vice-Ministre palestinien, Leïla SHAHID - Déléguée générale de la Palestine en France, Chawki ARMALI - Délégué général de la Palestine en Belgique et Pierre GALAND - Président de l’Association Belgo-Palestinienne.
- 21h : Concert exceptionnel de la chanteuse palestinienne Rim BANNA. 
                               
4. MARSEILLE - Présentation de l'association "Grandir à Gaza" le samedi 29 novembre à partir de 17H00
à L'Equitable Café - 27, rue de la Loubière - Marseille 6°
L'Association "Grandir à Gaza" prolonge la solidarité politique avec le peuple palestinien par des actions concrètes de solidarité avec les jardins d'enfants des camps de réfugiés de la Bande de Gaza. [Grandir à Gaza - Bat. i - Résidence Eugène Pottier - 13003 Marseille - E-mail : grandiragaza@yahho.fr]
 
                                             
Réseau

                                          
1. Composition du nouveau gouvernement palestinien (12 novembre 2003)
Premier ministre, ministre de l'Information et du Waqf (affaires religieuses) : Ahmad Qoreï (Abou Alaa)
Ministre des Finances : Salam Fayad
Ministre de la Santé : Jawad al-Tibi
Ministre des Affaires étrangères : Nabil Chaath
Ministre de l'Education : Naïm Aboul Homous
Ministre des Collectivités locales : Jamal Choubaki
Ministre des Travaux publics : Abdelrahmane Hamad
Ministre en charge des négociations : Saëb Erakat
Ministre de l'Intérieur : Hakam Balaawi
Ministre de l'Economie : Maher Al-Masri
Ministre de la Justice : Nahed Al-Rayyès
Ministre des Affaires sociales : Intissar Al-Wazir (Oum Jihad)
Ministre des Communications et de la Technologie : Azzam Al-Ahmad
Ministre en charge des Prisonniers : Hicham Abdelrazzek
Ministre de la Culture : Yehya Khalaf
Ministre de la Planification : Nabil Qassis
Ministre du Tourisme : Metri Abou Eita
Ministre des Transports : Hikmat Zeid
Ministre de l'Agriculture : Rawhi Fattouh
Ministre des Sports et de la Jeunesse : Salah Al-Taamari
Ministre du Travail : Ghassan Al-Khatib
Ministre des Affaires civiles : Jamil Al-Tarifi
Ministre de la Condition féminine : Zahira Kamal
Ministre d'Etat : Souleimane Abou Sneineh
Ministre d'Etat : Qadoura Farès
Secrétaire général du gouvernement et chef du cabinet de M. Qoreï, avec rang de ministre : Hassan Abou Libdeh
                                   
2. D’Oslo à Genève : le retour des imposteurs par Pierre-Yves Salingue (2 novembre 2003)
Ils sont revenus ! Précédée des joueurs de flûtiau ravis d’avoir servi d’éclaireurs (1) la grosse fanfare des illusionnistes de la paix  revient en force sous les feux des projecteurs. Du gouvernement suisse à Kofi Annan  en passant par le groupe de la GUE/ NGL au Parlement européen chacun se pousse pour prendre place sur le nouveau Titanic de la Paix.
Les uns à coup de millions de dollars pour promouvoir l’initiative, d’autres par des déclarations émouvantes qui saluent les sacrifices douloureux mais nécessaires de ceux “ à qui on demande de faire encore des compromis ” (2), d’autres encore  nous annonçant avec un enthousiasme juvénile la découverte de la pierre philosophale de “ la solution définitive du conflit. ”
Dix ans et 3500 morts après la très émouvante cérémonie de Washington qui ouvrait la voie à “ la paix d’Oslo ”, au “ nouveau Moyen-Orient ” et la route du Nobel aux nouvelles stars de la paix quelques “ personnalités attachées à la paix ” se rencontrent dans un confortable hôtel des bords de la Mer morte et un nouveau miracle s’accomplit: “ un accord démontre spectaculairement que la paix est possible et que les Israéliens ont un partenaire pour la négocier ” (3)
Qu’est-ce que le texte de Genève ?
On se gardera de suivre Beilin et Abed Rabbo quand ceux-ci qualifient leur pacte de “ tournant historique ” et de “ début d’une nouvelle ère ”.
Les deux compères savent que cette initiative n’a de sens qu’en tant qu’élément d’un dispositif  politique et diplomatique international qui repose entièrement sur les précédents accords d’Oslo, sur “ la vision de Bush des deux états ” (juin 2002), sur l’initiative du Quartet et sa “ feuille de route ” et sur la dernière résolution de la Ligue arabe consécutive au “ plan Abdallâh ”.
Le texte de Genève fait explicitement référence à tous ces éléments et on s’étonne de l’enthousiasme manifesté à son égard par certains qui n’avaient parfois pas de mots assez forts pour condamner telle ou telle contrainte unilatéralement imposée à la partie palestinienne lors de l’un des épisodes précédents.
Le commentaire apporté par l’un des participants israéliens aux négociations (4) nous éclaire davantage sur la fonction principale du nouveau plan.
Selon lui, aujourd’hui le texte “ n’est rien de plus que 50 feuilles de papier ”. Mais, ajoute-t-il  immédiatement “  si les peuples des deux côtés l’acceptent, demain ou après-demain, ils se rendront compte que le travail de déblayage a déjà été fait. Presque jusqu’au moindre détail ”.
Quel est donc ce "déblayage"  complaisamment validé par “ le partenaire palestinien? ”
Le texte publié est à ce jour incomplet et sans prétention à l’exhaustivité on se limitera ici à développer deux sujets.
Le premier, dont l’énormité ne devrait échapper à personne, est celui du droit au retour des réfugiés.
La reconnaissance du principe du droit au retour était restée jusqu’à ce jour un élément intangible de la négociation pour les Palestiniens.
Le document  ignore l’expression de “ droit au retour” et on cherchera même en vain le mot “ retour”
Non pas que le problème des réfugiés soit ignoré, bien au contraire il donne lieu à la seule véritable innovation de ce texte : le droit au retour est tout simplement supprimé et remplacé par “ le choix d’un lieu fixe de résidence ”.
Les réfugiés auront individuellement plusieurs options possibles : résider dans l’état indépendant de Palestine ou dans un pays tiers qui les accepte ou rester dans le pays d’accueil actuel ou dans l’état d’Israël "à sa discrétion" et conformément à un nombre décidé par lui.
Effectivement pas avare de détails sur le sujet le texte prévoit ensuite un “ règlement définitif de la question des réfugiés ” : le statut de réfugié disparaît avec le choix individuel du lieu fixe de résidence et la fin de l’UNRWA est programmée.
Le deuxième problème majeur est celui des Palestiniens de 48, le million de Palestiniens vivant en Israël. On cherchera en vain trace de leur existence dans “ le spectaculaire accord de paix”, pas un mot, pas une allusion.
Nos pourfendeurs littéraires d’Apartheid semblent aveugle à ce détail concret du paysage intérieur de “ l’état le plus démocratique du Moyen-Orient. ”
Et comme parallèlement le partenaire palestinien reconnaît qu’Israël est “ l’état du Peuple juif ”(5)  la boucle sioniste de “ l’état juif ” est refermée : “ Ils vivront chez eux et nous vivrons chez nous ” écrit Amos Oz.
Mais où donc vivront les Palestiniens citoyens d’Israël? Avec quel statut et avec quels droits individuels et collectifs ?
Ces deux questions majeures n’épuisent malheureusement pas la liste des abdications consenties par les négociateurs palestiniens.
Il faudra bien aussi expliquer la signification et la portée de l’intégration à Israël des colonies qui assurent la continuité du grand Jérusalem ( Maale Adoumim, Goush Etsion, Neve Yaakov , Guilo, Ramot etc.) “ Le nœud coulant qui enserre Jérusalem sera éliminé ” écrit Mitzna. Certes, mais à quel prix pour les Palestiniens?
Sans oublier le corridor “ sous souveraineté israélienne ” entre Gaza et la Cisjordanie, la démilitarisation imposée de l’état palestinien mais l’affirmation de la nécessité d’une “ puissante force de sécurité intérieure ” pour assurer la sécurité d’Israël bien sur, la mise en tutelle du contrôle des frontières, le maintien pendant pas moins de 6 ans de forces militaires israéliennes dans la vallée du Jourdain et la présence illimitée de deux  bases militaires en Cisjordanie, la possibilité de maintenir en prison pendant des années des militants palestiniens emprisonnés répondant aux critères énumérés dans une annexe qui n’est pas encore écrite, rien sur la maîtrise de l’eau et rien sur la subordination de l’économie palestinienne à celle d’Israël etc.
Cette simple énumération infirme l’assertion selon laquelle il s’agirait d’un “ accord équilibré ” témoignant des concessions et sacrifices des deux parties.
Il s’agit bien en réalité, ainsi que l’écrit justement Azmi Bishara ( 6), d’ “ une tentative pour imposer d’autres réalités ” et rabaisser ainsi sans cesse le niveau des exigences légitimes des Palestiniens pour de futures "vraies" négociations.
Les renoncements consentis par la délégation palestinienne et le soutien de principe apporté par l’Autorité et Arafat lui-même au texte publié dessinent très exactement les contours de la manœuvre en cours : “ La paix est possible mais à ces conditions. C’est donc le seul accord possible. C’est ça ou Sharon et demain l’expulsion. Soyez réalistes. ”
Pour preuve que le camp de la paix israélien a fait lui aussi des concessions douloureuses on monte en épingle les propos très critiques de Sharon et Barak contre le plan de Genève en feignant d’oublier les leçons pourtant évidentes des dix dernières  années.
Celles-ci nous ont démontré que par delà des divergences réelles mais limitées dans les modalités et les rythmes de mise en œuvre tous les partis sionistes appliquaient  une politique de liquidation de la cause nationale palestinienne par l’éradication de ses bases matérielles et territoriales d’existence.
Sharon dénonce la paix d’Oslo mais n’a de cesse d’en maintenir le principal acquis du point de vue sioniste :  à partir des colonies construites pendant “ la paix ” et de toute l’infrastructure qu’elles ont générée Israël a pu amplifier l’occupation d’une portion croissante des territoires palestiniens vidés de leur population arabe remplacée par des colons juifs.
Loin de contredire Oslo la construction du mur en parachève les objectifs.
Loin de s’opposer à la mise en place des bantoustans qui seront le “ vrai état palestinien ” l’accord de Genève veut donner du temps  pour la mise en œuvre concrète du plan sioniste pratiquement inchangé depuis près de 40 ans.
Pourquoi maintenant ?
Dans un moment critique pour la perspective de “ la coexistence de deux états ”, compte tenu de la réalité de la politique sioniste et de ses conséquences sur la prise de conscience croissante du caractère illusoire et mystificateur de l’état palestinien indépendant, surgit soudainement une hypothèse de “ nouvelle chance pour la paix ” : il suffirait de s’opposer à "la coalition fanatique d’extrémistes des deux bords."
Est-ce un effet du hasard si cet accord surgit au moment où des voix de plus en plus nombreuses s’élèvent pour dire que la perspective de l’état indépendant est désormais caduque compte  tenu des conséquences de la politique de guerre menée par l’état d’Israël au Peuple palestinien?
Est-ce une coïncidence si cet accord est porté, côté israélien, par des gens plus inquiets de l’avenir du sionisme que de la situation faite aux Palestiniens? (7)
Car cette “ gauche sioniste ”, subitement intronisée “ partenaire de la paix ” et qu’on nous convie à applaudir et à remercier, a été singulièrement absente de tous les combats contre l’occupation depuis la fin tragique d’un prétendu processus de paix dont ils ont profité sans se poser de questions sur les conséquences réelles de leur politique pour la population palestinienne.
Peut-être jugent-ils que trois ans de répression et de punitions collectives sont suffisantes et que, maintenant que le sale boulot a été fait par Sharon, on peut en revenir à des méthodes plus policées?
Après la main de fer de la répression, le gant de velours pour tirer les dividendes de la guerre ?
On touche là à un aspect non négligeable de cette nouvelle initiative de Paix qui doit parvenir à effacer l’Intifada de la réflexion collective palestinienne pour imposer la négociation et donc de nouveaux compromis comme étant la seule issue possible.
Le début de la deuxième Intifada a montré la rupture massive de la population palestinienne avec l’illusion des bienfaits de “ la paix ”  entretenue par la stratégie des négociations interminables menées par l’Autorité pendant 7 années.
Cette révolte marquait la volonté du Peuple palestinien de reprendre l’initiative et le chemin de la lutte pour obtenir ses droits légitimes.
On lui oppose aujourd’hui un retour à la table des négociations à laquelle le peuple n’est évidemment pas convié.
En échange de sacrifices supplémentaires on va lui octroyer quelques “ généreux cadeaux ”, sous réserve qu’il se dissocie des “ extrémistes ” qui entendent continuer la lutte.
Pour ce faire il convient aussi de redonner du souffle et de la crédibilité à une Autorité palestinienne plus préoccupée de sa propre survie que de la satisfaction des droits historiques du Peuple palestinien. Désormais démunie de toute stratégie de lutte et totalement impuissante sur le terrain de la résistance à l’occupation, incapable d’aider la population à affronter les difficultés de la vie quotidienne   elle n’existe plus que par la négociation et le soutien diplomatique et financier international qu’elle paye de ses concessions croissantes.
Là réside la seule justification de la valorisation d’un “ partenaire palestinien ” qui ne représente plus guère que les intérêts d’une minorité intéressée à reprendre les affaires interrompues par l’Intifada. Faible et peut-être même peu fiable, mais indispensable tant que ne se sera pas affirmée une “ alternative ” encore plus à la botte de l’Impérialisme et plus soumise aux intérêts sionistes. Dans l’attente de ce qui pourrait émerger du chaos provoqué par la politique de Sharon la diplomatie internationale et les sionistes de gauche font avec ceux qu’ils jugent les plus fréquentables, prêts à les troquer pour d’autres encore plus malléables si possible.
Le mouvement de solidarité face à un défi
Le mouvement de solidarité est désormais confronté à un choix : poursuivre la maturation  en cours, clarifier les bases et les modalités de son soutien à la lutte du Peuple palestinien ou revenir des années en arrière, à nouveau bercé par les sirènes d’une paix qui ne sera que poursuite et aggravation de l’injustice faîte aux Palestiniens.
Depuis sa ré émergence sur le terrain de la solidarité de masse au cours de l’année 2001 le mouvement a connu plusieurs phases.
D’abord une phase de redécouverte pour certains, de découverte pour beaucoup, de la situation dans laquelle vivait le Peuple palestinien et notamment les habitants des territoires occupés. Le déclenchement de la deuxième Intifada et la brutale répression mise en œuvre par les gouvernements israéliens ont nourri un processus de prise de conscience d’une réalité largement dissimulée par le masque de “ la Paix ” et de la prétendue “ Autonomie palestinienne. ”
Dans un deuxième temps la systématisation et l’amplification de la répression culminant dans la réoccupation par l’armée israélienne des villes “ sous autonomie palestinienne ”, les bombardements des camps, les arrestations massives, les assassinats toujours plus nombreux etc. ont suscité les mobilisations les plus importantes avant l’été 2002. Des campagnes nationales, des pétitions et des réunions publiques ont été organisées en grand nombre.  Les comités, missions civiles et associations se sont développés et ont amplifié leur action d’explication au travers de compte-rendus de voyages en Palestine, de popularisation des initiatives des pacifistes israéliens et de soutien concret à des projets locaux de développement, éducatifs ou culturels en Palestine.
La profonde dégradation de la situation sur le terrain, la démission politique de “ la communauté internationale ” complice de la stratégie de guerre totale imposée aux Palestiniens par les gouvernements israéliens successifs et la perception croissante de la voie sans issue dans laquelle était engagée la direction palestinienne ont ouvert une période d’hésitation et de doute pour un mouvement peu préparé à faire face à ce qui est de plus en plus apparu comme une impasse politique.
La sempiternelle admonestation d’une communauté internationale sommée de mettre en œuvre ses propres résolutions inefficaces depuis des dizaines d’années, le maintien à l’identique d’une revendication d’un état palestinien indépendant que la réalité de la politique sioniste de colonisation du territoire et d’enfermement de la population dans de véritables bantoustans a rendu en pratique non viable et le malaise provoqué par l’incapacité de la direction palestinienne à proposer une stratégie de lutte alternative à la soumission aux exigences impérialistes et aux actions suicide désespérées sont apparus de plus en plus incapables de fonder une action de soutien de longue durée favorisant réellement la lutte du Peuple palestinien pour la conquête de ses droits.
La tentation est donc forte de vouloir se saisir d’une initiative présentée comme une issue possible pour mettre un terme à l'affrontement.
Déjà les pressions s’organisent, portées par des forces qu’on n’a souvent pas beaucoup rencontrées dans les actions de solidarité concrète avec le Peuple palestinien ou avec les pacifistes israéliens mais elles émanent aussi  parfois du sein même du mouvement de solidarité.
L’heure est venue de nous souvenir de nos échanges avec nos amis palestiniens, avec les paysans interdits d’accès à leurs champs, avec les habitants chassés de leurs maisons détruites, avec les étudiants interdits d’accès à leurs universités, avec les réfugiés des camps maintenus dans une situation de perpétuelle précarité et de dépendance   etc.
Ils nous ont expliqué ce qu’avaient été pour eux les “ années de paix ”, la frustration après les espoirs, la colère croissante face à une négociation dont les seuls résultats étaient toujours plus de renoncements.
Pour le mouvement de solidarité “ l’accord de Genève ” est un dérivatif et un leurre.
Il s’agit de détourner son attention de ce qui se passe concrètement sur le terrain et d’agiter de vaines espérances pour l’attirer dans une nouvelle impasse : alors, quand les faits auront de nouveau évolué en défaveur du Peuple palestinien, on appellera à prendre la mesure des nouvelles réalités et à faire de nouvelles concessions.
Se soumettre à cette offensive serait l’acte de décès du mouvement de solidarité.
A l’opposé de sa transformation en un auxiliaire de la liquidation des droits fondamentaux des Palestiniens l’heure est à l’élaboration d’un véritable programme de lutte et de solidarité : 
- pour le droit à l'autodétermination du Peuple palestinien
- pour le droit au retour de tous les réfugiés 
- contre l’Apartheid infligé aux Palestiniens de 48 
- pour la fin du régime d’occupation militaire 
- pour la liberté de circulation de tous les Palestiniens en Israël et dans les territoires annexés de fait 
- pour la libération inconditionnelle et immédiate de tous les prisonniers politiques
“ Pas de paix sans justice ” avons nous souvent affirmé. L’accord de Genève tourne le dos à cette exigence : ne soyons pas complices d’un nouvel abandon de celles et ceux dont nous avons soutenu  les droits et dont nous connaissons les attentes à l’égard de la solidarité internationale.
- NOTES :
(1) Uri Avnery,  Avec qui, sur quoi ? “je donne tout mon soutien à ce projet, d’autant plus qu’il est la suite d’un processus que nous avons nous-mêmes engagé il y a 2 ans.”
(2) Alima Boumedienne-Thiery, Paix et dignité au Proche-Orient, intervention en séance plénière au Parlement européen le 22/10/03
(3) Un espoir à Genève sur le site Web du Monde Diplomatique
(4) Amos Oz, Nous avons déblayé le terrain pour la paix, in The Guardian du 27/10/03
(5) Amram Mitzna,  “les Palestiniens ont reconnu officiellement et publiquement qu’Israël était l’état du Peuple juif pour l’éternité” in Ha'Aretz du 16/10 /03
(6) Une lueur de rien du tout in Al-Ahram Weekly n° 661
(7) Lire les articles récents de A. Burg qui s’inquiète de “la fin de l’aventure sioniste”
                   
3. Condamnation des attaques anti-juifs par l'Union Générale des Etudiants de Palestine - Unité de Paris (21 novembre 2003)
Nous écrivons aujourd'hui car nous refusons de voir germer la haine et l'ignorance sans la combattre. Nous écrivons car nous croyons à un monde où chacun des mots liberté, égalité et fraternité aura un sens. La liberté pour notre peuple qui vit une occupation de plus en plus meurtrière. Egalité pour tous les hommes et femmes quelque soit leur religion ou leur race. Fraternité, c'est notre vision d'une humanité unie autour de valeurs communes.
C' est pourquoi nous dénonçons ceux qui jouent avec les amalgames, ces extrémistes qui tentent de faire passer notre combat pour un combat entre musulmans et juifs, mais aussi ceux qui ne cessent de crier à l'antisémitisme à chaque critique adressée au gouvernement israélien. Ceux-là tentent de nous réduire au silence en abusant d'une accusation aussi grave que l'antisémitisme alors qu'ils savent pertinemment que nos critiques sont adressés contre les crimes d'Israël. Comme le dit l'historien Moshé
Zimmermann, Israël dévalue l'accusation grave d'antisémitisme en l'utilisant avec libéralité contre les attaques visant sa politique gouvernementale. Du coup, déplore-t-il, "quand il s'agit de véritable antisémitisme, l'autre partie ne fait plus attention". Mais c'est le cas aussi de certains représentants de la communauté juive qui par leur comportement irresponsable participe à la confusion générale. Nous ne nous permettrons pas d'avoir la même attitude. C'est pourquoi nous adressons ce message clair, nous poursuivrons notre lutte pour la restitution de nos droits nationaux reconnus par le droit international, mais aussi notre combat pour le respect des droits de l'homme et malgré les blessures nous continuerons à croire à un autre monde où nous pourrions vivre ensemble. Voilà ce qui nous a toujours distingué des sionistes pour qui la religion définissait l'appartenance, pour nous ce sont les idées qui définissent qui nous sommes. Nous écrivons notre colère et notre indignation des actes antijuifs en
France et à l'étranger. Non, on ne peut se prévaloir de la cause palestinienne pour commettre ces actes. Nous refusons que notre combat pour la libération de notre peuple soit transformé en une guerre de religions. Aucune explication ne peut-être donnée à de tels actes, profaner les cimetières, brûler les synagogues et les lycées. Ceux-là ne connaissent ni notre histoire, ni notre cause. Ils ne savent pas que nous avons le plus grand respect  de la dignité humaine que nous tentons de faire respecter pour notre peuple dont les droits  sont bafoués chaque jour. Comment permettre de telles insultes des morts quand nous nous battons pour que les meurtres cessent ? Comment se prévaloir de Dieu pour brûler la maison de Dieu car les synagogues, comme les églises, comme les mosquées sont les maisons de Dieu ? Comment construire l'avenir en brûlant les lieux où grandissent les générations futures.
Notre combat prend ses racines dans notre désir de justice, de liberté mais aussi de paix. Ce n'est pas une guerre de religion car notre combat n'a ni frontières, ni religion, ni race. Il a été mené par des hommes et des femmes de toutes les nationalités, par des croyants et des athées, par des musulmans, des juifs et des chrétiens pour mettre fin à l'occupation. Nous nous adressons à la communauté juive en lui demandant de ne pas laisser la peur les pousser au repli communautaire, ce qui serait la pire des
solutions. Certains au sein même de cette communauté tente de profiter de ces crimes pour expliquer que le communautarisme est la seule solution. Non, la solidarité contre toutes les formes de racisme est la seule solution. Les victimes du racisme sont juives, musulmanes, arabes, noirs et c'est pour tous qu'il faut se battre. Les actes antijuifs et les actes antimusulmans doivent être combattus avec la même fermeté, et la France se doit de défendre tous ses citoyens.
Nous écrivons aujourd'hui au nom de notre cause et des principes qui nous animent mais aussi au nom des milliers de juifs qui à nos côtés se sont battus et continue à se battre pour la justice et la défense des droits de notre peuple, au nom de ceux qui sont morts pour lutter contre les discriminations, nous lutterons toujours contre le racisme aveugle et criminel. [Site : www.gupsfrance.org - Email : gupsparis@hotmail.com]
                           
4. Le Mrap condamne l'agression perpétrée contre son secrétaire général (14 novembre 2003)
Invité par l'association culturelle Aviv jeudi 13 novembre à 20h30 à l'institut du Val Mandé (Saint Mandé, Val de Marne), pour y débattre avec Marek Alter de la laïcité, du racisme, et de l'antisémitisme, Mouloud Aounit, secrétaire général du Mrap, a été agressé par des individus usant des méthodes propres à la Ligue de Défense Juive. Avant de pénétrer dans la salle, et en dehors de l'enceinte, des individus casqués l'ont insulté et lui ont craché dessus, avant de lui asséner deux coups de poing. Après que les organisateurs aient regretté cette agression et pris les mesures adéquates pour assurer la sécurité de Mouloud Aounit, le débat s'est déroulé durant plus de trois heures.
Mouloud Aounit a décidé de porter plainte ce jour pour injures et coups volontaires auprès du Procureur de Paris.
Le Mrap tient à dissocier l'attitude de ces dangereux voyous imbibés de haine, ennemis de la paix, des organisateurs du débat.
Cette lâche agression en bande organisée renforce la détermination du Mrap à poursuivre le dialogue avec tous ceux épris de justice, de droit, de paix, et qui oeuvrent pour que l'intelligence et le dialogue l'emporte sur la haine et la violence.
Après avoir revendiqué un saccage des locaux du Mrap, après avoir menacé des témoins dans l'enceinte dans la 17ème chambre du Tribunal correctionnel de Paris lors du procès amisarelhai.org, la LDJ et ses " petits soldats " agressent maintenant physiquement un responsable associatif. Le Mrap rappelle à ce sujet que ce sont des sympathisants de la LDJ qui sont derrières les sites odieux et racistes comme cpiaj qui lancent des appels au meurtre. C'est pourquoi le Mrap demande, une fois de plus, que la Ligue de Défense Juive (interdite en Israël) soit dissoute et que ses sympathisants soient surveillés de plus près par les autorités françaises afin d'éviter de tels faits gravissimes. Il en va de la paix civile et de la défense des valeurs que notre République est censée promouvoir.
                       
5. Harcèlement judicière - Un communiqué du Mouvement Justice pour la Palestine (1er novembre 2003)
Suite à l’organisation par notre mouvement de la journée du 1er juin 2003 à l’Institut du Monde Arabe consacrée aux questions entre-autres des réfugiés palestiniens ainsi que du boycott des produits israéliens, M. Walid ATALLAH, l’un de nos responsables a été convoqué le vendredi 24 octobre à la Brigade des affaires sanitaires et des libertés publiques. La lettre ci-jointe reproduit les charges retenues contre le mouvement et M. Walid ATALLAH, ceci constituant la base de la demande d’instructions demandée par M. le Procureur de la République à Paris.
Suite à cette audition, où il est apparu que des personnes (?) ont saisi avant la tenue du meeting M. le Procureur ainsi que la brigade sus-nommée qui a diligenté un certain nombre de ses fonctionnaires afin de couvrir cet événement et d’en rendre compte.
DE QUOI S’AGIT-IL ?
Comme vous pouvez le constater dans les charges retenues, manifestement l’appel au BOYCOTT DES PRODUITS ISRAELIENS (marques Jaffa – Carmel – code barre d’Israël n°0729) par notre mouvement dérange. Cet appel au BOYCOTT est considéré comme PROVOCATEUR et DISCRIMINATOIRE, selon les termes de M. le Procureur. Provocateur de quoi et discriminatoire envers qui, toujours est-il que ces « délits » sont punis par la loi et après l’audition du 24 octobre, M. le Procureur a la possibilité de poursuivre notre mouvement et son responsable légal, M. Walid ATALLAH.
L’objectif de cette attaque est bien entendu de faire taire les voix qui appellent au boycott des produits israéliens. Pour notre part, nous n’abandonnons pas cet appel au boycott et à la suspension de l’accord d’association économique entre Israël et l’Union Européenne car comme l’a précisé M. Walid ATALLAH lors de son audition : « Nous avons le devoir de réagir devant les exactions terroristes de l’Etat d’Israël, reconnues comme telles par la communauté internationale. Nous demandons à la France de suspendre l’accord d’association économique avec Israël qu’elle a ratifié en novembre 1999, comme le stipule son article n° 2 – Si l’une des parties viole les droits de l’Homme, cet accord peut être suspendu ».
Pour l’heure, la demande de sanctions contre Israël reste d’actualité : « Quand vous achetez un produit israélien, vous participez à la guerre d’Israël contre le peuple palestinien ».
[Mouvement Justice pour la Palestine - Email : justicepalestine@hotmail.com]
                           
6. Quand le sage montre la lune par Sylvia Cattori (3 novembre 2003)
Dimanche soir, Ripostes, l'émission de Serge Moati sur la Ciquième chaîne de télévision française recevait Tariq Ramadan face à Alain Finkielkraut.
Compte tenu des réactions hystériques suscitées par le texte de Tariq Ramadan paru sur Oumma.com - après que le quotidien « Le Monde » ait refusé de le publier - il était intéressant de voir et d'entendre ces deux protagonistes s'expliquer en direct.
Premier point, on constate que Tariq Ramadam semble serein, détendu et souriant. Finkielkraut, lui affichait tous les symptômes du stress. Tendu comme un arc, il se frottait sans cesse les mains, trahissant ainsi une grande nervosité.
Parmi les autres invités, seul Denis Sieffert a su garder une attitude objective face aux arguments développés par Ramadan et Finkielkraut. Les trois autres se perdant dans des généralités et des lieux communs, n'ont pas été à la hauteur de la discussion et sont passés inaperçus.
En effet, Alain Finkielkraut qui a pourtant l'habitude des plateaux de télévision, étant l'un des intellectuels parmi les plus médiatisés, a semblé bien peu convaincant malgré ses qualités de pédagogue. Sa prestation fut un flop et n'ont été convaincus que ceux qui l'étaient déjà.
Pourquoi ?
Tout simplement parce que Finkielkraut s'est fait le chantre d'une cause indéfendable. Même avec du talent, même avec malice et perversité, son discours est apparu comme une suite d'exagérations puériles. Denis Suiffert s'est d'ailleurs chargé de le lui rappeler.
Ce discours lassant de la victimisation des uns et la diabolisation des autres, s'est finalement retourné contre lui car - ainsi que le lui faisait remarquer à juste titre Ramadam - Finkielkraut n'a pas répondu une seule fois sur le fond du débat.
Le soutien implicite apporté à la politique raciste de l'Etat hébreu par absence de condamnation claire, a permis à chacun de comprendre que Monsieur Finkielkraut ne dénonce ni l'apartheid ni les agissements de Sharon, manifestement par réflexe communautariste, confirmant ainsi les craintes de Tariq Ramadan.
Si cette émission a servi à quelque chose c'est à comprendre cela : les intellectuels sionistes, les nouveaux philosophes, se prétendent universalistes uniquement lorsqu'il s'agit d'aller chercher des poux sur la tête des autres.
Lorsqu'il s'agit des exactions commises au nom du sionisme, là c'est le black out total, Finkielkraut se réfugiant derrière la ritournelle habituelle de l'antisémitisme... Puéril et malhonnête.
Un sondage paru dans l'Herald Tribune du 31 octobre 2003 montre que 59% des européens considèrent que la politique d'Israël constitue la plus grave menace pour la paix mondiale. Ces 59% d'européens doivent-ils être taxés d'antisémitisme aussi ?
Monsieur Finkielkraut ne lit peut-être pas l'Herald Tribune puisqu'il s'obstine à désigner l'Islam comme la source de tous les dangers, oubliant au passage les propos de Tony BLAIR le 3 juillet dernier devant le Congrès américain, qui disait, je cite : - "La politique brutale que mène Israël contre les Palestiniens est la cause principale de la montée du terrorisme islamiste."
Le monde entier a compris ça, la preuve se trouve à l'ONU où l'ensemble de la communauté internationale ne cesse d'aligner les résolutions contre Israël.
Il n'est pas nécessaire d'être musulman pour être choqué par la politique de Sharon. Il n'est pas nécessaire d'être musulman pour comprendre qu'Israël est le seul Etat qui se veut au-dessus des lois. Il n'est pas nécessaire d'être devin pour voir qu'Israël n'a jamais respecté aucune résolution de l'ONU se mettant en permanence hors du Droit international, hors de toute légalité.
Diaboliser la communauté musulmane de France pour masquer les crimes d'Israël ne contribuera pas à favoriser le dialogue et la compréhension, bien au contraire.
Monsieur Finkielkraut s'obstine à désigner les concitoyens de confession musulmane, comme responsables de cette "vague déferlante d'antisémisme" imaginaire. Comme tous ses collègues, il confond non sans malice, anti-sionisme et antisémitisme.
Non content de proférer des accusations calomnieuses, il n'a pu s'empêcher de s'adonner à une de ces manipulations ignobles dont il a le secret. Ainsi, il a affirmé que la situation des chrétiens palestiniens était devenue insupportable à cause du "sectarisme" supposé des palestiniens musulmans. Un mensonge de plus pour essayer de diviser pour mieux régner. Tous ceux qui ont eu l'occasion d'aller en Palestine peuvent témoigner de la grande solidarité qui existe entre Palestiniens, quelque soit leur religion. Les Palestiniens chrétiens ne sont pas victimes de l'ostracisme des Palestiniens musulmans mais bien de la purification ethnique israélienne.
Heureusement pour nous tous, par ses excès et ses tentatives de manipulation de l'opinion publique, Finkielkraut accélère son propre déclin après avoir pollué l'esprit de deux générations de lecteurs. Malheureusement on peut se prétendre philosophe universaliste et démontrer par réflexe communautariste, un aveuglement constant et une totale partialité dans l'analyse de la situation au Moyen Orient.
Dans ces conditions, quand le sage montre la lune, l'imbécile regarde le doigt...
En conclusion, Tariq Ramadan a bien du mérite de tenter de dialoguer avec ces intellectuels plus attachés à l'idéologie sioniste qu'à la vérité...
                           
