Rassemblement à Marseille ce soir à 18h
 
 
Point d'information Palestine > N°149 du 23/05/2001

Réalisé par l'AMFP - BP 33 - 13191 Marseille FRANCE
Phone + Fax : +33 491 089 017 - E-mail : amfpmarseille@wanadoo.fr
Association loi 1901 - Membre de la Plateforme des ONG françaises pour la Palestine
Pierre-Alexandre Orsoni (Président) - Daniel Garnier (Secrétaire) - Daniel Amphoux (Trésorier)
Sélections, traductions et adaptations de la presse étrangère par Marcel Charbonnier
 
Si vous ne souhaitez plus recevoir (temporairement ou définitivement) nos Points d'information Palestine, ou nous indiquer de nouveaux destinataires, merci de nous adresser un e-mail à l'adresse suivante : amfpmarseille@wanadoo.fr. Ce point d'information est envoyé directement à 2478 destinataires.
                             
Aujourd'hui mercredi 23 mai 2001 à 18h
Rassemblement pacifique de soutien au peuple palestinien
devant le Consulat général d'Israël à Marseille - 146, rue Paradis - Marseille 6ème (M° Estrangin / Préfecture)
à l'appel de  Résister!, Discrimination Zéro et de la Ligue Communiste Révolutionnaire
Sept ans après la signature à Washington des accords d'Oslo, les frustrations liées aux engagements signés et non respectés par les administrations israéliennes successives ont conduit le peuple palestinien à cette seconde Intifada. Neuf mois après le début de l'Intifada Al-Aqsa, le peuple palestinien enterre ses morts et pleure ses espoirs déçus de paix... Ce constat nous pousse aujourd'hui à nous élever :
- Contre la répression sanglante des civils palestiniens par l'armée israélienne
- Contre l'injustice d'une occupation militaire ayant dépassé le demi-siècle
Le retour aux négociations et le retour à l'apaisement, que nous souhaitons  ne pourra se faire, aussi longtemps que des colonies israéliennes continuent à être construites pendant que les Palestiniens restent enfermés dans leur prison collective. Les seules négociations qui vaillent aujourd'hui doivent porter sur les modalités d'un retrait israélien de tous les territoires occupés en 1967.
               
Au sommaire
     
Rendez-vous
           
1. Dernière rencontre avec six jeunes réfugiés palestiniens du Liban à Septèmes-les-Vallons le mercredi 23 mai 2001 à 19h
2. "Tirons la chasse" Spécial Palestine le dimanche 27 mai 2001 de 11h à 13h sur Radio Galère (88.4 Mhz)
3. Rencontre "Israël / Palestine : sortir de la crise" avec Isabelle Avran et Marwan Bishara le lundi 28 mai 2001 à 19h30 à la Maison Robert Doisneau de Gentilly
4. Crise en Palestine - Crise au Moyen-Orient Conférence avec le soutien d'Edward Saïd et Noam Chomsky le samedi 16 juin 2001 de 10h à 18h à l'Université d'Edinburgh (Bristo Square) en Ecosse [traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier]
           
Réseau
           
1. Communiqué de l’Aide Sanitaire Suisse aux Palestiniens
2. Lettre d'Israel Shamir [traduit de l'anglais par Annie Coussemant]
3. Israël court à la catastrophe par Alexandre Prohanov [traduit de l'anglais par Annie Coussemant]
            
Revue de presse
                
1. "Israël s'est tiré une bombe dans le pied" (Correspondance) in Le Monde du mardi 22 mai 2001
2. La Ligue arabe prône l'arrêt de tous les contacts politiques avec Israël par Alexandre Buccianti in Le Monde du mardi 22 mai 2001
3. Une onde de choc parcoure Ramallah par Pénélope Larzilliere in La Croix du lundi 21 mai 2001
4. Je hais Israël par Pénélope Larzilliere in La Croix du mardi 22 mai 2001
5. L'UE rappelle sèchement à Israël ses obligations par Yves Clarisse Dépêche de l'agence Reuters du lundi 21 mai 2001, 18h44
6. Des ONG et des députés européens demandent l'annulation de la visite de Sharon à Paris par Françoise Germain-Robin in L'Humanité du lundi 21 mai 2001
7. Trois questions à... Leïla Shahid Propos recueillis par Mouna Naïm in Le Monde du dimanche 20 mai 2001
8. Le défi, la dignité, et le dogmatisme par Edward Saïd in Al-Ahram Weekly (hebdomadaire égyptien) du jeudi 17 mai 2001 [traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier]
9. Les Juifs qui remettent en cause la politique d'Israël en question font l'objet de menaces par Michael Lerner in The Los Angeles Times (quotidien américain) du vendredi 18 mai 2001 [traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier]
10. Coup de théâtre de l'Intifada In L'Orient-Le Jour du vendredi 18 mai 2001
11. Liban-Syrie-Palestine - Retour à la symbiose triangulaire in Le Magazine (hebdomadaire libanais) du vendredi 11 mai 2001
12. Sultan Abou el-Aïnaïn "Affrontons ensemble la machine de guerre d'Israël" in Le Magazine (hebdomadaire libanais) du vendredi 11 mai 2001
13. Le retour de l'OLP au Liban in Le Magazine (hebdomadaire libanais) du vendredi 11 mai 2001
                    
Rendez-vous
              
1. Dernière rencontre avec six jeunes réfugiés palestiniens du Liban à Septèmes-les-Vallons
le mercredi 23 mai 2001 à 19h
Les Centres Sociaux Belsunce-Porte d'Aix à Marseille et La Gavotte Peyret à Septèmes-les-Vallons, en partenariat avec l'Association Médicale Franco-Palestinienne (Aubagne et Marseille) et l'association Ajial France, en liaison avec le Centre Ajial de Beyrouth, accueillent à Marseille et dans sa région, jusqu'au 24 mai prochain, six jeunes réfugiés palestiniens du Liban. Ces jeunes, cinq garçons et une fille, âgés de 19 à 25 ans, sont issus de différents camps de réfugiés palestiniens du Liban. Ils vont suivre, durant cette période, plusieurs formations intensives dans les domaines de la nouvelle technologie, et en particulier autour des outils liés à Internet. L'objectif étant, dans un premier temps, de créer un "pont" durable entre les habitants de Marseille et de ces camps palestiniens. [Contact presse - Yasser Khellef : 06 61 43 24 00]
Après les deux rencontres organisées le week end dernier à Aubagne et à Marseille, une dernière rencontre publique est organisée ce mercredi 23 mai 2001 à 19h, à la Maison municipale de l'enfance - Centre aéré - 8, avenue Nelson Mandela à Septèmes-les-Vallons (à 15 minutes de Marseille par l'autoroute nord).
[Renseignements auprès de Hossine Bensaïd : 04 91 51 23 28]
                  
2. "Tirons la chasse" Spécial Palestine
le dimanche 27 mai 2001 de 11h à 13h sur Radio Galère (88.4 Mhz)
"Tirons la chasse", le magazine hebdomadaire de Radio Galère (Marseille), sera consacré cette semaine à la situation en Palestine. William Ferrari recevra, Daniel Garnier et Pierre-Alexandre Orsoni, respectivement secrétaire et président de l'Association Médicale Franco-Palestinienne (Marseille), ainsi que Annie Fiore, journaliste spécialiste de la question palestinienne et auteur de Rêves d'indépendance - Chronique du peuple de l'Intifada aux éditions de L'Harmattan (1994). Par ailleurs plusieurs directs seront réalisés avec la Palestine avec :
- à Ramallah, Olivier Boudart, ancien chef de mission de Vétérinaire sans Frontière en Palestine et actuellement chargé du programme de Sécurité alimentaire de la Commission européenne en Palestine,
- à El Khalil (Hébron), Chantal Abu Eïsheh, professeur de français au Centre Culturel Français de Jérusalem,
- à Gaza, Anis Gandeel, Coordinateur pédagogique d'Enfant Réfugiés du Monde à Gaza,
et un entretien avec un ministre de l'Autorité palestinienne.
             
3. Rencontre "Israël / Palestine : sortir de la crise" avec Isabelle Avran et Marwan Bishara
le lundi 28 mai 2001 à 19h30 à la Maison Robert Doisneau de Gentilly
Maison Robert Doisneau - 1, rue de la Division du Général Leclerc à Gentilly (94)
Cette rencontre est organisée par la Plateforme des ONG françaises pour la Palestine en marge de "Palestine, entre le bleu du ciel et le sable de la mémoire", une exposition de photographies de Joss Dray, Miki Kratsma, Fayez Nureldine et John Tordai à la Maison Robert Doisneau à Gentilly du 26 avril au 1er juillet 2001.
"Israël/Palestine : sortir de la crise" autour de Isabelle Avran, secrétaire générale de l'Association France Palestine, auteur de "Israël/Palestine, les Inventeurs de paix", Co-édité par l'Atelier et le CCFD. 176 pages, 95 francs (mars 2001), et Marwan Bishara, journaliste, chercheur palestinien, auteur de "Palestine/Israël, la paix ou l'apartheid". Ed. La Découverte, Collection Sur le vif - 128 pages - 42 FFr (avril 2001), animée par Thierry Brésillon, journaliste, rédacteur en chef de Faim Développement Magazine, CCFD (Comité Catholique contre la Faim et pour le Développement).
[Renseignements : Rachel Lyon/Latifa Tayah : 01 44 18 60 50]
                   
