"Si la guerre des religions se développe dans cette région, elle aura une caractéristique : il n’y aura pas de vainqueurs, il n’y aura que des vaincus surtout quand on sait qu’Israël est dotée de l’arme nucléaire et qu’elle n’a jamais caché, qu’en dernière analyse, s’il n’y a plus le choix, selon l’expression israélienne consacrée, "nous mourrons avec les Philistins", référence à Sanson qui s’est tué en faisant tomber les poutres du temple où il se trouvait."
 
Michel Warschawski - Directeur de Centre d'Informations Alternatives de Jérusalem
 
 
Point d'information Palestine > N°130 du 12/02/2001

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Association loi 1901 - Membre de la Plateforme des ONG françaises pour la Palestine
Pierre-Alexandre Orsoni (Président) - Daniel Garnier (Secrétaire) - Daniel Amphoux (Trésorier)
Sélections, traductions et adaptations de la presse étrangère par Marcel Charbonnier
 
Si vous ne souhaitez plus recevoir (temporairement ou définitivement) nos Points d'information Palestine, ou nous indiquer de nouveaux destinataires, merci de nous adresser un e-mail à l'adresse suivante : amfpmarseille@wanadoo.fr. Ce point d'information est envoyé directement à 1889 destinataires.
 
Au sommaire
 
Rendez-vous
  1. Rencontre avec Léon Schwartzenberg ce mardi 13 février à Genève
  2. Rencontre avec As'ad Abdul Rahman ce jeudi 15 février à Montpellier
Dernières parutions
  1. Palestine(s), les déchirures de Valérie Feron aux Editions du Félin
  2. Palestine, mon histoire de Raymonda Hawa-Tawil aux Editions du Seuil
Réseau
  1. Relations bilatérales turco-israéliennes et inquiétudes des tierces-parties par Abdullah Kiran in Birikim (mensuel "socialiste de culture" turc) du mois de décembre 2000 [traduit du turque par Marcel Charbonnier]
  2. Processus de paix ou de guerre ? par Michel Warschawski [Michel Warschawski est Directeur du Centre d'Informations Alternatives de Jérusalem. Nous vous proposons la retranscription intégrale d'une Conférence qu'il a donné à Grenoble, le 25 janvier 2001, à l'invitation du CCFD, de l'Association Médicale Franco-Palestinienne et de Chrétiens Proche Orient.]
Rendez-vous

 
1. Rencontre avec Léon Schwartzenberg ce mardi 13 février à Genève
L'Association les Racines Palestiniennes organise ce mardi 13 février à 20h, une rencontre avec Léon Schwartzenberg, ancien ministre français de la Santé, suite à la Mission d'investigation médicale en Palestine, qui s'est déroulée du 14 au 21 décembre 2000, à l'initiative de la Commission Arabe des Droits Humainsen, à L'Université de Genève - Uni Mail Salle R070 - 102, boulevard Carl-Vogt à Genève.
[Organisation : Association les Racines Palestiniennes - Case postale 2027 CH 1211 Genève 2 - Suisse]
 
2. Rencontre avec As'ad Abdul Rahman ce jeudi 15 février à Montpellier
L'Association des Palestiniens en France organise ce jeudi 15 février à 20h30, une rencontre avec As'ad Abdul Rahman, membre du Comité exécutif de l'OLP, ancien professeur de Sciences Politiques à l'Université du Koweït, rédacteur en chef de l'Encyclopédie palestinienne éditée à Londres, et directeur du département des réfugiés de l'OLP, à la Salle Renaissance - 3, rue Colot à Montpellier.
[Renseignements : APF / Section Montpellier - Safwat Ibraghith - Tél/Fax : 04 67 20 11 18 - E-mail : SIbraghith@aol.com]
 