7. Observatoire du Lobby Israélien – La Ligue de Défense Juive s’installe aux Pays-Bas par Miral Assuli
on The Electronic Intifada le lundi 22 septembre 2003
[traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier]

Ce matin, je me suis réveillé, puis j’ai entamé ma routine habituelle, consistant à parcourir le canard tout en sirotant mon café, en attendant de me mettre dans les starting-blocks et de m’élancer vers une nouvelle journée radieuse au turbin. Un écrémage rapide des gros titres en première page me renvoya vers les pages intérieures, consacrées aux affaires domestiques (hollandaises, donc). Là, je n’eus plus besoin du moindre milligramme de caféine, et j’aurais tout aussi bien pu aller jeter mon café dans l’évier : une photo montrant un pseudo – Tsahal en plein centre de La Haye avait suffi à me rendre incapable d’avaler quoi que ce soit.
Mais que se passe-t-il ? Moi, je m’attendais, comme d’habitude, à me retrouver nez à nez avec « Harry Potter » (sobriquet du Premier ministre batave Balkenende) et sa politique « crachez au bassinet » qui rend les pauvres toujours plus pauvres et les riches toujours plus riches, dans notre bonne vieille Hollande social-démocrate… Mais ça alors, par exemple ! Des questions confuses commencèrent à se bousculer dans ma tête :  « Où suis-je ? En Palestine occupée ? L’armée israélienne se serait-elle retirée du Liban à seule fin de venir occuper la Hollande ? Mais que se passe-t-il donc, mon Dieu, mon Dieu, mon Dieu… ? »
Un examen plus approfondi de ce cliché, et la lecture de l’article, apportèrent un peu de clarté à mon esprit confus, mais sans parvenir à repousser totalement ma peur. Le sentiment et l’idée réconfortants de ne pas avoir à franchir des checkpoints plusieurs fois par jour, ni à croiser des soldats, des jeeps militaires et des tanks dans tous les coins du pays, me semblèrent soudain bien lointains : comme trop beaux, pour être vrais…
Non. En fait, d’après, donc, le quotidien hollandais De Volkskrant, la Ligue de Défense Juive s’était installée en Hollande, durant l’été, voilà tout. Pour  la première fois, samedi dernier, ses activistes ont manifesté à La Haye, devant les ambassades des Etats-Unis et d’Israël. Ils portaient des uniformes militaires israéliens, des blazers bleus avec un logo composé d’une étoile de David et d’un poing menaçant, et ils agitaient des drapeaux israéliens aux dimensions impressionnantes. Par ces gestes, ils entendaient exprimer leur préoccupation au sujet de la feuille de route, censée apporter une solution pacifique au conflit israélo-palestinien et aboutir à la création d’un Etat palestinien à côté d’Israël. D’après le fondateur de l’association, Philip Awuy, son image militante de choc est trompeuse. Ils ont simplement pour but de protéger la communauté juive contre l’antisémitisme, ce pour quoi ils ont adopté un mode d’intervention défensif, plus qu’offensif.
Le De Volksrant mentionne également que cette organisation existait déjà dans les années 1970, mais qu’elle a énormément gagné en popularité en perpétrant des attaques violentes contre les médias hollandais au moindre soupçon d’une éventuelle prise de position pro-palestinienne. Ce que voyant, le gouvernement néerlandais avait décidé d’interdire cette formation paramilitaire sans autre forme de procès.
On a pu remonter la trace de la L.D.J. jusqu’en 1968, année où le rabbin extrémiste Meir Kahane fonda cette organisation aux Etats-Unis. Le De Volkskrant conclut son article en précisant que la LDJ est interdite, en Israël.
Mais cela ne suffisait pas à me rassurer tout à fait. N’était-ce pas à cette même LDJ que présidait Baruch Goldstein lorsqu’il ouvrit le feu dans la Mosquée d’Abraham, à Hébron, massacrant trente neuf Palestiniens venus y prier ?
« Nous pensons que Baruch Goldstein n’a fait que prendre une mesure préventive afin d’éviter une énième attaque arabe contre les juifs. Nous comprenons ses motivations, ses récriminations et ses actions. Et nous n’avons pas honte d’affirmer ici que Goldstein était membre fondateur de la LDJ », affirme le site ouèbe de la LDJ.
S’agit-il de l’organisation qui a été accusée par le FBI et la CIA de plus de cinquante attaques terroristes aux Etats-Unis, et dont des membres ont été soupçonnés d’avoir fait sauter le bureau de l’American Arab Anti Discrimination Committee à Los Angeles, attentat qui avait coûté la vie au directeur régional de cette association, Alex Odeh ? Est-ce l’organisation qui entretient d’étroites relations avec les colons extrémistes dans les territoires palestiniens occupés, notamment le mouvement illégal Kach ? Est-ce cette même organisation dont le président, Irv Rubin, et son adjoint, Earl Krugel, ont été accusés officiellement de conspiration en vue d’un attentat terroriste ? Vivre sous occupation, en Palestine, est une chose. Mais habiter en Europe occidentale et voir l’occupation israélienne vous y rattraper en est une autre. Je ne m’exprime pas ici aujourd’hui au nom des Palestiniens, ou des Hollandais d’il y a une soixantaine d’années, mais tout simplement en tant qu’être humain.
                                   
8. Il n’y a qu’un seul choix, qu’on le veuille ou non par Ken Heller (mars 2003)
sur le site de la Ligue de Défense Juive hollandaise [http://www.jdlholland.tk]
[traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier]

Y a-t-il encore quelqu’un pour croire à la formulation ridicule « la terre contre la paix » ? Y a-t-il quelqu’un qui ne soit pas d’accord avec l’affirmation que les Arabes ne veulent pas la paix avec Israël… qu’ils veulent la paix sans Israël du tout ? Y a-t-il encore quelqu’un pour dire qu’il vaut mieux perdre que gagner ? Ou que mourir, c’est mieux que vivre ?
De mémoire d’homme, les Arabes ont toujours haï les juifs. Ils le feront toujours. La question de savoir pourquoi n’a aucune importance. Seul importe de savoir que c’est ce qu’ils font. Malheureusement, leur haine n’est que par trop attestée, à travers les bains de sang juif. En supposant que vous connaissiez l’histoire de la région en remontant au moins jusqu’aux années 1920 à Hébron, vous savez que les Arabes (judicieusement décrits dans la Bible comme des « bêtes à apparence humaine ») ont répandu le sang juif à flots… et qu’ils continuent à le faire de nos jours, en toute impunité. Les territoires prétendument « occupés » que les Arabes ne cessent de rabâcher qu’ils veulent en faire leur pays, c’est l’ensemble d’Israël : pas seulement Elon Moreh, Efrat ,Ofra et Hébron [des colonies dans les territoires occupés en 1967, ndt], mais aussi Petah Tikvah, Tel Aviv, Tzfat [Safed] et Haïfa [des colonies dans les territoires occupés en 1948, ndt]. Cela aussi, c’est bien prouvé. Vous n’avez qu’à vous reporter à la Charte de l’OLP [pourtant déclarée "caduque" par Yasser Arafat, à Paris le 2 mai 1989, Ndt] qui continue à en appeler à la destruction totale d’Israël, ou encore lire les transcriptions des sermons hebdomadaires de leurs imams et mullahs [Le chiisme palestinien : nouveau sujet de thèse pour orientaliste distingué ! Ndt].
Le gouvernement et le peuple d’Israël, ainsi que les juifs du monde entier doivent désormais reconnaître qu’après cinquante années de guerre continue et brutale pour la survie ; après d’innombrables tentatives d’acquiescement, de capitulation et de flagorneries, et après avoir négocié accord sur accord durant les décennies écoulées (qui se sont avérés n’être rien d’autre que des pièges), il est plus que temps de mettre en application la seule option restante, réaliste, responsable et sensée, qui garantira aux juifs qu’ils vivront à l’avenir en paix : le TRANSFERT des Arabes, qu’ils le veuillent ou non.
Déjà, en juin 1938, David Ben Gourion (même lui !) n’avait-il pas affirmé : « Je suis favorable au transfert par la force ; je n’y vois rien d’immoral ».
Je suis certain que vous partagez ma profonde tristesse, ma frustration et ma colère, à la lecture de chaque titre en « une » informant d’attentats à la bombe contre des autobus, des cafés, des Seders, des pizzérias, des piscines, des marchés, des discothèques, avec les nombreux morts et blessés qui en résultent. Je suis sûr que vous partagez la même horreur qui me parcourt les veines lorsque vous lisez ces informations faisant état de paisibles étudiants de yéshiva abattus avant, durant ou après le Shabbat, de familles assassinées chez elles par les « bêtes humaines » et les innombrables obus de mortiers et roquettes qui attaquent quotidiennement les communautés à Gaza. Bien que le gouvernement Sharon ait en réalité intercepté des dizaines de criminels kamikazes, épargnant ainsi certainement des centaines de vies humaines, et bien qu’il ait arrêté un certain nombre de terroristes, les tueries continuent et doivent être stoppées totalement. Une phrase circule, en Israël,
"Ein Aravim; Ein piguim".. : Cette formule parfaitement logique et frappée au coin du bon sens devrait servir de mot d’ordre à la nouvelle politique du gouvernement israélien. Elle signifie, tout simplement : « Pas d’arabes, pas de terrorisme ! » Vous avouerez qu’il est bien difficile de réfuter cette philosophie ! La solution nous aveuglait, parce que nous l’avions devant les yeux. Elle est d’un dépouillement magnifique : « Pas d’arabes, pas de terreur ! »
On parle de « cycle de la violence », mais moi, je vois surtout un « cycle de la stupidité », et c’est ce qui est très préoccupant. Nous n’avons plus le temps pour jouer au chat et à la souris, au tac au tac « tu me tires dessus, alors moi, je te tire dessus, après quoi tu me tireras dessus, et je te retirerai à mon tour dessus. » Cette stratégie ne marche pas. C’est de la folie. Le terrorisme continue. Des juifs meurent ! Ça doit être soit entièrement écrasé, soit entièrement déporté, voire les deux ["Ça" (it, en anglais), désignant les Arabes Palestiniens, ndt].
Les dirigeants israéliens ne doivent pas se préoccuper de l’élargissement de leur électorat et de toutes les prébendes attachées aux fonctions officielles, ni de ce que George Bush, Vladimir Poutine ou Jacques Chirac peuvent bien penser, mais plutôt de la préservation de la vie juive et des lieux saints juifs. Il n’y a rien qui soit aussi important. Quelqu’un pourrait-il en douter ? Plus de jeu du chat et de la souris : le Transfert, vous dis-je !
Il est plus que temps de terroriser les terroristes. Je formule l’humble suggestion que le gouvernement israélien essaie de commencer à se rendre compte du fait que la vie juive a priorité sur toutes les autres priorités et qu’il commence à consacrer toutes ses ressources à mettre en place la logistique du Transfert, tout en continuant à écraser les forces ennemies dans nos propres rangs. Le cancer, à défaut d’exérèse, finira par nous tuer tous. La réponse, c’est : le Transfert ! La seule Réponse ! Ce mantra devrait être répété dans tout Israël en commençant aujourd’hui même et chaque jour, jusqu’à ce qu’une énorme pression contraigne le gouvernement à accéder à nos demandes… à notre désir de vivre.
Le (regretté) Rabbin Meir Kahane, hy"d, avait répondu à une question qu’on lui posait en ces termes : « La question n’est pas de savoir comment nous pouvons nous débarrasser des Arabes, mais bien plutôt celle de savoir comment nous pourrions ne pas le faire ? »
 
Revue de presse

                                           
1. Israël : l'armée accusée - Une arme très meurtrière aurait été utilisée dans un raid sur Gaza par Jean-Luc Allouche
in Libération du vendredi 21 novembre 2003

Jérusalem de notre correspondant - L'armée de l'air israélienne a-t-elle débité un gros mensonge, ou livré une semi-vérité, sur les armes employées lors du raid aérien du 20 octobre sur le camp de réfugiés de Nusseirat, à Gaza et particulièrement meurtrières ? Le nombre de victimes ­ douze dont dix civils ­ avait déclenché une polémique sur ces «attaques ciblées», au coeur d'une population très dense. A grand renfort d'images prises d'un drone, montrées sur toutes les chaînes de télévision, Tsahal s'était employé à prouver l'absence de foule au moment du tir de ses deux missiles (Libération du 23 octobre).
Le député du Méretz (gauche pacifiste) Yossi Sarid, en possession d'«informations confidentielles», a menacé de les révéler, faute de recevoir les précisions qu'il a demandées à la Commission de la défense du Parlement. Précisions qu'a accepté de lui donner, mercredi, le chef d'état-major de l'armée de l'air : le général Dan Haloutz a confirmé l'emploi de missiles Hellfire tirés depuis des hélicoptères Apache, et il a reconnu qu'une autre arme, plus sophistiquée, «couverte par le secret militaire», a bien été employée mais que, jusqu'à cette heure, l'armée évite de le dévoiler pour des «raisons opérationnelles». Ces armes ne seraient pas interdites par les conventions sur la guerre, selon l'armée.
Cette révélation fera au moins deux nouvelles victimes : le général Dan Haloutz lui-même, candidat au poste de chef d'état-major de Tsahal, qui s'est «mis dans de beaux draps», comme titrait, hier, le quotidien Maariv, en taisant, il y a un mois, la vérité. Et surtout, la confiance entre la poignée de journalistes politiques et militaires qui forme un relais privilégié, et très bien informé, entre l'armée et l'opinion publique. La presse d'hier lançait cet avertissement : il n'est pire vengeance que celle d'un journaliste à qui l'on a servi de pieux mensonges...
                       
2. Défense : Premier F-16.I pour Israël
in Air et Cosmos (hebdomadaire français) du vendredi 21 novembre 2003

Le ministre israélien de la Défense, Shaul Mofaz, a réceptionné le 14 novembre à Fort Worth (Texas) le premier des 102 biplaces Lockheed Martin F-16.I commandés au titre de programme “Peace Marble V”. L’appareil a reçu le nom de baptême de “Soufra” (tempête) dans l’IAF. Il est équipé de réservoirs conformes de fuselage, du radar APG-68(V)9 et du réacteur F100. Vingt-quatrième client du Fighting Falcon, l’IAF avec 362 exemplaires en service ou en commande devient le second utilisateur de ce chasseur après les Etats-Unis.
                               
3. Bush campe sur ses positions par Jean-Christophe Ploquin
in La Croix du mercredi 19 novembre 2003

Le président américain n'a pas profité de sa venue en Europe pour esquisser un rapprochement sur l'Irak, le Proche-Orient ou le recours à la force
Le président américain George W. Bush ne s'est pas écarté des positions habituelles de son administration sur les grands dossiers internationaux lors d'un important discours prononcé le 19 novembre à Londres, durant la visite d'État de trois jours qu'il effectue au Royaume-Uni. Il a cherché à enfoncer le clou plutôt qu'à aménager de nouveaux espaces de discussions, notamment sur les questions de l'Irak et du Proche-Orient.
George W. Bush a défendu la guerre en Irak. « Dans certains cas, le recours mesuré à la force est tout ce qui nous protège d'un monde chaotique dirigé par la force, a-t-il déclaré lors de son discours au palais de Whitehall. [...] Ce devoir requiert parfois de restreindre par la violence les hommes violents. »
Rappelant les attentats du 11 septembre 2001, il a mis en garde contre le danger de l'inaction. « Ces terroristes prennent les innocents pour cible, ils ont tué des milliers de gens, et ils en tueraient des millions s'ils obtenaient les armes qu'ils cherchent [...]. Le mal est bien visible. Le danger ne fait qu'augmenter lorsqu'on le nie. »
Le président américain a rappelé comment les Alliés avaient travaillé après la fin de la Seconde guerre mondiale pour ramener l'Allemagne sur le chemin de la démocratie, et a remercié la Grande-Bretagne qui aide Washington à faire de même en Irak. « La démocratie réussira en Irak, parce que notre volonté est ferme, notre parole est bonne et le peuple irakien ne renoncera pas à sa liberté », a-t-il affirmé.
Au sujet du Proche-Orient, George W. Bush a demandé aux dirigeants européens de cesser les contacts avec les dirigeants palestiniens jugés indignes de confiance, son administration ayant elle-même coupé tout contact depuis près de deux ans avec Yasser Arafat. « Les dirigeants européens doivent arrêter de soutenir les dirigeants palestiniens qui trahissent la cause de leur peuple, a-t-il demandé. La paix ne sera pas atteinte avec des dirigeants palestiniens qui intimident l'opposition, qui tolèrent et profitent de la corruption et maintiennent des liens avec les groupes terroristes. Ceux qui veulent diriger une nouvelle Palestine doivent adopter des méthodes pacifiques et créer les institutions viables d'une démocratie stable. »
Le président Bush a également demandé à Israël d'arrêter l'implantation de colonies juives dans les territoires occupés et de cesser « les humiliations quotidiennes des Palestiniens et ne pas préjuger du résultat final des négociations en construisant des murs et clôtures ». Il a réaffirmé l'engagement de son administration en faveur de la création d'un État palestinien indépendant. Il a par ailleurs appelé les dirigeants européens à « fermement combattre l'antisémitisme qui empoisonne le débat public sur l'avenir du Proche-Orient ».
Le président américain a ainsi tenté de montrer que sa diplomatie s'appuie sur « trois piliers » à savoir le soutien aux institutions internationales, la promotion de la paix et de la démocratie, et la nécessité d'agir, y compris par la force, pour défendre celles-ci. Quant aux contentieux commerciaux entre les États-Unis et l'Union européenne, il ne semble pas être venu pour les apaiser.
                                                      
4. Palestine : juste un autre plan de paix ? par Valérie Féron
in 24 heures (quotidien suisse) du lundi 17 novembre 2003

Dans les territoires palestiniens où le texte n’a pu être distribué, la poste ne fonctionnant pas en raison de l’occupation et des bouclages, les discussions portent plus sur les soucis du moment que sur l’Initiative de Genève dont le texte intégral était disponible dans l’édition du jour du quotidien national al Quds (Jérusalem) et avait déjà été publié dans la presse au début du mois. Les préparatifs se poursuivent pour en sortir des copies prochainement et organiser des conférences.
Survivre
Loin des agitations diplomatiques autour de l’Initiative de Genève, Bethléem a vécu hier une journée calme, les habitants de la région respectant le repos dominical chrétien. En cette période de Ramadan, quelques épiceries étaient ouvertes et préparaient des qatayef, ces petits ronds de pâte fourrés aux noix et arrosés de sucre en sirop, traditionnellement dégustés en ce mois sacré par toute la population palestinienne toutes religions confondues. «Que voulez-vous que les gens vous disent?, lance Ashraf du camp de réfugiés d’Aïda où, à quelques mètres, un bulldozer nivelle un terrain pour la construction de la «barrière de sécurité» selon l’appellation israélienne. Ce «mur de la honte» pour les Palestiniens va éventrer la Cisjordanie et, au passage, isoler une partie du camp d’Aïda. «Voilà notre réalité: le mur, les morts et les destructions de maisons tous les jours. Les gens ne se concentrent que sur une chose actuellement: survivre!»
«Solutions concrètes»
Même ambiance dans le camp de réfugiés de Deishe, où Mohammed Taher, responsable du Fatah, le parti du président Arafat, est assis à son bureau le texte de Genève près de lui: «Je ne peux pas dire que cet accord, qui n’est pas officiel, est vraiment négatif. Il faut discuter. Il propose des solutions concrètes et durables contrairement aux précédents accords qui laissaient ouvertes les questions cruciales comme Jérusalem et la question des réfugiés. En principe, il n’abandonne pas les droits des réfugiés. Mais le problème porte sur les applications concrètes.»
Nafez al-Rifai, en costume cravate, écoute debout près de la porte, le regard las: «Disons-le clairement, nous n’avons aucune confiance en les Israéliens. Les expériences passées nous ont toujours prouvé que leur stratégie consiste à faire durer des négociations, au mieux à les appliquer partiellement ce qui oblige ensuite à renégocier une partie de ce qui avait déjà été conclu. Et on veut nous faire croire que, cette fois-ci, ils vont se retirer des territoires, que nous aurons des frontières et que tout va être réglé en trente mois!»
Ce haut responsable régional du Fatah est partisan d’un statu quo diplomatique à court terme: «Sharon est en train de rendre impossible la solution des deux Etats. On va vers l’apartheid. Mais un futur Sharon et un futur Arafat devront faire ce que De Klerk et Mandela ont fait en Afrique du Sud. C’est pourquoi je suis contre toute rencontre entre Abou Alaa (le premier ministre palestinien) et Sharon, car ce dernier ne s’en servira que pour l’image extérieure. Ce jeu nous le connaissons.»
Si la situation est dramatique, les esprits restent combattants: «Nous sommes prêts à continuer à nous battre pour obtenir nos droits, insiste Mohammed Taher, appuyé par Nafez al-Rifai qui ajoute «Nous sommes prêts pour une vraie paix. Nous avons déjà reconnu Israël sur 78% de notre patrie historique. Quel que soit l’accord à venir, la seule solution passe par le retrait complet des Israéliens aux frontières de 1967. Je ne vois pas pourquoi nous devons négocier cela!»
                                       
5. Orient arabe : le nouveau paradigme US par Hichem Ben Yaïche
on Vigirak [http://vigirak.com] le lundi 17 novembre 2003
Une "destruction créatrice" du monde arabe, selon G W Bush
L'avant et l'après-guerre en Irak ont mis à nu les défauts structurels du monde arabe, qui se trouve ainsi dans un état pétrifié, incapable d'agir sur le cours des choses. En plus, il est inaudible. Chaque pays est entré dans sa coquille, en se contentant de contrôler une opinion intérieure en état de dépression.
Pour les Américains, la situation en Irak se complique de jour en jour sérieusement : le harcèlement des forces militaires de la coalition et la multiplication des attentats aveugles rendent aléatoires, voire inefficaces, les efforts de reconstruction du pays. Paul Bremer, l’administrateur civil de l’Irak, et ses quelque huit cents fonctionnaires auront bien des soucis avant de pouvoir mettre le pays d’aplomb. On en est très loin !
Pour autant, et ce n’est nullement contradictoire avec ce qui vient d’être dit, les Américains sont en « cours d’apprentissage » des réalités géopolitiques de la région, de sa culture et des subtilités de cet Orient arabe qui leur échappe pour le moment. Depuis l’électrochoc du 11 septembre 2001, le virage idéologique est pris. Les néoconservateurs de l’administration Bush sont décidés à aller jusqu’au bout de leur stratégie de remodeler le paysage politique arabe (1). Même si leurs ambitions sont en ce moment malmenées, voire contrariées sur le terrain, par une violence qui s’enfle jour après jour, les idéologues de Washington sont en train d’élaborer des scénarios, notamment en politique intérieure, afin de subir le minimum de dégâts d’ici aux élections présidentielles prévues en novembre 2004.
Hier, c’était la guerre froide, qui déboucha sur le triomphe idéologique de l’Amérique sur l’Union soviétique. Mais les attentats du 11 septembre 2001 sur le sol américain avaient produit un choc psychologique profond dans l’opinion et chez les dirigeants US. Devant cette agression, l’Amérique ne pouvait pas rester inerte. L’Afghanistan, sanctuaire du djihadisme à la Ben Laden, servit d’acte inaugural à la guerre contre le terrorisme. Mais les idéologues de Washington ont petit à petit réactivé, en les adaptant à l’Irak, des idées développées ces dernières années dans les think tanks. D’où la mise en place du concept «axe du mal», établissant une liste de pays-cibles, dont l’Amérique se doit de changer les régimes politiques ou de les contenir par la force militaire : Irak, Syrie, Iran, Corée du Nord. 
S’il est vrai que l’extrémisme islamique est le « cœur de cible» de cette bataille des idées des faucons de l’équipe Bush, il n’en reste pas moins vrai qu’une série de maladresses au plan du discours, en particulier du président George W. Bush, et des glissements sémantiques, fréquents, dans la presse américaine, dessinent, à tort ou à raison, un nouveau paradigme qui est fondé sur le choc des civilisations : Orient versus Occident. Il ne s’agit nullement d’une hypothèse fantaisiste. Ecoutons ces paroles: « (Richard) Perle a réussi à faire renverser Saddam. Il menace l’Iran et la Syrie. L’Arabie Saoudite est également dans sa ligne de mire, et l’Egypte commence à se sentir mal à l’aise. Si ce n’est pas une guerre contre le musulman, dites-moi ce que c’est ! », explique, sous couvert d’anonymat, un haut responsable du Département d’Etat (2). Les responsables de cette politique ont verrouillé tous les lieux névralgiques du pouvoir, à Washington, en prenant soin d’écarter les orientalistes suspectés d’« arabophilie ». L’orientaliste juif américain, Bernard Lewis est devenu le maître penseur des faucons. Ces derniers «ne sont pas [seulement] liés à Israël, note Eric Laurent (3), mais aux organisations les plus virulentes et les plus opposées à la paix. George W. Bush ne le voit pas, ou refuse de l’admettre.»
L’avant et l’après-guerre en Irak ont mis à nu les défauts structurels du monde arabe, qui se trouve ainsi dans un état pétrifié, incapable d’agir sur le cours des choses. En plus, il est inaudible. Chaque pays est entré dans sa coquille, en se contentant de contrôler une opinion intérieure en état de dépression. Pour les architectes américains du nouveau monde arabe, cette phase de « destruction créatrice » est une étape nécessaire pour que les plaques tectoniques des sociétés arabes se réaménagent et débouchent, un jour, sur de nouveaux pouvoirs démocratiques. Voilà un pari bien risqué ! 
En attendant, l’Amérique, en redéployant massivement ses services de renseignements dans l’aire arabe et musulmane, cherche à capturer l’énergie de ses peuples pour mieux les conquérir et les séduire par l'American Way of Life. Conversion des élites politiques et économiques, télévision, radio, presse écrite…, rien n’est épargné dans cette bataille des idées américaines.
Nous sommes qu’au tout début d’une nouvelle ère. Les incertitudes et le poids des antagonismes sont considérables. La guerre froide n’a-t-elle pas coûté 13 mille milliards de dollars au contribuable américain ? Les Etats-Unis d’Amérique semblent prêts à payer le prix de leur nouvelle politique mondiale (4). Avec ou sans George W. Bush, les décideurs actuels – et, probablement, ceux à venir –, qui sont plus que jamais en phase avec les attentes du complexe militaro-industriel, ont de fortes chances de confirmer l’orientation actuelle de l’hyperpuissance américaine. A moins que l’imprévisible ne s’en mêle en stoppant la machine… .
- NOTES :
[1] Paul Wolfowitz, secrétaire adjoint à la Défense (n°2) et concepteur du plan de remodelage du Moyen-Orient ; Richard Perle, conseiller au Pentagone, dont l’influence occulte est considérable ; Elliott Abrams, directeur du Moyen-Orient au Conseil national de sécurité de la Maison Blanche ; Douglas Feith, secrétaire adjoint à la Défense (n°3). 
[2] Propos rapportés par Eric Laurent (p. 153) dans son livre “Le monde secret de Bush (la religion, les affaires, les réseaux occultes). Editions Plon, Paris 2003.
[3] Livre d'Eric Laurent cité plus (p.152).
[4] Chiffre donné par Melton Dearden, ancien responsable à la CIA (voir
www.arte-tv.com/cia).
                       
6. "Si la famine guette, en Cisjordanie, suivez mon regard : Israël", dit la Croix-Rouge par Amos Harel, Aluf Benn et Yoav Stern
in Ha'Aretz (quotidien israélien) du  dimanche 16 novembre 2003
[traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier]

Correspondants et Agences - Le Comité International de la Croix-Rouge [CICR] est en train de distribuer ses derniers colis alimentaires de secours en Cisjordanie, tout en tirant la sonnette d’alarme : la crise économique qui affecte gravement cette région du monde est la conséquence directe des bouclages militaires israéliens, et Israël doit assumer ses responsabilités, en sa qualité de puissance occupante, en pourvoyant aux besoins économiques de la population palestinienne. Ce geste intervenait à un moment où précisément les médias israéliens faisaient état des propos de François Bellon, le représentant de la Croix-Rouge, qui a dit à des généraux de l’armée israélienne à la retraite que l’Autorité palestinienne était au bord d’une « implosion » qui pourrait conduire à la « pire crise humanitaire » jamais encore constatée dans les territoires occupés. Israël redoute que d’autres organisations internationales n’emboîtent le pas à la Croix-Rouge, ce qui le placerait devant la nécessité de prendre financièrement en charge le coût des services de base qu’il fournit, actuellement, à un tarif annuel que certains experts estiment atteindre la somme rondelette d’1,1 milliard de dollars.
L’économie palestinienne s’est effondrée sous le poids des bouclages militaires des villes palestiniennes, qui interdisent aux Palestiniens de transporter leurs marchandises ou de se rendre à leur travail dans d’autres villes que celles où ils résident, ou en Israël. L’année dernière, et au début de celle-ci, des couvre-feux imposés tout juste pour une durée de quatre heures par semaine par l’armée israélienne suffisaient à empêcher les Palestiniens de se rendre à leur travail. Le gouvernement israélien affirme que les bouclages très stricts sont rendus nécessaires par la prévention d’éventuelles infiltrations transfrontalières d’activistes palestiniens vers Israël, en vue d’attentats kamikazes ou d’autres types d’attaques, mais il a été accusé d’infliger une forme de punition collective aux civils palestiniens. Moshe Ya’alon, chef d’état-major de l’armée israélienne, s’est élevé, récemment, contre les bouclages, dont il a affirmé qu’ils ne faisaient que susciter de la colère et un désir de vengeance envers Israël chez les Palestiniens. En raison de l’effondrement économique, un cinquième des enfants palestiniens sont dénutris, d’après un rapport publié l’année dernière par une agence gouvernementale américaine d’aide humanitaire. Les organisations internationales se sont apprêtées à apporter l’assistance nécessaire. Au lendemain de l’invasion et de la réoccupation des villes de Cisjordanie, en avril dernier, la Croix Rouge avait lancé un programme d’aide alimentaire et de services fondamentaux en faveur des Palestiniens.
La Croix-Rouge a dépensé, l’an dernier, 46 millions de dollars, dont la moitié a été consacrée à la distribution de vivres et de biens de première nécessité telles les allumettes et l’huile de friture, à quelque 300 000 familles palestiniennes, parmi les plus nécessiteuses, en Cisjordanie. Mais, aujourd’hui, le CICR informe qu’il est contraint d’arrêter ces distributions, et qu’Israël doit prendre ses responsabilités de puissance occupante, sous l’empire de la Quatrième Convention de Genève, qui lui impartit de prendre en charge les besoins économiques de la population civile de Cisjordanie et de la bande de Gaza. Un porte-parole du CICR, Vincent Bernard, a déclaré : « Ces secours humanitaires étaient destinés à soulager la population, dans une situation d’urgence humanitaire, et non pas à pallier aux problèmes de plus long terme occasionnés par les couvre-feu, les bouclages et l’effondrement de l’économie auxquels nous assistons depuis plusieurs mois. Il ne relève pas de notre responsabilité de prendre en charge les besoins économiques des Palestiniens. Nous n’avons eu de cesse de rappeler qu’il s’agit là de la responsabilité exclusive de la puissance occupante. »
M. Bernard a démenti des propos rapportés par la presse israélienne, selon lesquels ce programme de secours alimentaire aurait été supprimé pour des raisons budgétaires. « En tant que puissance occupante, Israël se doit de minimiser les conséquences humanitaires de ses interventions », a-t-il rappelé. « Les couvre-feu et les bouclages qui sont en train de détruire l’économie palestinienne ne sauraient se poursuivre indéfiniment. Les Israéliens doivent trouver des moyens alternatifs de défendre leur sécurité. S’ils levaient ces mesures sécuritaires paralysantes, l’économie palestinienne, quoi que fortement endommagée, redémarrerait. » M. Bernard s’est refusé à tout commentaire sur un article du quotidien Ha’aretz, selon lequel M. Bellon aurait indiqué au cours d’une rencontre relativement récente que les Palestiniens étaient au bord d’une grave crise humanitaire. Néanmoins, il s’agit là d’une évaluation à laquelle des hauts responsables de l’armée israéliennes semblent apporter un certain crédit. Pour l’instant, le Programme Alimentaire Mondial, de l’ONU, est venu colmater la brèche, en mettant sur pied un programme alimentaire de remplacement jusqu’à l’été prochain.
                       