4. Crise en Palestine - Crise au Moyen-Orient
Conférence avec le soutien d'Edward Saïd et Noam Chomsky
le samedi 16 juin 2001 de 10h à 18h à l'Université d'Edinburgh (Bristo Square) en Ecosse
[traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier]
Union des étudiants Teviot Row
Le siècle dernier a connu la conquête de la Palestine par les Sionistes et le nettoyage ethnique visant la population indigène. Aujourd'hui, le peuple palestinien soit continue à survivre dans des camps de réfugiés sordides depuis plus de cinquante trois ans, sous occupation militaire, soit sont les citoyens de seconde catégorie d'Israël, ou bien encore sont éparpillés aux quatre vents. L'intifada actuelle est la réponse populaire à une occupation militaire illégale et raciste.
Robin Cook se donne pour "ami du peuple palestinien", mais la Grande-Bretagne refuse :
- de cesser de vendre des équipements militaires à une armée exerçant une occupation illégale
- d'exiger que les réfugiés soient autorisés à retourner dans les maisons et sur les terres qui leur ont été volés
-  d'exiger le retrait d'Israël des territoires occupés
- de voter les propositions de résolutions de l'ONU condamnant le recours 'disproportionné' d'Israël à la violence.
Et cela, tout en :
- participant à des bombardements aériens de l'Irak, supposé empêcher la prolifération d'"armes de destruction massive" ;
- facilitant les bombardements de l'aviation turque contre les Kurdes dans la région dont elle prétend "assurer la protection" ;
- aidant à armer l'Israël de Sharon, la seule puissance nucléaire de la région.
La conférence du samedi 16 juin examinera le Moyen-Orient en tant qu'arc de pays en crise, depuis la Turquie jusqu'à l'Irak :
Programme
10h00 / 11h15
- Les Palestiniens, l'occupation militaire et les droits de l'homme : un audit, par Liz Hodgkin, Amnesty International. Le dernier rapport du Département américain pour les droits de l'homme critique très vivement Israël pour ses infractions au droits de l'homme à l'encontre des Palestiniens. Quel est le sort actuel des Palestiniens vivant sous occupation israélienne ?
Modérateur : Linda Fabiani, MSP
- Apartheid, Afrique du Sud et Israël par Melissa Levin, ANC (Afrique du Sud : African National Congress)
Pourquoi l'Afrique du Sud et Israël coopèrent-ils aussi intensivement dans des domaines tels l'armement nucléaire et l'entraide économique. Le père de l'apartheid, Henrick Vervoerd, disait qu'"Israël, comme l'Afrique du Sud, est un pays d'apartheid".
Modérateur : Wael Shawish, Comité pour les Droits des Palestiniens, Glasgow.
11h30 / 12h45
- La honte de l'OTAN - le goulag turc par Brian Quail (membre d'une commission d'enquête sur les prisons en Turquie)
Plus d'une cinquantaine de prisonniers politiques et de parents de ces derniers sont morts après avoir mené une grève de la faim au cours des derniers mois. Des centaines poursuivent leur jeûne mortel dans les prisons turques, en protestation contre la torture, les passages à tabac systématiques et les viols. Brian Quail rendra compte d'une visite effectuée là-bas cette année.
Modérateur : Lloyd Quinan, MSP
- L'armement nucléaire d'Israël par Géraldine Sinkie, CND, Glasgow
L'Israël de Sharon détient le monopole de l'armement nucléaire dans la région, avec une centaine ou deux cents missiles nucléaires pointés en direction de toutes les capitales dans la région. Des membres du cabinet de Sharon ont déjà proféré des menaces guerrières contrel'Iran et l'Egypte (en menaçant de bombarder le Haut barrage d'Assouan). Geraldine Sinkie a correspondu avec Mordechai Vanunu, qui a subi quatorze ans d'isolement carcéral total pour avoir révélé des détails sur l'arsenal nucléaire d'Israël.
Modérateur : David Turner, Secrétaire de la Campagne d'Edinburgh contre le commerce des armes (CAAT)
13h45 / 15h
- L'holocauste, le sionisme et le nettoyage ethnique contre le peuple palestinien par Donnie Gluckstein, Palestine Solidarity Campagin (auteur du Capitalisme, les Nazis et la classe ouvrière). La mise en cause des crimes israéliens contre le peuple palestinien intervient sur fond de la réalité de l'extermination de millions de Juifs durant la domination des Nazis sur la plus grande partie de l'Europe. Donnie Gluckstein, auteur et historien au Stevenson College, à Edinburgh, analysera les relations entre l'antisémitisme européen, la solution finale des Nazis, le sionisme et le traitement criminel infligé par Israël aux Palestiniens.
Modérateur : Phil Attridge, Edinburgh
- Ces Kurdes qu'on ne saurait voir par Estelle Schmidt, coordonnatrice de la campagne pour la Paix au Kurdistan. Estelle est active également au sein du Comité de Solidarité Kurde, dans le cadre de la campagne pour le Barrage d'Ilisu. L'Etat turc, n'est pas seul à dénier au million de Kurdes qui vivent à l'intérieur de ses frontières leurs droits démocratiques et nationaux fondamentaux. L'armée turque, équipée par la Grande-Bretagne, conduit une politique de terreur dans les régions kurdes. Les Kurdes doivent, à l'instar des Palestiniens, être comptés au nombre des victimes du statu quo, mais ils ne sont pas les seuls. Tant la Turquie que l'Israël d'Ariel Sharon confirment le dicton qui veut qu'"une nation qui en opprime une autre ne peut pas être libre elle-même".
Modérateur : Yusuf Öztürk, défenseur des droits des Kurdes
15h15 / 16h30
- Une guerre silencieuse contre les enfants d'Irak par Richard Burne, Des Voix dans le Désert
Les statistiques sont horrifiantes : les démissions en cascade des personnels des Nations Unies chargées de l'application des sanctions sont éloquentes. Les sanctions de l'ONU contre l'Irak sotn une guerre contre la population ordinaire de ce pays. Richard Byrne était en Irak il y a peu. Il apportera un témoignage de première main sur la chaos créé par les sactions qui affectent des millions de vies humaines. C'est les victimes du dictateur irakien qui sont punies. Pendant ce temps, la base électoral d'Ariel Sharon bénéficie d'aides financières occidentales très importantes.
Modérateur : John Watson, officier écossais, Mouvement pour le Développement mondial.
- Palestine : Comment les Palestiniens conquièrent-ils leur liberté ? par Anne Alexander, auteur de "La nouvelle Intifada".
Israël bénéficie de l'entier soutien diplomatique, économique et militaire des Etats-Unis et des Etats occidentaux en général. Il détient l'arme atomique et la quatrième armée du monde. Les Palestiniens n'ont à leur disposition que des pierres, des armes légères, l'énergie du désespoir et un courage invincible, un sens aigü de l'injustice, mais c'est pratiquement tout. Face au nettoyage ethnique sioniste déterminé, passé et présent, peuvent-ils échapper au sort de bien des nations aujourd'hui disparues qui ont été poussées dans les marges ou dispersées ?
Modérateur : Dr. Hisham Ghanayem, Campagne de Solidarité avec la Palestine. (Grande-Bretagne)
17h / 16h
- Session finale : La crise au Moyen-Orient par George Galloway, député (Member or Parliament)
Modérateur : Mick Napier, Palestine Solidarity Campain.
- table de presse -
- Inscription : £5 (£2,5 pour les sans-emploi) - Contact : 0131-447-3967 - E-mail : edinburgh@palsolcam.freeserve.co.uk
- Chèques à l'ordre de PSC - PSC c/o Peace & Justice Center, Princes St, Edinburgh EH2 4BJ
- Conférence parrainée par : Scottish Palestine Solidarity Campaign  edinburgh@palsolcam.freeserve.co.uk / Scottish Campaign for Nuclear Disarmament  cndscot@dial.pipex.com / Campaign against the Arms Trade  http://caat.org.uk / Voices in the Wilderness  http://welcome.to/voices.uk / Campaign against Sanctions on Irak  http://www.cam.ac.uk/societies/casi/contact.html / Campaign for Peace in Kurdistan  http://www.knklondonagn.apc.org
              
Réseau
           
1. Communiqué de l’Aide Sanitaire Suisse aux Palestiniens
L’Aide Sanitaire Suisse aux Palestiniens (A.S.S.P.) salue avec une vive satisfaction la résolution adoptée le 21 mai 2001 par la 54ème Assemblée Mondiale de la Santé sur la situation sanitaire en Palestine. Limitée strictement aux compétences de l’OMS, cette résolution a été proposée par les pays européens. Les pays arabes qui auraient souhaité y ajouter une demande au Directeur général de l’OMS de se rendre de toute urgence sur le terrain et aux Nations Unies d’y envoyer une mission d’observateurs internationaux s'y sont ralliés.
La résolution qui rappelle un principe primordial de la Constitution de l’OMS, selon lequel la santé de tous les peuples est une condition fondamentale de la paix et la sécurité, se fonde sur le droit public international qui s’impose à Israël et aux accords que cet Etat a conclus avec l’OLP et qui seuls, nous le soulignons, engagent formellement les deux parties.
Réaffirmant le droit inconditionnel du peuple palestinien à créer un Etat souverain et indépendant,  l’OMS s’est déclarée profondément préoccupée face aux bouclages des zones palestiniennes et à l’intérieur de ces zones. Ces entraves compromettent gravement les programmes de santé et la prestation de services en particulier en faveur des mères et des enfants. La vaccination et la lutte contre les épidémies, la santé scolaire, le contrôle et la salubrité de l’eau, la lutte contre les ravageurs, la santé mentale et l’éducation sanitaire  sont remises en question.
L’Assemblée générale s’est aussi déclarée profondément préoccupée par les politiques d’implantation de colonies israéliennes dans les territoires palestiniens occupés, y compris dans Jérusalem-Est, en violation du droit international, de la Quatrième Convention de Genève et des résolutions pertinentes des Nations Unies. En outre, étant donné les conséquences néfastes du bouclage sur la situation économique, elle a tenu à souligner la nécessité de préserver l’intégrité territoriale de tout le territoire palestinien occupé et de garantir la liberté de circulation des personnes et des biens ainsi que la libre circulation entre le territoire et le monde extérieur.
Après avoir déploré vivement la recrudescence de la violence et l’usage excessif de la force contre les Palestiniens, la résolution appelle à la reprise des pourparlers pour que s’instaure une paix juste, durable et globale au Moyen-Orient. Elle invite instamment les Etats Membres ainsi que les organisations intergouvernementales, non gouvernementales et régionales à apporter promptement une aide généreuse pour assurer le développement sanitaire du peuple palestinien et faire face aux besoins humanitaires urgents.
Pour que cette résolution ne soit pas qu'un texte s'ajoutant à beaucoup d’autres, incontestables mais restés sans effets, l’Aide Sanitaire Suisse aux Palestiniens (A.S.S.P.) s’adresse à celles et à ceux qui, alertés par les  faits,  se sentent impuissants à  faire changer une situation intolérable. L'ASSP voudrait les persuader que ceux qui ont le pouvoir de prendre des décisions efficaces doivent y être encouragés, sinon contraints par leur opinion publique. Elle invite chacun et chacune à mieux s'informer et  à faire connaître leurs préoccupations  en famille, au travail, dans toutes leurs activités sociales. Elle les invite en outre à alerter depuis leurs bases les  collectivités sportives,  culturelles, professionnelles, politiques et religieuses pour qu'elles exigent jusqu'au plus haut niveau des responsabilités  les décisions et les mesures qui doivent être prises en conformité tant avec la morale universelle qu'avec le droit public international.
[Aide Sanitaire Suisse aux Palestiniens - 15, rue des Savoises - 1205 Genève SUISSE - Fax : 022 329 82 43 - E-mail : jvittori@Cortex.ch  - ccp 12-11690-7]
              
2. Lettre d'Israel Shamir
[traduit de l'anglais par Annie Coussemant]

Chers amis - En ce jour où les avions israéliens  F-16 jets ont bombardé Ramallah et Naplouse, je voudrais vous présenter l'hebdomadaire Zavtra publié à Moscou, qui me fait l'honneur de publier mes articles de temps à autre. Il s'agit d'un journal combattant qui prend délibérément parti en faveur d'une Russie indépendante et de la Palestine. Il publie largement aussi bien les opinions de gauche que de droite dès lors que les prises de position s'opposent à la mondialisation néo-libérale. Assurément, il ne s'agit pas d'une tribune " politiquement correcte ". Les gens qui écrivent dans ce journal ne font pas partie d'un " club " élitiste. Dans ses pages, on trouve également l'expression d'idées relativement extrémistes qui interpellent tout un chacun. C'est là le prix de la liberté d' expression et, à cet égard, Zavtra est libre, nettement plus libre que n'importe quel quotidien américain. Son rédacteur en chef,  Alexandre Prohanov, a rédigé l'éditorial (ci-dessous) dans un style éminemment dogmatique qui n'est pas sans rappeler les propos de Gibbon ou de Hugo. Il fait un panégyrique émouvant du peuple palestinien ainsi que de l'homme qui personnifie la Palestine aux yeux des Russes : Yasser Arafat. Son texte n'est pas sans rappeler l'apologie de Staline que l'on doit à Pablo Neruda ou à Eluard, à l'époque de Stalingrad. Prohanov se garde bien de trancher dans les différends politiques opposant les partis palestiniens. Il se contente d'accepter les choix de ce peuple et de le soutenir. Faisons de ses propos l'expression d'un encouragement aux Palestiniens en cette période d'horreur.
                   