Dernières parutions
 
1. Palestine(s) Les déchirures de Valérie Féron aux Editions du Félin
[288 pages - 135 FF - 2001 - ISBN 2-86645-391-3]
Ce livre, résultat d'une longue enquête, tient compte des développements survenus à la fin 2000 dans le cours de la " question palestinienne ", et fournit les clés pour comprendre les événements dans "les territoires occupés".
Il est fondé sur de nombreux entretiens et reportages que l'auteur a effectués dans des familles palestiniennes, principalement en Israël à Nazareth, en Cisjordanie à Bethléem, ainsi que dans la bande de Gaza. Une grande part de ces entretiens concerne la jeunesse. Celle-ci exprime ses espoirs, sa révolte et souvent son désarroi. L'accent est mis à la fois sur la situation des Palestiniens citoyens d'Israël, appelés généralement Arabes israéliens, et ceux des territoires.
C'est une "histoire en direct" et une mise en perspective du passé des cinquante dernières années. Le livre rappelle ainsi l'évolution contemporaine d'Israël, particulièrement depuis l'exode forcé des Palestiniens après 1948. Colonisation, problème des réfugiés, statut de Jérusalem, Droits de l'homme, autant de questions qui sont au cœur des débats actuels.
De nombreuses rencontres avec des intellectuels et des personnalités politiques palestiniens (l'historien Elias Sanbar, le député "arabe israélien" Azmi Bichara, le ministre palestinien chargé du dossier de Jérusalem pour l'OLP, Fayçal Husseini...) permettent de comprendre les débats en cours pour l'avenir de l'État palestinien et les critiques qui émergent parfois à propos de l'Autorité palestinienne. Un ouvrage pour comprendre l'accélération des événements en Palestine et saisir les enjeux à court et à moyen terme d'un conflit central dans cette région.
L'auteur, Valérie Féron, est née en 1967, journaliste, elle a collaboré à Radio-Orient pendant une dizaine d'années et a effectué de nombreux voyages en Israël et en Palestine depuis la fin des années 80.
 
2. Palestine, mon histoire de Raymonda Hawa-Tawil aux Editions du Seuil
[247 pages - 110 FF - 2001 - ISBN 2020316560]
Raymonda Hawa-Tawil est l'une des femmes palestiniennes les plus célèbres au monde. Née en 1940 dans une famille chrétienne de Saint-Jean-d'Acre, elle s'est fait connaître dès la fin des années 60 de la presse internationale dont elle deviendra, au coeur même des territoires occupés, la principale interlocutrice. Celle qu'on appelait " la lionne de Naplouse " fut traquée, incarcérée, brutalisée par le pouvoir israélien de façon arbitraire. Véritable pasionaria de l'intérieur, elle s'est toujours battue pour la réconciliation entre Palestiniens et Israéliens, y compris lors de son exil en France. S'exprimant à titre personnel, elle raconte ici plusieurs décennies de lutte aux côtés du peuple palestinien pour le droit à la patrie. Elle évoque aussi son combat sans cesse recommencé pour l'émancipation de la femme arabe. Alors que la tension au Moyen-Orient est de nouveau extrême, ce livre nous apprend qu'on peut faire la paix à condition que celle-ci soit juste. L'une des filles de Raymonda Hawa-Tawil, Soha, est aujourd'hui la femme de Yasser Arafat.
 
Réseau
 
1. Relations bilatérales turco-israéliennes et inquiétudes des tierces-parties par Abdullah Kiran
in Birikim (mensuel "socialiste de culture" turc) du mois de décembre 2000
[traduit du turque par Marcel Charbonnier]