7. L'amputation des oliviers palestiniens, arme des colons israéliens dans la conquête territoriale par Gilles Paris
in Le Monde du 13 novembre 2003

La période autrefois faste de la cueillette des olives suscite la peur.
Ein Abous de notre envoyé spécial - Hassan Ahmed Souleiman pourrait passer la journée entière à regarder la colline. Entre l'école et le cimetière du village d'Ein Abous, au sud de Naplouse, il cherche le meilleur point de vue et découpe du doigt les parcelles invisibles où trônaient ses oliviers, à quelques centaines de mètres de là. "C'est mon père qui les avait plantés là il y a une quarantaine d'années, 400 arbres en tout si on ajoute ceux de mes frères qui vivent en Jordanie, dont je m'occupais aussi", assure-t-il. Il ne reste plus que des troncs par terre. Il y a quelques jours, les colons israéliens d'Itzhar, l'implantation qui court sur la crête, ont coupé les arbres les plus proches des premiers baraquements.
"Nous n'osions pas nous y rendre pour ramasser les olives, explique-t-il, puis le 1er novembre deux bus de pacifistes internationaux sont arrivés pour nous accompagner, comme les années précédentes. Mais il était déjà trop tard. Ce sont eux qui ont découvert la catastrophe. Moi, je n'ai pas eu la force d'y aller." Il ne compte pas aller là-haut à présent pour déblayer les branches coupées à la tronçonneuse. "On a perdu le chameau, on ne va pas se battre pour la selle", lâche-t-il, découragé.
Au village d'As-Saouiya, plus près de Ramallah, les colons ont eu la main un peu moins lourde. "Les arbres ont été écornés au plus près du tronc, assure le maire, Abdallah Youssef, mais, même dans ce cas, pour nous, cela veut dire cinq ou six ans sans récolte." Comme à Ein Abous, les parcelles touchées jouxtent un point de colonisation, en fait une extension de l'implantation d'Eli, qui se trouve à 2 km de là. Pour le maire, le message est clair. "Ce ne sont pas des représailles de leur part, mais au contraire une stratégie pour gagner toujours plus de terre. Les colons diront, dans un premier temps, que les terres n'ont plus de valeur compte tenu de l'état des arbres pour lever les objections de l'armée, puis ils traceront une route. Plus tard, ils installeront de nouvelles caravanes, puis des maisons. Ils ont toujours procédé de cette manière." Faute d'autres recours, les paysans touchés transmettront une protestation officielle au bureau de liaison palestinien de Naplouse, qui la fera suivre à sa contrepartie israélienne.
PARCELLES RAVAGÉES
Hassan Ahmed Souleiman rédigera également une déclaration à l'intention du ministère palestinien de l'agriculture, mais sans se faire d'illusions. "Avec leur dédommagement, je n'irai pas bien loin", se plaint-il, lui qui, à 60 ans, a perdu, à l'en croire, sa principale source de revenus. Les habitants d'Ein Abous et d'As-Saouiya ont beau assurer qu'ils ne craignent pas les colons, aucun n'ose monter seul jusqu'aux parcelles ravagées. "Trop dangereux, assure Abdallah Youssef, les colons ont des armes et des chiens. On ne sait jamais comment cela peut tourner avec eux." Depuis le début de l'Intifada, la période autrefois faste de la cueillette des olives suscite la peur. Pour les parcelles les plus proches des colonies, les villageois essaient de s'organiser avec une armée jugée peu coopérative, ou avec les pacifistes israéliens ou internationaux, dont la présence, selon eux, a un effet aussi dissuasif sur les colons que celle des militaires israéliens.
A Ein Abous, personne n'a eu vent de la visite effectuée quelques jours auparavant dans les champs touchés par le député israélien Ephraïm Sneh, un ancien militaire membre du Parti travailliste, qui n'est pourtant pas un inconnu pour le vieux moukhtar (maire), Abou Youssef, 82 ans. Ce dernier se souvient, en effet, d'avoir eu affaire à lui par le passé, lors d'une affectation dans la région dans les années 1980. Le député, choqué par ce que le chroniqueur militaire du Haaretz, Zeev Schiff, a qualifié d'"autre forme de terrorisme", a assuré ensuite que la Knesset serait saisie de cette affaire. Jeudi 6 novembre, la nouvelle a laissé cependant de marbre les Palestiniens concernés.
                       
8. Sharon indésirable à Ankara
in L'Intelligent - Jeune Afrique du mercredi 12 novembre 2003

En visite à Moscou au tout début de novembre, le Premier ministre israélien Ariel Sharon se proposait de passer par Ankara sur le chemin du retour. Les autorités turques l'en ont dissuadé, au motif que l'emploi du temps de son homologue, Recep Tayyip Erdogan, était déjà chargé. Les diplomates turcs s'emploient à minimiser l'incident : les relations privilégiées qu'entretiennent Israël et la Turquie depuis l'accord de coopération militaire de 1998 demeurent inchangées, affirment-ils. En réalité, les Israéliens ont modérément apprécié les réserves émises par Ankara sur leur politique en Palestine. L'entretien de matériels militaires américains livrés à la Turquie, qui devait incomber aux Israéliens, n'est plus assuré par ces derniers. Depuis plusieurs semaines, la presse nationaliste turque reproche à Israël de nouer des liens avec les Kurdes d'Irak, en négociant auprès d'eux le rachat de terres abandonnées par quelque 150 000 juifs irakiens sous le régime de Saddam. 
                       
9. Bertrand Delanoë reçu par Yasser Arafat
Dépêche de l'agence Associated Press du lundi 10 novembre 2003, 09h24

Le maire socialiste de Paris, Bertrand Delanoë, a rencontré samedi matin le dirigeant palestinien Yasser Arafat à Ramallah, en Cisjordanie, dans son quartier général de la Moukatta, où il est assiégé depuis près de deux ans par l'armée israélienne.
"Je suis venu apporter mon salut au président élu du peuple palestinien, nous sommes très peinés par la souffrance de ce peuple", a déclaré M. Delanoë aux journalistes.
"Paris est aux côtés de tous ceux qui en Palestine et en Israël cherchent et veulent la paix", a-t-il souligné.
Le ministère israélien des Affaires étrangères a déploré cette rencontre qui va à l'encontre des efforts israéliens d'écarter Yasser Arafat de la scène politique.
M. Delanoë avait entamé jeudi en Israël une tournée de quatre jours au Proche-Orient par une rencontre avec le chef de la diplomatie israélienne, Sylvan Shalom. Il a également assisté aux cérémonies officielles honorant la mémoire de Yitzhak Rabin.
Outre les relations bilatérales, principal sujet de l'entretien, les discussions avaient aussi porté sur le rôle de l'Europe dans le processus de négociations israélo-palestiniennes, actuellement au point mort.
                       
10. Le temps est venu de supprimer l'Autorité Palestinienne par Gideon Levy
in Ha’Aretz (quotidien israélien) du dimanche 9 novembre 2003
[traduit de l'hébreu par Michel Ghys]
  
Si les chefs de l'Autorité Palestinienne se souciaient véritablement du bien-être de leur peuple, ils démissionneraient et ôteraient le masque à cette illusion de gouvernement et à celle d'un «État en gestation».
Il aurait fallu mettre fin depuis longtemps à cette farce. Si les chefs de l'Autorité Palestinienne étaient dotés de davantage de respect de soi, d'empressement à se dévouer et d'audace politique, ils auraient déjà annoncé depuis longtemps l'abolition de l'Autorité et confié toutes les clefs à Israël.
S'ils étaient davantage soucieux de ce dont ils sont censés avoir la charge, le bien-être de leur peuple, ils démissionneraient et ôteraient le masque à cette illusion de gouvernement et à celle d'un «État en gestation»; ils cesseraient d'être la feuille de vigne qui sert l'occupation israélienne et la perpétue. Au lieu de cela, ils s'attachent aux quelques honneurs et gratifications qu'Israël dispense encore à certains d'entre eux et ils continuent de prêter la main à cette grande supercherie selon laquelle existeraient une Autorité palestinienne souveraine et un gouvernement doté de pouvoirs.
Sous couvert de titres vides, ils collaborent à cette escroquerie - à laquelle beaucoup en Israël et dans le monde trouvent encore confortable de croire - qui veut que l'occupation israélienne dans les Territoires n'est pas redevenue pleine et entière, et qu'il y ait un gouvernement palestinien.
«Ministres», «directeurs-généraux», «secrétaires d'État» et «gouverneurs» dont les titres ne recèlent aucun pouvoir, aucune capacité de gouverner ou de rien décider - en dehors des voitures de cérémonie et des certificats réservés aux personnages de marque, qui leur permettent de passer aux barrages - tous continuent de tromper leur peuple et le monde.
Le Ministre de la Sécurité Intérieure palestinien peut-il assurer la sécurité d'un civil palestinien face aux assassinats ciblés, aux hélicoptères, aux soldats qui font irruption dans les maisons au milieu de la nuit? Le Ministre de la Santé est-il capable de se préoccuper de la santé des citoyens quand n'importe quel soldat à un barrage peut retenir des ambulances et des malades et que villes et villages sont placés sous couvre-feu prolongé? Que peut faire le Ministre de l'Agriculture alors que des colons abattent, sans être inquiétés, des centaines d'oliviers ou empêchent la récolte, et que l'armée israélienne «déblaie» des milliers de dounams de champs et de vignes? Et comment le Ministre du Travail s'occuperait-il de l'emploi des habitants alors qu'ils ne peuvent même pas sortir de leurs lieux de résidence? Le Ministre des Communications peut-il s'occuper de la circulation dans son pays semé de barrages où l'armée israélienne est seul maître pour décider quelle route sera réservée uniquement aux Juifs, et quelle ligne d'autobus palestinienne sera autorisée à circuler? Et ainsi de suite.
À la fin de la semaine, dans une rue de Ramallah, un passant plaisantait: «Le temps que les Palestiniens aient polémiqué pour savoir si Nasser Youssouf sera Ministre de l'Intérieur ou non, les Israéliens auront terminé de construire la clôture de séparation». Beaucoup de Palestiniens ne savent pas qui sont les ministres de leur gouvernement, et ce n'est pas sans raisons: l'essentiel de la petite assistance qu'ils reçoivent leur vient d'organisations comme l'UNRWA ou des autorités locales, pas de leur gouvernement imaginaire.
Les ministres palestiniens atteignent des sommets dans le pitoyable, lors de leurs rencontres avec leurs homologues israéliens. Telle était, par exemple, la rencontre du Ministre des Finances, Salam Fayad (qui s'est suspendu lui-même de ses fonctions, jeudi), le chéri des États-Unis et d'Israël, avec le Ministre de la Défense, Shaoul Mofaz, rencontre qui était exclusivement destinée à faire le lit de la visite de Mofaz à Washington. Il est difficile de comprendre comment le ministre palestinien a pu consentir à rencontrer Mofaz, l'homme qui est responsable de la politique dure à l'égard de son peuple, au seul profit des besoins politiques du ministre israélien.
Pourquoi est-il permis à Israël de boycotter des dirigeants palestiniens, à commencer par Yasser Arafat, tandis que les ministres palestiniens n'ont pas de ligne rouge? Pendant que des représentants européens et américains s'abstiennent de se rendre au cabinet du Ministre israélien de la Justice situé à Jérusalem-Est, le Ministre de la Justice palestinien sortant, Abd al-Karim Abu Salah, se présente en compagnie du Ministre préposé à la question des prisonniers, Hisham Abd al-Razak, pour une rencontre avec le Ministre israélien de la Justice, Joseph Lapid, dans son cabinet. Dans le public palestinien, on n'a que mépris pour de tels ministres.
Cette présentation fallacieuse d'un gouvernement et d'une Autorité pseudo-autonome amène ceci qu'Israël a dès lors quelqu'un à accuser et quelqu'un dont il peut exiger une lutte contre le terrorisme, et il lui est aussi possible de prétendre, à destination du reste du monde, que l'occupation israélienne n'est pas complète.
Israël a fait beaucoup, ces trois dernières années, pour porter atteinte à tous les fondements du pouvoir de l'Autorité Palestinienne. Il ne reste pas grand chose, et le mort-vivant qui rôde encore dans les rues de Ramallah doit maintenant quitter ce monde. Il ne s'agit pas seulement d'une affaire intérieure palestinienne mais aussi de la lourde responsabilité qui pèse à la porte d'Israël et dont Israël essaie de se dégager.
Si les ministres palestiniens se présentaient comme un seul homme et faisaient savoir que le jeu est terminé - il n'y a pas d'Autorité ni de gouvernement - tout le poids de la responsabilité liée à l'occupation tomberait sur Israël.
                           
11. La double exclusion des réfugiés palestiniens par Mouna Naïm
in Le Monde du samedi 8 novembre 2003

La revue "Maghreb-Machrek" consacre son dernier numéro au conflit israélo-palestinien. Elle met l'accent sur la dérive vers les mouvements fondamentalistes islamiques, longtemps clandestins.
Après avoir consacré au Maghreb le premier numéro de sa "renaissance" - une crise de deux ans a failli le faire disparaître -, le trimestriel Maghreb-Machrek a centré le suivant (n° 176) sur le conflit israélo-palestinien. Un article de Jean-François Legrain, rédacteur en chef et chercheur au CNRS/Gremmo (Maison de l'Orient et de la Méditerranée/Lyon), est centré sur les Brigades des martyrs d'Al-Aqsa, la branche armée du Fatah "en mal de leadership national".
Puis la revue propose une lecture excentrée du conflit selon trois perspectives différentes : Bernard Rougier, chercheur à l'Institut français du Proche-Orient, conduit le lecteur dans les camps de réfugiés palestiniens du Liban ; Mohammed Kamel Doraï, Jalal Husseini et Jean-Chrisophe Augé l'emmènent en Jordanie ; Dominique Thomas, consultant pour les questions islamistes, le fait entrer dans les arcanes de la communauté d'intégristes islamistes arabes installés à Londres, le "Londonistan". Au Liban, dont la classe politique est hantée par la crainte de "l'implantation des réfugiés palestiniens" accueillis sur son territoire, les interdits officiellement imposés à ces derniers sont tels qu'ils rendent leurs conditions de vie intolérables. Au moins une partie d'entre eux ont également eu le sentiment d'être les laissés-pour-compte du processus de paix israélo-palestinien, mis en route après les accords d'Oslo en 1993.
"LONDONISTAN"
Cette double exclusion, ainsi que les divisions internes de ces réfugiés et le poids de l'influence syrienne dans le pays, explique la dérive vers les voies fondamentalistes islamiques prônées par des mouvements et des chefs religieux longtemps discrets, sinon clandestins. La question palestinienne transgresse là les frontières identitaires pour se fondre dans un projet à l'échelle mondiale. Bernard Rougier livre les clés historiques et politiques de cette mutation, qui n'est pas sans rapport avec l'histoire particulière, voire l'emplacement géographique, des camps de réfugiés. Alors qu'à la faveur de la "lutte contre le terrorisme" Londres est apparu comme l'un des pivots de l'islamisme djihadiste - éclaté entre l'Afghanistan, la Bosnie ou encore la Tchétchénie et peut-être désormais l'Irak - et que la Palestine semblait, au mieux, instrumentalisée par les groupes militants, au pis, totalement oubliée, Dominique Thomas assure qu'il n'en est rien. Sur la base d'un pointilleux décryptage des dits et écrits de dirigeants ou maîtres à penser de nombreuses formations islamistes - dont certains sont eux-mêmes d'origine palestinienne -, le lecteur découvre que la libération de Jérusalem est une cause sacrée, qui transcende toutes les autres luttes au cœur du projet islamiste. Le passage à l'acte reste néanmoins différé en attendant des circonstances favorables. L'article est par ailleurs riche d'enseignements sur le "Londonistan".
Lorsque les territoires palestiniens s'embrasent, la Jordanie redouble d'inquiétude. Ce royaume, dont la population est en majorité d'origine palestinienne, est la voie de passage obligée vers l'extérieur des Palestiniens de la Cisjordanie occupée et le pays dont le premier ministre israélien Ariel Sharon voulait faire, dans les années 1970, la patrie des Palestiniens. Il est tiraillé, en particulier depuis le début de l'Intifada Al-Aqsa, entre la crainte d'une nouvelle immigration de Palestiniens et, plus encore, de leur transfert massif par Israël, sa solidarité avec les habitants des territoires occupés et le respect du traité de paix conclu en 1994 avec l'Etat juif.
Avec, en toile de fond, cette interrogation : quel sort sera réservé, dans un éventuel accord de paix, aux réfugiés dont la Jordanie est le principal pays d'accueil ?
Outre ce dossier palestinien, Maghreb-Machrek publie un article de Kamel Kateb sur les changements démographiques et l'organisation familiale en Algérie. Et, en document, le texte de la Constitution du Qatar, qui a été approuvée par référendum le 29 avril 2003. [revue@geoeconomie.org
]
                               
12. Des policiers passent à tabac deux Arabes de Nazareth
par l’Association Arabe pour les Droits de l’Homme le samedi 8 novembre 2003
[traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier]

Lundi 3 novembre, deux Arabes habitants de Nazareth ont été passés à tabac par des policiers, à Tel Aviv. Les deux Arabes venaient d’assister à la prière à la mosquée Hassan Bek. Lorsqu’ils reprirent leur voiture, ils se rendirent compte qu’elle avait été vandalisée à coups de tournevis. Tandis que l’un d’entre eux ressortait de la voiture pour constater les dégâts, un policier le pris par le paletot et lui donna un coup de poing au visage. Interrogé sur les raisons de son agression, le policier répondit : « Vous êtes arabes, c’est déjà trop ! » Peu de temps après, des voitures de la police sont arrivées sur les lieux. Une vingtaine de policiers en surgirent, qui se mirent immédiatement à donner des coups de matraque et de pieds aux deux citoyens de Nazareth, criant des slogans tels : « Sales Arabes, vous ne méritez que la mort ! ». Une des victimes a déclaré qu’un policier lui a dirigé du gaz lacrymogène dans les yeux, après quoi il s’est mis à lui donner des coups de pied dans la figure, à tel point que la victime se mit à saigner des yeux. Après une demi-heure de coups redoublés, les deux hommes ont été emmenés dans un commissariat. En chemin, les policiers continuaient à les frapper en chemin, et ils continuèrent à le faire au poste de police. L’un des deux hommes a mentionné qu’il souffrait de problèmes cardiaques : rien n’y fit, cela ne lui épargna pas les coups. Les policiers ont menacé les deux Palestiniens de les tuer s’ils parlaient de l’incident à quiconque.
                               
13. A Kamani, un Israélien juif agresse des citoyens arabes
par l’Association Arabe pour les Droits de l’Homme le samedi 8 novembre 2003
[traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier]

Un Israélien juif de la colonie de Kamun (Israël) a agressé une famille du village voisin de Kamani, le samedi 2 novembre courant. L’agresseur est arrivé à bord de sa voiture devant la maison de la famille Sh’hadi. Il est descendu de sa voiture et il a commencé à leur crier des insanités, après quoi il leur a tiré dessus avec un fusil qu’il avait dans sa voiture. Un des membres de la famille, Amir Mahmoud Sh’hadi, s’est vu pointer le canon du fusil sur la poitrine. Ce n’est qu’après un certain laps de temps que la police est arrivée sur place et qu’elle a arrêté l’agresseur, qui a été relâché dès le lendemain.
Il convient de noter que l’agresseur est un voisin de cette famille, et qu’il cherche depuis longtemps à obtenir que les Sh’hadis soient chassés de chez eux. Dans le passé, il les avait déjà menacés.
                               
14. Le ministre irakien des Émigrés a quitté le Liban humilié - La grossière et dangereuse erreur de Beyrouth à l’encontre de Bagdad par Ziyad Makhoul
in L'Orient - Le Jour (quotidien libanais) du vendredi 7 novembre 2003

Que Mohammed Jassem Khodayer soit venu à Beyrouth pour apporter son soutien aux 812 Irakiens réfugiés au Liban et voir dans quelle mesure ils ne menaceraient pas, en cas de retour au bercail, la sécurité de l’Irak ; qu’il se soit déplacé pour juste faire connaissance avec les responsables libanais, leur raconter la situation en son pays, vue par les yeux d’un membre à part entière du Conseil de gouvernement transitoire, ou qu’il soit venu pour évoquer avec les autorités libanaises des sujets bien plus délicats et stratégiques, ne change rien à l’affaire. En claquant toutes les portes officielles – à l’exception de celles, nécessaires certes mais loin d’être suffisantes, du patron de la Sûreté générale – au nez du ministre irakien des Émigrés, rentré humilié à Bagdad, Beyrouth a commis une très grossière erreur.
L’État a d’abord fait montre d’une impolitesse et d’une inhospitalité flagrantes, dont il était finalement, il faut le reconnaître, peu coutumier. Surtout à l’encontre d’un « pays-frère », arabe qui plus est, d’un membre de cette famille pour le respect de laquelle le pouvoir en place s’est toujours pourtant montré, en toutes occasions, d’une intransigeance carrément obtuse. Et ce n’est pas Michel Aoun qui dira le contraire.
L’État a ensuite réaffirmé sa capacité, son habileté et sa rapidité à commettre de très graves erreurs de jugement. Afficher un tel mépris face à un ministre – et au-delà, de tout un gouvernement – dont le pays va bien finir par offrir – et il le fait déjà – un choix phénoménal de chantiers de reconstruction et de possibilités d’investissements... c’est de l’inconscience et de l’immaturité pures. Ou alors, avec 35 milliards de dollars de dette publique, un véritable suicide économique.
L’État a également donné une nouvelle et énième preuve non seulement de son suivisme aveugle, bêtifiant et honteux à l’égard de la Syrie, mais surtout de son enthousiasme, souvent démontré, à payer tous les pots cassés, à dynamiter sa crédibilité internationale, à la place de son tuteur.
Voilà une des premières explications à cette fin de non-recevoir – sous les fallacieux prétextes d’agendas surbookés ou de santé fragile – que les ministres libanais – Obeid, Murr et Farhat – ont été « obligés » d’asséner, en réponse à la toute naturelle demande d’audience formulée par Mohammed Jassem Khodayer. Au lendemain des sévères critiques du président du Conseil de gouvernement transitoire, le Kurde Jalal Talabani, à l’encontre du ministre syrien des Affaires étrangères – « la façon dont l’invitation a été lancée à l’Irak pour la réunion de Damas est provocatrice et insultante », avait-il dit – ; au lendemain de cette campagne menée par Bagdad contre Damas, il était tout naturel pour les Syriens d’y répondre. Mais par le biais de leur pupille libanais, trop souvent utilisé comme bouc-émissaire, tant avec Israël qu’avec les membres de la Ligue arabe. Parce que la Syrie n’a aucun intérêt, surtout en ce moment, à provoquer sciemment une nette cassure dans ses relations avec le binôme Bagdad-Washington.
C’est peut-être d’ailleurs au niveau américain qu’il pourrait y avoir une deuxième explication au scandaleux comportement du Liban. L’ambassadeur US Vincent Battle s’est particulièrement impliqué, mais en vain, pour tenter d’organiser des rencontres entre leur protégé irakien et les ministres libanais. Or – et cela commence à devenir mathématique –, Beyrouth se fait un point d’honneur, depuis quelques jours, à systématiquement dire « non » à Washington. Non à l’interdiction du feuilleton al-Chatat que diffuse al-Manar, non à la condamnation officielle des propos de Walid Joumblatt à propos de Paul Wolfowitz, non à un rapport explicatif du palais Bustros au sujet de l’incident qui avait opposé un convoi diplomatique US à des membres du Hezbollah, etc. Que des bras de fer que la Syrie refuse d’engager avec les États-Unis, mais qu’elle sous-traite sans conditions. À croire que Beyrouth a la capacité ou la force nécessaires pour ce genre de mano a mano.
Il n’empêche, des sources plus ou moins officielles ont laissé entendre hier que le Liban n’avait aucune envie de donner à la visite du ministre irakien une couleur politique. Qui impliquerait de facto la reconnaissance du régime mis en place par Paul Bremer à Bagdad – et auquel Beyrouth refuse, en écho à Damas et aux toutes récentes déclarations de Bouchra Kanafani, la porte-parole du ministère syrien des AE, d’accorder la moindre légitimité. Parce que le Conseil de gouvernement transitoire, arguent le tuteur et surtout son pupille, habitué aux surenchères ultra-complaisantes, n’est pas issu de la libre volonté du peuple irakien.
C’est ubuesque. Comme si le pouvoir en place à Beyrouth était, lui, issu d’une quelconque volonté populaire.
                       
15. Peut-on arrêter Sharon ? par Patrick Seale
in L'intelligent - Jeune Afrique du vendredi 7 novembre 2003

Il est largement reconnu - et ce depuis des décennies - que le Premier ministre israélien Ariel Sharon est un homme dangereux dont la sanglante carrière a fait le symbole du militarisme israélien agressif. En tant que massacreur d'Arabes, Sharon est sans égal. À la poursuite de son rêve d'un « Grand Israël », il a détruit la société palestinienne et causé de terribles dommages à la sécurité, à l'économie et à la réputation de son pays.
Les tensions sont aujourd'hui telles, non seulement dans les Territoires, mais aussi sur les frontières de la Syrie et en Irak, que beaucoup d'observateurs ont le sentiment d'assister au prélude d'un conflit plus vaste. Il y a du pré-1967 dans l'air. Mais les dégâts dont Sharon et ses amis de droite aux États-Unis peuvent être tenus pour responsables s'étendent bien au-delà du Proche-Orient. L'une des conséquences a été une explosion de haine anti-israélienne et antiaméricaine sans précédent dans le monde arabe, au point qu'elle est l'une des principales sources d'instabilité, de violence et de terreur sur la planète. Que peut-on faire pour enrayer cette descente aux enfers ? La pente peut-elle être remontée ? Peut-on arrêter Sharon ?
L'accord de Genève
Une réponse est venue d'un petit groupe de Palestiniens et d'Israéliens courageux qui, travaillant plus ou moins en secret depuis janvier 2001, avec l'aide financière du ministère suisse des Affaires étrangères, a mis au point jusque dans le détail, avec des cartes, le texte d'un accord de paix israélo-palestinien. Connu sous le nom d'accord de Genève, ce document doit être officiellement signé à Genève dans les semaines à venir. Il a déjà été publié dans la presse israélienne et peut être consulté sur le site Web du quotidien Ha'aretz. Un exemplaire a été remis aux ministres égyptien et français des Affaires étrangères et au président d'Israël, Moshe Katsav.
Il est prévu de distribuer ce document de trente pages bien remplies aux deux millions de foyers juifs en Israël et de contacter la population palestinienne via la presse arabe. Pour la première fois depuis trois ans, Israéliens et Palestiniens se voient offrir une solution de rechange pacifique à l'horrible violence dont ils sont les uns et les autres victimes. L'hystérique réponse du gouvernement Sharon à l'accord est une indication de l'importance de la menace qu'il représente pour l'extrême droite israélienne. Se refusant même à en discuter le contenu, les autorités ont cherché à faire passer le projet pour une tentative illégitime de court-circuiter le gouvernement israélien et a invité la communauté internationale à ne pas le prendre en compte. Certains membres du gouvernement ont même demandé que les signataires israéliens de l'accord soient condamnés à mort pour haute trahison !
Comme on le sait, les principaux négociateurs de l'accord sont Yossi Beilin, ancien ministre travailliste israélien et partisan bien connu de la paix, et, du côté palestinien, Yasser Abed Rabbo. Ils se sont assuré le soutien d'une large frange de personnalités de gauche en Israël, comme l'ancien dirigeant du Parti travailliste Amram Mitzna, l'ancien président de la Knesset Avraham Burg, l'écrivain Amos Oz, et un nombre impressionnant de généraux à la retraite. Du côté palestinien, on trouve de jeunes dirigeants du Fatah comme Qadura Farès et Mohamed Urami.
L'accord de Genève a soulevé une vive opposition de la part d'Ehoud Barak, qui cherche à faire un come-back après son désastreux passage au poste de Premier ministre. Par pusillanimité et absence de vision en 1999-2000, il a raté l'occasion de faire la paix avec la Syrie comme avec les Palestiniens. Sa thèse selon laquelle il n'y a personne à qui parler du côté palestinien serait immédiatement invalidée si l'accord de Genève était un succès.
Avec la mort de la feuille de route du Quartet et le honteux refus du président George W. Bush de s'engager dans le conflit israélo-palestinien, l'accord de Genève représente la seule initiative de paix encore valide. Il offre une occasion unique de sortir du cycle actuel de mort et de destruction. Il est essentiel de susciter un mouvement d'opinion international en sa faveur.
Ce que les États arabes doivent faire
Voici quelques suggestions à l'intention des dirigeants arabes, menacés comme leurs concitoyens par la vague de violence qui submerge toute la région.
1. Les États arabes devraient signer une vigoureuse déclaration commune de soutien à l'accord de Genève.
2. Ils devraient, en même temps, relancer le plan de paix du prince Abdallah d'Arabie saoudite, approuvé à l'unanimité au sommet arabe de Beyrouth en mars 2002, mais qui est resté depuis dans un tiroir.
Le plan de paix de Beyrouth proposait à Israël une normalisation avec l'ensemble du monde arabe une fois qu'il se serait retiré sur les frontières d'avant 1967 et aurait autorisé la création d'un État palestinien indépendant. Sur le fond, il est étonnamment semblable à l'accord de Genève.
3. Des délégations des ministres arabes des Affaires étrangères devraient faire une tournée en Europe et dans d'autres capitales mondiales pour recueillir un soutien en faveur du plan de paix de Beyrouth et de l'accord de Genève. En particulier, le Premier ministre britannique Tony Blair, qui déclare être totalement favorable à la solution des deux États, devrait être invité à affirmer publiquement son soutien à l'accord.
4. Les États du Golfe et l'Arabie saoudite devraient créer un important fonds d'indemnisation des réfugiés palestiniens et solliciter des contributions d'autres pays, tels que les États-Unis, les membres de l'Union européenne, la Chine et le Japon.
Un point clé de l'accord de Genève, qu'on trouve aussi, quoique moins explicitement, dans le plan de paix de Beyrouth, est l'échange proposé du « droit au retour » des Palestiniens contre la souveraineté palestinienne sur le Haram el-Sharif (le mont du Temple), ainsi que contre les trois quarts de la Vieille Ville de Jérusalem. Pour la grande majorité des réfugiés palestiniens, renoncer au « droit au retour » n'est concevable qu'en échange d'un dédommagement généreux. D'où la nécessité impérieuse d'un important fonds d'indemnisation, géré dans une totale transparence et disposant d'abondantes ressources internationales.
5. S'ils souhaitent agir sur l'opinion israélienne et américaine, les États arabes seraient bien avisés de faire preuve de compréhension concernant les craintes sécuritaires d'Israël. À cet égard, ils devraient prendre collectivement l'engagement de mettre fin à la violence exercée contre Israël par les groupes extrémistes - à la condition qu'Israël, de son côté, renonce à la violence et accepte des relations de bon voisinage.
6. Enfin, les États arabes devraient se joindre à ceux qui demandent la création d'une force internationale sous les auspices des Nations unies pour surveiller l'application sur le terrain du plan de paix israélo-palestinien.
Shlomo Ben Ami, ancien ministre israélien des Affaires étrangères, a demandé publiquement qu'un mandat international soit exercé sur les Territoires avec l'aide d'une force multinationale. Sa tâche serait de guider l'Autorité palestinienne dans la transition vers un État démocratique, de désarmer les milices, mais aussi de contrôler à la fois l'évacuation des colons juifs hors des Territoires et le reclassement des réfugiés palestiniens.
L'accord de Genève donne aux Arabes une arme stratégique pour défier et défaire les ennemis de la paix.
                   