3. Israël court à la catastrophe par Alexandre Prohanov
[traduit de l'anglais par Annie Coussemant]
De nos jours, les pays dont, en d'autres temps, l'action a ébranlé le monde, qui se sont efforcés d'inspirer des révolutions de grande ampleur et sont allés peupler de nouveaux continents et imposer leur foi et leur religion révélée, observent d'un œil torve les donneurs de leçon qui les ont embobinés dans l'idée d'un nouvel ordre mondial, tandis que les miettes des ripailles américaines aboutissent dans leur gamelle, que le FMI préconise d'avaler les potions concoctées par Circé, et qu'on les titille en agitant de loin le fantôme d'un avenir totalement fictif, celui du " rêve américain ".
Tout pays qui ose se rebeller et agiter ses chaînes est immédiatement rappelé à l'ordre par les censeurs électroniques de CNN. Il voit son cuir transpercé par les éclats des missiles Tomahawk, et sa bouche bâillonnée par l'argument qui réduit tout individu au silence, celui des " victimes de l'Holocauste ". Le peuple russe a oublié les mots de Pouchkine comme les victoires du maréchal Zhukov. Les Latino-américains ont oublié Sandino et Che Guevara. Ils se contorsionnent souplement à l'occasion du Carnaval, revendent la drogue et fournissent une main-d'œuvre à bon marché sur les chantiers de construction de Californie. Les Américains n'ont que faire de l'élan des pionniers vers l'Ouest et du corps de John Brown. La larme à l'œil, ils regardent l'écran de leur télévision, rendent hommage à qui de droit et envoient docilement leurs enfants tuer des Serbes ou des Irakiens.
Un seul et unique foyer céleste nous envoie un rayon qui vient percer la carapace déliquescente qui enserre l'humanité. Tel le doigt de Dieu, ce rayon plasma illumine la population palestinienne. Où que ce rayon éclaire la Terre, et peu importe qu'il fasse de Gaza, de  Jérusalem ou d'Hébron des lieux saints, l'Histoire est en marche devant nos yeux. Comme au temps des prophètes, une nation prie, tire et répand son sang, reprend les chants de la lutte, se dresse face aux chars juifs, détruisant à mains nues mais les yeux remplis de larmes, les chenilles d'acier, opposant aux tirs tous azimuts les cadavres de leurs enfants. Les Palestiniens révèlent au monde aussi pusillanime qu'impuissant le sens des mots " liberté ", " patrie " et " dieu ".
Si Israël court à la catastrophe, c'est que les Arabes, les Français, les Anglais, voire le peuple même de cet État sont dégoûtés. L'ardente Intifada est le fleuve indomptable qui entraîne et engloutit à jamais un autre mythe du XXe siècle : la théorie du Sionisme. Conformément aux dessins de Herzl et de Jabotinsky, une petit monstre géopolitique a vu le jour en terre arabe. Ses colons ont imposé à l'Amérique et à l'Allemagne de leur verser un tribut de 5 milliards de dollars par an. Ils ont arrosé les mosquées au napalm et transformé des nations entières en réfugiés sans abri. En invoquant " les cendres d'Auschwitz ", ils ont lavé le cerveau de tous les habitants de la Planète.
Là où s'étendait Israël, les Arabes planteront des figuiers et des cèdres du Liban par milliers. Ils en feront un parc national qui constituera l'habitat naturel d'un grand perroquet de toute beauté, parlant l'hébreu. Le triste peuple juif partira et ira s'installer ailleurs sur la Terre. Pourquoi pas à Brooklyn ? S'il s'enferre dans ses erreurs, les Américains n'auront qu'à lui organiser une nouvelle Intifada.
Yasser Arafat est bien le dernier leader national de cette fin de siècle. Ce grand homme de Palestine a été élevé par son peuple dans la foi en la liberté, à l'endroit où la distinction entre le combat terrestre et le combat divin s'estompe en même temps que disparaît la limite entre la Vie et la Mort. Dieu est venu à son peuple en s'incarnant dans un dirigeant sage et incorruptible, ne connaissant ni la peur ni la fatigue. Cet homme pleure les fedayin qui sont tombés, serre l'orphelin dans ses bras, essuie les larmes des veuves, quitte avec ses combattant Beyrouth embrasée, pénètre dans la tanière du Monstre à Camp David, lit les pages mutilées du Coran de Sabra et Shatila, et baise la terre brûlante de sa Palestine natale. Arborant son rameau d'olivier et sa Kalachnikov, Arafat, le Palestinien, avance dans l'Histoire sur la voie de l'immortalité.
" Oh toi, rameau de Palestine, où as-tu grandi, où as-tu fleuri ? … " disait le poète russe, Lermontov. Et le rameau répondit : " j'ai grandi dans le Jardin d'Éden de Dieu, Notre Seigneur. La poignée et la crosse de mon fusil mitrailleur sont faites de mon bois solide. Mes feuilles ardentes, telles les gouttes échappées d'un cocktail Molotov, s'envolent pour se poser sur le blindage des chars israéliens. Mes fleurs agrémentent le drapeau de l'OLP, criblé de balles. Mes fruits sont suaves pour les héros et les martyrs, aussi suaves que la Liberté..."
                 
Revue de presse

                  
1. "Israël s'est tiré une bombe dans le pied" (Correspondance)
in Le Monde du mardi 22 mai 2001

Bien que réputés plus proches du gouvernement d'Ariel Sharon que le quotidien Haaretz, les quotidiens Maariv et Yedioth Ahronoth, n'ont pas été, dimanche 20 mai, moins sévères que leur confrère de centre gauche en commentant la riposte israélienne à l'attentat de Netanya, vendredi 18 mai. "On peut comprendre certaines réactions venue des tripes appelant à utiliser les F-16, écrit Hemi Chalev dans Maariv. Mais on est en droit d'attendre plus de hauteur de vue de la part du premier ministre, du ministre des affaires étrangères, du chef d'état-major et de ses généraux. L'homme de la rue peut perdre sa raison, mais pas le pays.
La décision d'envoyer les chasseurs bombardiers pour attaquer des villes de Cisjordanie et de la bande de Gaza était une erreur diplomatico-stratégique si grossière qu'il est difficile de l'expliquer autrement que par un manque de sang-froid." "Israël, poursuit Hemi Chalev, s'est tiré une bombe dans le pied. (…) Les bombardements ont augmenté les appels à une intervention internationale, conformément au scénario d'Arafat. Ils pourraient pousser les Etats-Unis à accepter les propositions les plus sévères du rapport Mitchell concernant les colonies, illustration qu'Israël fait vraiment, ainsi que l'affirme le rapport, un usage démesuré de sa force."
PERTE D'"ÉQUILIBRE"
Alex Fishman, dans Yediath Arhonoth, estime que "la revanche est une preuve de faiblesse et de frustration. Le gouvernement qui avait promis de ramener le calme et la sécurité se retrouve (...) entraîné dans une escalade incontrôlée. Il est difficile de ne pas avoir l'impression que la décision d'envoyer des chasseurs pour bombarder des objectifs en Cisjordanie relève plus des tripes que du cerveau. (…) Cette initiative indique que quelqu'un, chez nous, a, quelque part, perdu son équilibre et est en train de perdre son calme, ou sa patience."
                
2. La Ligue arabe prône l'arrêt de tous les contacts politiques avec Israël par Alexandre Buccianti
in Le Monde du mardi 22 mai 2001

LE CAIRE, de notre correspondant
La Ligue arabe a recommandé, samedi 19 mai, l'arrêt de "tous contacts politiques avec Israël tant que l'agression et le blocus se poursuivent contre le peuple et l'Autorité palestinienne". Dans un communiqué publié à l'issue de huit heures de réunion du comité ministériel de suivi issu du sommet arabe du Caire d'octobre2000, la Ligue a indiqué qu'elle demandera à "tous les pays de boycotter totalement les produits des colonies israéliennes". Le nouveau secrétaire général de la Ligue, Amr Moussa, a appelé à "une protection internationale des civils palestiniens".
Aux yeux de la presse arabe, le comité ministériel de la Ligue a comblé les "lacunes" laissées par le sommet arabe de soutien à l'Intifada même s'il n'est pas allé jusqu'à satisfaire la rue qui réclame la rupture des relations diplomatiques avec Israël. Un discours que l'on n'entendait plus en Egypte depuis la signature du traité de paix en 1979 et qui a été scandé par des manifestants réunis devant le siège de la Ligue arabe au Caire.
C'est une première dans une Egypte où les manifestations en dehors des campus sont sévèrement réprimées. Cette tolérance inhabituelle reflète l'exaspération du Caire face au rejet par le gouvernement israélien d'Ariel Sharon de toutes les tentatives de médiation, notamment celle initiée par l'Egypte et par la Jordanie.
Gardant en mémoire une récente visite au Caire du ministre israélien des affaires étrangères, Shimon Pérès, qui avait tourné court, les responsables égyptiens, qui jusque-là modéraient les appels radicaux de pays comme la Syrie, en ont conclu que puisque "les tentatives de dialogue ne servent à rien au stade actuel, autant les suspendre", comme nous a confié une source proche du pouvoir.
AMBASSADE SYMBOLIQUE
Le nouveau ministre des affaires étrangères égyptien, Ahmed Maher, a d'ailleurs opposé une fin de non-recevoir, le 18mai, à une nouvelle demande de rencontre de M.
Pérès. Un refus qui vient s'ajouter à celui opposé par le président Hosni Moubarak à M.Sharon au lendemain de l'élection de ce dernier au poste de premier ministre. Compte tenu de ce contexte, le secrétaire de la Ligue, qui s'était illustré par ses sorties anti-israéliennes quand il dirigeait la diplomatie égyptienne, n'a pas hésité à critiquer implicitement les Etats-Unis et à s'en prendre "à la faiblesse du monde arabe". Une occasion en or pour celui qui veut tirer la Ligue arabe de sa léthargie.
Le président Moubarak a mis en garde contre la grave détérioration de la situation qui, selon lui, risque de conduire à "un point de non- retour", à "une catastrophe nuisible aux intérêts de l'Occident et des Etats-Unis dans la région". Le "raïs" devait rencontrer, lundi, Javier Solana, le haut représentant de l'Union européenne pour la politique étrangère. L'ancien pilote de combat de l'armée égyptienne a, par ailleurs, appelé les présidents américain, George W. Bush, français, Jacques Chirac, et russe, Vladimir Poutine, pour les informer de "la gravité de la situation" après "l'usage ahurissant de F-16" contre les Palestiniens.
M. Maher a également contacté son homologue américain, Colin Powell, pour lui demander de ne pas s'opposer à une réunion du Conseil de sécurité sur la situation explosive dans les territoires palestiniens. M. Maher a aussi contacté le secrétaire général de l'ONU, le ministre des affaires étrangères de Suède, pays qui préside actuellement l'Union européenne, ainsi que les chefs de la diplomatie française et russe.
Toutefois, ce dernier a tenu à mettre un bémol aux recommandations de la Ligue en indiquant qu'elles "ne concernent pas les traités de paix ni les ambassades existantes". Une ambassade qui, côté égyptien, est devenue purement symbolique puisque l'ambassadeur d'Egypte, rappelé de Tel-Aviv le 21 novembre 2000, ne réintègrera son poste que "quand cesseront les agressions israéliennes contre les Palestiniens".
                  
3. Une onde de choc parcoure Ramallah par Pénélope Larzilliere
in La Croix du lundi 21 mai 2001

Soudain, une onde de choc parcoure la ville, les lumières s'éteignent. Sur les terrasses des cafés où la population de Ramallah profite du beau temps, chacun s'interroge du regard. Puis très vite, les téléphones portables sonnent de toute part et les nouvelles tombent : les Israéliens ont bombardé avec des avions de combat F16 un bâtiment des Forces 17 à Ramallah et la prison principale de Naplouse. Un mort a Ramallah, 11 a Naplouse, prisonniers et gardiens. Dans les cafés, les musiques d'ambiance se taisent ou sont remplacées par des chants nationalistes pour honorer leur mémoire. L'emploi pour la première fois depuis 67 d'avions de combat fait grosse impression. « Après il ne leur reste plus que la bombe atomique » s'exclame Hisham, jeune ingénieur qui s'est précipité sur les lieux du bombardement. "C'est à la fois l'indignation et le sentiment d'abandon qui l'emportent » souligne Bilal as-Shafi, professeur a l'Université de Naplouse, «en utilisant des avions de combat, contre une Autorité qui dispose tout au plus de quelques mitraillettes, il nous semble que les Israéliens ont voulu nous dire : vous êtes à notre entière merci, personne ne peut vous protéger." Une manifestation de protestation est organisée pendant la nuit a Ramallah par le comité national et islamique de direction de l'Intifada  «nous ne sommes pas surpris parce que le gouvernement Sharon est un gouvernement de guerre et nous nous attendons à tout de sa part » souligne Marwan Barghouti. Le lendemain, les rues sont vides, les magasins fermés en signe de deuil. Comme à chaque nouvel échelon militaire franchi par Israël, la peur et la nervosité sont présentes et une grande partie de la population a préféré rester chez elle. Environ 2 000 personnes ont assisté aux funérailles de l'officier des Forces 17 tué à Ramallah tandis que des dizaines de milliers de personnes suivaient celles des 11 morts de Naplouse. A la suite des funérailles, un Palestinien de 20 ans a de nouveau été tué d'une balle dans la tête à Naplouse par l'armée israélienne, alors que les raids aériens israéliens reprenaient au Nord de la Cisjordanie et que deux autres Palestiniens se faisaient tuer. Beaucoup cependant s'étonnent du choix de la cible des bombardements. « Ils prétendent agir en représailles mais pourquoi s'attaquent-ils à l'Autorité Palestinienne alors même que l'attentat a été reconnu par le Hamas et condamné par l'Autorité Palestinienne » se demande ainsi Kifah, chercheur et militant du FPLP. « Quoi qu'il arrive les Israéliens veulent faire le lien avec Arafat pour pouvoir le rendre responsable et qu'internationalement il soit fait pression sur lui. » analyse Awad, journaliste, «c'est pourquoi ils ont cessé de parler des Tanzim et de Marwan Barghouti et se concentrent sur les Forces 17. Comme c'est la garde d'Arafat, il n'y a plus d'ambiguïté et la démonstration est faite : si les Israéliens s'attaquent aux Forces 17, c'est bien la preuve qu'elles sont engagées dans l'Intifada et qu'Arafat est directement responsable. » « Ce que les Israéliens ne comprennent pas » reprend Kifah  «c'est que cette fuite en avant ne les mènera nulle part et qu'avec toute cette violence, ils sont en train d'élever un monstre sur les territoires dont on ne sait pas ou il nous mènera. » Effectivement, chaque mort et chaque blessé supplémentaire pousse de nouveaux Palestiniens à s'engager et augmente amertume et détermination. Pour la première fois, la Croix-Rouge s'est exprimée publiquement sur la situation sur les territoires et a dénoncé «les crimes de guerre », soulignant que les actes d'une population occupée ne pouvaient pas être mis sur le même plan que ceux d'une puissance occupante toute puissante. Yasser Arafat a quant a lui qualifié de «terrorisme d'Etat », les raids aériens israéliens. Le ministre de l'information et de la culture palestinien Yasser Abed Rabbo a mis directement en cause les Etats-Unis pour ces raids effectués par des F16 de fabrication américaine. On peut voir dans cette dénonciation la déception de l'Autorité Palestinienne suite au peu d'impact du rapport de la Commission Mitchell sur la politique américaine. L'OLP avait accueilli très favorablement les recommandations de ce rapport ; tout particulièrement satisfaite par la reconnaissance de la contradiction entre sécurité israélienne et poursuite de la colonisation.
             