- PREMIERE PARTIE -

La sympathie réciproque entre les Turcs et les Juifs remonte à une époque assez ancienne. Cette affection mutuelle date du quinzième siècle, époque où les Juifs persécutés en Espagne se réfugièrent dans l'Empire ottoman, dirigé alors par le Sultan Beyazit (Bajazet). Les Juifs, chassés d'Espagne par le roi catholique Ferdinand et son épouse Isabelle (époque de la Reconquista, NdT) vinrent se réfugier en Turquie, en particulier dans les deux grandes villes de l'époque, Istanbul et Salonique, où ils s'établirent durablement. Le Sultan Beyazit II, qui ouvrira largement les portes de l'Empire ottoman aux Juifs d'Espagne et du Portugal, ordonna que ceux-ci s'installent dans l'île de Sakiz.
(Source : Avram Galanti : Histoire des Turcs et des Juifs : enquête politique. Deuxième édition augmentée, Tan Matbaasi, Istanbul 1947, p. 16 : "les Juifs d'Espagne et du Portugal, convertis au catholicisme en apparence seulement, et le plus souvent artisans spécialisés et aisés, ont commencé à quitter la péninsule ibérique, à partir de 1532. Une partie d'entre eux est venue se réfugier en Turquie).
La bienveillance et la sympathie entre les deux peuples se sont renforcées, au cours des siècles, à l'occasion de différents événements bien documentés par les historiens de l'Empire ottoman. Alors que des Juifs, fuyant la Russie tsariste, étaient venus se réfugier à Istanbul, dans les années 1891-1892, le Sultan Abdülhamit invita au sérail, au mois d'avril 1893, le grand rabbin de Turquie, Moshé Lévy, pour lui faire cette proposition :
"Je sais que des Juifs, qui subissaient des persécutions dans différents pays, sont venus se réfugier en grand nombre dans le nôtre. Notre intention est d'installer ces Juifs réfugiés dans l'Est de l'Anatolie, afin qu'ils forment, avec des Juifs locaux, turcs, une formation militaire de cent mille hommes, qui sera rattachée à la Quatrième Armée de Turquie. Si un problème de nourriture casher devait se poser, je donnerais les ordres nécessaires afin que l'on prépare de la nourriture casher pour les Juifs, dans les casernes concernées. Qu'en pensez-vous, Monsieur le Grand Rabbin Efendi ?" (Avram Galanti, op. cit. , p. 18)
Les Juifs accueillis par la Turquie aux jours difficiles, tout comme les Juifs turcs, défendirent vaillamment la Turquie, au cours de la Guerre d'Indépendance, contre les forces d'occupation occidentales, en particulier, contre la Grèce. Ce sacrifice fait par les Juifs a entraîné la nomination du rabbin Haïm Naum, grand intellectuel, en tant que conseiller de la délégation turque à la conférence de Lausanne, en 1922, par l'Assemblée Nationale (Millet Meclisi).
Le tribut payé par les Juifs au cours des combats a été grandement pris en compte par Kemal Atatürk. Le 2 février 1923, à Izmir (Smyrne), l'avocat Rafaël Amato demanda  à ce dernier :
"Excellence, que pensez-vous des citoyens turcs de la religion mosaïque (les Juifs), qui sont heureux lorsque les Turcs sont heureux, et attristés, lorsque les Turcs sont en deuil ?"
Le Gazi (Mustafa Kemal Atatürk) lui répondit :
"Il y a parmi nous des éléments de différents peuples, qui ont uni leur destinée à celle des Turcs, peuple majoritaire de la Turquie. Parmi ces minorités, il y a les Israélites. Ceux-ci ont fait la démonstration de leur loyauté envers notre peuple et notre pays. Ils ont toujours mené chez nous une vie confortable, digne et constructive, et ils continueront, à l'avenir, à mener une vie aisée et heureuse chez nous, en Turquie". (Avram Galanti, op. cit., p. 86)
(référence : Ali Karaosmanoglu : A Turkish View of Bilateral Relations with Israël. Actual Situation and Prospect of Turkey's Bilateral Relations with Israël. Potential and Opportunities", modérateur : Pr. Ali Ihsan Bagis, Ter-Ar Yayinlari, n° 4, avril 1992, p. 2)