16. De l’Afrique du Sud à la Palestine par Leila Farsakh
in Le Monde diplomatique du mois de novembre 2003

(Leila Farsakh est chercheuse au Center for International Studies, Massachusetts Institute of Technology (MIT) de Boston.)
Le 4 novembre 2003, huit ans jour pour jour après le meurtre d’Itzhak Rabin, des personnalités  représentatives de la gauche israélienne et des différentes forces palestiniennes – sauf les islamistes – devaient signer, à Genève, un futur accord de paix. Ce document règle toutes les questions en suspens. Un Etat palestinien verra le jour dans les territoires occupés en 1967 (sauf 2,5 % de la Cisjordanie échangés par Israël pour regrouper le gros de ses colonies). Il aura sa capitale à Jérusalem-Est, où il contrôlera la Vieille Ville, à l’exception du quartier juif et du Mur des lamentations. Sauf quelques dizaines de milliers autorisés à revenir en Israël, les réfugiés pourront s’installer dans l’Etat de Palestine. Voilà donc un événement majeur : en pleine escalade guerrière, il démontre que la paix est possible, et que les Israéliens ont un partenaire pour la bâtir. D’autant qu’y sont associés, non seulement des ministres de l’Autorité, mais aussi des représentants du Tanzim de M. Marwan Barghouti. Si le général Ariel Sharon a violemment dénoncé l’accord de Genève, c’est que celui-ci place son gouvernement au pied du mur. Le refuser, c’est poursuivre une fuite en avant meurtrière et suicidaire.
« Cela ressemble beaucoup à ce qui est arrivé aux Noirs de l’Afrique du Sud. J’ai vu l’humiliation des Palestiniens aux points de passage et aux barrages routiers, souffrant comme nous quand de jeunes policiers blancs nous empêchaient de circuler [1]. » Ainsi, l’évêque sud-africain Desmond Tutu, Prix Nobel de la paix, décrivait-il sa visite en Terre sainte. On a souvent établi un parallèle entre l’apartheid sud-africain et la situation israélo-palestinienne, mais sans toujours clairement l’expliciter. Certains facteurs rendent cette comparaison tentante, même si elle ne va pas de soi.
Les deux conflits sont historiquement issus du colonialisme. Les colons blancs pour l’Afrique du Sud, tout comme les pionniers du sionisme, se sont installés dans un pays où vivait déjà un autre peuple. Comme en Afrique du Sud, les colonisateurs de la Palestine vont expulser la population indigène arabe de sa terre, soit les deux tiers des Palestiniens vivant sur le territoire qui deviendra Israël en 1948, s’emparer de leurs terres et de leurs biens et faire longtemps subir à ceux qui restent dans ce qui est désormais défini comme un « Etat juif » une législation ségrégationniste. Cependant, admettre le caractère colonialiste de la naissance d’Israël ne suffit pas pour établir une équivalence avec l’Afrique du Sud de l’apartheid. Le sociologue israélien Gershon Shafir fait remarquer que, si l’enjeu des deux conflits était la maîtrise du sol, l’un et l’autre se sont déroulés dans des conditions historiques et économiques différentes, qui eurent un impact particulier sur leur évolution et sur les rapports entre colons et indigènes [2].
Les nouveaux venus vont en effet réagir différemment à la réalité démographique indigène. En Palestine, le projet sioniste cherche à nier l’existence d’une population indigène non juive vivant sur ce territoire (3], évoquant « un peuple sans terre pour une terre sans peuple ». Il vise à établir une domination démographique juive, en expulsant les Palestiniens tout en faisant obstacle à l’indépendance structurelle de leur économie et surtout de leur main-d’œuvre. Avant 1948, celle-ci ne représentera jamais plus qu’un tiers de l’ensemble des travailleurs employés dans le secteur juif [4] ; à la veille de la guerre de juin 1967, ce pourcentage ne dépasse pas 15 % de la main-d’œuvre d’Israël [5].
La situation en Afrique du Sud était différente. Plutôt que d’expulser les Noirs, les colons blancs cherchaient à les dominer, les incorporant comme citoyens de seconde classe. La population indigène est demeurée largement majoritaire, représentant 75 % de la main-d’œuvre du pays dès le début du vingtième siècle.
C’est en 1948 que la minorité blanche imposera, en Afrique du Sud, le système dit d’apartheid, ensemble de discriminations juridiques, économiques et résidentielles. Au cœur de cette politique figure une ségrégation territoriale, avec création de réserves de main-d’œuvre fixées par les Blancs, espaces géographiquement délimités où les Noirs devaient vivre. Ces espaces représentaient 13 % du territoire sud-africain.
Entre 1951 et 1970, quatre lois importantes seront promulguées [6], grâce auxquelles ces réserves deviendront des bantoustans, où l’on accordait les droits et responsabilités de l’ « autonomie » aux indigènes. Ceux-ci avaient le droit de définir leur politique économique et d’administrer les affaires civiles ainsi que la vie quotidienne, mais ils devaient cogérer avec les colons toutes les questions de sécurité et ne pouvaient revendiquer une politique étrangère autonome. En 1974, une citoyenneté bantoue est créée et, dès 1976, dix bantoustans ont accédé à l’indépendance, leurs populations perdant la nationalité sud-africaine.
La terre sans sa population
En Israël / Palestine aucune structure territoriale de ségrégation ne sera créée – sauf, de 1948 à 1966, quand le gouvernement militaire astreint les Arabes d’Israël à des permis de déplacement, au couvre-feu, aux assignations à résidence, et favorise la colonisation juive à travers la confiscation de leurs terres.
Alors que le régime de l’apartheid voulait la terre avec sa population, les Israéliens en Palestine voulaient la terre sans sa population. Mais cette vision sera sérieusement ébranlée par la guerre de juin 1967, qui va modifier les données démographiques du conflit. Près d’un million de Palestiniens vont rester dans les territoires occupés (Cisjordanie, Gaza et Jérusalem-Est), ce qui représente à l’époque un tiers de la population juive totale.
Bien que le gouvernement israélien ait persévéré dans sa politique de transfert des populations, plus volontaire que forcé, la majorité des Palestiniens choisira de rester. Qu’en faire ? C’est en examinant la réponse apportée à cette question cruciale que l’on pourra comprendre les ressemblances de plus en plus marquées avec l’Afrique du Sud, malgré les différences historiques.
Après la guerre de 1967, Israël va développer ses revendications sur les territoires occupés. Quand la droite remporte les élections de 1977, le gouvernement de Menahem Begin met sur pied une politique complexe, faite d’intégration des territoires et de séparation démographique. Parallèlement, le gouvernement militaire en Cisjordanie et à Gaza accélère l’expropriation des terres palestiniennes et la clôture pour permettre l’installation des colons. Ceux-ci continueront de relever du droit israélien, alors que ce même gouvernement militaire va promulguer une série de lois différentes pour régir les affaires civiles, économiques et juridiques des habitants palestiniens.
Ces décrets ont pour conséquence d’étrangler l’économie palestinienne, tout en aggravant sa dépendance et son intégration à Israël. Entre 1967 et 1990, les frontières entre Israël et les territoires occupés restent ouvertes. Plus d’un tiers de la main-d’œuvre palestinienne travaille alors en Israël et génère un quart du PNB des territoires occupés.
En 1993, on recense 145 colonies et 196 000 colons, dont la moitié vivent dans dix colonies autour de Jérusalem-Est [7] – sans compter les colons de la partie orientale de la ville. Destinés à contrer la poussée démographique palestinienne, le développement exponentiel des colonies et leur répartition à travers tous les territoires jettent les bases d’un éclatement géographique de la Cisjordanie et de Gaza. Nombreux sont les observateurs qui estiment que ce système d’intégration territoriale et de séparation sociétale fait de la politique israélienne une sorte d’apartheid qui ne dit pas son nom [8].
Rapporter le modèle de l’apartheid aux relations israélo-palestiniennes pose cependant problème. D’abord quant à la définition géographique de l’ « apartheid israélien » : celui-ci s’étend-il à tout Israël ou seulement aux territoires occupés ? Le fait est que les Palestiniens vivant à l’intérieur de la ligne verte sont citoyens israéliens, ce qui n’est pas le cas de ceux de la Cisjordanie et de Gaza. Les premiers ne sont ni confinés dans un périmètre, avec interdiction d’en sortir, ni exclus du processus politique israélien – ils votent et sont éligibles, même s’ils subissent certaines discriminations. Les seconds constituent une population sous occupation, en attente d’une solution politique.
« Bantoustanisation » des territoires occupés
La comparaison avec l’apartheid met en lumière une deuxième différence. Le Congrès national africain (ANC), devenu la principale organisation politique indigène, rejeta le séparatisme des Afrikaners, appela à la fin de l’apartheid et à l’instauration d’une démocratie pour tous. L’Organisation de la libération de la Palestine (OLP), elle, adoptera dès 1974 la partition comme solution à même de satisfaire le droit à l’autodétermination du peuple palestinien. Et, en 1993, Israël reconnaîtra en l’OLP son seul interlocuteur légitime et acceptera l’idée d’un partage, les frontières et le statut des territoires palestiniens demeurant en suspens.
La troisième différence tient à l’attitude de la communauté internationale, qui n’a jamais accepté le système de l’apartheid ni la création d’entités étatiques séparées pour les indigènes (en 1967, quand le gouvernement sud-africain voulut faire entrer l’un des dix bantoustans, le Transkei, aux Nations unies, celles-ci refusèrent [9].) Dans le cas de la Palestine, au contraire, l’ONU va préconiser la création d’Etats-nations séparés comme solution au conflit.
Adoptée le 29 novembre 1947, la résolution 181 de l’Assemblée générale des Nations unies, dite plan de partage, prône la coexistence d’un Etat juif et d’un Etat arabe. Et la résolution 242 du Conseil de sécurité, votée le 22 novembre 1967, si elle laisse dans le flou les droits nationaux des Palestiniens, réaffirme que la paix au Proche-Orient passe par la restitution des territoires occupés pendant la guerre et la reconnaissance de tous les Etats de la région. Or le processus d’Oslo sera fondé sur la résolution 242.
Malgré ces différences considérables entre le conflit israélo-palestinien et l’expérience de l’apartheid sud-africain, les événements des dix dernières années les ont paradoxalement rapprochés. En institutionnalisant à la fois la séparation sociétale et l’intégration territoriale, les accords d’Oslo auront effectivement jeté les bases de la « bantoustanisation » des territoires occupés, transformés en réserves de population fragmentées, économiquement non viables et privées de toute souveraineté politique.
Trois mécanismes y ont contribué. Géographiquement, l’application des accords d’Oslo a conduit à une fragmentation territoriale de la Cisjordanie et de la bande de Gaza. Alors que l’Autorité palestinienne était censée diriger la quasi-totalité de la Cisjordanie dès 1996, elle n’en contrôlait en fait que 17,2 % en juillet 2000 (zone A [10]). On peut penser que l’opposition au processus d’Oslo – les attentats-suicides et leurs répercussions en Israël, mais aussi l’assassinat d’Itzhak Rabin et l’élection de M. Benyamin Netanyahou – a contribué à retarder le redéploiement israélien. A la veille de l’Intifada Al-Aqsa, la juridiction palestinienne restait limitée : 59 % de la Cisjordanie et 30 % de la bande de Gaza lui échappaient encore.
Les colonies constituent une autre clé de la « bantoustanisation » des territoires palestiniens. Les zones C, aux mains des seuls Israéliens, divisent la Cisjordanie en trois grands secteurs, découpés à leur tour en petites réserves de population par les quatre grands blocs de colonies (Jérusalem, Ariel / Shomron, Gush Etzion, Benjamin / vallée du Jourdain) et les routes de contournement. Entre 1993 et 2000, la population des colonies (Jérusalem – Est compris) aura doublé, pour atteindre le chiffre de 410 000, soit environ 15 % de la population des territoires. Et Israël aura construit plus de 400 kilomètres de routes de contournement et 72 colonies nouvelles (11].
Juridiquement, les accords d’Oslo ont rapproché le statut des Palestiniens de celui des habitants des bantoustans.
En premier lieu, ces accords, comme les résolutions concernant les bantoustans d’Afrique du Sud, ne font pas de la population autochtone l’unique source d’autorité de l’entité autonome. Le président et le Conseil législatif palestiniens, démocratiquement élus, ne jouissent que d’attributions limitées : c’est le gouvernement militaire israélien, jamais dissous, qui leur « délègue » toutes les juridictions (territoriale, civile, juridique) qu’ils sont censés exercer. Si le Conseil et l’Autorité nationale exercent une juridiction essentiellement civile ou fonctionnelle sur 93 % de la population palestinienne, leur juridiction territoriale provisoire porte sur moins de 19 % de la Cisjordanie.
Ensuite, les accords d’Oslo ne stipulent pas que le droit international a priorité sur le droit israélien. Ils ne mettent pas fin à l’occupation et ne mentionnent pas la quatrième convention de Genève, pas plus que la résolution 181 de l’Assemblée générale de l’ONU, qui fonde la légitimité internationale d’un Etat arabe sur les terres de la Palestine  historique. Ils ne font référence qu’à la résolution 242 du Conseil de sécurité (et à la 338, qui la réaffirme en 1973), l’une et l’autre ne précisant ni le droit des Palestiniens à un Etat, ni l’étendue des territoires occupés, ni le tracé des frontières.
Troisièmement, les accords d’Oslo privilégient l’établissement d’une étroite collaboration entre les parties palestinienne et israélienne plutôt que leur séparation. Des comités paritaires devaient être créés dans tous les domaines, mais surtout dans celui de la sécurité, demeurée entièrement sous contrôle israélien. On exigeait le même type de coopération sécuritaire des bantoustans de l’Afrique du Sud.
Dernier trait caractéristique d’une « bantoustanisation », le traitement de la population palestinienne : l’institutionnalisation du système de permis de circulation et des fermetures de frontière, introduits pour la première fois en 1990, va placer les Palestiniens dans une situation semblable à celle que connurent les Noirs sud-africains sous le régime du laissez-passer. Avec, là encore, une différence : ce régime entendait contrôler les flux de main-d’œuvre bon marché pour l’économie sud-africaine, alors qu’en Palestine les permis obéissent essentiellement à des impératifs de sécurité – mais les conséquences seront identiques. Avec le schéma de contrôle territorial israélien, le système des permis conduit déjà – de fait – à la transformation de la Cisjordanie et de la bande de Gaza en réserves non viables et fragmentées pour des populations emprisonnées.
Face à l’Intifada, qui commence fin septembre 2000, Israël va développer davantage le système des permis et la fragmentation du territoire. Ainsi, en avril 2002, il décide de découper la Cisjordanie et Gaza en huit zones principales, hors desquelles les Palestiniens ne pourront vivre sans permis [12]. Entre-temps, l’expansion des colonies continue sans relâche : entre septembre 2000 et janvier 2003, plus de 2 500 maisons et 52 nouvelles implantations s’ajoutent aux précédentes [13]. Et la construction d’un mur de séparation d’au moins 600 kilomètres entre Israël et la Cisjordanie marque une frontière unilatéralement définie par Israël, qui empiète sur celle de 1967 et isole encore plus les zones palestiniennes les unes des autres [14].
Hélas, la « feuille de route » du Quartet (Etats-Unis, Union européenne, Russie, Nations unies) ne renversera pas la logique des accords d’Oslo. Elle met l’accent sur les nécessaires avancées de la coopération sécuritaire et de la construction des institutions palestiniennes, légitimant l’intervention d’Israël dans les affaires palestiniennes. Et, si elle préconise l’établissement d’un Etat palestinien dans des frontières provisoires dès 2005, elle ne précise pas comment un tel Etat pourra être souverain sans que ses frontières définitives soient fixées. Le texte demeure très vague aussi sur trois autres questions vitales : l’avenir des colonies, le sort de Jérusalem et celui des réfugiés.
Le nouveau plan de paix a cependant le mérite de préconiser un rôle pour la communauté internationale, ce que ne prévoyaient pas les accords d’Oslo. Sur le papier tout au moins, il fait du Quartet le gardien de l’accord et confère aux Etats-Unis la responsabilité de suivre de près la coopération entre les deux parties. Mais les Quatre n’ont pas le pouvoir d’imposer leurs arbitrages ni leurs contrôles. Si bien que la principale nouveauté de la « feuille de route » est d’apporter l’aval de la communauté internationale à la transformation de fait des territoires en bantoustans : n’accepte-t-elle pas la création d’un Etat palestinien aux frontières provisoires, sans démantèlement des colonies ni capitale à Jérusalem – Est, le gouvernement israélien restant libre de redéfinir à sa guise les frontières de 1967…
Malgré les différences historiques, l’évolution du conflit le rapproche donc de plus en plus du modèle de l’apartheid sud-africain. Cette évolution est-elle temporaire ou durable, sachant que ces « bantoustans » palestiniens ne sont ni aussi clairement définis ni aussi étendus que ceux naguère réservés aux Noirs, et qu’Israël a moins besoin de cette main-d’œuvre, remplacée depuis plus de dix ans par quelque 250 000 travailleurs asiatiques, africains ou est-européens ? Si elle devait se poursuivre, elle mettrait en tout cas en péril la perspective d’une solution par la coexistence de deux Etats. Une option dont la disparition condamnerait Israël à devenir à la fois un Etat d’apartheid et binational, à moins qu’il ne se lance dans un « transfert » massif de population…
- NOTES :
[1] : The Guardian, Londres, 29 avril 2002.
[2] : Gerson Shafir, Land, Labour and the Origins of the Israeli-Palestinian Conflict, 1883-1914, Cambridge University Press, Cambridge, 1989.
[3] : L’idée de l’expulsion ou de transfert de la population indigène est inhérente au sionisme depuis les débuts. Cf. Nur Masalha, Expulsion of the Palestinians : the Concept of « Transfer » in Zionist Political Thought, 1882-1984, Institute of Palestinian Studies, Washington DC, 191.
[4] : Baruch Kimmerling, Zionism and Economy, Schenkmen, Cambridge Massachusetts, 1983, p. 51.
[5] : Statistical Abstract of Israel, Office central israélien de statistiques, Jérusalem, 2002, table 16.15.
[6] : Il s’agit du Bantu Authorities Act de 1951, du Promotion of Bantu Self-Government Act de 1959, et du Bantu Homeland Citizenship de 1970, amendé en 1974.
[7] : Report on Israeli Settlements in the Occupied Territories, Fondation pour la paix au Moyen-Orient (FMEP), Washington DC, 2001, vol 11/6, table I.
[8] : Uri Davis, Israel : An Apartheid State, London, Zed Books, 1987 ; Roane Carey (éd.), The New Intifada : Resisting Israel’s Apartheid, Verso, Londres, 2001 ; Marwan Bishara, Israël / Palestine : Peace or Apartheid, Zd Books, Londres, 2001 (en français Palestine-Israël : la paix ou l’apartheid, La Découverte, Paris, 2002) ; Law (The Palestinian Society for the Protection of Human Rights and Environment), Apartheid, Bantustans and Cantons : The ABC of the Oslo Accords, 1998 (
www.lawsociety.org/apartheid/palngo.html)
 [9] : Alexander Kerby, South Africa’s Bantustans : What Independence for the Transkei, World Council of Churches, Genève, 1987.
[10 : Selon les accords d’Oslo II, fin septembre 1995, la zone A (3 % de la Cisjordanie) relevait de l’autonomie palestinienne ; la zone B (27 %) était gérée en commun ; et la zone C (70 %) dépendait des seuls Israéliens. En juillet 2000, les proportions sont respectivement de 17,2 %, 26,8 % et la zone C 59 %. Voir la carte publiée dans l’Atlas du Monde diplomatique en janvier 2003.
[11] : Report on Israeli Settlements in the Occupied Territories, FMEP, 2003, vol 13/2.
[12] : The Israeli Security Zones make up 45,25 % of the West Bank, including 158 Israeli Colonies, Applied Research Institute Jerusalem, 2002 (
www.poica.org/casestudies/security-zones)
 [13] : Report on Israeli Settlements in the Occupied Territories, FMEP, 2002, vol 12/2.
[14] : Jusqu’ici, 140 km de mur ont été construits, coupant de leurs terres et des autres parties de la Palestine 14 000 familles (Betselem, 2003). La nouvelle tranche, décidée par le gouvernement israélien le 1er octobre, ira jusqu’au sud de la Cisjordanie et fera 450 km. Lire Gadi Algazi, « Un mur pour enfermer les Palestiniens », Le Monde diplomatique, juillet 2002.
                                                       
17. Enfants qui meurent, enfants qui tuent par Leah Tsemel
in Le Monde diplomatique du mois de novembre 2003

(Leah Tsemel  est une avocate israélienne, Jérusalem. Cet article est tiré de l’intervention de l’auteur au colloque organisé par la Fondation Giorgio Cini sur le thème « Enfance et droits humains », à Venise, le 20 septembre 2003.)
Mes parents ont quitté l’Europe juste avant le génocide, dans lequel a péri la plus grande partie de ma famille, pour venir dans cette région qui s’appelait alors la Palestine – et que nous nommons Israël – m’offrir une vie meilleure et la sécurité d’un Etat. Près de soixante ans après, je ne puis pas dire qu’ils aient réussi, bien au contraire. Tous ceux qui voulaient bâtir l’Etat d’Israël ne semblent pas avoir compris qu’on ne saurait ériger un nouveau futur sur un socle d’oppression. Voilà plus de trente ans que je défends des Palestiniens devant les tribunaux israéliens, et je n’ai toujours pas réussi, malgré mes efforts acharnés, à faire comprendre aux juges cette vérité élémentaire. La situation ne cesse de se détériorer et, l’an dernier, pour en pas en avant, j’ai dû reculer de deux.
L’écrivain David Grossman parle du « recyclage » linguistique. « Occupation » s’est transformée en « libération », « colonisation » en « implantation pacifique », « assassinat » en « ciblage »… A cette tentative de dissimulation du forfait répond, chez les Palestiniens, une radicalisation du langage. Naguère, ceux qui venaient me consulter à Jérusalem parlaient de « soldats » ou de « colons », mais maintenant ils n’emploient plus ces mots : ils disent carrément Elyahud (les juifs) : « Les juifs m’ont confisqué ma carte d’identité », « les juifs m’ont frappé », « les juifs ont détruit… » Que l’Etat d’Israël devienne ainsi le représentant de tous les juifs du monde me terrifie, car tous les juifs vont se voir accoler l’image de soldats, de policiers et de colons…
L’enfant palestinien qui parle d’Elyahud pour désigner les gens en uniforme va embrasser le fanatisme. Mais un fanatisme du même type – religieux – se renforce du côté juif. Sur les murs de nos villes, on peut lire en hébreu : « Les Arabes dehors » ou « Mort aux Arabes ». D’ailleurs, notre gouvernement débat ouvertement du sort de M. Yasser Arafat, le président élu des Palestiniens : allons-nous le tuer, ou le déporter, ou appeler à l’élection d’un autre président assez faible pour que nous obtenions de lui ce que nous voulons ?
Les principales victimes de l’occupation et de l’oppression sont naturellement, des deux côtés, les enfants. Les lois promulguées avant 1948, en vigueur sous le mandat britannique, existent encore. Elles permettent à toute puissance occupante d’imposer des châtiments collectifs.
J’ai perdu récemment un procès. J’avais tenté de faire opposition à la destruction de la maison d’un jeune Palestinien qui s’était suicidé à la bombe près d’un camp militaire, tuant huit personnes. La loi mandataire (britannique) veut que la maison de l’auteur d’un attentat soit détruite. Lorsque j’ai appelé la famille pour lui dire que j’avais perdu le procès, la mère de ce jeune homme m’a dit : « Je savais qu’il n’y avait pas d’espoir, et cela fait des heures que nous avons évacué la maison. »
Souvent, l’armée procède sans préavis. « Vous avez cinq minutes pour évacuer les lieux. » Tout est cassé, y compris les meubles et les effets personnels. J’ai parfois demandé à ces familles ce qu’elles emportaient lorsqu’elles disposaient de quelques minutes. Réponse : « Les diplômes scolaires des enfants ». « Quel optimisme ! », me suis-je réjouie.
Les enfants, ou les frères et les sœurs, des terroristes palestiniens seront parqués à vie. Sous l’occupation militaire, ils n’auront pas le droit de quitter le pays, de se déplacer d’une ville à l’autre, d’aller faire leurs études ailleurs, de rendre visite à leurs proches en prison. Ces dernières années, les familles de terroristes présumés sont déplacées par mesure punitive. Depuis le début de la nouvelle Intifada, toutes les villes et tous les villages palestiniens sont soumis à des bouclages et à des couvre-feux complets, et les tanks israéliens rentrent et sortent de ces localités comme ils l’entendent. Les enfants palestiniens se livrent à un sport inédit : escalader les collines et tous les obstacles dressés par Israël pour empêcher le passage d’un lieu à un autre. Si cette discipline existait aux Jeux olympiques, les Palestiniens auraient la médaille d’or…
M. Ariel Sharon érige entre Israël et la Palestine une « clôture de sécurité, qui ne correspond pas au tracé des frontières de 1967. Il s’agit d’un mur visant à la fois à créer une forme d’apartheid entre les populations juive et palestinienne, en isolant les Palestiniens, et à placer les terres palestiniennes non encore confisquées par les colonies juives sous le contrôle de l’Etat d’Israël.
Si le spectacle de ces mères escaladant murs et barrières prête à rire, les incidents tragiques se multiplient : récemment, de jeunes soldats israéliens ont empêché une jeune Palestinienne sur le point d’accoucher de passer à un barrage, provoquant la mort du bébé. L’oppression et l’humiliation pèsent de plus en plus lourd. Pour faire soigner son enfant, un père habitant un village près de Ramallah devra marcher des heures avant d’atteindre un hôpital. Et quelle humiliation va subir de patriarche, aux yeux des siens, lorsqu’il devra supplier les soldats, aux barrages, de le laisser passer ? Quelle image de leurs parents auront les enfants ?
Sans parler de l’assassinat de cet enfant de 10 ans tué, près d’un barrage à la sortie de Jérusalem, par un soldat auquel il avait lancé une pierre ; ni de la bombe d’une tonne larguée par un avion israélien sur Gaza, et qui a tué seize enfants… Le petit Mohammad Al-Dura, mort dans les bras de son père il y a trois ans, n’est pas seulement un symbole, mais une expérience quotidienne.
Cette vaste tragédie tien en partie à la similitude entre les deux nations. A un ami européen qui me demandait comment les soldats pouvaient différencier les juifs des Arabes alors que tout le monde se ressemble, j’ai répondu ce que j’ai entendu dire : « Le soldat regarde la personne droit dans les yeux, et si celle-ci a les yeux d’un juif, à coup sûr elle est arabe. »
L’autre jour, à la frontière entre Jérusalem-Est et Jérusalem-Ouest, j’ai vu 150 Palestiniens d’un certain âge rassemblés dans un jardin. Ils venaient de Cisjordanie et n’avaient pas de permis. Sûre – comme femme, blanche, juive et avocate – de pouvoir tout régler, j’ai essayé d’intervenir. Les soldats avaient confisqué les batteries de leurs téléphones portables et leur ont intimé l’ordre de ne pas parler. Ils sont demeurés silencieux, et je me suis soudain sentie stupide, car ils comprenaient la situation bien mieux que moi : ils savaient qu’il leur coûterait cher de me répondre et que mon intervention… ne servirait à rien. L’arbitraire pèse bien plus lourd que le système juridique que je représente. J’ai pensé à Primo Levi, en me disant qu’il devait être heureux de ne pas avoir vécu le moment où d’autres seraient opprimés par des juifs.
Golda Meir affirmait, suscitant un tollé justifié, que la démographie galopante des Palestiniens lui donnait des cauchemars. Le 29 août, la Knesset a adopté un projet de loi prévoyant qu’en cas de « mariage entre un Israélien et une Palestinienne des territoires occupés, l’épouse n’aura pas le droit de venir en Israël, et tout enfant qui naîtra de cette union et qui ne sera pas inscrit la première année de sa naissance ne figurera pas dans le registre israélien ». Nous tentons de lutter de toutes nos forces contre cette politique de différenciation, osons le mot : raciste.
Comment ne pas évoquer les auteurs d’attentats-suicides ? Ce sont des enfants. Je connais ceux qui ne sont pas morts, et je connais ceux qui sont morts. Ne nous y trompons pas : ils ne choisissent pas la mort pour les soixante-dix vierges qu’on leur promettrait une fois devenus shahid, ni parce qu’on leur aurait lavé le cerveau. Si ces jeunes de toutes catégories se portent volontaires pour mourir, c’est parce qu’ils éprouvent un immense désespoir : ils ont le sentiment d’avoir très peu à perdre et quelque gloire à gagner. Que dire d’une société – comme la palestinienne – qui produit des enfants prêts à mourir ou qui – comme la nôtre – sécrète un groupe clandestin de colons capables de piéger une voiture près d’une école de fillettes palestiniennes à Jérusalem ?
Tuer les enfants, c’est une obsession ! Depuis la dernière Intifada, 700 Palestiniens et 100 Israéliens de moins de 16 ans ont perdu la vie. Au cours des trois dernières années, l’armée et les colons israéliens ont tué 382 enfants palestiniens, et 79 enfants juifs sont morts. Etre un enfant israélien en Israël relève donc du cauchemar. Vous avez peur de prendre le bus, d’aller au marché ou chez un copain ; avant d’entrer où que ce soit, des gardes vous fouillent. Et il y a cet amalgame malsain, contre lequel je m’élève, entre le souvenir du génocide (« nous avons toujours été des victimes ») et la nouvelle « victimologie » israélienne (« nous sommes des victimes car les Palestiniens nous tuent »).
Comparaison inacceptable : dans le passé, nous avons été des victimes, mais actuellement, c’est nous qui victimisons les autres. Après trente-six ans d’occupation, une deuxième génération de colons dans les territoires occupés parle au nom de la Bible : « Comment peut-on nous déraciner de notre nouvelle patrie ? » Juste après 1967, les jeunes soldats s’interrogeaient : « Avons-nous le droit de conquérir les terres d’un autre peuple ? » Désormais, on ne se pose pratiquement plus de questions. Tous les jeunes soldats sont contaminés. Pas un seul qui n’ait été posté à un barrage, pas un seul qui n’ait pas réveillé au moins une fois une famille en pleine nuit pour arrêter quelqu’un.
Une petite minorité, dont les rangs grandissent peu à peu, refusent de faire leur service militaire dans les territoires occupés. De plus en plus d’Israéliens se disent : « Je ne veux pas m’impliquer là-dedans. » Un autre espoir vient de ces héroïques parents palestiniens qui, malgré l’occupation, n’enseignent pas la haine à leurs enfants, refusent de considérer tous les Israéliens comme des démons, parlent des différences d’opinions entre eux, apprennent à leurs enfants à juger les gens en fonction de leurs actes et non de leur origine.
A ces mères palestiniennes, je voudrais dire : « Soyez patientes, une reconnaissance mutuelle est possible, nous avons déjà obtenu celle de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP). Actuellement, il existe dans le monde – ce n’était pas le cas en 1967 – un consensus favorable à la création d’un Etat palestinien aux côtés d’Israël. Préparez la prochaine génération, car le futur est porteur d’une promesse.
Aux mères israéliennes qui se battent pour la paix, je voudrais rappeler qu’elles ont déjà gagné une guerre et qu’elles doivent continuer. L’organisation des Quatre mères, en référence aux mères de la Bible, a déjà obtenu que l’armée israélienne se retire du Liban. Une autre organisation, celle des Femmes en noir, manifeste toutes les semaines depuis vingt ans contre l’occupation. Je leur dis : « Vous allez gagner ».
Il existe également un groupe de femmes israéliennes qui surveille les barrages où des atrocités sont commises. Elles s’y rendent et se tiennent près des soldats, leurs fils, en leur disant, de même qu’aux Palestiniens : « Nous n’avons rien à voir avec ce racisme, nous sommes contre. »
Nourit Peled, dont le père était un général haut placé, milite pour la paix. Sa fille, une adolescente, a été tuée à Jérusalem lors d’un attentat-suicide commis par un adolescent palestinien [1]. Choisissant la paix plutôt que la haine, elle a créé une organisation qui rassemble des parents palestiniens et israéliens victimes du terrorisme et qui lutte pour la paix.
Lorsqu’elle a reçu le prix Sakharov en 2001, elle a évoqué devant le Parlement européen Abraham, père mythologique d’Isaac et d’Ismaël, symbole des deux nations. Abraham voulait sacrifier Isaac pour prouver à Dieu toute sa confiance, mais Dieu lui interdit de sacrifier son fil et lui donna une chèvre à la place. Elle conclut : « Si nous ne voulons pas que notre planète devienne le royaume des enfants morts, nous devons élever la voix, notre voix de mères, et faire taire toutes les autres. Nous devons faire en sorte que tout le monde entende la voix de Dieu disant à Abraham : « Ne lève pas la main sur l’enfant… » »
- NOTE :
[1] : Lire Nourit Peled-Elhanan, « Bibi qu’as-tu fait ? », Le Monde diplomatique, octobre 1997.
                                       
18. Les gens et la politique - Alibis et berceuses par Akiva Eldar
in Ha'Aretz (quotidien israélien) du jeudi 6 novembre 2003
[traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier]