4. Je hais Israël par Pénélope Larzilliere
in La Croix du mardi 22 mai 2001

« Je hais Israël. Je hais la destruction. Je hais Israël à cause du Golan et du Sud-Liban.  Les enfants continuent à mourir. Ils ne sont pas coupables. » Le chanteur égyptien Shaban Abed al-Rahim a obtenu un certain succès sur les territoires palestiniens soulevant de vives réactions en Israël. « Apres 480 morts dont la moitié ne participaient même pas à des manifestations, 15 000 blessés dont 1 500 à vie, les maisons détruites, les bombardements, les hectares de terre expropriés, les humiliations quotidiennes aux barrages militaires, qu'attend Israël de nous ? » demande Ammar, statisticien de 29 ans, «que nous restions de gentilles victimes attendant patiemment le jour ou ils daigneront reconnaître nos droits et nous laisser vivre ? Bien sûr que nous détestons l'occupant ! Et lorsque Rabbi Ovadia Yosef (un des leaders du parti du Shas) appelle à la mort des arabes cela ne déclenche pas les même réactions  ». Dans les rues de nombreuses affiches rappellent aux passants les visages des morts de l'Intifada et chaque journée qui passe en fait apparaître de nouvelles. Le contraste est saisissant entre les visages au regard sérieux et à l'arrière plan, les corps blessés, crâne ouvert, oil transpercé, abdomen déchiqueté. Des expositions sur l'identité palestinienne ont été organisées dans des centres culturels et des universités, à Hébron et Ramallah notamment. Elles présentent les traditions artisanales palestiniennes comme les broderies, les tapis, les céramiques, le verre soufflé. Mais sont également mises en avant la littérature, la peinture, et la musique, de même que les produits manufacturés et les inventions technologiques, en informatique tout particulièrement. A coté, dans de grandes salles tendues de noir, l'histoire du soulèvement palestinien et de ses morts est mise en scène. Les organisateurs font clairement le lien entre les deux parties de l'exposition : ces hommes et ces femmes ne doivent pas être oubliés parce qu'ils sont morts pour défendre l'identité d'un peuple. C'est le même message qui passe sur la télévision nationale palestinienne et les nombreuses télévisions privées locales. Les informations y diffusent chaque jour leur lot d'images sanglantes. Jeunes lanceurs de pierre qui s'écroulent, touchés par des balles réelles et sont évacués par des ambulances du Croissant Rouge, sirènes hurlantes. Blessés ou morts sur des lits d'hôpitaux. Funérailles des morts de la veille. Maisons détruites, appartements bombardés aux pièces ensanglantées. Hier, Haytha Souf, 31 ans, habitant d'Haris, village en zone B à coté de Naplouse, paralysé à vie par la balle qui l'a atteint lorsque l'armée israélienne a envahi une fois de plus le village. Après les informations, entre débats, pièces de théâtre, films et reportages reviennent en leitmotiv ces images de l'Intifada al-Aqsa mêlées à celles de la première Intifada ou même de Feydahin des années 70. Sur fond de mosquée Al Aqsa, des jeunes courent levant haut le drapeau palestinien, lancent des pierres contre des chars, se font battre ou descendre par des soldats. Des femmes pleurent sur des corps sans vie. La caméra s'attarde sur les terrasses de pierre plantées d'oliviers qui recouvrent les collines. « Je vous appelle, j'ai senti mon sang dans mes paumes mais je continue à faire face au tyran. » » chante un chour. « Chaque semaine voit des attaques israéliennes pour éliminer des leaders activistes palestiniens. De plus, l'armée israélienne entre maintenant régulièrement sur les territoires sous juridiction de l'Autorité Palestinienne pour détruire des maisons et des positions militaires et pour arracher des arbres » souligne Danny Rubinstein dans un article publié dans Haaretz, journal de gauche israélien, «le résultat principal de la campagne d'usure israélienne a été jusqu'à maintenant l'exact opposé de ce qu'Israël avait en vue. La campagne a produit une plus grande haine et a généré des demandes de revanche parmi les Palestiniens. »
             
5. L'UE rappelle sèchement à Israël ses obligations par Yves Clarisse
Dépêche de l'agence Reuters du lundi 21 mai 2001, 18h44

BRUXELLES  - L'Union européenne a sèchement rappelé Israël à ses obligations en matière de respect des droits de l'homme dans les territoires occupés, sans toutefois brandir de menace explicite de sanctions contre l'Etat hébreu.
Les représentants israéliens au comité d'association UE-Israël qui s'est tenu à Bruxelles pour la première fois depuis l'arrivée d'Ariel Sharon au pouvoir, ont estimé que les Européens faisaient ainsi preuve de partialité.
L'Union européenne exerce depuis une semaine une pression maximale sur Israël, du moins dans les discours, pour l'inciter à faire preuve de plus de retenue dans son conflit avec les Palestiniens et à retourner à la table des négociations.
Après le commissaire aux Relations extérieures, Chris Patten, qui a fait la semaine dernière un discours remarqué au Parlement européen, et l'adoption d'une résolution très dure à Strasbourg, ce sont les gouvernements des Quinze qui ont sorti l'artillerie lourde contre la politique d'Israël.
Dans une déclaration lue par la présidence suédoise de l'UE devant les représentants d'Israël, et dont une copie a été obtenue par Reuters, les Quinze se montrent très tranchants.
"L'UE a toujours reconnu les préoccupations légitimes d'Israël en matière de sécurité, mais ces dernières doivent être rencontrées en respectant pleinement les droits de l'homme et dans le cadre de la règle de droit", peut-on y lire.
Colonies juives "illégales"
Les Quinze, qui ont longuement soupesé chaque ligne de cette déclaration depuis une semaine, ont rappelé que l'article 2 de leur accord d'association stipulait que la relation entre l'UE et Israël était basée sur le respect des droits de l'homme.
Ce passage pourrait être interprété comme une menace voilée de sanctions, qui prendraient la forme d'une suspension de cet accord de libre-échange, même si les ministres des Affaires étrangères des Quinze s'y refusent pour l'instant.
Dans ce cadre, "l'utilisation disproportionnée de la force (contre les Palestiniens) est inadmissible", tout comme les "assassinats extra-judiciaires" de Palestiniens, ajoutent-ils.
Le bouclage des territoires occupés par Israël, le maintien et l'extension des implantations juives, "qui sont illégales en droit international" et le refus de payer les sommes dues aux Palestiniens sont selon l'UE des obstacles à la paix.
Les Quinze ont réitéré leur volonté de voir un Etat palestinien se créer aux côtés de l'Etat d'Israël. "(L'UE) réaffirme sa conviction que la création d'un Etat palestinien souverain démocratique, viable et pacifique serait la meilleure garantie pour la sécurité d'Israël et son acceptation comme un partenaire à part entière dans la région", ont-ils estimé dans leur déclaration.
L'Union européenne demande également aux deux parties de reprendre le chemin des négociations sur la base du rapport américain Mitchell et du plan jordano-égyptien.
Règles d'origine
Le vice-directeur des Affaires européennes au ministère israélien des Affaires étrangères, Ehud Gol, qui a quant à lui défendu son pays en proie au "terrorisme palestinien", a dit n'avoir pas été surpris par cette position européenne.
Mais il n'a pas caché son irritation.
"L'Union européenne devrait jouer un rôle équilibré dans le conflit", a-t-il déclaré après la réunion du comité.
Harry Kney-Tal, l'ambassadeur d'Israël auprès de l'UE, a estimé que les discours comme ceux de Chris Patten "donnent l'impression aux Arabes que l'UE est de leur côté".
"Après tout, l'UE veut jouer un rôle au Moyen-Orient", a-t-il expliqué en soulignant qu'elle aura l'occasion d'évoquer tous ces problèmes le 6 juin prochain, lors de la visite à Bruxelles du Premier ministre israélien Ariel Sharon.
Après ce dialogue politique de sourds, la réunion du comité d'association n'a pas non plus permis d'avancer sur les dossiers techniques à l'ordre du jour.
L'UE soupçonne Israël de détourner les "règles d'origine" qui lui permettent d'exporter ses produits librement vers le marché européen: plusieurs pays estiment que l'Etat hébreu classe dans cette catégorie des oranges ou des agrumes cultivées dans les colonies juives situées dans les territoires occupés.
"Nous avons toujours dit (...) qu'on n'accorderait pas de traitement préférentiel pour des produits qui ne sont pas originaires d'Israël", a souligné le représentant de la Commission, Peter Zangl, lors d'une conférence de presse.
Mais l'UE entend mener à bien toute la procédure d'examen de ce dossier, qui est pendant depuis des années, avant de prendre des mesures, alors que les responsables israéliens reconnaissent à mots couverts prendre des libertés avec les règles.
"Les frontières douanières dérivent des frontières politiques", a dit Harry Kney-tal en soulignant que la zone géographique de l'accord d'association UE-Israël n'avait jamais été clairement définie par les parties.
                 
6. Des ONG et des députés européens demandent l'annulation de la visite de Sharon à Paris par Françoise Germain-Robin
in L'Humanité du lundi 21 mai 2001
Mobilisation contre un fauteur de guerre
L'émotion était très forte, vendredi, parmi les militants des ONG qui, en France, militent pour la paix en Palestine (1). Plusieurs de leurs représentants s'étaient retrouvés au bureau parisien de l'Union européenne (UE) autour des députés des groupes GUE (Gauche unitaire européenne) et Verts pour relancer la mobilisation à un moment où la dégradation de la situation en Palestine atteint l'intolérable, comme l'a montré le récit fait par Fernand Tuil de la délégation de 52 personnes qu'il a conduite la semaine dernière en Palestine (2). Isabelle Avran, secrétaire générale de France-Palestine a rappelé le bilan de sept mois et demi d'Intifada. On en est à 450 Palestiniens tués, dont une large majorité de civils - contrairement à ce qu'écrivait le Monde du 18 mai - et un tiers d'enfants. Elle s'est réjouie des récentes déclarations du ministre français des Affaires étrangères, Hubert Védrine, et du Commissaire européen, Chris Patten, qui ont proposé une intervention de l'Union européenne " sur la base des résolutions de l'ONU ". Mais en contestant " l'idée fausse et inféconde que, pour pouvoir intervenir, il faudra se tenir à égale distance entre les deux parties ". Idée au nom de laquelle le premier ministre israélien, Ariel Sharon, s'apprête à faire en juin, à l'invitation de Jacques Chirac, une visite officielle en France suite à celle, cette semaine, de Yasser Arafat. La perspective de la visite d'un criminel de guerre dont certaines ONG estiment qu'il relève du Tribunal pénal international a soulevé l'indignation. Une lettre ouverte a été adressée au président de la République pour lui demander de renoncer à cette invitation. Le texte souligne que la visite prévue " cautionne de fait les dérives inhumaines et inacceptables du gouvernement Sharon " au moment où " l'Union européenne lance un avertissement sérieux au gouvernement israélien et cherche les moyens de faire pression sur ses dirigeants ".
Halima Thierry-Boumédiene, députée européenne du groupe des Verts a évoqué des actions engagées au Parlement européen : " La résolution adoptée jeudi (3), l'appel pour déploiement d'une force internationale d'interposition, la pétition pour que soit retiré à Shimon Peres le prix Sakharov et la lettre ouverte au président de la République contre la visite de Sharon qui a déjà reçu de nombreuses signatures de parlementaires. "
Pour Alain Krivine, député du groupe GUE, " si Sharon vient, il faut l'accueillir comme il le mérite et mettre du monde dans la rue. La Palestine, c'est aujourd'hui le Vietnam des opprimés et il est temps de se mobiliser ".
Le MRAP s'est indigné du caractère " choquant, inadapté et dangereux de l'invitation faite à Sharon, une provocation qui pourrait faire redémarrer la poussée antisémite qu'on a connue l'automne dernier ".
Plusieurs associations ont manifesté leur incompréhension et leur indignation face à l'annulation par la municipalité de Montreuil d'une semaine de films et de débats autour du thème " Palestine, regards sur l'occupation ", qui devait avoir lieu du 30 mai au 5 juin au cinéma Méliès. Elles ont demandé le maintien de cette semaine. La section de Montreuil du PCF a, de son côté, souhaité une reprogrammation rapide de l'initiative " qui doit faire grandir la mobilisation des citoyens montreuillois ".
(1) Les députés des groupes GUE-NGL et Vert du Parlement européen et le collectif des ONG pour la paix en Palestine, des associations, des partis et des syndicats comme Amnesty International, la Ligue des droits de l'homme, la CIMADE, le MRAP, le Mouvement de la paix, l'Union des juifs français pour la paix, la CGT, la FSU, SUD-PTT, le PCF, la LCR.
(2) Voir l'Humanité du 18 mai.
(3) Voir l'Humanité du 17 mai.
              