La Turquie vota contre la résolution des Nations-Unies préconisant, en 1947, le partage de la Palestine en deux Etats et reconnaissant la création de l'Etat d'Israël. Elle se tint à l'écart, ne prenant pas partie et observant une stricte neutralité, dans le conflit qui éclata, en 1948, entre Israël et les pays arabes. Mais, en mars 1949, les puissances occidentales ayant reconnu Israël, la Turquie fit de même : elle établit des relations diplomatiques avec ce pays. Les relations bilatérales turco-israéliennes suivirent un cours normal jusqu'en 1956, année où la Turquie rappela à Ankara son ambassadeur en Israël, sans toutefois rompre ses relations diplomatiques avec ce pays, après l'occupation du Sinaï par l'armée israélienne. Mais les relations entre les deux pays ne tardèrent pas à retourner à la normale. Ces relations se sont poursuivies, depuis lors, sans interruption jusqu'à nos jours, ne connaissant que des incidents mineurs, sans gravité. Le rôle joué au Moyen-Orient par les Etats-Unis est un élément non-négligeable du rapprochement et de l'amitié entre la Turquie et Israël. La Turquie a toujours pensé, dès la création de l'Etat d'Israël, que ce dernier pouvait jouer un rôle important en sa faveur, auprès de Washington... A un point tel qu'Ankara ira même jusqu'à demander l'aide d'Israël pour se faire admettre dans l'OTAN. (et envoyer des Turcs se faire tuer en Corée, NdT).
On ne saurait tenir pour négligeable non plus, le rôle joué, dans le rapprochement entre les deux pays, par la communauté juive de Turquie. Bien que le sionisme soit un mouvement interdit en Turquie, et en dépit du fait que la Turquie ait voté, en 1975, la résolution assimilant le sionisme à une forme de racisme, aux côtés d'une majorité de pays membres de l'ONU, les Juifs n'ont jamais subi, au cours de l'histoire, une quelconque pression de la part des Turcs. Les Juifs, dont la majorité vivent à Istanbul, ont pu continuer à respecter le plus librement qu'il soit leurs coutumes ancestrales, leurs rites et leurs pratiques religieuses, comme ils le désiraient. Après la création d'Israël, les Juifs qui quittèrent la Turquie pour y immigrer étaient, pour ainsi dire, des ambassadeurs en puissance entre les deux pays, dans les deux sens d'ailleurs (car ils parlaient d'Israël aux Turcs, NdT). Les Juifs d'origine turque se sont établis, en Israël, majoritairement dans la ville de Bat Yam. Ils continuent à y parler le turc, et beaucoup d'entre eux viennent en visite, de temps en temps, en Turquie.
La Turquie joue un rôle de pont, d'étape, pour les Juifs de différents pays du monde qui vont s'installer en Israël. (La géographie explique aisément que) les Juifs d'Iran ou de Bulgarie immigrant en Israël faisaient étape en Turquie. Mais ceux qui avaient quitté la Syrie ou l'Irak faisaient de même (avec le détour que cela représente, NdT). Ankara, ayant souvent servi d'intermédiaire avec l'Irak, dans l'assistance aux Juifs que l'on y jetait en prison, adoptait souvent, aux Nations-Unies, des positions communes avec Israël, à ce sujet.
Certains dirigeants éminents d'Israël, comme le Président de la République Yitzhak Ben Zvi, le Premier ministre David Ben-Gurion et le ministre des Affaires Etrangères Moshé Sharett, ont reçu leur éducation en Turquie, à l'époque de l'Empire ottoman. Ces dirigeants historiques d'Israël, très au fait des usages turcs et parfaitement turcophones, ont joué, bien évidemment, un rôle certain dans le rapprochement entre les deux pays.
En 1989, en préparation de la commémoration du cinq centième anniversaire (proche) de l'immigration massive de Juifs espagnols et portugais dans l'Empire ottoman, de 1492, fut créée en Turquie la Fondation du Demi-millénaire, qui joua un rôle important dans le renforcement et le développement des relations turco-israéliennes. Cette Fondation joua un rôle utile, du point de vue de la Turquie, par sa contribution au rayonnement du pays dans le monde entier. On ne peut ignorer, notamment, le rôle décisif que cette Fondation a joué, avec le soutien du lobby juif aux Etats-Unis, dans le rejet par le Congrès américain d'un projet de loi établissant officiellement la responsabilité de la Turquie dans le génocide des Arméniens (comparer avec : la France, NdT).
 