Le chef d’état-major de l’armée israélienne, Moshe Ya’alon, a montré à l’échelon politique de quelle manière un simple titre dans la presse peut faire passer d’un coup d’un seul quelqu’un de la case « solution » à la case « problème ». Ce même Ya’alon, qui avait fait la promesse que l’année 2003 serait l’ « année décisive », a compris que même la grosse Bertha de Tsahal ne détient pas la solution au problème de l’occupation. Ses aides disent qu’il est parvenu à la conclusion que s’il continuait à se tenir à carreau politiquement, il entrerait dans l’histoire comme le premier chef d’état-major à se faire sauter avec une ceinture d’explosifs. Finalement, les évaluations des services de renseignement militaire l’ont persuadé que se débarrasser d’Arafat ne ferait qu’aggraver le problème et éloigner la solution.
Ya’alon a tiré le tapis de sous les pieds de son ministre, Shaul Mofaz, un grand partisan de l’élimination d’Arafat, en dénonçant l’échec de la politique du ministre de la défense. Les critiques de Ya’alon sur la manière dont Israël a fait échouer un premier ministre jugé trop obéissant vis-à-vis d’Arafat a été une erreur de jugement, qui a fini par rendre l’assassinat d’Arafat impossible. Résultat : le gouvernement israélien n’a d’autre choix que d’accueillir à bras ouverts Ahmed Qureï (Abu Ala), un premier ministre palestinien non moins lige vis-à-vis d’Arafat que ne l’était Mahmoud Abbas.
Mais, à part l’accueil poli, Sharon et Mofaz sont en train de proposer à Abu Ala exactement le même marché que celui qu’ils avaient offert à Abou Mazen. Démanteler les organisations terroristes (sic, ndt), arrêter des hommes recherchés et collecter les armes illégales. Et que reçoivent, en retour, les Palestinien ? L’arrêt des assassinats programmés durant une quinzaine de jours ? Peanuts ! Le démantèlement d’avant-postes ? Pas question ! Le gel des colonies ? Ne les faites pas rire. D’après l’entourage de Qureï, il n’y a aucune chance qu’il accepte le marché. Il a vu ce qui est arrivé à un premier ministre qui pensait que si les Israéliens et les Américains l’aimaient bien, cela lui permettrait de contrôler plus facilement le Hamas et le Tanzim.
Sur les plans politique et militaire, les gens sont déjà en train de préparer un alibi pour la vague de terreur à venir, avant même que Qureï n’annonce quelle sera sa politique générale et sécuritaire. Ils doivent expliquer aux Israéliens que si le coupable est Arafat, alors pourquoi ne l’élimine-t-on pas ? Si l’occupation est le problème, ils ont à faire face aux récriminations de Washington au sujet des avant-postes, du mur et des checkpoints. Aussi, le salut vient du nord. Dans le dialogue stratégique noué la semaine dernière avec les représentants américains à Tel Aviv, des officiers israéliens ont montré du doigt la Syrie, dans laquelle ils ont vu l’élément clé derrière la dernière flambée de violences. Les pistes de certains des kamikazes ont conduit jusqu’à des banques, en Syrie et au Liban.
Saddam et Oussama étant portés aux abonnés absents, Bashar al-Assad est devenu le nouveau croquemitaine en vogue à Washington. L’administration américaine n’a rien tenté afin de bloquer une initiative sénatoriale dirigée contre la Syrie. En réalité, elle s’en est même frotté les mains.
Et le lobby anti-syrien à Washington a été récemment regonflé à bloc quand le vice-président Dick Cheney, exécutant en chef de la politique étrangère américaine, est allé cueillir le néoconservateur – qui est aussi juif (ce qui ne gâche rien, ndt) – David Wurmser, un associé de Richard Perle au Pentagone, qui entretient des relations suivies avec Israël, et il l’a nommé dans l’équipe des managers de son cabinet. Wurmser est le type qui a écrit, en 1998, « qu’Israël n’a jamais fait payer à la Syrie son terrorisme », parce qu’attaquer la Syrie aurait pu être considéré comme un aveu que la paix sponsorisée par les Etats-Unis était une vaste fumisterie. Après tout, Wurmser ne pense-t-il pas que les accords d’Oslo furent « une reddition israélienne inconditionnelle », le résultat d’un « repli stratégique » consécutif à la guerre de 1982 » ?
Un massacre d’oliviers
Le brigadier général Ephraim Sneh, qui commandait le district militaire du sud Liban au début des années 1980 et présidait à l’Administration civile ( !) en Judée et Samarie [= la Cisjordanie en novlangue israélienne, ndt] juste avant le déclenchement de la première Intifada, et qui devint ensuite vice-ministre de la Défense, a eu récemment l’occasion de voir de près les iniquités de l’occupation. En tant que député travailliste à la Knesset, il s’est rendu dans le village d’Inabus, en Samarie, en début de semaine. Au retour, il a déclaré qu’il n’avait jamais été aussi choqué et jamais il n’avait ressenti une telle honte que lorsqu’il vit les centaines d’oliviers de Fawzi Hussein abattus : les troncs avaient été sciés. La semaine dernière, j’ai relaté dans cette même tribune de quelle manière des colons avaient scié des oliviers millénaires dans les oliveraies des villages d’El Sawiyyé et d’Inabus. Cette semaine, Sneh a cette horreur par lui-même.
Avant de se rendre dans les vergers, il a rencontré le vice commandant de la division stationnée dans la région, qui a expliqué fièrement à l’ancien général et député en place comment l’armée protège de manière quotidienne les paysans palestiniens du coin des menées des colons juifs – comme s’il était tout à fait naturel que le gouvernement envoie ses meilleurs petits gars, et pourquoi pas rappelle des réservistes ( ?) afin de protéger le gagne-pain des gens contre les longs bras malfaisants de voyous juifs.
Mais, une fois dans les oliveraies, même l’officier ne parvenait pas à croire ce que ses yeux, pourtant, voyaient. Des dizaines d’arbres supplémentaires avaient été sciés, en plus des centaines déjà détruits durant l’été. Apparemment, quelqu’un, quelque part, avait dit aux colons que l’armée arrivait, et ils ont opéré leur méfait en toute hâte. Sneh  a promis à Hussein qu’il n’aurait de cesse que le ministre de la Défense lui accorde un dédommagement pour ses oliviers détruits. Il n’aura de cesse, non plus, promet-il, que la Knesset inscrive ce scandale à son ordre du jour.
Hussein ne croit pas beaucoup aux promesses israéliennes. Il conserve les dépositions de sa plainte à la police, en janvier 2001, lorsque 55 de ses arbres avaient été détruits. D’après les colons du coin, ces arbres auraient tous été abattus afin de libérer le passage de « routes de sécurité » en direction d’avant-postes dans la région. Des « éléments de sécurité », comme dit le Ministère de la Défense.
Dans le dernier rapport du Contrôleur financier de l’Etat, le conseiller du ministre de la Défense pour les questions des colonies indique que « la politique du commandement central consiste à garantir la sécurité des résidents juifs dans ceux des points de peuplement qui sont en cours de légalisation. » C’est, dit en novlangue bureaucratique, unes des ruses les plus vicieuses utilisées pour rendre légaux les avant-postes illégaux : présenter des « éléments de sécurité » est l’un des critères de base pour décrocher le statut d’implantation définitive. D’abord, vous coupez les arbres fruitiers – privant ainsi les Palestiniens d’une de leurs principales sources de revenus – après quoi vous tracez une « route de sécurité » : voilà comment on prépare une nouvelle colonie, protégée de toute évacuation, à la « croissance naturelle »…
Des chants pour Rabin
Le 4 novembre 1995, Bat Chen Shahak, quatorze ans, de Tel Monde, écrivit un poème en mémoire du Premier ministre (assassiné), qu’elle envoya à sa veuve, Léah : « Trois balles, et puis tout est fini : désormais, on parle de lui au passé », disait ce poème.
Six mois plus tard, le jour de son quinzième anniversaire, Bat Chen a été tuée dans un attentat perpétré au Centre (commercial) Dizengoff.
Ses parents, Ayelet et Zvi, jurèrent qu’ils ne laisseraient ni le terrorisme ni l’occupation tuer l’espoir. Ils se joignirent au Cercle Yitzhak Frankenthal des Parents Eprouvés, et ils allèrent rencontrer les parents endeuillés de l’autre côté. Passant d’une école à l’autre, ils finirent par visiter toutes les écoles, juives et arabe, d’un bout à l’autre du pays.
Des rencontres similaires se produisent, de l’autre côté, et quand c’est possible, des parents palestiniens endeuillés par la perte d’un enfant viennent en Israël. En retournant la force de la douleur, Ayelet, Zvi et leurs partenaires israéliens et palestiniens, tels Yaacov Grossman, Boaz Kitai, Rami Elhanan et Razi Brijit, qui a perdu deux frères, s’adressent aux cœurs et aux esprits des jeunes, israéliens et palestiniens.
Beaucoup d’enseignants les remercient de se rendre dans des endroits où ils n’osent pas aller. D’autres protestent contre leur discours, qu’ils jugent trop « politique ». Ainsi, M. Elhanan dit qu’il n’y a aucune différence entre le terroriste qui a tué sa fille Smadar sur l’avenue Ben Yehuda de Jérusalem et le soldat israélien qui bloque une femme enceinte sur le point d’accoucher à un checkpoint sur la route de Ramallah. Il affirme que Menachem Begin et Yitzhak Shamir avaient du sang sur les mains, et qu’afin de permettre qu’encore plus de sang ne soit versé, ceux qui ont planifié l’assassinat de Smadar, la petite-fille du major général à la retraite de l’armée israélienne Matti Peled, doivent être libérés, eux aussi.
On perçoit un reflet de l’humeur de la génération des « jeunes allumeurs de veilleuses », comme Bat Chen Shahak, dans les questionnaires que relèvent ces parents dans des lieux comme Netanya, les villes de la plaine côtière du Sharon et Ra’anana. « La rencontre a changé ma manière de voir les choses », a ainsi écrit un adolescent. « Avant, je n’avais pas conscience du fait que les Arabes souffrent comme nous et qu’ils ont aussi de nombreuses victimes. La plupart des jeunes que je connais ne sont pas intéressés par la vie en bonne intelligence. Ils parlent tout le temps de guerre. De tuer les Arabes. Notre rencontre émet le message que la guerre ne mènera nulle part, et qu’il faut prendre les choses en mains et arrêter tout ça. » « Avant la rencontre, j’avais des sentiments du genre « Les Arabes, à mort ! », a écrit un autre jeune. « A dire vrai, c’est toujours ce que je pense, mais après cette rencontre, je veut seulement la mort de ceux qui font du mal aux juifs. » Mais il y a aussi ceux qui n’ont pas changé. « Barak était prêt à tout leur donner, jusqu’à la moitié de Jérusalem ! », écrit un élève. « Mais même là, ils n’ont pas voulu la paix. La seule solution, c’est la G-U-E-R-R-E».
                               
19. Sniper riposte à Sarkozy - Faute de recevoir des "excuses publiques", les rappeurs menacent d'une plainte en diffamation le ministre de l'Intérieur qui avait jugé leurs textes "antisémites, racistes et injurieux" par Philippe Mathon
sur le portail Bouygues Telecom mis en ligne le mercredi 5 novembre 2003
 
Le hall d'entrée du cabinet d'avocat est trop étroit pour accueillir les va-et-vient incessants de Ben, le manager de Sniper. L'homme s'agite au téléphone. A son correspondant, il balbutie d'un ton haché : "Je ne comprends pas pourquoi il dit ça. Maintenant, il va falloir qu'il prouve ce qu'il dit". Le "il", c'est Nicolas Sarkozy qui a annoncé, mercredi à l'Assemblée nationale, qu'il porterait plainte contre les textes de chansons ou de rap "racistes et antisémites". Le ministre de l'Intérieur répondait à une question d'une députée UMP de Meurthe-et-Moselle qui s'inquiétait de la tenue prochaine d'un concert de Sniper dans son département. L'affaire n'a pas tardé à produire son premier effet : les responsables de la discothèque où le groupe devait se produire ont décidé d'annuler le concert "pour ne pas troubler l'ordre public". Une décision prise "sans aucune pression", ajoutent-t-il comme pour faire taire les mauvaises langues. Les Sniper, un des groupes de rap les plus populaires de l'Hexagone (plus de 500.000 ventes en deux albums) seront finalement remplacés par le plus consensuel Doc Gyneco.
Jeudi, les rappeurs sont donc restés à Paris. Mais, une fois n'est pas coutume, ils ont passé la journée loin des studios d'enregistrement ou de leur banlieue "du 93 et du 95" . C'est dans le cabinet de leur avocat que tf1.fr a pu les rencontrer. Une entrevue informelle d'une vingtaine de minutes. Mais pas d'enregistrement de la conversation ni de déclaration publique. "Ils ne veulent pas être manipulés par les médias", souffle leur avocat, maître Dominique Tricaud. Lors de l'entretien, les quatre Snipper (El Tunisiano, Black Renega, Aketo et le scratcheur DJ Boudj, âgés de 23 à 25 ans) et leur manager se sont déclarés "choqués" par les déclarations du ministre. "Nous traiter d'antisémites, c'est dingue ! Notre manager est juif !", a dit l'un d'eux. Un autre a refusé le raisonnement selon lequel leurs textes pourraient influencer des fans mal intentionnés. "Ta life, tu l'as fait pas grâce à un skeud" (un disque, ndlr). Jamais quelqu'un n'a tué après avoir entendu nos titres ! Le groupe ajoute que "la musique en général et plus particulièrement la notre, est composée d'images fortes qu'aucun auditeur de bonne foi ne prend au premier degré".
"Cela vous évitera de travestir le sens de nos chansons"
Partant du principe que la meilleure défense est l'attaque, les rappeurs, qui se disent "ni antisémites ni anti-français", ont menacé de "porter plainte en diffamation contre Nicolas Sarkozy" si celui-ci ne leur présente pas "des excuses publiques". Dans un courrier adressé jeudi au ministre dont tf1.fr a obtenu copie, les rappeurs se permettent d'ironiser sur "la crise de démagogie passagère" et le "populisme" de l'hôte de la Place Beauvau : "Nous pensons qu'avec tout le travail que vous avez, vous n'avez pas pris le temps d'écouter nos albums et nous vous invitons à le faire. Cela vous évitera de travestir le sens de nos chansons". Et de citer pêle-mêle Maxime Le Forestier, Léo Ferré, Serge Gainsbourg, Georges Brassens comme autant d'artistes à "condamner" …
[...] Dans une autre chanson, intitulée Jeteur de pierre (2003), le groupe évoque les attentats-suicides en Israël : "Tu f'rais quoi, si on avait tué ton père et détruit ton toit ? (...) J'aurais envie d'faire un carnage", "Palestiniens dans les rues, Israéliens dans les bus, le mal par le mal, venger les tiens".
                   
20. L'éclaircie par Régine Deforges
in L'Humanité du mercredi 5 novembre 2003

Quand un général de l'armée de l'air d'Israël, Yiftah Spector, dit : " L'occupation est la principale cause du terrorisme ; en occupant toujours plus de terres palestiniennes, nous mettons en danger l'existence de l'État juif que nous avons créé avec tant de succès. Si les Palestiniens n'ont pas leur propre État, ils devront vivre avec nous dans un seul et même pays. Alors, ils nous battront, parce que la démographie joue en leur faveur. L'occupation a commencé de façon non intentionnelle. Les Palestiniens profitaient de cette situation et nous aussi. Leur niveau de vie s'est amélioré. Nous espérions que la prospérité nous mettrait sur la voie de la paix. Mais, au début de la première Intifada, j'ai compris qu'Israël occupait une autre nation et que celle-ci avait droit à un État ", on croit voir la Colombe montrer le bout de ses ailes. Le général Yiftah Spector a participé à de nombreuses batailles décisives de l'État hébreu, notamment la Guerre des Six Jours. Il n'a pas hésité à signer, en compagnie de vingt-sept pilotes, la lettre au gouvernement israélien dans laquelle il s'engage à ne plus " obéir aux ordres illégaux et immoraux " et à refuser de " prendre part à des attaques aériennes contre des centres de population civile ", en Cisjordanie et dans la bande de Gaza. Cette lettre a fait grand bruit, en Israël, qui a déclaré, le mois dernier, une " guerre totale " aux islamistes du Djihad et du Hamas, suite à la reprise des attentats suicide. " Je ne suis pas un " baba cool ". Je suis pour attaquer et stopper, par tous les moyens, les bombes humaines en marche et tous les salopards ; mais je refuse de devenir moi-même un salopard. Je suis contre le fait de tuer des femmes et des enfants palestiniens. On ne peut pas tuer son ennemi en transperçant le coeur d'une jeune fille, même si cela implique que d'autres jeunes filles doivent mourir chez nous, sous les bombes des terroristes. Je suis contre le terrorisme et l'antisémitisme. Mais je dis à mon peuple : ``Ne devenez pas anti-arabes'' ", a déclaré le général Yiftah Spector. Le chef de l'armée de l'air, Dan Haloutz, a accusé les signataires " d'avoir planté un couteau dans le dos des combattants et de la démocratie israélienne ". Accusation à laquelle répond Yiftah Spector : " Je ne suis pas un insoumis. Israël est un État fondé sur la moralité. Depuis le procès Eichmann qui avait plaidé devant la justice israélienne n'avoir fait qu'obéir aux ordres, une loi dit que personne, en Israël, ne peut échapper à ses responsabilités s'il viole les conventions internationales protégeant les civils des conflits. Chaque soldat israélien affiche, dans son salon, le texte de la loi du ``drapeau noir''. Celle-ci dit que si un drapeau noir s'élève dans votre conscience lorsque vous recevez un ordre immoral, vous avez le droit de désobéir. "
Pendant ce temps-là, à Genève, un plan de paix non officiel a été signé entre l'ancien ministre travailliste de la Justice, l'Israélien Yossi Beilin, et l'ex-ministre de l'Information palestinien, Yasser Abed-Rabbo. L'accord propose des solutions aux principaux obstacles du processus de paix, prévoyant, entre autres, que les Palestiniens renoncent au retour en Israël, le partage de la souveraineté sur la vieille ville de Jérusalem ; le mont du Temple, site le plus sacré du judaïsme sur lequel se trouve l'esplanade des Mosquées, troisième lieu saint de l'Islam, situé à Jérusalem- est, passerait sous autorité palestinienne. Le mur des Lamentations ainsi que le quartier juif resteraient à Israël. De son côté, l'État israélien s'engagerait à restituer aux Palestiniens 97,5 % de la Cisjordanie occupée depuis 1967. Cela ne fait pas l'affaire d'Ariel Sharon ni celle de Yasser Arafat, qui jugent l'initiative de Genève " dangereuse ". " Il faut lutter pour empêcher l'adoption de l'Initiative de Genève et contre l'aide qui lui est apportée par les États européens ", a déclaré le premier ministre israélien. David Leffler, ancien collaborateur de Yitzhak Rabin, s'est réjoui de l'appui apporté par un certain nombre de comédiens d'Hollywood, dont Brad Pitt, préconisant l'organisation d'un référendum avec les deux populations. " Nous souhaitons que la solution de ce conflit sanglant vienne de la base et ne soit pas présentée sous forme d'un plan tout prêt qui serait à prendre ou à laisser ", a déclaré David Leffler. Une éclaircie se ferait-elle dans le ciel israélo-palestinien ?
Le livre d'Israël Shamir, l'Autre Visage d'Israël (1), a été retiré de la vente à la suite de pressions sur Denis Bourgois, coéditeur, avec Franck Spengler, de l'ouvrage, sous prétexte de " passages antisémites ". " Des passages de la traduction française, lus trop hâtivement, présentent un caractère antisémite. Aussi, les Éditions Balland ont-elles décidé d'interrompre immédiatement la commercialisation de l'ouvrage ", a annoncé Denis Bourgois contre l'avis de Franck Spengler. Selon l'éditeur, " l'auteur de ce livre traduit de l'anglais, citoyen israélien d'origine russe, s'en prend à la politique actuelle du gouvernement Sharon et prône la création pacifique d'un État israélo-palestinien. " Prise de position qui mérite pour le moins que l'on retire le livre de la vente avant de le brûler, et l'auteur avec... (1) Aux Éditions Blanche-Balland
                   
21. A la culotte - Des caleçons de deuxième main pour les soldats de Tsahal
in Marianne du lundi 3 novembre 2003

L'argent est décidément le nerf de la guerre. Par souci d'économie, l'armée israélienne vient d'acquérir, auprès du Pentagone, un lot de caleçons longs usagés. Cet hiver, les soldats israéliens porteront donc, sous leurs uniformes, des sous-vêtements de seconde main. Les caleçons seront, bien sûr, lavés avant d'être distribués dans les casernes. Ces sous-vêtements feront ainsi figure de vétérans : première guerre du Golfe, retour au pays et entraînement, intervention en Somalie, retour au pays, guerre en Afghanistan, retour au pays, deuxième guerre de Golfe, retour au pays puis départ pour Israël ! Malgré ces périples, les morceaux d'étoffe sont toujours vaillants. On notera qu'Israël et les Etats-Unis sont plus que jamais cul et chemise.
               
22. Israël est la plus grande menace pour la paix, selon les Européens (sondage)
Dépêche de l'Agence France Presse du lundi 3 novembre 2003, 14h02

Une majorité de citoyens de l'UE estiment qu'Israël représente la menace la plus sérieuse "pour la paix" dans le monde, avant l'Iran, la Corée du Nord et les Etats-Unis, qui arrivent tous trois en deuxième position, selon un sondage Eurobaromètre dont les chiffres officiels ont été rendus publics lundi. 59% des personnes interrogées ont répondu par l'affirmative à la question de savoir si Israël présentait ou pas une "menace pour la paix dans le monde", selon l'enquête d'opinion. Les personnes interrogées devaient se prononcer sur une liste de pays pré-selectionnés. L'Iran, la Corée du Nord et les Etats-Unis sont arrivés en deuxième position avec chacun 53% de réponses. L'Irak est arrivé en troisième position (52%), suivi de l'Afghanistan (50%), du Pakistan (48%), de la Syrie (37%), de la Libye (36%), de l'Arabie saoudite (36%), de la Chine (30%), de l'Inde (22%), de la Russie (21%), de la Somalie (16%) et de l'UE (8%).Par pays, le sondage indique que les Néerlandais ont été les plus nombreux (74%) à citer Israël comme une menace, tandis que les Italiens se sont déclarés les moins préoccupés (48%).Les résultats du sondage ont été dénoncés par les autorités israéliennes avant même leur parution officielle. L'exécutif européen s'est refusé lundi à commenter sur le fond ce sondage. "Il n'y aura pas de réaction politique spécifique", a déclaré un porte-parole Gerassimos Thomas lors d'un point de presse."Ce n'est pas notre travail d'interpréter chaque enquête d'opinion", a-t-il dit face à un barrage de questions."Le sondage est ce qu'il est. Il est transparent et on le publie, un point c'est tout", a-t-il ajouté, tout en jugeant "légitime" la réaction israélienne. Le ministre en charge des relations avec la diaspora Nathan Chtcharansky a déclaré dimanche au quotidien Yédiot Aharonot que "l'UE, qui a montré qu'elle était sensible aux questions relevant des droits de l'Homme, devrait faire cesser le lavage de cerveau qui vise à diaboliser Israël avant que l'Europe ne retombe une fois encore dans les périodes sombres de son passé". A Rome lundi, l'ambassadeur d'Israël en Italie, Ehud Gol, a estimé dans un entretien au quotidien Il Messagero que le sondage avait été réalisé "dans le seul but de dénigrer Israël".La Commission européenne avait livré des résultats intermédiaires du sondage la semaine dernière mais sans citer ces chiffres, qui ont été révélés jeudi par le quotidien espagnol "El Pais". Malgré de vives protestations israéliennes, la Commission européenne n'a pas reçu de plainte officielle, a indiqué lundi le porte-parole. Le sondage a été réalisé en octobre par téléphone auprès d'un échantillon de 7.515 citoyens de l'Union européenne.
[Vous pouvez consulter l'intégralité de l'Eurobaromètre en version pdf (voir la page 80) à cette adresse :
http://europa.eu.int/comm/public_opinion/flash/fl151_iraq_full_report.pdf]
                                   
23. Israël outré qu’un sondage effectué auprès de citoyens de l’Union européenne le qualifie de menace pour la paix par Peter Beaumont
in The Observer (hebdomadaire britannique) du dimanche 2 novembre 2003
[traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier]

Israël a été qualifié de toute première menace pour la paix dans le monde, devançant le peloton de tête composé de la Corée du Nord, de l’Afghanistan et de l’Iran, par un sondage (non encore publié) de la Commission Européenne, effectué auprès de 7 500 ressortissants des pays membres, suscitant une controverse internationale.
Ce sondage, effectué courant octobre, auprès d’un échantillon représentatif de 500 personnes dans chacun des pays membres de l’Union européenne, couvrait (par conséquent) quinze pays et comportait une liste de quinze pays au sujet desquels on demanda aux sondés « s’ils représentaient, ou non, une menace pour la paix dans le monde ». Israël aurait, d’après certaines fuites, été choisi par 59 % des personnes interrogées.
Les fuites au sujet des résultats de ce sondage, au bénéfice du quotidien espagnol El Pais et français International Herald Tribune, ont déclenché une acerbe polémique, un groupe juif de défense des droits de l’homme et de lobbying, le Centre Simon Wiesenthal, allant jusqu’à exiger que l’Union européenne soit exclue du processus de paix israélo-palestinien et à accuser l’Europe de connaître la pire flambée d’ « antisémitisme » depuis la Seconde guerre mondiale.
Ces résultats semblent vouloir marquer la désapprobation, très large, en Europe, des tactiques employées par le gouvernement Sharon dans sa répression de l’actuelle Intifada.
Les ministres et le porte-parole du gouvernement israélien ont également mouillé la chemise, récemment, afin de tenter de démontrer qu’une définition de l’ « antisémitisme » mise au goût du jour se devrait d’inclure toute critique formulée à l’encontre de la manière dont l’Etat d’Israël choisit de se protéger, en qualifiant ces critiques d’attaques ouvertes contre l’existence même d’Israël.
Certains membres du gouvernement Sharon ont regimbé devant les efforts déployés par Tony Blair et d’autres responsables britanniques afin d’établir une médiation entre les deux parties.
A un moment donné, on fit savoir aux journalistes qu’Israël considérait que le Foreign Office avait un « parti pris pro-arabe ».
Réagissant au sondage, le Centre Simon Wiesenthal, qui revendique 400 000 membres encartés aux seuls Etats-Unis, a initialisé une pétition afin de condamner la Commission européenne et d’exiger que l’Union européenne ne soit plus représentée, dorénavant, dans le groupe dit du « Quartette », qui s’efforce d’effectuer une médiation en vue de la fin des violences entre Israël et la Palestine.
Ce sondage intervient également sur fond d’un accroissement des agressions antisémites en Europe, au cours de l’année écoulée, bien que tout indique que dans des pays, telle la France, la plupart de ces incidents aient été provoqués par de jeunes islamistes. ( ! du traducteur).
« Ce sondage est l’indication que les Européens ont mordu à la campagne menée tant par les médias que par les dirigeants européens, tendant à vilipender et à démoniser l’Etat d’Israël et ses partisans – ils ont tout avalé : l’hameçon, la ligne et le flotteur » ; a déclaré M. le rabbin Marvin Hier, fondateur du Centre Wiesenthal.
« Ce résultat outrageant – à savoir qu’Israël serait la plus grande menace pour la paix du monde, plus grande même que celle de la Corée du Nord et de l’Iran – défie toute logique. Il s’agit d’une incartade raciste qui ne fait que démontrer combien profondément l’antisémitisme est ancré dans la société européenne, plus qu’à aucune période depuis la fin de la (Seconde) guerre (mondiale) », a-t-il ajouté.
                       
24. Une petite fenêtre pour une prison à ciel ouvert par Valérie Féron
in L'Humanité du samedi 1er novembre 2003
Visite dans les camps palestiniens. Le récit d'une délégation française pour la promotion des jumelages.
Correspondance particulière - Fernand Thuil, coprésident de l'Association pour la promotion des jumelages entre villes de France et camps de réfugiés palestiniens (AJPF), vient d'effectuer à la tête d'une délégation de 29 personnes une visite officielle de cinq jours dans les territoires palestiniens. Cinq jours au pas de charge : des rencontres avec le président Arafat à Ramallah, avec des députés du Parlement israélien à Jérusalem-Ouest, le consul général de France à Jérusalem, Régis Koetschet et des pacifistes israéliens, dont Michel Warshawsky, ainsi que le travail habituel de terrain avec les partenaires palestiniens des camps de réfugiés. La délégation s'est divisée en petits groupes de travail dans les camps de Jénine (au nord de la Cisjordanie) et dans d'autres autour de Ramallah (notamment celui de Qalandia) et de Bethliem (dont Deishe). Au-delà des projets en cours et à venir, le voyage a été comme à chaque fois l'occasion de mieux s'imprégner de la réalité palestinienne au quotidien.
Face à une réalité inextricable
Sept heures. C'est le temps qu'il aura fallu à la délégation conduite par Fernand Thuil pour faire la soixantaine de kilomètres qui séparent Ramallah de Jénine. Pour les initiés, pas grand-chose de nouveau sinon l'impression que l'étau ne cesse de se resserrer autour des Palestiniens. Pour la vingtaine de personnes qui effectuaient leur premier voyage en territoire palestinien, il s'agissait d'une plongée dans une réalité dont ils étaient certes conscients mais qu'ils allaient cette fois toucher pour de bon. Une réalité bien inextricable aux repères bouleversés, où les distances ne se comptent plus en kilomètres mais en check-points, en chars et en soldats rencontrés. Après le premier arrêt pour sortir de Ramallah par la voie la plus facile, celle réservée aux étrangers et diplomates, la délégation, installée dans deux minibus, a pris " la route des colons ", pratiquement déserte, pour terminer son voyage à travers champs, toutes les voies d'accès gardées par l'armée israélienne leur ayant été refusées. À mi-route, un premier groupe de soldats acceptent de les laisser continuer, quand, trois mètres plus loin, un autre groupe leur intime l'ordre de rebrousser chemin sur un ton péremptoire qui découragea quiconque d'entamer le dialogue. Sentiment conforté par la scène d'un jeune Palestinien mains attachées, empoigné comme un vulgaire paquet par trois soldats, qui l'ont laissé choir sur le bas côté de la route, face contre terre. Combien de temps ? Nul ne le saura. Une série de palabres avec les chauffeurs de taxi du coin plus tard pour prendre un autre chemin, une pancarte prometteuse indique en grand : Jénine. S'engageant sur des routes défoncées, les deux minibus butent cette fois sur deux chars israéliens. Un des minibus est autorisé à passer, mais pas le second, forçant à nouveau tout le groupe à rebrousser chemin. " Il y a des millions de chemins pour aller à Jénine, on va y arriver ", promet Wael, un des chauffeurs, le ton plein de défi. En attendant de trouver le bon chemin, la délégation fait du tourisme un peu particulier, découvrant les villages et hameaux du centre de Cisjordanie et les espaces agricoles qui ont jusqu'ici échappé aux bulldozers et aux chars israéliens. Guidé finalement par un habitant du coin, qui les fera traverser les quelques kilomètres restants à travers champs, où se croisent ainsi de nombreux taxis, Jénine l'inespérée s'étale soudain sous leurs yeux. Mission accomplie. C'est un groupe couvert de poussière et fatigué qui arrive dans le camp de réfugiés, juste à temps pour partager l'iftar (la rupture du jeûne) de ce premier jour du mois de ramadan avec leurs collègues palestiniens, avant de passer la soirée en réunions et mises au point de projets. Cela après une visite obligatoire du camp, dont le centre, dévasté au printemps 2002 à coups de missiles par l'armée israélienne, qui ressemble désormais à un étrange terrain vague. Neuf d'entre eux resteront sur place 24 heures, alors que les autres retourneront dès le lendemain matin à Ramallah, pour être ensuite dispatchés par petits groupes dans les autres camps prévus au programme. Le retour sera moins compliqué, mais comportera les mêmes défis que la veille, la même guerre psychologique lorsqu'un groupe de soldats exigera que tous les passagers descendent des minibus pour vérification des identités, des bagages, des véhicules, avant de décréter qu'ils ne peuvent les laisser passer. Ces cinq jours leur ont laissé l'impression d'être une pelote d'émotions dont ils mettront du temps à démêler les fils. Comme Marie-Hélène, Bretonne, membre de l'AFPS depuis deux ans, qui raconte ce qui l'a plus choquée lors de ce voyage : " C'est ce jeune militaire israélien qui, à l'un des barrages où l'on nous a fouillés, nous a dit avec un air très calme et naturel : " Il y a eu une bombe. " Il parlait de l'explosion d'une maison palestinienne tout près de l'endroit où nous étions. Cette maison gênait la construction du mur qui va encercler les Palestiniens. J'ai ressenti dans son ton et son air insouciant toute la déshumanisation de ce peuple. " Marie Hélène a déjà effectué un premier voyage en juin dernier et se déclare frappée par les changements : " En juin, les gens parlaient énormément de la " feuille de route ", maintenant pas un mot sur ce plan de paix, on parle de résistance. Mais je pense que ce que j'ai ressenti le plus fortement cette fois-ci, c'est la force psychologique des Palestiniens, cette ténacité et cette dignité qu'ils gardent dans cette situation effroyable, si difficile à faire comprendre et à faire admettre à l'extérieur. " Et pourtant, c'est bien à cette tâche que la délégation, comme des dizaines d'autres, va s'atteler dès son retour en France. Témoigner de ce qu'elle a vu et continuer à concrétiser des projets avec les habitants des camps de réfugiés palestiniens en Cisjordanie, dans la bande de Gaza, au Liban et en Syrie.
                       
25. Fernand Thuil : "La volonté de paix est très forte chez les Palestiniens" entretien réalisé par Valérie Féron
in L'Humanité du samedi 1er novembre 2003
Fernand Thuil, président de l'association pour le jumelage des villes françaises avec les camps palestiniens, explique les buts de sa visite et sa vision de la situation.
- Quel était le but de cette visite ?
- Fernand Thuil. D'abord se rendre compte directement de la situation pour, comme à chaque fois, témoigner à notre retour en France. C'est aussi pour être une petite fenêtre sur l'extérieur pour les Palestiniens qui vivent dans une prison à ciel ouvert. Le deuxième objectif était de mettre en ouvre de nouveaux projets. L'un d'entre eux, intitulé " Un cartable pour chaque enfant palestinien ", concerne plus particulièrement l'aide à l'éducation. Il s'agit, avec l'accord des comités des camps, d'encourager le retour des enfants à l'école, pour qu'ils retrouvent une certaine normalité, ce qui est extrêmement difficile dans la situation actuelle, avec les bouclages. La campagne nationale a été lancée en France il y a un mois. Un des responsables du camp de Jénine, où les enfants sont très traumatisés, m'a dit ceci, qui résume bien l'idée du projet : " Ce que l'on veut, c'est pouvoir continuer à expliquer à nos enfants que la vie, ce n'est pas la haine, c'est la paix. " Voilà une des premières préoccupations des Palestiniens. Que leurs enfants vivent comme les autres. C'est sur cela qu'est basée notre campagne, dont le cartable est bien sûr un symbole. La campagne nous permet de parler de la situation des enfants palestiniens et l'argent récolté, de répondre aux besoins les plus urgents : là, l'achat de chauffage ; ailleurs, de livres, ou le financement de bourses, etc. Il faut bien comprendre qu'une journée d'école pour un enfant palestinien, c'est une victoire.
- Une partie de votre famille vit en Israël, vous vous décrivez comme humaniste et athée. Vous travaillez avec des pacifistes israéliens. Comment faites-vous passer vos messages ?
- Fernand Thuil. Je parle de la même manière partout. Je sais que, en défendant le peuple palestinien, je défends aussi le peuple israélien, qui lui aussi est en train de crever, avec de moins en moins de protection sociale, un chômage terrible. Je trouve ignoble que des groupes déclarent parler au nom de tous les juifs du monde. Ce sont eux qui sèment la haine. J'ai bien sûr eu droit à des menaces de mort, je me suis fait traiter d'antisémite, alors qu'une bonne partie de ma famille vit en Israël. Mais leurs insultes et leurs menaces de mort à mon encontre ne changeront rien à mon discours. Et doit-on une fois encore rappeler que les Palestiniens n'ont aucune responsabilité dans l'Holocauste ? Nous avons un rôle énorme à jouer pour retisser des liens entre les deux peuples. Il ne faut pas les laisser se débrouiller tout seuls. Le président Arafat me l'a lui-même déclaré : " Je ne vous demande pas d'être les ennemis des Israéliens, je vous demande même d'être leurs meilleurs amis. Au moins, ils vous écouteront. " La volonté de paix est très forte chez le peuple palestinien, qui est profondément laïc et démocratique. Il est temps de mener une action qui puisse être l'équivalente de celle qui a mis fin au régime d'apartheid en Afrique du Sud. Il s'agit réellement de non-assistance à peuple en danger. Et on ne peut pas dire, en 2003, que l'on ne sait pas ce qui se passe en Palestine. J'en profite d'ailleurs pour saluer, tout gouvernement confondu, la position de notre pays sur la question palestinienne ainsi que le travail extraordinaire effectué depuis des années par le consulat général de France à Jérusalem. La France a une position claire et je souhaite qu'elle prenne encore plus d'initiatives.
- Vous et votre association êtes directement concernés par le droit au retour des réfugiés palestiniens, qui est l'une des questions les plus sensibles de ce conflit. Quelle est votre position ?
- Fernand Thuil. Je suis profondément pour le droit au retour d'abord comme reconnaissance politique. Dans tous les camps de réfugiés, les Palestiniens que je rencontre n'ont qu'un rêve : revenir chez eux. Ils ont encore leurs clés. Il faut que le monde reconnaisse la plus grande injustice du XXe siècle qu'est l'expulsion du peuple palestinien en 1948 et la destruction de quelque 500 de ses villages. Cette reconnaissance est obligatoire si l'on veut qu'il y ait un jour une réconciliation des deux peuples. Il faut qu'il y ait reconnaissance et demande de pardon pour ouvrir la voie à une réconciliation. Je suis pour un État palestinien dans les frontières de 1967 avec Jérusalem-Est comme capitale. Avec le démantèlement de toutes les colonies.
- Que devient alors le souhait des Israéliens de vivre dans un " État juif " ?
Fernand Thuil. Prenez l'accord de Genève élaboré par Yossi Beilin et Yasser Abed Rabbo, qui prévoit qu'un pourcentage de Palestiniens puissent, avec l'accord d'Israël, rentrer en territoire israélien. Personnellement, je ne suis pas d'accord avec cette proposition restrictive, mais je pense que c'est déjà un premier pas. Il faut s'appuyer sur toutes les chances offertes d'arriver à des compromis. Je ne suis pas pour autant pour un État binational. Je n'y crois pas. Je crois à deux États séparés, avec un État palestinien, bien évidemment viable, et un État d'Israël, " juif ", si c'est le souhait des Israéliens. Mais avec un retour des réfugiés palestiniens où ils le souhaitent à travers des négociations. Faisons confiance aux peuples. Ils sont forts pour faire la guerre mais aussi pour faire la paix. Je me souviens de ce jeune couple palestinien du camp d'el Bureij dans la bande de Gaza. La femme et l'enfant ont été tués dans l'explosion d'une bombe de l'armée israélienne dans leur maison. Lui-même a les deux jambes coupées. J'étais avec lui pour le quarantième jour de commémoration. Ce qu'il m'a dit, c'est : " Je ne souhaite à aucun père israélien de connaître une souffrance telle que celle que j'endure maintenant. " Il faut cesser de présenter les Palestiniens comme des belliqueux. Mais si rien ne bouge maintenant, je crains cependant que les extrémistes prennent le pouvoir. Précisons aussi que les Palestiniens ne se sentent aucun lien avec des gens comme Ben Laden.
                               