7. Trois questions à... Leïla Shahid Propos recueillis par Mouna Naïm
in Le Monde du dimanche 20 mai 2001
- En tant que déléguée générale de Palestine en France, comment réagissez-vous à l'entrée en action de F-16 israéliens dans les territoires palestiniens ?
- Je crois que c'est une guerre unilatérale sans pitié que mène le général Sharon contre la population civile palestinienne, avec l'entrée en action, après les hélicoptères Apache, les blindés et les missiles, des avions F-16 contre des villes palestiniennes. Jusqu'à quand la communauté internationale, le Conseil de sécurité et les Etats-Unis vont-ils dire que ce n'est pas le moment propice pour une intervention de la communauté internationale et l'envoi d'observateurs pour assurer la protection de la population civile ?
- Pour M. Sharon, l'intervention des F-16 est consécutive à l'attentat de Netanya.
- Mais qui M. Sharon a-t-il puni en bombardant quatre villes palestiniennes ? L'attentat de Netanya est totalement déplorable étant donné qu'il était destiné à tuer des civils dans un supermarché.
Il est évident que les attentats suicides ne sont que la manifestation d'un désespoir total des auteurs mêmes. Nous avons toujours condamné ces attentats et continuons de les condamner. Mais il faudrait se rappeler que le seul moment où nous avons pu empêcher ce genre d'attentats, c'était lors des vingt-deux mois du gouvernement d'Ehoud Barak, lorsque le processus d'Oslo nous permettait une coopération sécuritaire qui offrait la possibilité de prévenir ce genre d'attaques, grâce à l'échange d'informations et un travail à deux.
Mais Sharon peut-il réellement penser qu'il peut mener depuis trois mois le bombardement systématique et sans pitié, avec les armes les plus barbares, de l'appareil de sécurité palestinien, qu'il s'agisse de la Force 17, de la police ou des sièges de l'Autorité palestinienne et demander dans le même temps la reprise de la coopération sécuritaire ? Y a-t-il au monde une personne saine d'esprit qui puisse demander la reprise de la coopération avec un partenaire palestinien qu'on est en train de détruire ?
- A votre avis, quel est l'objectif de M. Sharon ?
- Nous sommes en droit et le monde est en droit de se demander quelle est la stratégie de M. Sharon. Pour moi, il y a une décision de détruire pour toujours l'Autorité palestinienne dans tout ce qu'elle représente sur les plans politique, économique, financier et sécuritaire. C'est la seule explication que l'on peut donner à la stratégie de M. Sharon, et c'est peut-être l'élément le plus dangereux de cette politique suicidaire.
              
8. Le défi, la dignité, et le dogmatisme par Edward Saïd
in Al-Ahram Weekly (hebdomadaire égyptien) du jeudi 17 mai 2001
[traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier]