Le changement dans les grands équilibres et le pacte turco-israélien
 
Tout au long des années de la guerre froide, la Turquie, au premier rang des pays "sous la menace de l'URSS", revêtait une importance particulière pour l'OTAN et les Etats-Unis. Mais la Turquie, après avoir reçu des aides très importantes, des décennies durant, de l'OTAN et des Etats-Unis, perdit ce rôle essentiel, après la disparition de l'URSS et, par voie de conséquence, du danger potentiel que ce pays représentait pour elle. La crainte de voir le pays marginalisé amena l'armée turque à s'orienter vers une stratégie dans laquelle celui-ci assumerait un nouveau rôle dans le cadre des sphères d'influence américaine et européenne, au Moyen-Orient.
Le rapprochement entre Israël et la Turquie représentait le maillon le plus important de cette nouvelle stratégie. En se rapprochant d'Israël, la Turquie mettait de son côté, en sus des Etats-Unis et du soutien du Congrès américain, le puissant lobby pro-israélien américain.
(Les Juifs vivant aux Etats-Unis, qui ne représentent que 4% de la population américaine, sont influents sur les plans économique et politique. Ils constituent le lobby le plus influent des USA, dans l'entourage des institutions dirigeantes. La principale institution de lobbying pro-israélien est l'AIPAC (American Israël Public Affairs Committee - Comité américano-israélien pour les affaires publiques). De plus, les Juifs américains, dont les succès dans les domaines politique et économique sont éclatants, exercent une grande influence sur le front des médias. Ainsi, ils exercent une grande influence dans deux des trois plus importantes chaînes de télévision, NBC (National Broadcasting Company), et CBS (Columbia Broadcasting System). Ils possèdent les journaux les plus influents sur le plan politique, qui sont aussi ceux qui connaissent les plus forts tirages : le New York Times, le New York News et le Washington Post).
Ainsi, la Turquie, en raison de son dossier chargé en matière de non-respect des droits de l'homme et de ses problèmes endémiques avec la Grèce, pourrait se procurer, grâce à son pacte avec Israël, les nouvelles technologies et les armements du Pentagone qu'elle aurait eu de grandes difficultés à obtenir en s'adressant directement aux Etats-Unis et à l'Union européenne...
Les rôles parallèles tenus tant par Israël que par la Turquie au cours de la crise du Golfe ont joué un rôle certain dans leur rapprochement mutuel. D'ailleurs, à la fin de cette crise, le renforcement des relations bilatérales ayant été très important, comme nous l'avons indiqué, les relations diplomatiques furent pleinement rétablies le 31 décembre 1991 ; elles furent élevées au niveau plénier d'ambassades, en même temps que se produisait la reconnaissance mutuelle entre Israël et les Palestiniens. Comme nous le savons, les relations entre les deux pays avaient été établies au niveau des consulats, en 1949, un an après la création de l'Etat d'Israël. Mais, en 1980, après qu'Israël eût annoncé l'annexion de Jérusalem-Est, ces relations avaient été ramenées au niveau des représentants des intérêts des deux pays respectifs auprès du pays partenaire (maslahatgüzar seviyesi). Néanmoins, en 1991, Israël s'étant engagé de manière déterminée dans le processus de paix au Moyen-Orient découlant de l'accord de Madrid, sa position sincère joua un rôle décisif dans le rétablissement, au niveau des ambassades,  des relations diplomatiques entre les deux pays, et leur renforcement.
En fait, la Turquie considéra les accords d'Oslo, entre Israël et l'OLP, comme une porte ouverte au développement de relations encore plus intenses avec Israël. Ankara, qui défendit la position de l'OLP durant les longues années du processus de paix, fut parmi les premières capitales à endosser la "déclaration d'indépendance de la Palestine" proclamée au cours du Conseil National Palestinien de 1989. Par conséquent, après la reconnaissance d'Israël par l'OLP, il ne restait plus aucun obstacle de nature à retenir la Turquie de considérer Israël comme son partenaire privilégié, en vue d'une très large collaboration.