26. L'Association "Au service des hommes" par Valérie Féron
in L'Humanité du samedi 1er novembre 2003

L'Association pour la promotion des jumelages entre villes de France et camps de réfugiés palestiniens, AJPF, est une association franco-palestinienne coprésidé par Fernand Thuil pour la France et Ahmed Muhaissen, habitant du camp de Deishe, pour la Palestine. Elle a été créée il y a une vingtaine d'années après les massacres des réfugiés des camps palestiniens de Sabra et Chatila, au Liban. Le premier jumelage a eu lieu avec la ville de Montataire. Près de soixante villes ou villages français sont actuellement concernés. Le partenariat repose sur la base " d'une relation d'égal à égal ". Fernand Thuil définit l'association non pas comme humanitaire à proprement parler mais " politique dans le sens premier du terme, au service des Hommes ". Outre les projets directs pour les camps de réfugiés, l'AJPF organise des rencontres entre Palestiniens de la diaspora et des territoires " membres d'une même nation, coupés les uns des autres " ; entre jeunes Palestiniens des territoires occupés et jeunes Français des banlieues, notamment pour des activités sportives. Outre la campagne " un cartable pour chaque enfant palestinien ", l'association organise des rencontres entre femmes palestiniennes et européennes. Une visite en France de dix jours des représentantes des femmes palestiniennes des camps de Palestine, de Syrie, de Jordanie et du Liban est prévue dans les prochains mois pour élaborer une charte sur le thème " nous les femmes, nous voulons changer le monde ". Le temps fort de cette initiative sera le 8 mars 2004.
[AJPF : Mairie de Montataire, 60160 Montataire. Tél. : 03 44 64 44 04 - Fax : 03 44 64 44 05]
                       
27. La guerre américaine en Irak : Encore une bataille pour protéger les intérêts israéliens ? par Delinda C. Hanley
in Washington Report on Middle East Affairs (mensuel américain) du mois d'octobre 2003
[traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier]

(Delinda C. Hanley est éditorialiste au Washington Report on Middle East Affairs.)
Pourquoi le président George W. Bush a-t-il décidé d’envahir l’Irak ? Certains développement très curieux, dans l’Irak occupé par les Etats-Unis, mettent mal à l’aise les Irakiens et leurs voisins arabes, lorsqu’on les interroge sur les motivations de Bush. Les récits étonnants qu’ils en font pourraient fort rendre furieux également les Américains, qui commencent à suspecter qu’ils ont une fois de plus été entraînés dans une énième bataille pour le compte d’Israël.
A la veille de la guerre, le président Bush et le Premier ministre britannique Tony Blair avaient dit à leur peuple que les masses de destructions massives de l’Irak représentaient un danger réel et immédiat pour les Américains, leurs cousins britanniques, et même pour l’ensemble de la Planète. Si Saddam Hussein n’a pas utilisé lui-même ces armes, avançaient les Anglo-américains, il pourrait en remettre à des groupes terroristes. Les citoyens américains et britanniques crurent ce que leur disaient leurs dirigeants, ils pensèrent qu’ils ne recherchaient pas autre chose que leur sécurité, et qu’ils détenaient des preuves des intentions diaboliques de Saddam Hussein, qu’ils n’étaient pas encore en mesure de divulguer.
Aujourd’hui, ce sont quelque 1 500 enquêteurs américains qui inspectent l’Irak à la recherche de preuves qui permettraient, enfin, d’étayer ces affirmations pour le moins sujettes à caution. Scott Ritter, un ancien inspecteur en armement de l’ONU, doute que ces enquêteurs, qui constituent ce qu’on appelle le Iraq Survey Group [Groupe de Surveillance de l’Irak] auront quelque chance de trouver quoi que ce soit.
Il fait observer, tout d’abord, que tous les documents du gouvernement irakien relatifs au programme d’armement étaient stockés dans des coffres métalliques situés dans un immeuble de la banlieue Jadariya, de Bagdad. Ces archives ont constitué la base de la déclaration de quelque 12 500 pages compilée par l’Irak, pour l’ONU, en 2002. Le 8 avril dernier, les troupes américaines ont investi ce complexe d’immeubles administratifs. Ils n’ont jamais interviewé les scientifiques qui continuaient à venir à leur travail, ni ils n’ont entrepris d’examiner les archives. Non. Tout simplement, les soldats américains se sont retirés, tout simplement, au bout de deux semaines, laissant sur place toutes les preuves : les ordinateurs, les disques durs, les enregistrements vidéo d’entrevues, à l’ONU, avec des scientifiques irakiens tout au long des années 1990, et la documentation très bien tenue.
Des pillards ont mis à sac ces locaux, détruisant ainsi toute preuve d’un quelconque programme d’armement. Quiconque regarde la télévision sait que, lorsqu’on enquête sur un crime, la première chose à faire, c’est de sécuriser la scène du drame. On ne peut donc que se demander pourquoi les forces américaines n’ont-elles jamais pris la peine de le faire, ni de protéger le centre de recherches nucléaires de Tuwaitha, ainsi que six autres sites nucléaires, en Irak, qui furent dévastés par les pillards.
Les dirigeants de la coalition savaient-ils, depuis le début, qu’il n’y avait en Irak aucune arme de
destruction massive ? Il semble, de plus en plus, que les manifestants anti-guerre voyaient juste, lorsqu’ils affirmaient : « Pas de guerre pour du pétrole ! » L’Irak, l’un des principaux pays producteurs de pétrole au monde, a un potentiel de production de 2,5 millions de barils par jour. Les Etats-Unis attaqueraient-ils réellement un pays pour s’emparer de son pétrole ? Qu’à Dieu cela ne plaise ! La coalition promit que le pétrole irakien bénéficierait, enfin, au peuple irakien, au lieu d’aller finir dans les poches de leurs dirigeants.
Aujourd’hui, les Irakiens eux-mêmes commencent à en douter, étant donné que les pénuries d’essence et les longues queues qui s’étirent devant les stations-service les amènent à se demander s’ils connaîtront quelque moment une situation à nouveau normale.
Et voilà qu’un nouveau soupçon, affreux, leur traverse l’esprit. Les conseillers de Bush dans la lignée « Israël avant toute chose » ont-ils décider d’envahir l’Irak à seule fin de garantir à Israël un accès aisé au pétrole ? Un article publié le 31 mars par le quotidien israélien Ha’aretz faisait état de plans prochains visant à rouvrir un pipeline inutilisé depuis bien longtemps, qui relie les champs pétrolifères de Kirkouk au port israélien d’Haïfa. Le ministre israélien de l’Infrastructure nationale, Joseph Paritzky, a suggéré qu’après l’éviction de Saddam Hussein, le pétrole pourrait s’écouler à gros bouillons vers l’Etat juif, dans lequel il serait consommé, le restant étant exporté. D’après un article de John Cooley, paru le 23 avril dans The Christian Science Monitor, « L’idée est économiquement tentante, pour Israël, et pour certains de ses amis, en particulier ceux dont les entreprises pourraient tirer profit d’un projet de cette nature. Pauvre en ressources pétrolières, Israël, indique le Middle East Economic Survey [MEES], a besoin du pétrole brut de haute qualité extrait à Kirkouk pour sa raffinerie de Haïfa. Pour le moment, les raffineries israéliennes utilisent des pétroles bruts d’origine russe, ouest-africaine, égyptienne, ou autre.
« Politiquement, ce projet est une véritable bombe potentielle », avertit Cooley, car Israël et l’Irak ont toujours été des ennemis implacables et, cela, depuis 1948. « Sa mise en pratique pourrait déclencher une nouvelle explosion dans l’enchaînement des réactions à l’invasion et à l’occupation américaines de l’Irak, qui commence tout juste aujourd’hui à se réverbérer d’une extrémité à l’autre d’un Moyen-Orient en proie au trouble. » Néanmoins, d’après un article paru dans le Ha’aretz du lendemain, « un haut responsable du Pentagone » a envoyé un télégramme à un « responsable au plus haut niveau du ministère des Affaires étrangères à Jérusalem », afin de vérifier la faisabilité de pomper du pétrole provenant des champs pétrolifères irakiens vers des raffineries situées à Haïfa et de reconstruire le pipeline Kirkuk – Mossoul – Haïfa.
Selon cette missive, « le pipeline vers Haïfa est une sorte de « bon point » que les Etats-Unis remettront à Israël pour le récompenser de son soutien à la campagne américaine en Irak. » Début septembre, Paritzky ira à Washington, afin d’y présenter au Secrétaire d’Etat à l’Energie, Spencer Abraham, les projets de pipeline israélien, ainsi qu’un devis estimé de son coût. Le ministère israélien des Infrastructures estime qu’un pipeline de 42 pouces, entre Kirkuk et Haïfa, coûterait environ 400 000 dollars au kilomètre. Le plan demande l’accord de la Jordanie, mais Amman percevrait des royalties de transit en paiement de l’autorisation qu’il donnerait au transit du pétrole sur son territoire. Les voisins de la Jordanie pourraient trouver quelque chose à y redire, mais les Irakiens auront-ils leur mot à dire, dans une décision concernant leur propre pétrole ? Pour faire taire les rumeurs, la Turquie a averti Israël qu’elle verrait dans ce schéma un coup sérieux porté aux relations turco-israélienne. Aujourd’hui, le pétrole irakien est transporté, via la Turquie, vers un port proche de la Syrie. Ankara dépend de droits de passage collectés sur ce pétrole.
Le Memri ouvre une nouvelle succursale : à Bagdad !
Autre développement choquant, mentionné au départ par le site ouèbe IslamOnline.net, cause aujourd’hui la consternation, en Irak. Israël a ouvert un « Centre pour les Etudes Moyen-Orientales », dans un building lourdement gardé, dans la rue bagdadienne d’Abu  Nuwwas.
Ce centre est affilié au Memri [Middle East Media Research Institute]. Certains des cofondateurs du Memri ont travaillé dans les services secrets militaires israéliens. Le Memri traduit des articles de presse incendiaire qu’il trouve dans la presse arabe, en hébreu, anglais, allemand, français et italien, articles dont il assure la diffusion à ses abonnés.
D’après l’article de Brian Whitaker, publié dans The Guardian (« Selective Memri, repris dans le Washington Report de novembre 2002, page 22), « Les histoires sélectionnées par Memri afin de les traduire répondent à un schéma familier : soient ils s’agit de portraits caricaturaux du caractère des Arabes, soit ils correspondent, peu ou prou, à l’agenda politique d’Israël ». Le Memri a reçu les patentes nécessaires de l’Autorité américaine d’occupation en Irak, ainsi que du Pentagone. Le 15 juillet dernier, il publiait sa première « revue de presse » irakienne, ainsi que la traduction des sermons du vendredi, prononcés dans diverses mosquées irakiennes. L’action du Memri parle d’elle-même : on se reportera aux articles qu’il a sélectionnés afin de les publier sur son site ouèbe (www.memri.org). Ne vous attendez pas à y trouver quelques traductions des délires israéliens publiés dans la presse en langue hébraïque. Les Irakiens sont furieux contre les forces américaines d’occupation, qui ont autorisé le Memri à ouvrir boutique dans leur pays.
Le Dr. Anwar Abdul Aziz, de l’Université de Bagdad, a déclaré à IslamOnline que le Memri et ses rejetons ont une finalité sinistre. « Les objectifs lointains d’Israël, au Moyen-Orient, ne sont un secret pour personne », nous a-t-il dit. « Ce centre, en effet, n’est qu’une façade dissimulant des organismes d’intelligence et de sécurité dirigés par le Mossad (le service de renseignement israélien) ». « Qui aurait pu imaginer qu’un jour Bagdad abriterait un organisme au service des complots et des plans d’Israël ? » s’est interrogé la Dr Souad Bahauddin Al-Mawsili, de l’Université Al-Rafidayn. L’ouverture de ce centre a fini de la convaincre que la guerre menée par les Etats-Unis contre l’Irak l’a été au nom d’Israël : « Tel est le résultat de l’occupation de l’Irak par les Etats-Unis. Voilà qui ne pourra que renforcer notre conviction qu’Israël et les Etats-Unis ne sont que les deux côtés de la même médaille. »
Un autre rapport stupéfiant, publié le 27 août dernier par le Jerusalem Post, fournit la dernière pièce du puzzle, en répondant à la question de savoir pourquoi les soutiens américains inconditionnels d’Israël ont poussé Washington à faire cette guerre à l’Irak : le chef du Congrès National Irakien, Ahmed Chalabi, candidat destiné par le Pentagone à gouverner l’Irak, mais discrédité, a placé un traité de paix avec Israël en tête de l’ « ordre du jour » d’un nouveau gouvernement irakien. En l’absence d’un règlement équitable du conflit israélo-palestinien, cela n’aurait jamais pu se produire, n’eût l’Irak connu un changement de régime dans un sens très favorable à Israël. La persuasion que les soldats américains font en réalité le sale boulot d’Israël, voilà peut-être la raison pour laquelle les Irakiens sont en train de tuer ses « libérateurs ».
Et il est de fait que cette impression est confirmée, toujours et encore, par les articles traduits et diffusés depuis Bagdad par le Memri, au cours des dernières semaines écoulées. Tout Irakien sait qu’Israël, jadis, redoutait la puissance de l’armée irakienne, ainsi que les atouts économiques, politiques et intellectuels de l’Irak. Israël et ses acolytes américains s’emploient, depuis des décennies, à isoler les pays arabes avancés et à les empêcher de développer tout leur potentiel.
Si les soupçons des Irakiens sont justifiés, les Américains sont aller faire la guerre à seule fin de renforcer la position d’Israël au Moyen-Orient. Il semble, de plus en plus, que les gens que nous sommes allés « libérer » disent vrai…
                           
28. L'avocate et la kamikaze
in L'Intelligent - Jeaune Afrique du vendredi 31 octobre 2003
Membre de l'Association arabe des jeunes avocats (AAJA), la Palestinienne Taraji Yasser Abu Chawareb a été arrêtée le 23 octobre par les autorités israéliennes et placée dans un centre de détention près de Tel-Aviv. Son « crime » : Hanadi Jaradat, l'auteur de l'attentat suicide du 4 octobre contre un restaurant d'Haïfa (vingt morts), a fait, il y a quelques mois, un stage dans son cabinet. Le président de l'AAJA, le Tunisien Chawki Tabib, a rendu public un communiqué appelant à la libération immédiate de sa collègue. 
                                                   
29. L'Oscar 2004 du film étranger pour la Palestine ?
in L'Intelligent - Jeaune Afrique du vendredi 31 octobre 2003
La course à la sélection pour les oscars décernés chaque année à Hollywood concerne aussi, et de plus en plus, les non-Américains. Dans la catégorie « meilleur film étranger », cinquante-cinq oeuvres, représentant autant de pays, sont en lice - un record. La liste des cinq « nominés » sera rendue publique par l'Académie des oscars le 27 janvier prochain. Parmi les principaux favoris, pour 2004 : Intervention divine, du Palestinien Elia Suleiman.
                               
30. Le mur par Michel Habib-Deloncle
in Refa N°66 (septembre-octobre 2003)
Depuis que les Soviétiques, lors de la Guerre froide, coupèrent en deux la ville de Berlin par un mur  flanqué de miradors et de soldats armés, prêts à tirer sur l’imprudent qui voudrait s’envoler vers la liberté, les murs n’ont pas bonne réputation en politique.
Imaginons, sur un coin de cette terre de Palestine, que sa famille a cultivé de père en fils, depuis un temps immémorial, cet agriculteur, qui s'appelle Ahmed, ou peut-être Youssef. Il est aisé. Il possède des pâtures pour ses troupeaux, des champs qui produisent des céréales ou des primeurs, qu’on apprécie partout dans la région, sans oublier ses vergers et ses oliveraies. Il alimente les marchés d’alentour. Il emploie, outre les membres de sa famille, des ouvriers agricoles, qu’il fait vivre. Il pourrait être heureux,de ce bonheur simple que provoque une vie honnête et bien employée.
Seulement voilà : sa propriété est située non loin de la “Ligne verte ”, qui suit le tracé de la frontière établie de facto entre l’Etat d’Israël et la Jordanie, après la première guerre de 1948. Elle délimite aujourd’hui la Cisjordanie, qu’on appelle en anglais “The West Bank ”et, au Likoud, la Judée Samarie. Cette ligne devrait, en principe, constituer la frontière entre Israël et le futur Etat palestinien, souverain et indépendant, dont la proclamation est sans cesse retardée.
A proximité de cette Ligne, du côté (en principe) palestinien, on a vu fleurir, au sommet de quelques collines, des implantations de colons juifs, que personne n’avait invités. Cette intrusion n’a pas été du goût des légitimes propriétaires. Des accrochages s’en sont suivis. Dans un contexte plus large,les incursions israéliennes, au mépris des décisions des Nations Unies et des accords conclus avec l’Autorité Palestinienne, ont provoqué des réactions prévisibles, sous la forme d’attentats commis en Israël même.
La parade israélienne ? Un mur ! Un mur qui barrera aux “terroristes” l’accès du territoire d’Israël. Mais il semble que la main de ceux qui ont dessiné le tracé de ce mur ait tendance à dévier. Pour assurer la protection des colons contre d’éventuelles attaques, rien de tel que de corriger, plus ou moins légèrement, le tracé du mur. Au lieu de suivre scrupuleusement la Ligne verte, on procédera à des inflexions. Est-il vraiment important que le mur englobe, ici ou là, des terres qui appartiennent aux Palestiniens, jusqu’à encercler complètement telle ville ou tel village.
Que va devenir notre Ahmed (ou notre Youssef) ? Qui va prendre soin de ses terres, coupées de sa maison par un mur ou une clôture infranchissables ? De quoi va-t-il vivre, désormais ? Qui viendra l’aider dans sa détresse ?
Face à la “sécurité d’Israël ”, quelle importance ? L’essentiel n ’est-il pas que ces terres soient exploitées.
Soyons tranquilles : Les colons s’en chargeront ! Quelle tristesse que de voir Ariel Sharon chausser les bottes de Nikita Khroutchev !
                       
31. Des fusées, du napalm, des torpilles et des gros mensonges : L’attaque israélienne contre le USS Liberty, revisitée par Jeffrey St. Clair
on Counterpunch le vendredi 24 octobre 2003
[traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier]

(Ceci est un extrait du nouvel ouvrage très « chaud », proposé par CounterPunch, The Politics of Anti-Semitism (La politique de l’antisémitisme). Counterpunch.)
Au début du mois de juin 1967, à la veille de la guerre des Six Jours, le Pentagone envoya le navire de guerre USS Liberty, depuis l’Espagne, vers les eaux internationales au large de la côte de Gaza, afin de surveiller les développements de l’attaque d’Israël contre les pays arabes. Le Liberty était un navire de surveillance, muni (seulement) d’artillerie légère.
Quelques heures seulement après le début de sa présence dans les dites eaux, le Liberty fut repéré par l’armée israélienne. « Tsahal » envoya des avions de reconnaissance afin d’identifier le bâtiment. Ils effectuèrent huit navettes en l’espace de trois heures. Le Liberty arborait un grand drapeau américain et, pour un œil averti, sa silhouette de bâtiment de guerre américain ne laissait aucun doute quant à sa nationalité.
Quelques heures après les premiers avions, d’autres arrivèrent. Il s’agissait cette fois d’avions de chasse israéliens du type Mirage III [Made in France, tout chauds des usines de Marcel Dassault, ndt], armés de missiles et de mitrailleuses. Tandis que des officiers américains en repos prenaient le soleil sur le pont, les Mirage ouvrirent le feu sur le bateau américain non armé, lançant des volées de missiles et de rafales de mitrailleuses.
Quelques minutes après, une deuxième vague d’avions de chasse survolèrent le bateau : des Mystère, de fabrication française [again ! Ndt], qui non seulement ratissèrent le navire de leurs tirs de mitrailleuses, mais lancèrent des petites bombes au napalm, tartinant généreusement le pont de gelée enflammée. En quelques secondes, le Liberty était en flammes, et des dizaines d’hommes de l’US Navy avaient été tués ou blessés, à l’exception de quelques officiers supérieurs.
L’équipe radio du Liberty tenta de lancer des appels de détresse, mais elle ne lui fallut pas plus de quelques secondes pour réaliser que ses fréquences étaient brouillées par les avions israéliens, au moyen de ce que les spécialistes appellent un « buzzsaw sound », ce qui signifie, dans la langue de Molière : « un bruit de scie sauteuse ». Enfin, un canal non brouillé fut trouvé et le Liberty put émettre un message indiquant qu’il était sous un feu nourri, message qui fut capté par un énorme porte-avion de la Sixième Flotte (américaine), l’USS America.
Deux F-4 s’élancèrent des pistes de ce porte-avion afin de se porter au secours du Liberty. Apparemment, ces avions n’étaient armés « que » de bombes nucléaires. Lorsque l’information parvint au Pentagone, le secrétaire à la Défense Robert McNamara entra dans une des colères dont il avait le secret, et il donna l’ordre aux jets de rentrer « à la maison ». « Dites à (notre) Sixième Flotte de ramener ces avions chez elle, et que ça saute ! », hurla-t-il. Les injonctions de McNamara furent répercutées en un langage moins châtié par l’Amiral David L. McDonald, chef des opérations navales : « Vous ramenez ces b.rdels de coucous sur votre pont, et vous leur dites de se tenir à carreau ! ». Les avions firent donc demi-tour. Et l’attaque contre le Liberty se poursuivit.
Après que les avions de combat israéliens eurent déversé leur cargaison mortelle, trois corvettes armées israéliennes s’approchèrent du Liberty. Deux torpilles furent tirées sur le navire qui ressemblait déjà à une crêpe bretonne. L’une d’entre elles creusa un trou de trois mètres de diamètre dans la coque, ce qui causa l’ennoyage immédiat des compartiments situés au-dessous de la ligne de flottaison, tout en causant la mort d’une douzaine de marins américains supplémentaires.
Tandis que le Liberty prenait du gîte sur une mer agitée, le pont en flammes, des membres de l’équipage lançaient des canots de sauvetage à l’eau et s’apprêtaient à saborder le navire. En raison du nombre très élevé de blessés, l’opération s’annonçait très risquée. Mais, très rapidement, elle s’avéra impossible, car les vedettes israéliennes d’attaque se mirent à coudre à la machine les canots de sauvetage avec leurs mitrailleuses. Personne ne pourrait avoir la vie sauve de ce côté-là.
Après plus de deux heures d’attaques irrémissibles, les Israéliens décidèrent que les marins américains devaient avoir eu leur dose. L’un des torpilleurs se rapprocha du Liberty. Un officier israélien demanda, en anglais, par porte-voix : « Afez-fous pesoin t’aite ? »
Le commandant du Liberty, blessé, Lieutenant William McGonagle donna instruction au quartier-maître de répondre avec autant d’emphase qu’il le pouvait : « Allez vous faire foutre ! ». Le bateau israélien manoeuvra et s’éloigna.
Un destroyer soviétique répondit à l’appel de détresse avant la marine américaine, bien qu’un sous-marin américain, en mission secrète, se trouvait sans doute dans les parages et avait suivi l’attaque israélienne depuis le début. Le navire soviétique atteignit le Liberty six heures avant le navire américain USS Davis. Le capitaine du navire soviétique offrit son aide, mais l’officier pilote du Liberty déclina son offre.
Finalement, seize heures après le début de l’agression, deux destroyers américains parvinrent dans les parages du Liberty. Déjà, 34 marins étaient décédés et 174 étaient blessés, dont beaucoup dans un état très grave. Tandis qu’on évacuait les blessés, un officier du Bureau des Renseignements de la Marine Militaire [Office of Naval Intelligence] donna aux hommes l’ordre de ne pas parler de leur calvaire à la presse.
Le lendemain matin, Israël lançait son invasion surprise de la Syrie, violant le dernier accord de cessez-le-feu et s’emparant des hauts plateaux du Golan.
En trois semaines, la marine américaine mit au point un rapport de sept cents pages, qui exonère les Israéliens, affirmant que l’attaque a été purement accidentelle et que les Israéliens se seraient retirés immédiatement après avoir pris conscience de leur erreur. Le secrétaire à la Défense de l’époque, McNamara, suggéra que l’on oubliât toute cette (pénible) affaire. « Ce genre d’erreurs, vous savez, ça arrive », conclut-il.
***
Dans Assaut sur le Liberty [Assault on the Liberty], un récit de première main de James Ennes Jr. à faire se dresser les cheveux sur la tête, la version des événements présentée par McNamara est dénoncée pour ce qu’elle est : une grosse embrouille, aussi mensongère que les bobards de l’époque au sujet du Vietnam. L’ouvrage de Ennes provoqua une tempête médiatique à l’occasion de sa première publication par Random House, en 1980, comportant notamment [comme il fallait s’y attendre] des accusations de mensonge et d’antisémitisme.
Néanmoins, le livre se vendit à plus de 40 000 exemplaires. Mais il ne fut pas réédité. Aujourd’hui, Ennes publie une version mise à jour, qui comporte de nouvelles preuves supplémentaires, si besoin était, du caractère délibéré de l’agression israélienne et du fait que le gouvernement américain a déployé des prodiges de manipulation afin de tenter de cacher la vérité.
C’est un grand roman d’agression israélienne, d’incompétence pentagonale, de mensonges officiels et de maquillage des faits, qui continue encore aujourd’hui. Le livre tire une grande force du caractère immédiat du récit de première main fait par Ennes de l’attaque elle-même, mais aussi des manips qui s’en suivirent.
Aujourd’hui, trente-cinq ans après, Ennes nous avertit que le bain de sang à bord du Liberty et ses conséquences devraient servir d’avertissement tragique au sujet des liens toujours aussi fusionnels entre les gouvernements américain et israélien.
Attaque Contre le Liberty est le genre de livres qui vous font bouillir les sangs de colère. Ennes documente avec art la vie du marin moyen sur l’un des vaisseaux les plus originaux de toute la marine de guerre américaine, avec une attention apportée aux moindres détails, qui évoque Dana ou encore O’Brien. Après tout, cela se passait en 1967, et la majorité des hommes du Liberty étaient certainement heureux de servir sur un navire non-combattant, au milieu de la Méditerranée, plutôt que dans le Golfe du Tonkin ou le Delta du Mékong !
Mais ce livre ne ressemble en rien à Two Years Before the Mast [Deux ans matelot]. En fait, l’équipée d’Ennes sur le Liberty ne dura pas plus de quelques courtes semaines. Il venait à peine d’entrer dans une sorte de routine quand son bateau flambant neuf fut réduit en charpie devant ses yeux.
Ennes a rejoint le Liberty en mai 1967, en tant qu’Officier du matériel électronique. Servir sur un « vaisseau fantôme », comme les épouses des marins qualifiaient le Liberty, semblait le tremplin assuré vers un avancement de carrière. La routine ordinaire du Liberty consistait à longer la côte africaine, et à braquer ses grandes oreilles indiscrètes afin d’espionner le trafic électronique dans la région.
Le Liberty avait à peine rejoint la côte africaine lorsqu’il reçut un message urgent des états-majors unifiés, lui ordonnant de mettre le cap, depuis la Côte d’Ivoire vers la Méditerranée, où il devait se repositionner au large de la côte du Sinaï afin de surveiller l’attaque israélienne contre l’Egypte et les pays arabes coalisés.
La guerre s’intensifiant, le Liberty envoya une requête à l’état-major de la marine afin de requérir une escorte. Celle-ci lui fut refusée par l’Amiral William Martin. Le Liberty continua, non escorté, jusqu’à une position située dans les eaux internationales, à environ 13 miles marins au large d’Al-Arish, ville égyptienne soumise alors à des bombardements intensifs de l’armée israélienne.
Le 6 juin, la coordination des chefs d’état-major envoya à l’Amiral McCain, père du sénateur de l’Arizona du même nom, un message urgent lui donnant l’ordre de faire sortir le Liberty de la zone de risques jusqu’à une position située à un minimum de cent miles marins de la côte de Gaza. McCain n’a jamais transmis ce message au navire.
Peu après sept heures du matin, le 8 juin, Ennes monta sur le pont du Liberty afin de prendre son quart. On lui dit qu’une heure auparavant, un « fourgon volant » avait survolé le navire à basse altitude [l’engin allait être identifié plus tard comme un Noratlas Nord 2501 bimoteur]. Ennes raconte qu’il a remarqué alors que le drapeau américain du navire était souillé de suie, et qu’il a ordonné qu’on lève un nouveau drapeau en haut du mat. Le temps était clair et calme, une légère brise soufflait.
A neuf heures, Ennes repéra un autre avion de reconnaissance, qui décrivit des cercles au-dessus du Liberty. Une heure après, deux avions israéliens frôlèrent le bâtiment. Durant les quatre heures suivantes, des avions israéliens survolèrent le Liberty à quatre nouvelles reprises.
Au moment de l’attaque du premier avion de chasse, un peu avant deux heures de l’après-midi, Ennes observait le ciel, depuis le côté tribord du pont, il avait ses jumelles à la main. Un missile frappa le navire juste au-dessous de l’endroit où Ennes se trouvait : les éclats découpèrent en lanières les hommes qui étaient à côté de lui.
Après l’explosion, il remarqua qu’il était le seul à être resté debout. Mais il avait été, lui aussi, atteint par plus de vingt éclats de shrapnel, et le souffle de l’explosion lui avait fait éclater la jambe gauche. Tandis qu’il rampait en direction du poste de pilotage, un deuxième avion d’assaut passa comme un éclair juste au-dessus d’eux, et il lâcha son chargement de bombes sur le Liberty estropié.
A ce moment-là, Ennes dit que l’équipage du Liberty n’avait aucune idée de la nationalité de l’assaillant, ni de la raison de l’attaque. Durant quelques instants, ils soupçonnèrent qu’il pouvait s’agir de Soviétiques, après qu’un officier eut cru reconnaître, par erreur, des Mig-15 dans les avions agresseurs. Ils savaient que l’aviation égyptienne avait d’ores et déjà été totalement décimée par les bombardiers israéliens. L’idée que les Israéliens pussent les attaquer ne leur traversa pas l’esprit jusqu’à ce qu’un membre de l’équipage aperçût une Etoile de David sur l’aile de l’un des Mystères de construction française.
Enfin, on emmena Ennes sous le pont, où un hôpital de fortune avait été organisé en toute hâte, avec d’autres hommes blessés. C’était tout, sauf un havre sûr. Tandis qu’Ennes, se tordant de douleur, gardait suffisamment de conscience pour être en proie à la hantise que les os fracturés de sa jambe n’entaillassent son artère fémorale et qu’il ne connusse la triste fin d’un cochon saigné à blanc, le Liberty continuait à être pilonné de missiles, de tirs de mitrailleuse, le tout, couronné par le bouquet : une torpille de fabrication italienne, chargée de 1 000 livres d’explosif…
L’attaque interminable ayant pris fin, un ami d’Ennes vint le voir, Pat O’Malley, un jeune officier, qui venait juste d’envoyer une liste des tués et des blessés au Bureau du Personnel de la Marine. Il avait reçu immédiatement un message en retour. « Ils disaient : ‘ (Des hommes)… blessés dans quelle action ? Tués dans quelle action ? », rapporta O’Malley à Ennes. « C’était pas un engagement, qu’ils disaient. C’était un accident, qu’ils disaient. J’aimerais qu’ils viennent voir par ici : je leur montrerais ce que c’est, la différence entre une action et un accident, à ces connards ! ».
Les cadavres n’étaient pas encore refroidis, que déjà l’opération de dissimulation était enclenchée…
                           
32. Lionel Brisson, représentant onusien à Gaza, témoigne sur le raid israélien : "120 maisons ont été détruites en 72 heures à Rafah" entretien réalisé par ar Jean-Luc Allouche
in Libération du mercredi 15 octobre 2003
Jérusalem de notre correspondant - Lionel Brisson est le directeur des opérations de l'UNRWA (Office de secours des Nations unies pour les réfugiés palestiniens) à Gaza, mais aussi pour l'ensemble des camps de réfugiés en Cisjordanie, en Jordanie et au Liban. Il fait le point sur les opérations de l'armée israélienne à Rafah visant selon un porte-parole militaire, «à achever de détruire des tunnels servant à la contrebande d'armes à partir de l'Egypte vers la bande de Gaza». Lors d'une première opération achevée dimanche, huit Palestiniens, dont deux enfants, avaient été tués et une soixantaine d'autres blessés par des tirs israéliens.
- Quelle est la situation humanitaire à Rafah, après les opérations de l'armée israélienne depuis jeudi dernier ?
- Depuis le 11 octobre, 120 maisons ont été détruites, en soixante-douze heures, 1 240 personnes sont sans toit. Au total, à Rafah, les maisons détruites, entièrement ou en partie, se montent à 835, depuis le début de l'Intifada, et 7 810 personnes en sont affectées. Pour l'ensemble de la bande de Gaza, ce sont 1 357 maisons, affectant 12 285 personnes.
- Avez-vous des difficultés d'approvisionnement ?
- A Rafah, compte tenu des difficultés accumulées, nous avons nos propres entrepôts. Plus généralement, l'assistance humanitaire à Gaza, depuis le début de l'Intifada, est compliquée : le territoire est coupé en deux, voire en quatre morceaux, le flux économique est entravé, les heures d'ouverture des barrages très limitées. Or les besoins alimentaires sont considérables, le taux de chômage frôle les 50 % (selon la Banque mondiale), une véritable pauvreté règne.
- Y a-t-il des problèmes de malnutrition ?
- La malnutrition touche 13 % de la population, mères, enfants, personnes âgées. Nous donnons de la nourriture, tous les quarante-cinq jours, à 620 000 personnes, mais nous ne couvrons que 40 % des besoins minima en calories. Souvent, les enfants vont à l'école le ventre vide. Mais le problème principal est l'emploi, les Palestiniens qui travaillaient autrefois en Israël ont perdu cette ressource, les entreprises palestiniennes sont au chômage technique. L'UNRWA fournit une aide à la création de l'emploi à quelque 4 500 personnes supplémentaires, en CDD, par rapport aux 8 000 que nous employons habituellement : enseignants, médecins, infirmières. Ainsi, il y a une augmentation de plus de 40 % de patients, les écoles sont gravement perturbées. A quoi s'ajoutent des grands travaux de construction d'écoles, de routes.
- Comment sont vos rapports avec les Israéliens ?
- Nous n'oublions pas que nous sommes des humanitaires au coeur d'un conflit. Nous sommes en contact permanent avec les autorités israéliennes et le coordonnateur ­ un militaire ­ des activités civiles. Certes, il est difficile de concilier les impératifs des uns et des autres, mais nous percevons, ces derniers temps, une plus grande volonté de nous faciliter les choses. Ils ont fait un effort pour faire passer le message aux soldats sur le terrain. J'espère que cela va continuer, et que nous aurons plus facilement accès aux réfugiés. Pour l'aide humanitaire, un système a été mis en place au passage de Karni qui nous donne priorité. Cela fonctionne de manière à peu près satisfaisante. Mais pour les mouvements de personnels, cela reste compliqué.
                   