Au cours d'un débat faisant suite à une conférence que j'avais prononcée à Oxford, il y a environ trois ans, je fus étonné par la question d'une jeune femme, dont j'appris par la suite qu'il s'agissait d'une doctorante palestinienne, étudiante dans cette université. J'avais évoqué les événements de 1948, et le fait qu'il me semblait indispensable non seulement de comprendre les liens existant entre notre propre histoire et celle d'Israël, mais aussi que nous devions, en tant qu'Arabes, étudier cette autre histoire en tant qu'elle nous concerne directement, plutôt que de l'éviter ou de l'ignorer totalement comme cela a été le cas trop longtemps. La question de la jeune femme visait à mettre en doute mes vues concernant la nécessité d'étudier Israël et d'en apprendre ce qu'il y a à en apprendre. "Ne s'agirait-il pas là d'une sorte d'attention apportée à Israël," demanda-t-elle, "ne serait-ce pas une forme de concession vis-à-vis de ce pays ?" Ce qu'elle était en train de me demander, c'était si une "non-normalisation" ignorante ne représentait pas une approche préférable pour un Etat qui avait fait un point de sa politique de s'opposer aux Palestiniens et de leur dénier toute autodétermination, pour ne rien dire sur le fait qu'il était cause première du problème, en ayant dépossédé les Palestiniens. Je dois avouer que cette idée ne m'avait encore jamais effleuré l'esprit, même durant ces longues années durant lesquelles Israël représentait l'Impensable dans le monde arabe et où l'on devait même utiliser la circonlocution euphémistique "entité sioniste" pour s'y référer. Après tout, me demandai-je intérieurement à mon tour, deux pays arabes majeurs avaient conclu une paix en bonne et due forme avec Israël, l'OLP l'avait déjà reconnu et poursuivait avec lui un processus de paix, et plusieurs autres pays arabes entretenaient avec lui des relations diplomatiques et commerciales. Les intellectuels arabes avaient à honneur de n'avoir rien à faire avec Israël, de ne pas y mettre les pieds, de ne pas rencontrer d'Israéliens, etc. mais même eux étaient restés silencieux lorsque, par exemple, l'Egypte avait signé d'énormes contrat de vente de gaz naturel à Israël et maintenu ses relations diplomatiques avec l'Etat juif en dépit de ses fréquentes campagnes de répression féroce à l'encontre des Palestiniens. Comment diable quelqu'un pouvait-il s'opposer à ce qu'on analysât et à ce que l'on apprît tout ce qu'il y avait à apprendre d'un pays dont la présence parmi nous durant plus de cinquante ans a eu une telle influence et formé à ce point la vie de chaque homme, de chaque femme et de chaque enfant dans le monde arabe ? Dans l'esprit de cette jeune femme, par conséquent, l'opposé de la (blâmable) concession était vraisemblablement le défi, l'acte de défier, de résister et de refuser de se plier devant la volonté d'un pouvoir que tout un chacun perçoit comme injuste et borné. C'était, je le compris très bien, ce qu'elle préconisait que nous pratiquions vis-à-vis d'Israël, et non pas ce que j'essayais de suggérer, un engagement créatif (dans un dialogue) avec une culture et une société qui s'était toujours comportée, à tous les niveaux et qui continue à se comporter (comme la brutalité de la répression israélienne contre l'intifada d'al-Aqsa le montre de manière dramatique) en s'entêtant dans une politique délibérée visant à la déshumanisation des Arabes, en général, et des Palestiniens, en particulier. Ce en quoi l'unique en son genre Ariel Sharon est difficilement différenciable de Barak, Rabin ou Ben-Gurion (en laissant de côté le racisme proprement pervers de bien des alliés de Sharon, tels Scharansky, Liberman et le Rabbin Ovadia Yousef). Ce que j'opposais à la vision de la jeune femme n'était pas simplement la nécessité qu'il y a à les comprendre (les Israéliens, ndt), mais aussi à nous comprendre nous-mêmes, si tant est que notre histoire serait incomplète si l'on ne prenait en considération Israël, ce qu'il a représenté dans nos existences, comment il a commis ce qu'il a commis, et ainsi de suite. De plus, je persiste à penser, en tant qu'éducateur, que la connaissance - toute forme de connaissance - est, de loin, préférable à l'ignorance. Il n'y a tout simplement aucune justification, d'un point de vue intellectuel, à persister dans une politique d'ignorance délibérée, ou à utiliser l'ignorance comme une arme dans une lutte quelle qu'elle soit. L'ignorance est l'ignorance, ni plus ni moins. Toujours, en tous les cas.
Je restais perplexe et insatisfait de ma réponse cavalière, quelque peu bousculé par la question de cette jeune femme, question qui ne m'a jamais quitté l'esprit, jusqu'à présent. Mais voilà qu'elle est revenue une nouvelle fois me défier, inopinément. Laissez-moi vous en narrer les circonstances. Il y a quelques semaines, les journaux de New York ont révélé qu'Hilary Clinton s'était vue contrainte par un tribunal fédéral de rendre des bijoux, pour une valeur de 7 000 dollars, que Yasser Arafat lui avait offerts. Et, toujours d'après la même source officielle, Madeleine Albright, Secrétaire d'Etat américaine sous le second mandat de Clinton, avait reçu quant à elle 17 000 dollars de joaillerie du même admirateur généreux. Il devenait soudain possible de voir à l'oeil nu le rapport qui existe entre les relations publiques et les relations privées dans le monde arabe, et de comprendre le rapport existant entre la défiance envers ce que la jeune étudiante considérait être des concessions faites à Israël, d'une part, et d'autre part, la générosité abjecte et dispendieuse de la direction palestinienne envers des politiciens américains qui sont d'une manière ou d'une autre directement responsables des malheurs accumulés sur les têtes des Palestiniens. Au moment même où j'écris ce papier, des armes américaines de destruction massive, fournies sans restriction à Israël, sont utilisées illégalement - d'après les lois américaines elles-mêmes - pour attaquer, tuer et mutiler des civils palestiniens sans défense, hommes, femmes et enfants, de démolir leurs maisons, raser au sol leurs camps de réfugiés, finir de rendre leur vie totalement invivable. Et pourtant, plusieurs années durant, une politique visant à tenter sans raison ni dignité de courtiser les leaders américains de la manière la plus vulgaire qui soit a été suivie, comme si les plaisir et satisfaction personnels d'Hilary ou de Madeleine, achetés aux dépens du trésor public palestinien, étaient une forme de due politique et non une démonstration indécente de malversation du plus triste acabit. La chose admise pour évidence, des plus stupidement, a été tout au long que des pays comme l'Amérique et Israël ne seraient que des reflets des pays du Tiers Monde dans lesquels, à l'instar du Zaïre d'un Mobutu, par exemple, la politique est décidée en fonction du caprice du gouvernant ou de l'enrichissement de sa famille. Ce qui manque ici de manière crue, c'est la moindre notion qu'il s'agit là de pays complexes, généralement démocratiques, dont les sociétés civiles et les intérêts jouent un rôle très important, sinon décisif, dans le comportement de chacun d'entre eux. Mais plutôt que de s'attaquer à la mentalité ou aux idées régnant dans leurs sociétés civiles, nos leaders les ignorent et se focalisent, en lieu et place, sur un expédient consistant à graisser la patte à leurs dirigeants ou à les flatter. Quiconque connaît un tant soit peu Israël et les Etats-Unis vous dira que de telles gamineries sont parfaitement inutiles ; elles peuvent à la rigueur valoir à d'aucuns un dîner ou une poignée de mains réticente de la part du regretté Général Rabin à la Maison Blanche, mais rien de plus.
La preuve de ce que j'avance est devenue évidente dans les développements récents de la chronique désastreuse de nos relations avec les Etats-Unis et Israël après la signature des accords d'Oslo. La direction palestinienne ayant trahi la confiance et les sacrifices consentis par son peuple en s'engageant dans le processus d'Oslo de la manière que l'on sait, et en continuant à y prendre part en tant que partenaire faible et, hélas, beaucoup trop plein d'une bonne volonté excessive, elle a maintenu, dans le même temps, une position publique qu'on ne saurait qualifier que de défiante - une défiance, doit-on préciser immédiatement, essentiellement rhétorique et complètement contredite par le comportement palestinien officiel qui est resté (à dire le moins) mystérieusement lige vis-à-vis des Etats-Unis et d'Israël. Les cadeaux non sollicités de joaillerie précieuse aux officiels américains illustrent trop bien ce dernier point. Aujourd'hui, tandis que les Palestiniens - armés de quelques escopettes et, surtout, de pierres - défient bravement l'armée israélienne, la direction persiste à se comporter en suppliant cherchant à obtenir la reprise des négociations avec Israël et les Etats-Unis. On peut dire la même chose des régimes arabes et même des milieux intellectuels de leurs pays respectifs, qui proclament haut et fort leur hostilité à Israël et aux Américains tout en collaborant avec eux, dans les faits, politiquement et économiquement, ou qui continuent à dénoncer la normalisation à grands cris. Ce qui est bien triste, c'est que cette contradiction n'est généralement pas perçue pour ce qu'elle est, mais bien comme quelque chose faisant partie, inévitablement, de la vie telle qu'elle va aujourd'hui. J'aurais eu tendance à penser que plutôt que dénoncer Israël à propos de tout et de rien, il aurait été plus intelligent de coopérer avec certains secteurs, à l'intérieur de ce pays, qui défendent les droits civiques et humains, qui s'opposent à la colonisation, qui sont prêts à adopter une position sur l'occupation militaire, qui croient en la coexistence et en l'égalité, qui sont écoeurés par la répression officielle à l'encontre des Palestiniens. Car ce n'est que de cette manière qu'il y a quelque espoir de changer la politique d'Israël, étant donnée la disparité gigantesque en matière de puissance militaire entre Israël et l'ensemble des Arabes réunis. J'aurais aussi tendance à penser qu'il eût été tout simplement décent de se dissocier d'attaques antisémites aussi inacceptables que celles qui se sont élevées à Damas dernièrement : quel effet peuvent-elles avoir, si ce n'est celui d'exposer aux yeux du monde un état d'esprit aussi sectaire que complètement stupide ?
Je sais parfaitement que les passions suscitées aujourd'hui par la répression israélienne à l'encontre des Palestiniens sont sincères et que les gens, partout dans le monde, sont dégoûtés par les menées du gouvernement Sharon. Mais cette passion est-elle une excuse pour abandonner toute rationalité, et pour les intellectuels, en particulier, de brasser du vent de manière incohérente au lieu d'essayer, sérieusement, de trouver une position politique et morale sérieuse, basée sur la connaissance plutôt que sur une ignorance aveugle et mal avisée, qui ne saurait être qualifiée, en aucun cas, de position politique digne de ce nom ? Prenez la campagne, récente, contre la traduction d'ouvrages arabes en hébreu. On aurait pu penser que plus il y a d'oeuvres littéraires arabes disponibles en Israël, plus les Israéliens sont à même de nous comprendre en tant que peuple, et à cesser de nous traiter comme des animaux ou des sous-hommes. Non : en lieu et place, nous voyons le spectacle désolant d'écrivains arabes des plus respectables dénonçant en fait leurs collègues de s'"être laissés aller" à une "normalisation" avec Israël, ce qui n'est autre que la traduction en langage imbécile de l'accusation de collaboration avec l'ennemi. N'est-il pas vrai, comme Julien Benda l'a formulé le premier, que les intellectuels devraient s'opposer aux passions collectives au lieu d'en faire commerce démagogiquement ? Comment diable une traduction en hébreu pourrait-elle représenter un acte de collaboration ? Etre traduit dans une langue étrangère est toujours une victoire, pour un écrivain. Toujours, et partout. N'est-ce pas là chose bien plus intelligente et positive que la "normalisation" honteuse des différents pays qui entretiennent des relations diplomatiques et économiques avec l'ennemi, même au moment où les Palestiniens continuent à être écrabouillés comme autant de mouches par l'artillerie et l'aviation israéliennes ? Les traductions en hébreu de la littérature arabe ne sont-elles pas une façon de pénétrer dans la vie culturelle israélienne, d'y produire un effet positif, d'y changer la disposition d'esprit des gens, la faisant passer de la passion sanguinaire à une compréhension raisonnée de l'Autre, Arabe, d'Israël, en particulier lorsque ce sont des éditeurs israéliens eux-mêmes qui ont pris l'initiative de publier ces traductions en signe de protestation culturelle contre la barbare politique arabe (on devrait écrire "anti-arabe", ndt) d'Israël ?
Toutes les confusions et les contradictions que j'ai décrites sont les signes d'un malaise arabe plus profond. Lorsque nous nous ingénions à prendre des actes d'opposition puérile pour une résistance authentique, et aussi longtemps que nous considérerons que l'ignorance du style "je ne veux rien savoir" est un acte politique (alors qu'il ne s'agit en l'occurrence de rien de tel), et tant que nous persisterons à perdre toute dignité à réclamer à grands cris l'attention et la protection américaines, il est bien sûr que notre sens de la dignité et du respect de nous-mêmes est en lambeaux. Qui n'a pas eu envie de rentrer sous terre à l'évocation d'Arafat, à la Maison Blanche, en 1993, répétant ses trois "thank you", avec une adulation abjecte, et qui n'a pas ressenti l'absence de tout sens du respect d'eux-mêmes de nos dirigeants qui semblent encore à ce jour incapable de trancher pour décider ce que sont pour nous les Américains : l'ennemi, ou le seul espoir qui nous reste ? En lieu et place de politique basée sur des principes et des normes de comportement décent, nous nous abaissons à des actes de défiance futile basés sur des dogmes stupides et irréfléchis édictant l'opposition à Israël tandis que nous n'offrons à nos compatriotes palestiniens assiégés d'autre aide que nos belles paroles et nos slogans patriotiques. Aucun modèle ne nous aidera à conduire nos actions. Le monde arabe, de nos jours, est l'allégorie de la médiocrité et de l'opportunisme, mais étant donné l'échec sur toute la ligne des dirigeants arabes, il incombe aux intellectuels de produire des analyses honnêtes et de donner des indications sur ce qui est raisonnable et juste, plutôt que de se joindre au choeur de la claque des flagorneurs qui font l'ornement des cours royales et présidentielles et des conseils d'administration, qu'ils honorent de leurs présences onctueuses et continûment déférentes.
Je conclurai par un exemple concret de ce que je veux dire. Dans tout le vacarme au sujet de la normalisation, j'ai remarqué qu'une chose brillait par son absence, en substance, le statut actuel des réfugiés palestiniens vivant dans tous les pays arabes, dont les conditions, où que ce soit - il n'y a malheureusement aucune exception - est uniformément misérable et inacceptable. Où qu'il y ait des Palestiniens, dans le monde arabe, il y a des lois et des règlements pour leur dénier le statut de résidents à part entière, ce qui leur interdit de travailler et de voyager et exige d'eux qu'ils aillent pointer au poste de police une fois par mois, etc. Israël n'est pas seul à maltraiter les Palestiniens : les pays arabes font de même. Maintenant, voyons un peu s'il y a la moindre campagne conséquente des intellectuels arabes contre le traitement local, haïssable, des réfugiés palestiniens : vous n'en verrez aucune ; vous n'entendrez parler d'aucune. Quelle excuse peut-on trouver pour les horribles camps de réfugiés dans lesquels sont contraints à vivre la plupart d'entre eux, jusqu'en des contrées comme la Cisjordanie ou la bande de Gaza ; de quel droit les mokhabarat (renseignements généraux) locales les harcellent-elles et leur rendent-elles généralement la vie invivable ? Pourquoi n'y a-t-il aucune campagne de presse de grande envergure et de longue durée pour dénoncer cette situation et appeler à y mettre un terme ? Pourquoi ? Je vais vous le dire : il est beaucoup plus facile (et beaucoup moins risqué) de vociférer contre la "normalisation" et les traductions en hébreu que de dénoncer les conditions de vie inacceptable des réfugiés palestiniens dans les pays arabes , à qui on répète à l'envi qu'ils ne sauraient être "normalisés", car cela contribuerait à inscrire dans les faits les objectifs d'Israël... Quelle ineptie !
Nous devons revenir aux valeurs essentielles et à l'honnêteté intellectuelle. Il n'y a pas de solution militaire à ce qui nous afflige, Arabes comme Juifs. Cette vérité ne laisse en scène que le pouvoir de l'esprit et de l'éducation pour faire le travail que les armées n'ont jamais pu accomplir en plus d'un demi-siècle. Savoir si les intellectuels israéliens ont failli ou non dans leur mission, ce n'est pas à nous d'en décider. Ce qui nous regarde, c'est l'état calamiteux du discours et de l'analyse dans le monde arabe. Face à cette situation, nous devons, en tant que citoyens, prendre nos responsabilités et nous efforcer, avant tout, de nous libérer des clichés obsolètes et des formules toutes faites qui encombrent nos écrits et nos propos.
             
9. Les Juifs qui remettent en cause la politique d'Israël en question font l'objet de menaces par Michael Lerner
in The Los Angeles Times (quotidien américain) du vendredi 18 mai 2001
[traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier]
(Michael Lerner, rabbin, est l'éditeur de la revue Tikkun Magazine et auteur de l'ouvrage : "Renaissance juive : une clé pour la guérison et le changement" (Harper-Collins, 1995) - E-mai : Rabbilerner@tikkun.org)
Après avoir reçu une volée de menaces de mort, au cours des dernières semaines, en réponse à mon appel à mettre un terme à l'occupation de la Cisjordanie par Israël, je me suis souvenu d'une leçon que nous avions reçue dans les années soixante : si votre peuple est impliqué dans des actions brutales à l'extérieur, la cruauté et la haine trouvera un reflet, à coup sûr, à l'intérieur de votre communauté elle-même.
"Espèce de sous-hommes, d'animaux gauchistes, on devrait tous vous exterminer!" disait l'une de ces lettres de menace, intitulée : "Crevez... Crevez!". Une autre commençait en ces termes : "quelqu'un viendra vous liquider - tout ce que vous méritez, c'est de pourrir en enfer". Bon, ça c'est le genre de trucs que vous recevez quand vous osez critiquer la politique d'Israël. Mais ce qui m'a fait sortir de mes gonds, c'est l'apparition d'un nouveau site sur le réseau internet, la semaine dernière, qui me décrivait comme l'un des trois principaux Juifs américains s'auto-haïssant (les deux autres étant le linguiste Noam Chomsky et le metteur en scène Woody Allen), allant jusqu'à me traiter de "traître" au peuple juif en donnant mon adresse personnelle, avec en plus un plan et des indications routières permettant d'y arriver sans encombre. Là, c'était trop. La Ligue anti-diffamation a appelé le FBI (services fédéraux américains de la police).
Le climat d'hostilité qui entoure les dissidents dans le monde juif atteint désormais des niveaux d'insulte verbale sans précédent. Tikkun est la seule revue juive distribuée dans l'ensemble des Etats-Unis à mettre en cause la "normalité" de l'occupation, à appeler de façon pressante au démantèlement des colonies en Cisjordanie et à insister sur le fait qu'Israël doit reconnaître sa responsabilité (partielle, et non totale) dans l'exil des Palestiniens (aujourd'hui réfugiés). Tout comme nous considérions, nous qui étions actifs dans le mouvement contre la guerre au Vietnam, dans les années soixante, que notre opposition découlait des plus hautes valeurs de la démocratie américaine, nous insistons aujourd'hui, dans le mouvement juif pour la paix, sur le fait que ce sont les valeurs juives elles-mêmes qui nous enjoignent de proclamer haut et fort que tout être humain a été créé à l'image de Dieu et que la violence faite au peuple palestinien et celle causée par les terroristes palestiniens à des Israéliens ont les mêmes effets tragiques l'une que l'autre.
Mais c'est bien là cette sorte d'équivalence morale qui met certains Juifs hors d'eux, ces Juifs qui soutiennent qu'"aucune souffrance ne peut égaler la nôtre", et que la souffrance passée justifierait l'insensibilité (présente) à l'égard (des souffrances) du peuple palestinien. Nombreux sont les Juifs à refuser d'admettre qu'Israël est le seul camp, dans ce conflit, à disposer d'une armée, que les Palestiniens ont eu à déplorer dix fois plus de morts que les Israéliens et que, cette fois, ce sont bien les Palestiniens qui se retrouvent assiégés dans des réduits et à qui on dénie la nourriture, l'éducation et les soins. Il est tellement plus facile de blâmer la victime et de se déchaîner contre les envoyés-enquêteurs internationaux qui élèvent de très sérieuses objections éthiques au comportement d'Israël...
Et voilà que la même déshumanisation utilisée jusqu'à présent contre les Palestinien commence à émerger, mais contre les pacifistes juifs, cette fois. Qu'importe que mon fils ait servi dans l'armée israélienne, que je sois un fervent partisan de l'Etat d'Israël ou que je dirige une synagogue de Juifs charismatiques à San Francisco ? Pour ces fanatiques d'extrême-droite, je ne suis rien d'autre qu'un "Juif haineux de lui-même".
Au cours des mois qui ont précédé l'assassinat du Premier ministre israélien Yitzhak Rabin, des accusations similaires circulaient le concernant. En Israël, depuis lors, il est interdit par la loi de propager ce type de campagnes diffamatoires, car les gens ont pu constater de visu avec quelle facilité des propos haineux peuvent se transformer en passage à l'acte violent. Mais même lorsqu'il ne vont pas jusque-là, des propos de ce type effraient beaucoup de personnes et les dissuadent de s'exprimer. Notre revue a perdu des abonnés et des donateurs, car ces personnes craignaient d'être identifiés avec (nos) prises de position sans détours sur ces questions.
Lorsqu'on me demande "que faire ?" face à cela, je réponds de deux manières. Premièrement, la meilleure façon de lutter contre la haine, c'est diffuser plus d'amour (autour de soi) dans le monde. Même les gens haineux sont des gens qui sont en réalité profondément blessés, et leurs blessures ne peuvent être soignées que par la compassion, et certainement pas par une haine en retour. Ensuite, j'exhorte mes interlocuteurs à s'exprimer sur ces questions. Nombreux sont les non-juifs à avoir craint depuis très longtemps d'exprimer des critiques (pourtant) légitimes à l'égard d'Israël, telle était leur crainte que leurs critiques soient prises pour de l'antisémitisme. La semaine dernière, au cours de sa visite en Syrie, le pape est resté silencieux lorsque le président Bashar Al-Asad a proféré un couplet de propos antisémites standard. Seul une chrétienté qui combatte de manière impitoyable ses rémanences d'antisémitisme peut critiquer légitimement Israël. Ce dont le peuple juif a besoin, c'est de chrétiens qui dénoncent l'antisémitisme certes, mais qui, ne s'en tenant pas là, se joignent aux Juifs progressistes afin de dénoncer tous ensemble la politique immorale et suicidaire du gouvernement israélien.
Par le passé, j'ai exhorté les Palestiniens à renoncer à la violence et à marcher dans les pas de Martin Luther King Junior et de Gandhi. Il est grand temps, aujourd'hui, de demander la même chose aux Juifs : non seulement à l'égard des Palestiniens mais, aussi, à l'égard de leurs frères Juifs.
                      