(Alan Makovsky, "The New Activism in Turkish Foreign Policy", The Washington Institute for Near East Policy, SAIS Review, printemps 1999, http://www.washingtoninstitute.org).
La Turquie, ayant pris en compte les changements intervenus dans la conjoncture internationale, après le discours de Yasser Arafat, le leader de l'OLP, devant l'Assemblée Générale de l'ONU, en 1974, reconnut officiellement l'OLP comme représentant légitime du peuple palestinien. Elle devint membre de la Conférence des Pays Islamiques, en 1976. Mais, tout en reconnaissant l'OLP, cette organisation était traitée ainsi qu'il suit par les milieux militaires et de droite, en Turquie :
"on a oublié de tenir compte du fait que (l'OLP), prenant modèle sur les organisations terroristes kurdes et arméniennes, pourrait à l'avenir porter atteinte aux intérêts de la Turquie et lui causer bien des "maux de tête". (Source : Türkiye-Israil Iliskilerinin Dünü-Bugünü-Yarini : Les relations turco-israéliennes, hier, aujourd'hui, demain).
En regard de la pauvreté de ses relations existantes avec les pays arabes, il était d'autant plus facile pour la Turquie de conclure un pacte avec Israël. Bien que la Turquie soutînt ouvertement l'OLP, elle n'a bénéficié d'aucun soutien du monde arabe, dont elle aurait bien eu besoin, au plus fort de la tension avec la Grèce, née de la question de Chypre, ni au cours des années quatre-vingt, face à l'oppression et à la politique d'assimilation forcée subies par la minorité turque en Bulgarie. La Turquie, extrêmement déçue de l'attitude des pays arabes à propos de la crise chypriote, ne rencontra pas plus de compréhension de leur part au sujet du problème du PKK (Parti des Travailleurs du Kurdistan) ou du partage des eaux du Tigre et de l'Euphrate.
(Alan Makovsky, "Turkish/Israeli Cooperation, The Peace Process and the Region")
Les relations bilatérales furent renforcées, au cours des années quatre-vingt dix, grâce à des visites réciproques de hauts responsables des deux pays. Immédiatement après la signature des accords d'Oslo, en 1993, le ministre turc des Affaires Etrangères d'alors, M. Hikmet Cetin effectua la première visite officielle de responsables gouvernementaux turcs en Israël. Cette visite fut suivie par celle du Premier Ministre (donc au plus haut niveau)  Tansu Ciller, du 5 au 7 novembre 1994. (La visite de Tansu Ciller fut précédée, en octobre 1994, par la signature entre les services de sécurité des deux pays, d'un accord sur la "lutte contre le traffic de drogues et le terrorisme".) C'est surtout dans les années 1994 et 1995, que les efforts du Premier ministre israélien, Yitzhak Rabin, allaient contribuer au renforcement des relations bilatérales, d'une manière décisive. A la suite de la visite en Israël, en 1996, du Président de la République de Turquie, Süleyman Demirel, le Président d'Israël, Weizman vint en Turquie en visite officielle.  Ces visites mutuelles se poursuivirent, avec, à la suite de la visite du ministre des Armées, Ismail Hakki Karadayi, le 24 février 1997, celle du ministre des Affaires Etrangères d'Israël, David Levy, qui vint en Turquie le 8 décembre 1997. Puis le ministre israélien de la Défense, Itzhak Mordechai (le 2 février 1998), le ministre du Parlement israélien, Dan Tichon (le 23 mars 1998), le ministre de l'Industrie et du Commerce, Natan Sharansky, se succédèrent, en visite officielle à Ankara.  Tout récemment, le 28 août 2000, le Premier ministre Ehud Barak a rendu une visite officielle d'une journée en Turquie.
 