33. Propagandes par Denis Sieffert
in Politis du jeudi 9 octobre 2003
Il ne doit pas être tous les jours facile d’être rédacteur en chef d’un journal télévisé. Que faire par exemple quand vous arrivent des images dont la réalisation doit beaucoup trop peut-être ­ à l’état-major de l’armée israélienne ? Sans trop de précautions, France 2 diffusa lundi un étonnant reportage (mais est-ce le mot qui convient ?) où l’on voyait l’armée israélienne faisant la leçon à ses soldats (1). On y voyait ce qu’elle ne veut plus donner à voir : des soldats rudoyant des femmes palestiniennes, ou brutalisant des vieillards, un char écrasant négligemment une ambulance, un enfant pleurant sa mère abattue dans sa propre maison. Et on y entendait sous forme de recommandations ce que, désormais, l’armée israélienne voudrait montrer d’elle-même : la courtoisie de ses soldats, le respect dont ils témoignent en toutes circonstances à la population palestinienne, les égards qu’ils réservent aux femmes, aux vieux et aux jeunes enfants. Leur exquise humanité en quelque sorte. Comme si l’inhumanité résidait dans le comportement des jeunes Israéliens, et non dans leur fusil mitrailleur, et dans le sentiment d’impunité que toute idéologie coloniale inculque. Sans doute, certains y ajoutent un zèle personnel, expression de leur mépris ou de la peur. Mais on ne résiste pas longtemps au mépris quand on n’a pas trop de principes et que l’on est placé en situation de domination absolue. Et on n’échappe pas à la peur quand on a conscience, par sa seule présence, de susciter la haine. Les inspirateurs de ce petit film le savent bien. Et c’est pourquoi nous avions le désagréable sentiment que cette leçon de civisme colonial s’adressait moins aux soldats israéliens qu’à nous-mêmes, téléspectateurs occidentaux. Avec un peu de patience nous verrons bientôt un vieux Palestinien frapper de sa canne un soldat israélien stoïque. La guerre coloniale n’ayant évidemment aucune réalité, nous aurons ainsi une autre explication de l’Histoire. Au moment où des militaires courageux révèlent les véritables instructions qui sont données (Politis n° 758) aux soldats en mission dans les territoires palestiniens, on peut s’interroger sur l’intérêt qu’il y a à diffuser de telles images, brutes de décoffrage ou presque. On nous rétorquera bien sûr que le téléspectateur est adulte et qu’il se forgera une opinion par lui-même. Peut-être. Mais si la propagande était sans effets, elle n’aurait plus cours depuis longtemps.
La propagande moderne n’est pas une invention des dictatures, mais des grandes démocraties occidentales. C’est Noam Chomsky qui nous le rappelle dans une série d’entretiens récemment réédités (2). Le linguiste américain évoque la figure d’Edward Bernays, qui fonda dans les années 1920 l’industrie de la communication. Celui-ci, libéral américain au meilleur sens politique du terme, s’enchantait de disposer de méthodes pour enrégimenter « l’esprit public exactement dans la même mesure qu’une armée enrégimente les corps de ses soldats ». Son compère Walter Lippmann parlait du « nouvel art de la démocratie ». Qui a dit qu’Israël n’était pas une démocratie ?
Mais la propagande ne sert pas seulement à travestir une occupation coloniale en simple mission de maintien de l’ordre. Elle peut aussi, bien sûr, inventer une « menace irakienne » pour justifier une guerre du pétrole. Et elle peut même, beaucoup plus pacifiquement, détourner un débat sur l’Europe de ses véritables enjeux. Un jour, sans doute, des linguistes se pencheront sur la sémantique utilisée dans la presse pour présenter la constitution européenne. L’ouverture, samedi à Rome, de la conférence intergouvernementale, a donné lieu à un festival d’adjectifs louangeurs. La présidence de l’Union sera « stable », les pouvoirs du parlement seront « accrus », les votes seront « simplifiés » et les droits sociaux « reconnus » (3). Ici, c’est un peu comme dans le document de l’armée israélienne : la désinformation réside moins dans ce qui est dit que dans ce qui demeure caché. Voyez les « droits sociaux reconnus » ­ pour ne citer que cet exemple ­, ils ne vont guère au-delà de la condamnation de l’esclavage et du travail des enfants. Et le pot de terre social aura tôt fait de se briser contre le pot de fer d’une économie de marché aux principes réaffirmés. Mais gardons-nous à notre tour de désinformer et ne portons pas trop sommairement la contradiction aux laudateurs de la constitution européenne. Ils ont leurs raisons qui ne sont pas toutes mauvaises. Regrettons seulement que les véritables termes du débat ne soient jamais posés. Depuis Maastricht, le procédé est toujours le même : ou bien vous êtes pour cette Europe libérale, destructrice de services publics, ou bien vous êtes anti-européens. Et cette désinformation est parfois infiniment subtile. Elle fait mine d’instruire son propre procès : si les opinions publiques boudent l’Europe, c’est, nous dit-on, la faute d’une mauvaise communication, ou d’une piètre pédagogie. Non. La communication est excellente. Si le but est d’éloigner les citoyens de la politique, elle remplit admirablement son office.
- NOTES :
(1) Ce sujet était fort heureusement précédé d’un traitement irréprochable de l’actualité du conflit.
(2) De la propagande, Noam Chomsky, « 10-18 », 336 p., 7,80 euros.
(3) Voir Libération des 4 et 5 octobre.
                       
34. Israël est en train de perdre la partie par Richard Cohen
in The Washington Post (quotidien américain) du vendredi 7 octobre 2003
[traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier]

J’ai discuté, il y a quelques jours, avec un Américain qui vient de rentrer d’Israël, où il a passé plus de vingt ans de sa vie. Nous n’étions pas dans le cadre d’une interview, c’est pourquoi je ne mentionnerai pas le nom ni la profession de cet ami. Tout ce que je peux dire, c’est que c’est quelqu’un d’assez connu en Israël, pays qu’il aime beaucoup, mais qu’il a décidé de quitter, sans doute définitivement, parce qu’il ne peut plus supporter le genre de vie qui règne là-bas. Cet ami ne trouverait pas de rubrique correspondant à sa catégorie : les victimes vivantes du terrorisme…
Combien les Israéliens sont-ils à lui ressembler, je n’en sais rien. Il dispose d’une des facilités les plus appréciables dans le monde d’aujourd’hui – un passeport américain – et ce n’est qu’à grand regret et en se posant moult questions sur l’authenticité de son courage qu’il y a eu recourt pour tirer sa révérence. Sa boîte est allée à vau-l’eau, sa vie était en permanence en danger. Bref : il en avait raz la casquette.
Dans leur guerre perpétuelle contre Israël, les ennemis de ce pays sont en train de gagner. L’économie est en plein marasme. Les parents ne veulent pas que leurs enfants sortent de chez eux. La plage est présumée sans danger, mais ce n’est plus le cas d’aucun café ni d’aucun restaurant. Un trajet en bus urbain (je sais, j’ai essayé…) et vous avez les boyaux qui font des nœuds. Vous devez sans cesse épier tout le monde autour de vous. A quoi un kamikaze peut bien ressembler, et si ce type en était un, là ? Le dernier – plutôt la dernière – en date avait vingt-neuf ans. Elle était titulaire d’une licence de droit. Elle a tué aussi bien des Arabes que des juifs. Même les endroits sûrs ne sont plus sûrs…
Aussi je ne critiquerai pas Israël lorsqu’il réplique. Il assassine des dirigeants du Hamas et du Jihad islamique, ainsi que des militants de base de ces mouvements. Il rase les maisons des kamikazes. Il confine Yasser Arafat dans son QG détruit et pourrait bien l’exiler un de ces jours, voire le tuer. Il a bombardé un camp de soi-disant terroristes en Syrie. Mais rien de ce qu’Israël a pu faire ne lui a en rien apporté plus de paix et de sécurité.
A la lecture de la presse israélienne, le désespoir est palpable. Pour certains, en particulier à gauche, Israël est devenu un pays dont la société est désormais virtuelle et hors d’état de fonctionner. Le gouvernement est incapable de protéger les citoyens. La corruption est endémique. Les extrémistes religieux ont acquis une influence inouïe, et leur vision d’un Grand Israël pousse à construire ou à renforcer les colonies de Cisjordanie et de la bande de Gaza. A chaque attentat suicide, la chose logique à faire – se retirer des territoires palestiniens – est perçue plus comme de la faiblesse que comme une chance laissée à l’espoir.
Israël doit retourner en deçà de la Ligne verte – c’est-à-dire la frontière antérieure à la guerre dite des « Six jours » de juin 1967. Il doit démanteler la plupart des colonies. Il doit le faire, parce que la colonisation est corruptrice et, à long terme, insoutenable. Plus Israël s’étend ou s’accroche aux colonies, plus il est coincé dans un traquenard où l’ennemi est partout. De septembre 2000 jusqu’à récemment, quelque 17 400 attaques [anti-israéliennes] ont été enregistrées dans les territoires – dont la quasi-totalité ont atteint tous les secteurs. Même lorsque les terroristes frappent en Israël proprement dit, ils viennent dans la totalité des cas de Cisjordanie.
Néanmoins, Ariel Saron a décidé dernièrement d’inclure deux nouvelles colonies du côté israélien du mur en construction dans le but de séparer l’Etat juif de la Cisjordanie. En étirant le mur de séparation afin qu’il englobe les colonies, Sharon ne fait que garantir la pérennisation de ses problèmes. Ce qu’il lui faut, c’est : sortir des territoires, se retirer.
Pour un peuple du Livre, pour un pays créé autant par l’Histoire que par les hommes, Israël se comporte comme si rien de ce qui s’est produit dans le passé n’avait la moindre conséquence sur ce qui est en train de se produire de nos jours. Mais l’Histoire ne manque pas de se venger et d’admonester Israël. Les seuls endroits [sur notre Planète] où une culture occidentale se soit transplantée avec succès sont ces contrées où une grande pression démographique et des génocides cyclopéens ont été utilisés afin d’en extirper les populations indigènes. C’est ce qui s’est passé, notamment, aux Etats-Unis.
Un génocide est impensable. Ni le monde, ni Israël ne le permettraient, du point de vue moral. Néanmoins, Israël continue à donner du bois pour se faire battre. Au lieu de se retirer dans le territoire où les juifs sont à l’évidence majoritaires, il continue à s’accrocher à des colonies où les juifs ne font démographiquement pas le poids face à un environnement exclusivement palestinien. Chaque nouvelle colonie, à chaque nouvelle journée de colonisation, met Israël de plus en plus en danger. Chaque colonie est une provocation. L’exil – sinon l’assassinat – d’Arafat n’aura pas d’autre effet que de faire de lui un martyr et d’exacerber le chaos. Cet homme n’est, par lui-même, rien d’autre qu’un symptôme du problème israélien.
Le rêve israélien idyllique est en lambeaux. Personne ne veut plus aller vivre en Israël. Au contraire, les gens veulent en partir. Pour chaque attentat suicide perpétré, un nombre indéterminé d’autres attentats ont été évités – vingt-deux au cours du mois de septembre, d’après Zeev Schiff, l’estimé correspondant militaire du quotidien israélien Ha'’retz.
Israël frappe. Il vient de bombarder la Syrie. Après la Syrie, qui ? L’Iran ? Cela n’est pas une stratégie, c’est de la folie pure. Je peux le comprendre. Mais je comprends très bien, aussi, pourquoi après plus de vingt ans, cet homme que j’ai rencontré récemment a quitté Israël. Vous pourriez avoir tendance à dire qu’il a perdu son sang-froid. Lui, il vous dirait que ce qu’il a perdu, ce n’est pas son sang-froid, c’est l’espoir.
                       
35. Proche-Orient : la paix est dans la rupture par Yézékiel Ben-Ari, Edgar Morin, Véronique Nahoum-Grappe et François Tanguy
in Libération du lundi 29 septembre 2003

(Yézékiel Ben-Ari est directeur de l'Institut de neurobiologie de la Méditerranée ; Edgar Morin est philosophe ; Véronique Nahoum-Grappe enseigne à l'Ecole des hautes études en sciences sociales ; François Tanguy est directeur du théâtre du Radeau au Mans.)
Pour régler le conflit israélo-palestinien, voici le plan de séparation que l'ONU devrait mettre en oeuvre.
A l'évidence, la «feuille de route» comme les accords d'Oslo agonisent. Etant donné la haine et la méfiance entre les deux peuples, le projet d'un Etat binational dans le territoire de la Palestine de 1948 est illusoire. Tout aussi illusoires sont les différents plans car ils impliquent tous un statu quo suivi d'un retrait partiel des colonies et des négociations sur le tracé définitif, offrant ainsi de nombreuses occasions aux extrémistes des deux bords de faire parler la poudre et interdire son application. Une internationalisation du conflit et la séparation des deux parties sont par conséquent la seule solution viable au conflit (cf. Elie Barnavi, Marianne, septembre 2003).
Nous proposons un plan de paix basé sur le principe d'une séparation complète sans négociations directes et un retour immédiat aux frontières du 6 juin 1967 avec une force d'interposition des Nations unies placée le long de la frontière de 1967. Pendant la période intérimaire ­ limitée à deux ans ­, l'autorité palestinienne transfère ses pouvoirs à un gouverneur nommé par les Nations unies qui a pour charge ­ en plus du commandement de la force d'interposition ­ l'application d'un plan Marshall pour la Palestine. Ce plan est piloté par les pays du quartet et en particulier par l'UE que des liens équilibrés avec les deux parties et l'échec de l'approche américaine embourbée en Irak offrent une occasion unique de réinvestir une région et d'affirmer sa politique.
La démission de l'autorité palestinienne élue démocratiquement est injuste. Elle est cependant nécessaire car elle garantit aux Palestiniens la création d'un Etat viable sur tous les territoires occupés depuis 1967et permet d'obtenir les soutiens financiers pour la reconstruction de la Palestine. En ce qui concerne les Israéliens ­ opposés de toujours à l'internationalisation du conflit ­, il est temps enfin d'adopter des mesures coercitives : en cas de refus, le blocage par l'UE de toutes les relations, y compris économiques, accompagné d'un embargo et l'inclusion des crimes commis pendant le conflit dans le cadre de poursuites devant les cours de justice internationales. Une attitude ferme aura un effet bénéfique sur une opinion publique en train de se rendre compte combien la politique de Sharon est un échec et représente à terme un risque pour la survie de l'Etat (cf. l'article de A. Burg, le Monde du 11 septembre).
L'assemblée des Nations unies vote la résolution suivante.
- Volet juridique
Article 1 : L'autorité palestinienne est dissoute et ses pouvoirs exécutifs sont transférés pour une durée de deux ans à un gouverneur nommé par le secrétaire général des Nations unies, sur proposition des membres permanents du Conseil de sécurité. Le président Arafat et les membres de son gouvernement recevront l'aide et la protection du gouverneur général pendant cette durée.
Article 2 : Le gouverneur commande les forces d'interposition, contrôle les finances, bat monnaie et possède les pouvoirs financiers et économiques y compris réception des dons attribués par les Etats et organisations caritatives et onusiennes (UNRWA, etc.). Il contrôle la police et nomme des représentants auprès d'organes de gestion et de gouvernement local. Cependant, les maires élus conservent leur pouvoir jusqu'à la prochaine élection.
Article 3 : Une assemblée constituante représentative composée de membres du parlement palestinien, de personnalités compétentes et de personnalités civiles palestiniennes de la diaspora est nommée par le secrétaire général des Nations unies six mois après le début d'application de cet accord. Elle fera une proposition d'organisation d'un Etat palestinien au plus tard dix-huit mois après le début de l'application de cet accord.
Article 4 : Des élections générales sont organisées sous l'égide des Nations unies, dix-huit mois après l'entrée en vigueur de ce plan. Elles aboutissent à l'élection des organes de gouvernement de l'Etat palestinien qui prend fonction six mois plus tard ­ à la date d'expiration du mandat du gouverneur. Toutes les personnes vivant en Palestine ou ayant quitté le territoire depuis la guerre des Six Jours pourront voter et sont éligibles à ces institutions.
- Volets militaires et territoriaux
Article 1 : Les forces israéliennes quittent les territoires occupés depuis 1967 dans les six mois qui suivent l'adoption de cette résolution. Ces forces ne pourront en aucun cas intervenir en territoire palestinien quelle qu'en soit la cause. Les installations construites par Israël ­ routes, bâtiments, camps militaires etc. ­ sont cédées en l'état aux autorités de transition.
Article 2 : Une force d'interposition est placée sur la ligne de démarcation du 6 juin 1967. Ces forces ­ de l'ordre de 10 000 soldats et officiers ­ ont pour tâche principale d'interdire, y compris par l'usage de la force, tout passage entre des deux entités. Elle est placée sous commandement de l'UE avec la participation des Etats-Unis et des autres membres du quartet. Les forces israéliennes peuvent prendre toute disposition y compris la construction de murs et le placement de forces militaires afin de verrouiller la frontière à la condition expresse que ces éléments soit placés à l'intérieur des frontières de l'Etat d'Israël ­ celles du 5 juin 1967.
Article 3 : Toutes les colonies israéliennes sont transférées à l'intérieur du territoire israélien au plus tard six mois après l'adoption de cette résolution.
Article 4 : Pendant la phase de transition, Jérusalem, y compris la partie Est, reste sous l'autorité d'Israël. Des propositions pour le statut définitif de la ville sont faites par une commission nommée à cet effet par le secrétaire général des Nations unies. Le principe est que cette ville doit rester unie avec les autorités centrales des deux Etats. Si les Israéliens refusent, la ville est partagée le long de la frontière de 1967. L'annexion de la partie Est de la ville par Israël ­ qui n'a d'ailleurs pas été reconnue par la quasi-totalité des nations ­ est nulle et non avenue ainsi que les confiscations de biens et terres par Israël depuis 1967.
Article 5 : Les forces de police palestinienne, composées notamment des policiers de l'actuelle autorité, sont placées sous l'autorité du gouverneur qui nomme des officiers y compris à partir d'éléments extérieurs.
Article 6 : Une amnistie générale est décrétée pour les personnes condamnées pour des délits liés au conflit ­ y compris délits de sang. Les prisonniers détenus en Israël sont remis aux mains de l'autorité du gouverneur. De la même façon, les militaires israéliens ne sauraient être poursuivis pour faits liés au conflit et antérieurs à la signature de cet accord.
Article 7 : Un plan de démilitarisation est prévu dans l'accord. Il s'attache notamment une limitation de la future armée palestinienne en interdisant pendant vingt ans la possession d'armées de l'air et de mer et une limitation du nombre de chars d'assaut.
- Volet économique
Article 1 : Un plan type Marshall est décrété afin de reconstruire la Palestine. Il est doté d'un fonds conjoncturel de l'ordre de 10 milliards d'euros provenant des pays les plus riches (Club des 7, UE, Etats-Unis, etc.), des banques mondiales et des pays arabes. Ces fonds sont gérés par le gouverneur de la Palestine et affectés tant à la reconstruction des infrastructures ­ routes, hôpitaux, port et aéroport ­ que des maisons détruites par les combats. Les travaux de construction sont effectués par des ouvriers et techniciens palestiniens afin de faire redémarrer l'économie palestinienne.
Article 2 : Dans le même souci, l'UE, les Etats-Unis, le Japon et les pays arabes limitrophes acceptent de détaxer totalement les produits palestiniens pour une durée de deux ans à partir de la signature de ces accords.
Article 3 : Le fonds spécial dédommage les colons israéliens pour leurs propriétés à concurrence de 25 000 euros maximum à la condition que celles-ci soient laissées en bon état. Cette somme s'ajoute à celles qui peuvent être attribuées par les autorités israéliennes.
Article 4 : Les appartements et maisons laissées par les colons sont distribués par une commission nommée par le gouverneur notamment au profit de familles endeuillées par la disparition d'un membre pendant la guerre.
- Autres aspects
Article 1 : A la fin de la période intérimaire, les nouvelles autorités palestiniennes récupèrent leurs droits régaliens et peuvent adopter une loi du retour pour les réfugiés.
Article 2 : Un dédommagement est proposé aux réfugiés palestiniens et/ou à leurs descendants qui ont quitté la Palestine lors des guerres précédentes ­ et notamment celle de 1948. Un budget financé par les donations des organismes et Etats riches qui garantissent l'application de cet accord est créé et géré par une commission nommée par le secrétaire général des Nations unies. L'Etat d'Israël reconnaît une part de responsabilité dans l'expulsion de Palestiniens en 1948 et participe au fonds spécial à concurrence de 10 % de la totalité de la somme fixée par les Nations unies .
[- Contact : ben-ari@inmed.univ-mrs.fr]
                                   
36. Dans tous ses états - Portrait d'Ilan Halévy, 60 ans. Juif et Palestinien, proche d'Arafat et ex-ministre de Mahmoud Abbas. Endosse toutes ses contraditions. par Christophe Ayad
in Libération du mercredi 17 septembre 2003
ILAN HALÉVY EN 12 DATES
1943 Naissance à Lyon, dans la clandestinité.
1959 Musicien de jazz.
1962 Journaliste à la radio nationale malienne.
1964 Séjour en Algérie.
1966 Installation en Israël, où il milite dans l'extrême gauche antisioniste.
1974 Correspondant de «Libération».
1977 Premier séjour à Beyrouth pour rencontrer l'OLP.
1983 Représente l'OLP auprès de la Commission de l'ONU pour les droits de l'homme. Allers-retours avec Tunis, siège de l'OLP.
1991 Participe à la conférence de Madrid.
1996 S'installe à Ramallah.
2000 Début de la deuxième Intifada.
2003 Publie «Lettre de Ramallah» (Sindbad-Actes Sud), vice-ministre adjoint des Affaires étrangères dans le gouvernement démissionnaire de Mahmoud Abbas.
Oxymoron : «Figure qui consiste à allier deux mots de sens incompatibles pour leur donner plus de force expressive. Exemple : une douce violence.» Autre exemple : juif de nationalité palestinienne ou Palestinien d'origine juive, ce qui ne revient pas au même. Ilan Halévy, vice-ministre adjoint des Affaires étrangères du gouvernement démissionnaire de Mahmoud Abbas, est bien un oxymoron. CQFD. Mais, contrairement à ce que ce nom grinçant pourrait laisser croire, survient un homme petit et jovial, agile de corps et d'esprit, les yeux aux aguets, le teint de là-bas et l'allure d'ici, séduisant sans être beau. En scrutant son visage à la recherche d'un indice, on se dit qu'il a cette chance rare d'avoir l'air du coin où qu'il soit. Il parle couramment le français, l'arabe, l'hébreu, l'anglais, l'italien et l'espagnol.
Ilan Halévy est donc un diplomate palestinien portant un nom juif et se déplaçant avec un passeport français («Les Israéliens ont refusé que j'aie un passeport palestinien.») D'autres y voient un inextricable écheveau de contradictions, lui pas. Dans un conflit étouffé par les haines ethniques et confessionnelles, où l'identité est un tatouage mortel, Ilan Halévy veut continuer de croire que l'homme ne se résume pas à son ADN ni à sa tribu. Il y a longtemps déjà, il s'est choisi palestinien. Il rabroue ceux qui veulent voir en lui le symbole d'un avenir possible en commun. Ilan Halévy n'est pas israélien, il est palestinien, juif certes, mais palestinien. Jusqu'à sa façon de parler en français, lorsque la voix reste suspendue en fin de phrase, à la manière des Cisjordaniens. Jamais, il ne se souvient avoir eu droit à une remarque désobligeante en Palestine, ce qui n'a pas toujours été le cas ailleurs dans le monde arabe. Un jour, une secrétaire lui fait remarquer à Ramallah : «Ton nom est comme celui d'un juif. - C'est parce que je suis juif, a-t-il répondu. - Mais tu as l'air arabe. - C'est parce que je suis arabe. - Et alors qu'est-ce que ça fait d'être moitié-moitié, l'interroge-t-elle avec commisération. - Je suis à 100 % juif et à 100 % arabe.»
Quelle est la part juive alors ? «Comme l'a dit un jour Maxime Rodinson, je suis "juif à divers titres". Ce qui rassemble les juifs, c'est le fait d'appartenir à une communauté définie négativement de l'extérieur.» «L'antisémitisme, c'est le socialisme des imbéciles», a-t-il coutume de citer, lui qui est né en 1943 à Lyon dans un bureau de poste qui servait de planque à la Résistance. «L'ostracisme, la catégorisation, c'est ce qu'ont toujours fait les antisémites et les religieux. Pour moi, être juif c'est refuser tout statut à part. Je réclame le droit commun.» Ses parents, juifs résistants et communistes, étaient déjà viscéralement laïcs. «Il faut remonter à mon grand-père pour trouver un rabbin. Je sais que mon parcours intrigue. La curiosité qu'il suscite n'est pas très saine.» Comme Malraux, il pense que la vie privée est un «misérable petits tas de secrets». Tout ce qu'on saura c'est qu'il a eu cinq enfants, dispersés un peu partout sur la planète, et dont l'aîné, Laurent, musicien, est mort l'année dernière, laissant une blessure qui ne se referme pas.
Lorsqu'il est de passage à Paris, Ilan Halévy donne rendez-vous au café en face de chez lui, toujours le même, toujours à la même place, au fond de la salle avec un oeil sur la porte d'entrée. Il a gardé de vieilles habitudes de révolutionnaire professionnel, le sens de l'humour et de la fête en plus. «On ne connaît pas Ilan si on ne l'a pas vu danser», raconte une amie. Musicien de jazz à 16 ans, puis journaliste à la radio malienne en pleine fièvre postindépendance, c'est dans l'Algérie de Ben Bella qu'il découvre la cause palestinienne.
En 1966, il se rend pour la première fois en Israël, non pas pour faire son aliya (la «montée» synonyme pour les juifs d'installation sur la Terre sainte) mais pour le combattre de l'intérieur. Il mettra dix ans à comprendre «que toute volonté de détruire Israël ne fait que le renforcer». A comprendre surtout qu'Israël est une véritable nation, pas une simple création coloniale. Installé à Nahlaot, «un des rares quartiers de Jérusalem où l'on n'habite pas une maison volée», il tente de «s'établir» en travaillant comme docker, typographe, etc. tout en militant au Matzpen, un groupuscule d'extrême gauche antisioniste. Il travaille un temps comme journaliste - à Libération -, conçoit le journalisme comme un prolongement de son combat.
A son retour à Paris en 1976, il participe aux premiers contacts entre l'OLP et l'extrême gauche israélienne. D'interlocuteur, il devient compagnon de route et finit par être adopté par la famille OLP : l'évolution s'est faite toute seule. Ilan Halévy est un vrai homme d'appareil, un de ces rouages invisibles qui font tourner les partis. Et le parti, c'est Yasser Arafat. Il a pour le «raïs» une affection quasi filiale. Il assume tout, même les désaccords : l'alignement sur l'Irak pendant la guerre du Golfe de 1991 («traumatisant»), les négociations secrètes d'Oslo et l'accord bâclé, l'autocratie, la corruption, la militarisation de l'Intifada...
Tout comme Arafat et son entourage, Ilan Halévy vit dans un autre âge, comme s'il n'avait pas compris que les règles du jeu ont radicalement changé depuis le 11 septembre 2001. Alors qu'Arafat est au bord de l'expulsion, Ilan Halévy épilogue sur les byzantineries de la Moqataa. «Entre Abou Mazen et Arafat, c'était un peu comme entre Rocard et Mitterrand, ni meilleur, ni pire.» Il doit tout à Arafat : c'est lui qui l'a nommé représentant de l'OLP à la Commission des droits de l'homme de l'ONU et à l'Internationale socialiste. «Quand nous croisions des Israéliens, ils devenaient hystériques. J'étais un traître, un collabo.» Il est fier lorsqu'un responsable israélien l'apostrophe ainsi : «Vous, les Palestiniens...»
Parfois, le découragement perce la carapace du militant : «Pendant trente ans, l'OLP a déployé des trésors de patience pour distinguer les juifs, des Israéliens et des sionistes. Et maintenant...» Maintenant, la jeunesse palestinienne pense qu'un Israélien est un tankiste et que tous les juifs sont des colons. Il y a de quoi pleurer. Ilan Halévy juge les attentats-suicides «immoraux et politiquement nuisibles». «C'est une régression terrible, mais quand on vit là-bas, on comprend très bien pourquoi cela arrive. C'est de la vendetta : "Vous tuez nos femmes et enfants, nous aussi !" S'attaquer à des civils est criminel, mais résister à une armée d'occupation et à des colons armés est non seulement légitime mais reconnu par le droit international.» En avril 2002, pendant l'opération Rempart, son immeuble a été saccagé en son absence par des soldats israéliens. Puis, les chebabs du camp palestinien voisin sont venus piller ce qui restait. «Quand j'étais enfant, la guerre était simple, tout était noir ou blanc.»
                           