10. Coup de théâtre de l'Intifada
In L'Orient-Le Jour du vendredi 18 mai 2001
Un halo de lumière blafard s'étire et s'épuise sur des dunes de journaux dispersés sur un désert de scène. L'insolite piano d'Érik Satie divague sur fond de bourdonnements d'hélicoptères. Péniblement, des mains, puis des bras, surgissent des amas de pages froissées comme des revenants de leurs tombeaux. Brandis vers l'obscurité qui s'élargit, les mains crispées se figent, les corps à peine devinés, étouffés dans un dernier cri. Brutalement, le silence. Serré, dense, prêt à s'effondrer en applaudissement. 
Pour le monde extérieur, les Palestiniens ne sont que des infos. Entre les lignes pourtant, en filigrane, se vivent de véritables drames. Des individus qui luttent sans relâche pour leur identité et leur survie. 
Le directeur artistique du théâtre Al Kasaba, Abed Al-Jubeh n'élabore pas davantage. Son intention n'est pas de s'apitoyer sur le sort de son peuple. Il secoue nerveusement sa montre, roule minutieusement une cigarette et enchaîne, de l'émotion à l'inspiration.
Je veux désormais que ce théâtre reflète l'expérience réelle des Palestiniens. Qu'il aborde des enjeux et des situations reliées au vécu, à l'urgence, à la tragédie de notre peuple. Il faut qu'une véritable alliance se crée entre nous et le public que nous représentons.
Théâtre-vérité, théâtre-enraciné, théâtre-engagé. Telle est la tournure qu'a pris l'institution Al-Kasaba depuis le déclenchement de la seconde Intifada.
Rattrapé par les conjonctures politiques, l'établissement culturel renommé depuis plus de trente ans pour ses productions cosmopolites - du Caligula de Camus à Bab el Shams d'Élias Khoury - et ses spectacles haut en couleurs, a décidé de suspendre son programme classique et de mettre ses pendules à l'heure du conflit israélo/palestinien.
Nous ne pouvions pas jouer aux aveugles et ignorer ce qui se déroulait en dehors du théâtre. C'est pourquoi nous avons complètement modifié le calendrier prévu et opté pour un nouveau format artistique. C'est  notre contribution à l'Intifada.
En guise de solidarité donc, les membres de la troupe Al-Kasaba - établie depuis peu à Ramallah - offrent gratuitement des soirées culturelles calquées sur le modèle cabaret-improvisation à une audience en mal de divertissement. Chaque semaine, la dizaine d'acteurs enfilent leur costume d'auteur et composent des sketch à caractère personnel et insolite, qu'ils reprennent ensuite sur scène - le temps de brûler une heure de créativité -
pour immédiatement se concentrer sur le scénario suivant. Une véritable mission suicide, selon Nizar Zubi, qui en est à sa dixième mise en scène depuis six mois.
Tenter de faire preuve à la fois d'organisation, d'innovation et de sens esthétique à chaque occasion, c'est quasi un tour de force. Chaque représentation est l'aboutissement d'une lutte acharnée, d'une détermination soutenue. En plus de la course contre l'horloge, nous sommes également soumis aux contraintes de circulation. Les répétitions sont régulièrement retardées ou tout simplement  handicapées par l'absence d'un membre bloqué aux barrages de sécurité.
Aussi intolérable soit-elle, la situation actuelle ne demeure pas moins un réservoir à réflexions, imaginations et impulsions des plus bigarrées, toutes susceptibles d'être traduites en numéros de théâtre aux effets plutôt étonnants. Dans Histoires sous Occupation, un collage de monologues qui conjugue le malheur Palestinien sous plusieurs modes; un couple de jeunes amoureux se retrouvent en tête-à-tête pour échanger allègrement sur leur passion des cartouches : de caoutchouc, de plomb, d'acier, 500mm, 800mm... Un vieil homme, installé sur les ruines de sa maison rasée - représentées par des pelotes de papier - dresse le bilan des derniers désastres à ses parents inquiets à l'autre bout du fil, remâchant gaiement et inlassablement les Amdullah, Ana Bi Khayr... Un adepte de cinéma, persuadé que Jean-Claude Van Dam joue présentement à Jérusalem, se rend sur place où il croit débarquer en plein plateau de tournage. Le seuil de la Mosquée Al-Aqsa est investi par une une foule de figurants. Des gamins survoltés lancent des pierres à des colonnes de soldats qui répliquent par des tirs. On lui annonce soudainement l'arrivée de Sharon...Sharon Stone? s'écrit-il avant de s'écrouler, blessé.
La vie est devenue à un point tel surréaliste que toute déviation ou exagération devient presque crédible, pense Nizar, qui se plaît à combiner humour, sarcasme et drame dans les pièces qu'il incarne. C'est simple, nous ressentons au quotidien ce que nous interprétons sur scène. Le théâtre est utilisé comme une forme alternative de résistance. La tentative entêtée de continuer à vivre malgré les circonstances troublantes est déjà une forme de victoire exceptionnelle!   
Mais ce jeune danseur aux multiples talents, ne limite pas son rôle à celui de trompe l'oeil ou de promoteur de plaisir passager. Son horizon est plus vaste; sa vocation, plus étudiée.
En tant qu'artiste Palestinien, mon devoir est de renverser cette pauvreté mentale qui paralyse notre société, de renouveler et d approfondir la culture générale, qui a été complètement anéantie par la crise politique. En vérité, le plus dur des combats est en vue. Car le jour où l'occupation prendra fin - et ce jour viendra -, il faudra entamer la tâche ardue de réhabilitation, spécialement avec ces enfants des pierres qui ne connaissent de la vie que la révolte et la ligne de front. Mon défi, c'est de leur enseigner des alternatives aux hostilités de rue, leur proposer des échappatoires.
Al-Kasaba a ainsi donné, dans l'année écoulée, plus de 200 représentations théâtrales au sein des écoles de la Cisjordanie et de la bande de Gaza. L'administration a également mis sur pied une salle de cinéma - la seule du genre dans les Territoires -  qui offre présentement un choix de films grand public, presque exclusivement américains; mais dont l'objectif est d'en faire éventuellement une cinémathèque.
Éreinté par les derniers mois de création intensive, Abed Al-Jubeh est sur le point d'amorcer une nouvelle étape dans le parcours d'Al-Kasaba. Suite aux deux séances scéniques prévues pour la semaine de Al-Nakba, le 17 et 18 Mai prochain, le directeur artistique compte engager ses comédiens dans une voie un peu moins versatile. En coopération avec le Royal Court Theater de Londres, deux productions plus étoffées devraient être réalisées prochainement à partir du matériel cumulé au cours des soirées culturelles précédentes. Histoires d'une Occupation sera également retouchée avant de participer au Festival International de Théâtre de Londres (LIFT) au cours de la saison estivale.
En attendant le virage artistique toutefois, Nizar gave ses cendriers d'idées fumantes, mais rapidement consumées. L'approche du spectacle d'Al-Nakba le mine presque autant que la mémoire de l'événement originel - la Catastrophe -  soulève la colère des Palestiniens.
Nous vivons la Nakba depuis le début de notre histoire. C'est un épisode sans fin, qui ne cesse de rappeler la souffrance du peuple Palestinien. L'exil - le périple plutôt -  est la première et la seule image qui me vient à l'esprit quand on évoque la Nakba. Je vois des files de gens qui marchent, qui marchent et qui marchent encore...toujours sur place, toujours en rond.
               
11. Liban-Syrie-Palestine - Retour à la symbiose triangulaire
in Le Magazine (hebdomadaire libanais) du vendredi 11 mai 2001
Le rapprochement palestino-syrien et, accessoirement, libano-palestinien est plus qu'une convergence tactique. Il traduit la volonté des deux parties de tenir en échec «la solution Sharon» et d'imposer un retour à l'esprit de Madrid.
Le déclenchement de l'intifada en Palestine et l'arrivée d'Ariel Sharon au pouvoir peuvent être considérés comme deux événements majeurs marquant le début d'une nouvelle phase du conflit israélo-arabe. Leur impact sur le plan local et régional, sur la stratégie des acteurs étatiques ainsi que sur les opinions publiques sera considérable. Cette nouvelle donne est d'abord le produit de l'intransigeance israélienne. Refusant de se conformer à l'esprit du processus de paix que résume bien la formule «la terre contre la paix» et aux résolutions 242 et 338 du Conseil de sécurité de l'Onu qui constituent son fondement politique, elle portera la principale responsabilité des évolutions ultérieures. Elle forcera les parties arabes, surtout palestinienne, à revoir leurs stratégies. Le rapprochement syro-palestinien fait partie de cette révision stratégique. Il s'impose comme une nécessité impérieuse dans le cadre d'un conflit qui s'installe dans la durée et dont les perspectives sont ouvertes à toutes les possibilités. La victoire de la Résistance libanaise contre l'occupation israélienne était aussi celle de Damas. Toutefois, elle avait un caractère paradoxal. Le retrait israélien privera la Syrie de la principale carte de pression dont elle disposait face à Israël. Il est important de rappeler qu'il interviendra après l'échec du sommet du 26 mai 2000 entre le président défunt Hafez el-Assad et le président américain d'alors Bill Clinton, échec qui confirmera le caractère inconciliable des positions syriennes et israéliennes et l'impossibilité de la conclusion d'un accord de paix entre les deux parties. Privée d'alliés véritables sur le plan international, n'ayant que l'Iran comme allié fiable sur le plan régional, la Syrie se trouvait à la veille de l'intifada dans une position délicate. Les modifications que le soulèvement palestinien entraînera dans le paysage politique régional lui seront d'un grand secours.
A la recherche d'alliés
L'intifada représentera, dans un certain sens, une confirmation de la justesse de la position syrienne quant au conflit avec Israël et apparaîtra comme une réédition de l'expérience libanaise de résistance qui doit beaucoup à Damas. Convaincue de l'impossibilité d'une solution politique sur le volet palestinien ou syrien en présence du gouvernement Sharon, la Syrie mise sur la transformation de l'intifada en une lutte de longue haleine jusqu'à l'épuisement de l'occupant israélien. Malgré son expérience amère avec Yasser Arafat, Damas prend aujourd'hui le pari de la coordination avec les Palestiniens, conscient qu'il est de l'émergence d'une nouvelle dynamique de résistance et d'un nouveau leadership sur le terrain qui ne sont pas totalement contrôlés par l'Autorité palestinienne. Cette nouvelle dynamique amène plutôt l'Autorité à radicaliser ses positions. Dans le contexte politique actuel, l'affirmation de la concomitance des volets libanais, syrien et palestinien constitue un atout non négligeable pour les négociations syriennes et arabes. Du côté palestinien, huit mois d'intifada ont fini par convaincre la direction palestinienne des limites objectives de la stratégie égyptienne sur laquelle elle s'était alignée durant des années. Renouer avec la Syrie consacre la fin de la logique d'Oslo et le retour à une stratégie de résistance à long terme. Seule une telle stratégie pourrait tenir en échec «la solution Sharon» et mener, à terme, à une internationalisation de la crise. Celle-ci est une condition sine qua non d'une résolution équitable du conflit, satisfaisant l'essentiel des revendications nationales palestiniennes. Elle est aussi indispensable pour satisfaire la revendication syrienne. Le retour à l'esprit de Madrid est l'objectif central des parties syrienne et palestinienne.
           