37. Le credo d’une vie par Azmi Bishara
in Al-Ahram Weekly (hebdomadaire égyptien) du jeudi 4 septembre 2003
[traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier]

(Tuer des civils, puis mentir effrontément : Ariel Sharon connaît ça, il le pratique depuis un demi-siècle. Azmi Bishara passe ici en revue la carrière du Premier ministre israélien.)
Sofia Mohamed Mahmoud Shamasna, Amina Isa Abdel-Halim Al-Faqih, Halima Hassan Ahmed Taha – trois femmes de Qatana, au nord-ouest de Jérusalem, abattues sur leur chemin vers le puits du village par des soldats en embuscade. Leurs noms n’ont jamais été rendus publics, et peu de gens savent – comme sans doute personne ne l’a su à l’époque – que la personne qui a donné l’ordre de les abattre, voici cinquante ans de cela, était un certain Sharon Ariel.
Au début de l’année universitaire 1952 – 1953, Sharon s’était inscrit à l’Université Hébraïque de Jérusalem, et il s’apprêtait à devenir étudiant lorsqu’il fut rappelé dans l’armée afin d’y prendre la direction d’un régiment de réservistes dans la région de Jérusalem. Peu après cette affectation, il rassembla ses officiers et leur déclara que les villageoises de Qatana passaient en territoire israélien, sans le savoir, lorsqu’elles allaient chercher de l’eau au puits. La frontière entre la colonie israélienne de Ma’aliya Hahmishah et le village de Qatana n’était pas clairement indiquée, leur dit « Arik », qui ajouta qu’afin de « corriger cette erreur », ils allaient monter une embuscade. « Arik » donna aussi à ses officiers la consigne de garder le plus grand secret sur ce projet afin qu’il ne parvienne pas jusqu’aux oreilles du Commandement central du district, ni au Quartier général.
Le scénario fut exécuté selon les moindres détails planifiés par Arik. Quatre tireurs d’élite furent positionnés nuitamment, et ils tirèrent, tuant deux des quatre femmes qui se rendaient au puits du village. L’artillerie jordanienne ouvrit le feu sur les villages israéliens du coin et l’artillerie israélienne répliqua. L’incident prit fin grâce à l’intervention d’observateurs des Nations Unies chargés de contrôler le cessez-le-feu. Plus tard, en expliquant l’incident à ses supérieurs, « Arik » fit un long exposé sur la différence qu’il y a entre tirer sur des cibles depuis une position immobile et les viser depuis une position mobile, durant des combats.
Ce récit des événements se trouve dans l’ouvrage d’Uzi Benziman intitulé « Il grille les feux rouges » [He Does not Stop at Red] (Adama Books, Tel Aviv, 1994, pp. 35-36). Ayant pris contact avec cet auteur pour recueillir sa confirmation de ce récit, il m’a confié que ses sources étaient des soldats qui avaient servi dans la même unité que Sharon. Après quoi je me suis rendu à Qatana où des habitants confirmèrent mes informations : trois femmes avaient été tuées cette nuit-là, et non deux. Je demandai alors quels étaient les noms des victimes. Je ne les avais trouvé dans aucune source israélienne. Je pensais qu’il était important de citer leur nom dans cet article. [Voilà qui est fait.]
Contrairement à l’impression prédominante chez les habitants des villages du nord-ouest de Jérusalem, ce crime atroce fut perpétré avant la création du tristement célèbre commando spécial – dit Unité 101 – lequel fut créé en réalité en août 1953. Dirigée dès sa création par Sharon, la mission de cette Unité 101 fut d’organiser des raids de représailles contre les villages palestiniens situés tout au long de la frontière jordanienne, ainsi que contre des cibles civiles dans la bande de Gaza et tout au long de la ligne d’armistice avec la Syrie.
Sharon organisa en personne la fusion de son unité avec la brigade de paras numéro 890, en janvier 1954, laquelle fut à son tour incorporée par Moshé Dayan dans le corps des paras, à la tête duquel Sharon se retrouva catapulté commandant.
C’est précisément cette Unité 101 qui légua à l’histoire militaire d’Israël son « mot de passe » le plus tristement célèbre. Quelques soldats israéliens ayant émis quelques scrupules quant à l’éthique qu’il y avait à prendre pour cible des civiles lors d’opérations de représailles, Shlomo Baum, sous-commandant de la célèbre unité, répondit abruptement : « C’est nettoyés que nos fusils doivent être : on n’a jamais dit qu’ils devaient être purs ! ». En d’autres termes, il revenait au soldat de s’assurer que son artillerie était en excellent état de fonctionnement et prête à l’usage au combat, et non de se soucier de critères moraux qui n’avaient que faire dans la foi combattante de cette unité. Les soldats de l’Unité 101, et ensuite ceux du corps des paras devinrent les modèles du combattant israélien agressif. Cette unité formula la doxa « morale » de toute l’armée israélienne. Non que le modèle qu’elle donnait ait été suivi dans tous les domaines, à l’exception notable de son implication dans des mensonges et des rapports falsifiés (pratique omniprésente dans l’armée israélienne), comme nous le verrons.
La première offensive effectuée par l’Unité 101 fut planifiée contre le camp de réfugiés Al-Bureij, durant la nuit du 28 août 1953. Ayant appris que sa présence avait été découverte, bien loin de se retirer, elle investit ce camp et quitta le champ des opérations par le côté opposé, se retrouvant ainsi au milieu de civils désarmés. Le massacre qui s’ensuivit causa la vie à 43 réfugiés palestiniens, dont sept femmes, et 22 blessés. Les pertes de l’Unité 101 s’établirent à deux blessés. Sharon avait mené personnellement l’attaque. Dans son rapport à ses supérieurs, il justifia l’énorme tribut en pertes humaines du côté des civils palestiniens comme suit : « L’ennemi a ouvert le feu contre moi depuis le nord-ouest… J’ai décidé qu’il était préférable de passer à travers le camp et de nous éloigner par l’extrémité opposée plutôt que de retourner là d’où je venais, parce que des cultures, des potagers, des fils de fer barbelés et des gardiens rendaient le mouvement périlleux dans cette dernière direction… J’ai décidé également que l’offensive était préférable au fait de donner l’impression que nous cherchions à fuir… C’est pourquoi j’ai investi le camp (de réfugiés) à la tête de ma formation. » [Benny Morris, Israel’s Border Wars : 1949-1956 – Les guerres frontalières d’Israël : 1949-1956, Aam Ufid, Tel Aviv, 1996, p. 273].
Comme l’illustre la dernière phrase de son rapport, Sharon préféra attaquer et tuer des civils plutôt que donner l’impression qu’il se retirait. L’équation est claire, et le prix payé est encore plus clair. Les observateurs internationaux du cessez-le-feu qualifièrent l’opération de Bureij d’ « exemple alarmant de massacre délibéré ». Le gouvernement israélien dénia, à l’époque, toute responsabilité dans cette opération, donnant à accroire aux diplomates occidentaux qu’elle avait été engagée en toute indépendance par des miliciens et des membres de kibbutzim proches de la frontière jordanienne, en représailles d’incursions perpétrées par des Palestiniens infiltrés. Ce mensonge, dans lequel l’Israël officiel se servait comme d’un paravent de civils israéliens agissant soi-disant de leur propre initiative, allait se répéter, à plus grande échelle, à Qibya.
Le 13 octobre 1953, le Premier ministre Ben Gourion rencontra le ministre de la Sécurité Yitzhak Lavon, ainsi que Moshe Dayan, chef des opérations au cabinet du chef d’état-major, pour décider avec eux de représailles à la suite de l’assassinat d’une femme juive et de ses deux enfants au cours d’une attaque à la grenade menée par sa maison par un Palestinien infiltré. Qibya fut considérée représenter une cible convenable et il existait déjà, apparemment, un plan prêt à l’emploi recommandant la démolition de 50 maisons dans ce village qui en comportait 280. Toutefois, ce qui doit retenir notre attention ici, c’est ce qui est advenu de l’ordre au fur et à mesure qu’il redescendait la pyramide hiérarchique du commandement militaire.
Sous la plume de Dayan, l’ordre indiquait : « Opération Shushna : Objectif : effectuer des représailles très dures contre des villages servant de bases à des opérations palestiniennes d’infiltration. Mission A : incursion à l’intérieur de Naalein et de Shiqba, dans le but de détruire un certain nombre de maisons et d’en blesser (seulement) ( !) les habitants. Mission B : attaquer Qibya, l’occuper temporairement, faire sauter des maisons et causer des blessures, forçant les habitants à fuir le village. »
L’ordre fut remis de la main à la main au Commandant de la Région Centre, qui le reformula comme suit : « L’objectif du Chef d’état-major est de monter des opérations impitoyables consistant à détruire et à tuer en représailles contre des villages arabes. La mission : attaquer Qibya, l’occuper temporairement, démolir des maisons et tuer autant d’habitants que possible afin de pousser (tous) les habitants à fuir et à abandonner leurs maisons… Envahir Naalein et Shiqba, détruire un certain nombre de maisons et tuer les habitants et les hommes en armes. »
Là, déjà, l’ordre était plus explicitement meurtrier que l’original, comme le démontre d’abondance l’adjonction du « tuer autant d’habitants que possible ». A l’époque, travaillait au Commandement de la Région Centre un certain David Alazar, officier d’opérations (qui devint plus tard, lors de la guerre de 1973, chef d’état-major). Son collègue au cabinet du chef de garnison était Rahboam Zaiffi, surnommé Gandhi. Suit la manière dont Sharon, commandant de l’opération, interpréta l’ordre donné aux forces qui devaient y participer :
« L’objectif du commandement est de monter des opérations de représailles impitoyables… La mission : envahir Qibya, l’occuper, tuer autant de gens que possible et faire le plus de dégâts possible… Envahir Naalein et Shaqba, tuer les habitants et faire sauter un certain nombre de maisons. »
Dans un article publié dans le quotidien Ha’aretz le 8 juin 1994, l’hagiographe semi-officiel de Ben Gourion, Shabtai Tibit, a tenté de réhabiliter l’ancien Premier ministre israélien. Il attribue la métamorphose de la feuille de route du commando à la culture militaire du Palmach, une organisation paramilitaire clandestine qui fut la pouponnière de la plus grande partie de l’élite militaire israélienne. La formule « tuer autant d’habitants que possible » (en hébreu : « causer une perte maximale de vies  ») était en usage au sein du Palmach depuis que la Haganah, le 12 décembre 1947, avait adopté une politique de « défense effective » et de « représailles systématiques ». En termes voilés mais clairs, Shabtai tient à nous suggérer que personne ne saurait être tenu responsable de la rhétorique prodigue en hémoglobine des ordres de l’opération contre Qibya, dès lors que de telles formulations sont profondément ancrées dans le credo militaire sioniste.
L’opération fut menée à « bien » dans l’après-midi du 15 octobre. Emportant 700 kilos d’explosifs, le commando fit sauter 54 maisons en trois heures. Soixante-dix villageois furent tués – des femmes et des enfants, pour la plupart. La majorité des victimes furent tuées par balles. Nombre d’entre elles périrent ensevelies sous les gravats de leur maison, aucun ordre ne leur ayant été signifié de l’évacuer.
Le massacre de Qibya suscita une vague mondiale d’indignation devant laquelle Tel Aviv publia le communiqué suivant : « Depuis quatre ans, les armées de Transjordanie (lire : du Royaume de Jordanie) et d’autres pays arabes s’infiltrent dans des « implantations » juives proches des frontières ainsi qu’à Jérusalem afin d’y perpétrer des meurtres et des vols. Des centaines de citoyens (« israéliens », bien entendu, ndt) – hommes, femmes, enfants et vieillards – ont été tués et blessés. Les gouvernements arabes ont endossé ces opérations directement et indirectement dans un but politique évident : détruire Israël et y rendre la vie impossible. A cette fin, ils ont exploité des réfugiés palestiniens, auxquels ils refusent d’accorder la citoyenneté et qu’ils n’aident en rien à remettre leurs affaires en ordre ( !) alors que le gouvernement d’Israël, lui, a aidé, et continue à aider des réfugiés juifs de pays arabes à s’installer dans ce pays… ». Le communiqué continue sur ce ton de prêchi-prêcha jusqu’à finalement asséner la position du gouvernement sur (le massacre de) Qibya : « Nous regrettons tous le sang versé, où que ce soit. Personne ne ressent plus de peine que le gouvernement d’Israël si du sang a été versé au cours de l’opération de représailles menée à Qibya. Toutefois, l’entière responsabilité (de ce regrettable incident) incombe au gouvernement de Transjordanie. Le gouvernement israélien rejette véhémentement la fiction qui voudrait que 600 membres des Forces Israéliennes de Défonce aient pris part à l’opération contre Qibya. Nous avons mené une enquête approfondie, et nous savons aujourd’hui, sans l’ombre d’un doute qu’aucune unité militaire, aussi petite ait-elle été, n’a été absente de son campement au moment des destructions dont il a été fait état à Qibya ».
Ce communiqué, lu officiellement par Ben Gourion en personne à la radio, est un mensonge éhonté, aggravé d’un sermon péremptoire et d’un déni mordicus d’une quelconque culpabilité. Combien cela est évocateur des communiqués publiés au lendemain des massacres de civils palestiniens, dans lesquels les officiels de l’armée israélienne assènent que des enquêtes scrupuleuses confirment qu’aucun soldat israélien n’a ouvert le feu et que la responsabilité doit être recherchée ailleurs ! Qu’importe, la déclaration de Ben Gourion suscita des haussements de sourcils en Occident. Des diplomates anglo-saxons, en particulier, trouvèrent difficile à gober que le chef d’un état démocratique ami puisse mentir de la sorte, avec un tel aplomb.
Mais n’est-ce pas là la doxa de l’école israélienne du machiavélisme : Israël doit toujours se montrer fort ? Il doit en permanence faire comprendre aux Arabes le prix extrêmement élevé qu’ils devront payer s’ils osent l’attaquer. Après quoi, justifiez ces actions en mentant comme un arracheur de dents. Telle est l’école politique et militaire à laquelle a été élevé Sharon, qui se vantera, plus tard, de la puissance dissuasive de Qibya et autres massacres similaires. Dans sa préface aux mémoires de Meir Haritson, Sharon vante les exploits de l’Unité 101 : « Ses succès les plus éclatants, l’Unité 101 les obtint à Qibya et à Hébron. Ces opérations changèrent la façon de penser de l’armée, et restaurèrent sa confiance en elle. Elles eurent un effet immédiat sur l’ennemi. Dans la région de Lod, où se produisaient de fréquentes infiltrations ennemies qui causaient beaucoup de pertes en vies humaines, le calme prévalut durant de nombreuses années. L’Unité obtint un succès similaire dans la région de Jérusalem. » [Meir Haritson, Memoir Chapters, Levine-Epstein, Tel Aviv, 1969, p. 16.)
L’Unité 101 mena de nombreuses opérations après son intégration dans la 890ème division parachutistes. Le 29 mars 1954, l’unité envahit le village de Nahhalin, tira quatre villageois de leur maison au beau milieu de la nuit et les abattit.
Le 26 mai, elle monta une opération analogue à Kherbat Janba, extrayant les gens de chez eux et les fusillant après leur avoir lié les mains derrière le dos. La co-star de Sharon, dans ces opérations, trop nombreuses pour en dresser ici l’inventaire, fut Meir Harzion, le héros de l’Unité par excellence [en français dans le texte, ndt], son combattant le plus brutal, devenu de nos jours une véritable légende dans la saga militaire israélienne.
Dans ses mémoires, le récit fait par Harzion de ses « aventures » du bon vieux temps évoque une forme de réalisation personnelle. La sœur d’Harzion, ainsi que son petit ami, avaient été tués par un Bédouin tandis que leur « promenade » les avait conduits (par erreur…) en territoire jordanien.
Trois semaines plus tard, le 4 mars 1955, Harzion se vengeait. Avec trois de ses potes paras, il traversa la frontière et se fraya un chemin jusqu’au campement appartenant à des membres de la tribu des Azazma et des Jahalin, situé à huit kilomètres à l’est de la frontière. Ils ouvrirent le feu. Un Bédouin, qui tentait de fuir, fut tué, et ils en capturèrent cinq autres. Après plusieurs vaines tentatives d’interroger leurs prisonniers – aucun des soldats ne connaissait l’arabe  – ils en tuèrent quatre en les poignardant (ou en les égorgeant, d’après un autre récit). Le cinquième fut laissé en vie : il fallait que quelqu’un puisse raconter ces hauts-faits édifiants…
Bien qu’initialement Ben Gourion eût condamné cette opération et ordonné que ses exécutants fussent jugés, personne ne fut mis en examen. Ce qui nous intéresse, dans cette histoire, c’est que l’armée israélienne était impliquée dans l’opération et que Sharon avait apporté un appui tactique aux assassins. Il leur avait fourni des armes, de la nourriture et des munitions, il les avait véhiculés à bord d’une jeep jusqu’à la frontière et il avait pris des dispositions afin que quelques paras se tiennent prêts à les « cueillir » dans leur retraite précipitée. Sharon avait donné également aux quatre « justiciers » l’ordre de ne pas coopérer avec la police. « Nous ne parlerons pas, c’est un ordre d’Arik », ne cessaient-ils de répéter aux officiers (de police) qui faisaient semblant de les interroger.
Le 22 juin 2003, au cours d’un débat au sein de son cabinet au sujet de la construction d’une (énième) colonie, Sharon dit à ses ministres : « Construisez, mais taisez-vous. Il n’y a absolument aucune raison d’aller danser dans les rues à chaque fois que l’autorisation de construire est accordée… Vous savez combien les liens de foi commune et de confiance qui nous unissent aux Etats-Unis sont puissants, alors… » (Yediot Aharonot, 23 juin 2003). On ne peut s’empêcher de se demander si Sharon a donné à ses fistons le conseil paternel de se prévaloir du « droit au silence » lors des enquêtes en cours sur des allégations de fraude fiscale formulées à l’encontre de Gilad Sharon...
                   
38. Un ex-chef du Mossad prône la libération de Barghouti
Dépêche de l'agence Reuters du jeudi 4 septembre 2003, 18h12

JERUSALEM - Un ancien directeur du Mossad israélien s'est déclaré jeudi favorable à la libération de Marouane Barghouti, ancien chef du Fatah pour la Cisjordanie, dans l'espoir de consolider le pouvoir du Premier ministre palestinien, le modéré Mahmoud Abbas.
Ephraïm Halevy, qui a dirigé les services d'espionnage de l'Etat hébreu de 1998 à 2002, et dont l'opinion sur les questions de sécurité est très respectée dans son pays, prône également l'abandon de la politique israélienne visant à refuser la libération de tout Palestinien "ayant du sang sur les mains".
"Cela vaudrait aussi la peine de remettre en liberté Barghouti (...) Sa libération pourrait grandement aider à consolider la ligne modérée d'Abou Mazen" (Mahmoud Abbas).
"Barghouti pourrait faire partie d'une direction palestinienne pragmatique avec laquelle il nous serait possible de travailler. Sa remise en liberté pourrait enfin avec une influence sur le comportement de la rue palestinienne."
Barghouti, soupçonné par les Israéliens d'être le chef des Brigades des martyrs d'El Aksa, responsables de nombreux attentats suicide, avait été capturé en avril 2002 à Ramallah et incarcéré en Israël. Il est actuellement jugé pour avoir orchestré des attaques et des attentats qui ont fait au total 26 victimes côté israélien.
L'intéressé nie toute complicité avec les auteurs des attentats attribués aux Brigades de martyrs d'El Aksa.
                       
39. Le tabou israélien… 55 ans déjà par Isabelle Humphries
Diffusé sur le réseau What Matters [http://www.whatmatters.org.uk] le jeudi 15 mai 2003
[traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier]
Le Caire - La « gauche » israélienne débat et polémique autour de l’occupation de la Cisjordanie et de Gaza, depuis 1967. Plus controversé encore, chez les soi-disant « peaceniks » est le futur de la ville de Jérusalem. Mais le dernier tabou reste sans conteste l’occupation de 1948 et la dépossession des Palestiniens. Remettre en cause l’action des juifs en 1948 est un sujet naturellement évité dans la bonne société israélienne, mais il est considéré inconvenant y compris par le mouvement « pacifiste » israélien. La reconnaissance de l’injustice que représente la poursuite de l’occupation depuis 1967 est essentielle, bien entendu, mais une solution authentique et équitable ne pourra émerger tant que les Israéliens juifs n’auront pas pris en compte le problème de 1948. J’ai vécu près de trois ans à Nazareth, la plus grande ville palestinienne à l’intérieur des frontières (israéliennes) de 1948. Près d’un tiers des habitants de Nazareth ont perdu leur habitation et leurs terres en 1948 et sont venus se réfugier dans la ville. Même si l’occupation de la Cisjordanie et de la bande de Gaza devait prendre fin demain, l’injustice commise à l’encontre des réfugiés de Nazareth, pas plus que celle causée à leurs frères et sœurs au Liban, n’aurait été réparée.
Ces dernières semaines, l’affaire Teddy Katz, cet étudiant chercheur israélien de l’université de Haïfa, a une nouvelle fois fait sa réapparition dans les informations. Les recherches historiques de Katz ont apporté la preuve qu’un massacre a été commis, en 1948, dans le village palestinien de Tantura, (au nord, près de la côte méditerranéenne), par la (redoutable) brigade Alexandroni. En dépit de la rigueur scientifique de sa thèse, des directeurs de thèse de l’université de Haïfa ont décidé que même la version « corrigée » de sa thèse, qu’ils avaient exigée, serait rejetée. L’affaire Katz n’aurait jamais attiré autant qu’elle l’a fait l’attention du public sur le massacre de Tantura, si les efforts des autorités israéliennes pour la faire mettre au pilon n’avaient pas été aussi acharnés. Des universitaires qui ont soutenu Katz, en particulier le Dr. Ilan Pappe, se sont vu menacer de perdre leur poste pour avoir osé défier les mythes fondateurs de 1948. « Dans l’atmosphère actuelle de peur et de conformisme régnant dans la communauté académique israélienne, il est très facile de susciter une douzaine d’avis défavorables sur n’importe quel travail – a fortiori s’il s’agit de mémoires d’étudiants – qui serait critique vis-à-vis du sionisme ou d’Israël », a pu écrire Ilan Pappe. L’affaire Katz a apporté la démonstration du niveau du déni et du tabou que représente tout débat autour de la Nakba (catastrophe représentée pour les Palestiniens par la guerre de 1948 et la perte de leur pays, ndt) au sein de la société israélienne.
Cinquante cinq années ont passé, depuis la Nakba. En apprenant qu’un groupe de militants juifs organisait une cérémonie commémorative à Deir Yassine, afin d’honorer la mémoire des victimes de l’un des massacres sans doute les mieux connus et l’expulsion des Palestiniens à la suite de la Nakba, j’ai été piquée par la curiosité. M’attendant à moitié à ce qu’il s’agirait du petit couplet habituel, dans le genre : « Faisons une petite cérémonie, après quoi nous n’aurons plus à nous sentir coupables en rentrant chez nous, dans notre magnifique maison ancienne en pierres de taille, à flanc de colline, qui appartenait jadis à une famille palestinienne… », j’allais avoir une agréable surprise. Parlant au téléphone avec l’un des organisateurs, Yosef Mekyton, je lui ai dit, pour me présenter : « J’ai travaillé avec une ONG de Palestiniens de 1948… » Je me suis tout de suite rendu compte que peut-être il ne comprendrait pas que j’entendais, par là, les Palestiniens vivant en Israël. Aussi ai-je commencé à expliquer : « Oh, j’imagine que vous parlez des « Arabes d’Israël »… « En fait, non, je n’emploierais pas cette expression d’Arabes d’Israël », me répondit-il. (Cette circonlocution est utilisée en Israël car elle permet d’éliminer le mot « Palestinien » du vocabulaire).
« Oh », dis-je à la fois surprise et rassurée. « Et moi qui pensais que l’on pourrait compter sur les doigts de la main les Israéliens qui n’utilisent pas cette expression - les « Arabes d’Israël » !… »
L’association Zochrot (qui tire son nom d’un verbe hébreu signifiant : « se souvenir ») compte environ dix membres fondateurs et plusieurs autres personnes qui participent à ses activités. « Notre groupe se propose d’assumer la responsabilité de 1948 », m’explique Yosef, « et de reconnaître que ce qui a été fait en notre nom à l’époque continue encore aujourd’hui. » Le groupe a trois activités principales : préparer un site ouèbe en hébreu consacré à la Nakba, élever le niveau de conscience dans les écoles juives au sujet de l’histoire quel les programmes scolaires israéliens font tout pour occulter et apposer des panneaux et des plaques sur les sites des villages palestiniens détruits. « De nombreux monuments et panneaux routiers signalent la perte de soldats israéliens à tel ou tel endroit durant les guerres. Mais vous ne trouverez aucune allusion à la destruction de la vie palestinienne, vous pouvez le vérifier dans tout notre paysage tant culturel que géographique », explique la lettre d’intention de l’association, rédigée par le militant Eitan Bronstein. Le groupe est déterminé à changer cet état de fait, et la cérémonie de Deir Yassine s’insérait dans le cadre de cette action. Le 9 avril 1948, 93 Palestiniens ont été tués, à Deir Yassine, par les commandos de l’Irgoun et du groupe Stern, et figurent parmi les victimes, notamment, un certain nombre de prisonniers qui avaient été au préalable emmenés à Jérusalem et montrés à la foule comme dans l’Antiquité. Cinquante cinq ans plus tard, les protestataires se sont rassemblés sur le lieu du massacre, où s’élève aujourd’hui l’hôpital psychiatrique israélien de Kfar Shaul, sur le mur d’enceinte duquel ils ont apposé une liste des victimes, en hébreu et en arabe, après quoi ils ont planté un panneau indicateur avec le nom du village palestinien de ‘Deir Yassine’. Abdul Barakat, quatre-vingt un ans, dont la mère était de Deir Yassine, et dont dix-sept membres de sa famille ont été tués lors du massacre, s’est adressé à un groupe d’environ quatre-vingt juifs et vingt Arabes. Bientôt, un nombre presque équivalent de policiers arrivèrent sur les lieux, ainsi que des dizaines de juifs ultra-orthodoxes des immeubles voisins, pour déverser des tombereaux d’insultes sur les manifestants.
 « La douleur palestinienne est illégitime ; toutes les expressions de douleur sont considérées hostiles et menaçantes », continue Bronstein. « Israël considère la peine de ses citoyens arabes comme une menace pour l’existence juive ici et maintenant ». Si l’association compte parmi ses adhérents des Palestiniens vivant à l’intérieur des frontières de 1948, elle s’adresse essentiellement aux citoyens juifs. « Nous n’avons pas besoin de mettre au courant les Palestiniens de ce qui leur est arrivé en 1948… » ; m’a dit Yosef, « ce dont nous avons besoin, c’est de nous informer nous-mêmes. » Le groupe est en train de traduire en hébreu des documents importants écrits par des historiens palestiniens afin de mettre l’information à la disposition du public juif. Ils s’efforcent d’élargir leurs contacts avec des associations de réfugiés palestiniens afin qu’ils leur donnent leur avis sur leurs diverses activités et de transmettre aux Palestiniens le message que des Israéliens sont déterminés à œuvrer  afin de bousculer le déni profond de la Nakba au cœur de la société israélienne. La critique souvent soulevée par les Palestiniens et les participants aux campagnes internationales pour les droits des Palestiniens porte sur le fait que les militants israéliens ne parviennent pas à comprendre que la reconnaissance du dol subi par les Palestiniens devrait les conduire logiquement à apporter un soutien concret au Droit au retour. J’ai soulevé la question du « Droit au Retour » avec Yosef : c’est un sujet qui dissuade bien des militants de soutenir les mouvements « pacifistes » israéliens.
« Notre groupe n’a pas pris de position officielle sur le droit au retour », dit Joseph, « mais, sur le plan personnel, la plupart de nos adhérents seraient plutôt enclins à affirmer qu’il s’agit d’une revendication légitime, pour les réfugiés palestiniens. Toutefois, nous pensons qu’en raison du profond déni dans lequel vit la société israélienne, notre première mission, aujourd’hui, consiste à travailler simplement à ce que soit reconnu ce qui a été fait contre le peuple palestinien en 1948. C’est la tâche prioritaire. » Et ce n’est pas une tâche aisée. Persuader les écoles israéliennes de permettre à des conférenciers de parler de la Nakbah aux élèves, ou de diffuser des documents alternatifs dans les classes, c’est une tâche de Sisyphe. Les panneaux indiquant des villages non reconnus sont parfois arrachés par des résidents juifs.
Les citoyens juifs d’Israël qui défendent les droits des Palestiniens sont parfois considérés par le gouvernement comme encore plus traîtres que les citoyens arabes. Ils se font rejeter et insulter, on les qualifie de « juifs haineux d’eux-mêmes ». Un exemple parlant est le cas de ces deux militants juifs qui ont été soumis à une campagne des médias locaux de leur région afin qu’on leur retire leurs enfants sous prétexte qu’ils seraient des « parents indignes ». Même si les citoyens israéliens juifs authentiquement radicaux sont rares, et si on en rencontre rarement, il ne faut pas oublier qu’il y a quelques personnes qui pensent que leur statut d’Israéliens leur impose une obligation morale de redresser les torts causés aux personnes dépossédées au nom de la création d’un Etat juif.
« La mémoire collective sioniste empêche les juifs de reconnaître la part qu’ils ont prise dans la destruction, d’accepter leur responsabilité et, par conséquent, de travailler à une véritable réconciliation avec les Palestiniens. Le peuple juif n’a jusqu’ici jamais rien fait et il continue à ne rien faire qui puisse laisser entrevoir sa volonté de reconnaître la part qu’il a prise collectivement dans les souffrances des Palestiniens. Apposer des plaques et des panneaux indiquant les villages palestiniens détruits s’insère dans une action plus large en vue de l’égalité civile et nationale dans notre pays. Signaler physiquement ces villages et organiser des débats publics autour de la Nakba palestinienne, voilà qui est susceptible d’encourager un discours plus éthique et de révéler tant les victimes que les responsables des violences ».
Zochrot
[Isabelle Humphries fait des recherches sur la situation des réfugiés palestiniens qui vivent à l’intérieur des frontières (israéliennes) de 1948. Titulaire d’une maîtrise de sciences politiques consacrée au Moyen-Orient, elle a travaillé durant trois ans avec des ONG palestiniennes. Elle a souvent traversé la frontière de 1967. On peut la contacter à l’adresse E-mail suivante : innazareth@yahoo.co.uk]
                                                           
Document

Dans cette rubrique nous vous présentons des textes auquels les médias font référence sans les présenter dans leur intégralité.
                                           
- "Jeteur de pierres" paroles de la chanson du groupe musical Sniper extrait de l'album "Gravé dans la roche"
S’établir dans une contrer, en devenir résidant,
Se l’approprier, y expulser ces habitants,
Misérable gens soumis par droit de conquête et placer sous dépendance politique du conquérant,
Quêtes dominatrice à la recherche d’un Etat,
Voilà le résultat d’une puissance colonisatrice,
Aider d’l’occident, ils ont tués et chassés ses justifie ces terres sacré par présence d’antécédent,
Qui parle d’occupation, Parle de résistance,
Qui parle de colonisation, Parle forcement d’indépendance (danse),
Entre 2 feux,
Danse dans une salle ou danse entre les balles pour esquivé un couvre feux,
Des animaux cour dans les champs,
Des hommes sont libre,
Des animaux sont dans des cages et des hommes sont dans des camps,
Vivre comme on l’entend, clôturer dans un enclot,
Liberté par pour l’moment, Oslo est tomber à l’eau,
Sanglot, cette vie fait reup,
J’écrit et j’cri juste le combat d’un peuple qui s’bat pour sa patrie,
L’Amérique s’est battu pour avoir son indépendance,
Les résistant face aux allemands pour pouvoir libérer la France,
Tunisien et Algérien eux même ont en fait autant,
Donc les Palestiniens veulent un Etat au Proche-Orient,
Et c’est ça l’blème,
Toi tu parle de fanatisme et l’conflit ne résume pas qu’à d’l’antisémitisme,
Laxiste, le monde laisse faire et s’défile pendant qu’tu tue des civils et les appels terroristes,
On fait mine d’être concerner mais dans l’fond on s’en fou,
Regarde sans être d’outrer tant qu’sa n’arrive pas à nous.
Jeteur de pierres 
Tout l’mondes sait qu’ton pays est en guerre 
Pas d’aides humanitaires vu qu’les colons te volent tes terres 
Mais si triste 
Toujours la même morale, les mêmes balles, le même mal, la même spirale.
J’te resitue le contexte pour comprendre faut reprendre les choses à la base même du problème,
Sa dure depuis des siècles,
Terres convoiter, nombreuses ont été les conquêtes,
Différentes religions, différentes communautés,
Pour tout un lieu Saint chargé d’histoire,
L’ironie du sort, il en a vu couler du sang,
Juste événement les plus récent,
Le territoire a peu connu la paix, comprend c’est un peu dur d’y croire
Pour tout les frères, les jeunes de mon age qui ont grandi dans cet atmosphère,
Et qui ont vu ça toute leurs vie,
Les mains nues face à une armée prêtent à ré-ti,
S’faire dynamité,s’apparente à d’la résistance,
Quoi qu’il arrive c’est toujours des civils qui morfles et les morts ne se compte plus,
On a tous vu les mêmes chose aux infos,
Les balles contre les pierres jeter par des enfants,
J’invente rien, les faits parles d’eux même,
Dans les deux camps y’a des extrêmes,
Faut pas tout confondre contredit les sionistes,
Et tu passe pour un antisémite en 2 secondes,
C’est l’oppresseur qui prend l’rôle de la victime,
C’est l’art de la faire à l’envers et pour eux elle est belle,
Depuis qu’Israël a obtenu son indépendance sa s’envenime,
La spirale fatale du conflit commence,
L’Etat Arabe promis par l’O.N.U ne sera pas,
S’en suivra la guerre des 6 jours s’abra et chatti,
La 1ère Entifada la révolution des pierres,
Massacre sur massacre,
Période meurtrière et de nos jours on peut pas dire qu’sa va en s’arrangeant,
Sujet tabou et dérangeant, j’me devait d’être clair,
Issu d’la même famille,
Enfant d’Ismaël et d’Israël,
Sont des cousins mais trop d’gens oublient qu’les juifs du Maghreb on longtemps vécu en harmonie,
Avec les musulmans certain y vivent encore aujourd’hui.
Le mensonge est larme de l'intelligent,
Les médias l'ont compris,
Se l’approprient et l’utilisent à tes dépend,
Parle de leurs biens faits mais jamais de leurs défauts,
Injecte leurs carottes en sachet et joue avec nos cerveaux,
Parle de parents qui envoient leurs enfants au combat,
Mais pourquoi ?
Pour faire passer ses gens pour des sauvages,
Tu f’rais quoi, si on avait tué ton père et détruit ton toit ?
J’parle pour moi ou Hak’Allah, j’aurais envie d’faire un carnage,
Haine pour haine, balles perdu et plus ;
Palestiniens dans les rues,
Israéliens dans les bus,
Le mal par le mal, venger les tiens,
Tu n’peux plus rien enlevé a ceux qui n’ont plus rien,
Plus d’accord de paix ni d’cesser l’feux,
Rien qu’sa cogne ça c’est la politique de Sharon,
Ariel comme la lessive, noir de sentiment, blanchit par les médias et les States comme adoucissant ,
Dans s’coin du monde ou la paix reste difficile a défendre,
Issa Kra bine en a fait les frais et s’est fait descendre,
Malheuresement on peut pas revenir en arrière,
Les R.D.V manquer d’l’histoire on gfait que d’remuer la merde,
Comme si c’était préméditait,
Processus de paix qui foire et toujours des territoires occupé,
Des blindés qui tirent, des gosses qui jouent sur des mines,
Ce qui veulent mourir en martyres prêt a partir,
Terre de convoitises, lieu Saint
Posé les armes dire Inch’Allah, bonjour, shalom et salam,
J’suis pas l’avocat du pauvre ais sa m’fait al et tu sait si j’en parle c’est parce que personne le fait,
Refré vires tes œillères y’en a assez, le dire m’a soulager même si j’peux rien échanger,
Si a tes yeux on prend position, comprend bien,
qu'on parle pas en tant que musulmans mais en tant qu'êtres humains.