12. Sultan Abou el-Aïnaïn "Affrontons ensemble la machine de guerre d'Israël"
in Le Magazine (hebdomadaire libanais) du vendredi 11 mai 2001
«En montant l'histoire du navire qui transportait un arsenal destiné aux Palestiniens de Gaza, Sharon cherche à justifier une éventuelle frappe contre les camps palestiniens au Liban.» Entretien avec le général Sultan Abou el-Aïnaïn, responsable du mouvement Fatah au Liban, qui confirme l'émergence d'un axe libano-syro-palestinien.
- Le ministre palestinien des Réfugiés Assaad Abdel Rahman a déclaré, à partir du camp de Rachidiyé, que les contours d'un axe syro-palestino-libanais se dessinent. Comment cette initiative va-t-elle se traduire sur le terrain ?
- Nous avons toujours prôné une solidarité arabe pour arriver à une position unifiée susceptible de servir les intérêts arabes et la cause palestinienne. L'occupation israélienne du Golan et des fermes de Chebaa, les menaces proférées contre le Liban et la Syrie, nos souffrances en Palestine, justifient la nécessité d'un travail commun et d'une étroite collaboration entre nous jusqu'à l'obtention de tous nos droits.
- Cet axe est-il purement politique ou a-t-il d'autres dimensions, militaire peut-être ?
- La coopération est principalement politique et a un but essentiel pour les trois pays: travailler ensemble pour affronter la machine de guerre israélienne. Cela est d'autant plus justifié que la lutte que nous menons est une défense des lieux saints arabes, musulmans et chrétiens.
- Cette alliance reflète-t-elle l'ouverture d'une nouvelle page entre le Liban et l'OLP ?
- Cela est tout à fait normal. De l'eau a coulé sous les ponts et les événements récents nous ont amenés à dépasser tout ce qui a trait au passé. Il est nécessaire d'assainir les relations libano-palestiniennes. Nous luttons sans cesse pour préserver la paix civile et rejeter tout projet visant à l'implantation des Palestiniens au Liban.
- Dans le cadre de cette coopération, certaines facilités vont-elles vous être accordées?
Nous espérons, en premier lieu, obtenir pour les réfugiés les droits les plus élémentaires, ainsi que les exigences d'une vie décente. Notre peuple n'arrive pas à s'assurer les moyens de survie à cause de la loi du travail qui leur interdit de pratiquer un métier. A cela viennent s'ajouter la crise économique, ainsi que la loi des acquisitions qui interdit à tout Palestinien d'acquérir un logement au Liban.
- A la lumière de cette nouvelle alliance qui se dessine, les mesures de restriction vont-elles diminuer autour des camps palestiniens ?
- Nous l'espérons. Jusqu'à ce jour, rien n'a changé, surtout dans les camps situés au Liban-Sud.
- Etiez-vous au courant de l'affaire du bateau de pêche qui transportait un arsenal destiné aux Palestiniens de Gaza, arraisonné par la marine israélienne au large de Naqoura ?
- Cette affaire est montée par les Israéliens qui cherchent à justifier une éventuelle frappe contre les camps palestiniens au Liban et à troubler les relations libano-palestiniennes.
- Envisagez-vous de mener des opérations anti-israéliennes à partir du Liban ?
- Nous ne combattrons pas les Israéliens à partir du territoire libanais tant que les autres fronts arabes restent calmes et tant qu'il n'y aura pas une action arabe commune allant dans ce sens. Nous ne croyons pas aux avantages de l'ouverture du seul front libanais.
- De nouveaux bureaux du Fatah ont été ouverts dans divers camps au Liban. Cela est-il le signe concret de la collaboration libano-palestinienne ?
- Les membres, les cadres et les partisans de Fatah n'ont jamais quitté les camps. Notre présence parmi notre peuple n'est pas tributaire de l'ouverture d'une permanence ici et là. Tout membre du Fatah considère que sa demeure est un bureau de Fatah, et c'est pourquoi aucune nouvelle permanence n'a été ouverte.
- Les Israéliens intensifient leurs pressions militaires contre les Palestiniens des territoires autonomes. Quelles sont les mesures que vous allez prendre pour venir en leur aide ?
- Nous ne demandons à personne de combattre à notre place. Nous avons besoin d'un soutien politique, médiatique et financier, ainsi que la concrétisation des résolutions des sommets arabes. Nous désirons que le Liban nous donne l'occasion d'exprimer démocratiquement notre soutien au peuple palestinien de Palestine.
- L'hypothèse d'une guerre au Proche-Orient est-elle probable selon vous ?
- La politique suivie par Sharon nous pousse dans cette direction malgré le fait que les pays arabes aient rayé de leurs diction-naires politiques l'idée d'une guerre régionale.
                   
13. Le retour de l'OLP au Liban
in Le Magazine (hebdomadaire libanais) du vendredi 11 mai 2001
Faut-il croire à un retour politique, et peut-être militaire, de l'Organisation de la libération de la Palestine (OLP) au Liban? Les observateurs qui soulèvent cette question ne font pas dans la fiction. Ils constatent qu'à la suite du sommet arabe d'Amman, des entretiens entre le président Emile Lahoud et le chef de l'Autorité palestinienne Yasser Arafat et de la perspective d'une visite de M. Arafat en Syrie, quelque chose comme une nouvelle coordination Syrie-OLP-Liban est en cours de montage, qui pourrait être une pure mise en scène, ou une véritable stratégie d'encerclement politique et diplomatique d'Israël.
Pour l'instant, et en attendant une rencontre Arafat-Assad, force est de constater que l'OLP se manifeste à nouveau au Liban, mais apparemment sous ombrelle politique libanaise. C'est ainsi que des cadres politiques et sécuritaires palestiniens du mouvement Fatah, nouvellement formés au Liban ou dans les territoires autonomes, s'installent dans les camps palestiniens au nord et au sud de Beyrouth, et pour le moment toujours loin de la capitale. Cette installation est évidente à Rachidiyé (Tyr), QG du Fatah Liban, où se trouve son principal représentant, Sultan Abou el-Aïnaïn. Elle est également sensible à Nahr el-Bared (Tripoli). Elle s'accompagne généralement d'un allégement des mesures de sécurité autour des camps. Par ailleurs, là où l'OLP s'installe, elle déploie un effort de coordination et d'unification des rangs palestiniens, tout à fait dans l'esprit de coordination interarabe manifesté lors du dernier sommet du Caire. A Beyrouth même, le retour de l'OLP est pour le moment sensible dans le domaine de l'information, avec l'octroi d'un nouvel élan à certaines publications et périodiques palestiniens, et la réactivation de certaines organisations à vocation pédagogique et sanitaire. Ce retour s'est aussi traduit par la réactivation de la commission des réfugiés de l'OLP au Liban, inactive depuis des années. Cette commission, formée il y a quelques semaines, est composée de quatre membres, dont Salah Salah, connu pour son hostilité aux accords d'Oslo. Le renforcement de la présence de l'OLP au Liban se déroule avec la bénédiction de l'Etat. En effet, il ne semble pas que l'accident de parcours qui s'est produit, quelques semaines après le retrait israélien du 24 mai dernier, ait des chances de se reproduire. Deux combattants palestiniens relevant d'une organisation prosyrienne avaient alors trouvé la mort, alors qu'ils tentaient une incursion en territoire israélien, à travers les fermes de Chebaa. Les autorités libanaises et syriennes avaient alors fait clairement comprendre aux groupes palestiniens basés à Damas que le territoire libanais ne pouvait servir de tremplin à leurs actions militaires, et qu'il était exclusivement réservé à des opérations de résistance libanaises.
Détails complémentaires
Ce plan concerté a son pendant interne. C'est ainsi que, parallèlement, on note le retour sur la scène d'organisations nassériennes telles que les Mourabitoun (le mouvement des nassériens indépendants), dont on n'avait plus parlé depuis une quinzaine d'années. A travers ces organisations, on chercherait à créer des courants populaires d'appui à la politique du régime et, précisément, à ses nouvelles orientations palestiniennes. Objectif stratégique: garder Israël sur le qui-vive et l'empêcher d'être rassuré au sujet de la situation à sa frontière nord. Les observateurs notent que même la visite du pape en Syrie a servi au renforcement de la stratégie syro-libano-palestinienne d'encerclement politique, diplomatique et militaire du gouvernement israélien. Objectif: démontrer que la volonté du Premier ministre israélien de substituer au principe de Madrid «la terre en échange de la paix» celui de «la sécurité en échange de la sécurité» n'est qu'une version sioniste de l'équilibre de la terreur et forcer les Etats-Unis à s'impliquer davantage dans la région. Cette stratégie est payante, et l'escalade de la violence dans les territoires autonomes palestiniens semble devoir conduire les Etats-Unis à se manifester diplomatiquement et politiquement sur la scène régionale, plus tôt qu'ils ne le prévoyaient. En effet, la politique de «pourrissement» militaire suivie par Washington, dans les territoires de l'autonomie et sur les lignes de démarcation, s'est retournée contre lui. Elle n'a pas toujours conduit à un essoufflement de l'intifada ou à un affaiblissement de son élan, bien au contraire. De sorte que les Etats-Unis redoutent désormais un dérapage de la violence, ou encore un effet mobilisateur de cette violence contre leurs intérêts économiques et stratégiques dans la région. Cette implication des Etats-Unis dans la région s'avère encore plus nécessaire depuis le revers diplomatique de l'Egypte, qui avait tenté de mettre en œuvre un plan de relance du dialogue entre Israéliens et Palestiniens. Ce plan prévoyait des arrangements pour un arrêt de la violence, un gel de la colonisation juive et la relance des négociations pour un règlement définitif dans un délai d'un an. Il s'est heurté à des critiques de fond des Israéliens, en particulier concernant un gel de la colonisation. De sorte qu'Israël a servi, dans ce cas précis, les intérêts de ses adversaires et la stratégie d'encerclement qu'ils tentent de mettre en œuvre.
Et l'implantation ?
A l'ombre d'une telle stratégie à multiples facettes, qu'adviendra-t-il des Palestiniens du Liban? La question se pose, mais il est toujours très difficile d'y répondre, car une telle réponse est liée au succès de la politique suivie. En tout état de cause, le Liban a refusé de participer à une conférence de coordination arabe au sujet de l'implantation, considérant que ce serait s'engager à l'avance à respecter les éventuelles recommandations d'une telle conférence. Et de devoir donc accueillir le quota de Palestiniens qu'on jugerait bon de lui attribuer.