L'accord militaire turco-israélien
 
Au cours des dernières années, la Turquie et Israël ont signé dix-neuf accords bilatéraux. Dix-sept de ces accords avaient pour objectif d'accélérer le rythme de la coopération entre les deux pays dans les domaines scientifiques, économiques et technologiques. Parmi ceux-ci, citons l'accord, signé en 1996, sur la "liberté des échanges commerciaux entre les deux pays".
(Oguz Celikkol, "Turkey and Middle East : Policy and Prospect", the Washington Institute for Near East Policy, http://www.washingtoninstitute.org/media/celikkol.htm)
Les accords de défense commune signés entre la Turquie et Israël en février et août 1996 ont été tenus secrets. Bien que quelques informations aient filtré sur le contenu de l'accord de février, nous ne savons pratiquement rien de celui qui a été conclu au mois d'août 1996...
La rumeur publique rapporte que ce qui a été signé entre le ministère des Armées de la République de Turquie et le ministère de la Défense Nationale d'Israël, le 23 février 1996, à Tel-Aviv, était un "accord sur la coopération et la formation militaire" (il fut signé par le Général Cevik Bir, pour la Turquie, et David Ivry, au nom d'Israël). (voir le texte de cet accord dans Aksiyon, 18-24 mai 1996). Cet accord, qui aurait dû rester secret, entre les deux partenaires, a été rendu public, le 5 avril 1996, par le quotidien israélien Yediot Aharonot, ce qui donna lieu à beaucoup de commentaires, tant dans les pays contractants qu'à l'extérieur. L'accord, ayant un caractère militaire, n'aurait pas dû être révélé au public, car cela contrevenait à un accord signé préalablement par les deux pays, en mars 1994, portant sur "la sécurité et la confidentialité" des échanges entre les deux gouvernements.  (Les relations entre la Turquie et Israël, hier, aujourd'hui, demain, p. 137)
Le pacte de coopération et de formation militaires signé par la Turquie et Israël en 1996, peut être considéré comme similaire à un accord passé entre eux, en été 1958, sous le nom d'"Accord-Cadre". Cet accord, classifié "secret défense" par Israël, et qui ne pouvait pas être, par conséquent, rendu public avant un délai de cinquante ans, comportait la volonté de développer une coopération tous azimuts entre les deux pays. En sus des services de renseignement, de la diplomatie, du domaine militaire, il prévoyait des échanges commerciaux et scientifiques intenses. C'est dans le cadre de la conclusion de cet accord que le Premier ministre israélien, David Ben-Gurion était venu en visite officielle en Turquie et que son homologue Adnan Mendérès s'était rendu en Israël. (Nachami Amikan : "Afin de ménager la possibilité d'une rencontre secrète entre Ben-Gurion et Mendérès, pour des raisons de confidentialité, ce sont les hauts-fonctionnaires du Ministère des Affaires Etrangères qui firent fonction de serveurs, au cours du déjeuner"...)
L'Accord-Cadre israélo-turc de 1958 ayant pu rester secret, il ne fit l'objet d'aucune polémique.
L'accord de coopération militaire signé en 1996 l'était pour une durée de cinq ans. Dans le cas où l'un des deux partenaires n'informerait pas son homologue de sa volonté de mettre un terme à l'accord en respectant un délai minimal de quatre-vingt dix jours avant le terme prévu, cet accord était prorogeable pour une année supplémentaire. Dans le texte de l'accord, les autorités contractantes sont désignées ainsi qu'il suit :
a/ en Turquie, l'autorité représentative de la partie contractante turque est le Général en chef des Armées et, pour le côté israélien, l'autorité contractante est l'ambassadeur d'Israël à Ankara ;
b/ en Israël, l'autorité représentative de la partie contractante turque est l'ambassadeur de Turquie à Tel-Aviv et l'autorité représentative de la partie contractante israélienne, le Ministre de la Défense d'Israël. (Ahmet Güner, "Ce que l'on ne sait pas sur l'accord turco-israélien" - "Türk Israil Anlasmasinin Bilinmeyenleri", Aksiyon, 18-24 mai 1996, n° 76).
Dans l'accord conclu, les concepts de "parties contractantes", "objectifs", "étendue" et "autorité responsable" ayant été explicités, les mesures à prendre en matière de formation militaire sont énumérées comme suit, sous le titre "Contenu en matière de formation" :
1 - En matière de formation (militaire), la coopération comprend ce qui suit :
a- l'assurance d'une coopération, à tous les niveaux, sur la base de la réciprocité, dans les différents domaines de l'expertise professionnelle ;
b- des visites réciproques entre académies militaires, entre unités combattantes et entre quartiers généraux (des deux pays) ;
c- des échanges de programmes de formation et d'exercices militaires sur théâtre d'opérations ;
d- l'envoi d'observateurs chargés de suivre les exercices militaires entre les deux pays ;
e- des échanges de personnels d'encadrement, afin d'accroître leurs connaissances et leur expérience, en particulier dans les domaines de l'histoire militaire, de la muséologie militaire, des archives militaires, y compris les domaines sociaux et culturels ;
f- des visites mutuelles d'escadrons militaires dans les ports des deux pays ;
g- des échanges de visites d'équipes sportives et de tournées de formations artistiques ;
h- la coopération mutuelle des studios de réalisation de films et de photographies militaires ;
2 - les deux parties s'engagent à coopérer à la mise en place de préparatifs et d'une coordination entre elles pour assurer la réalisation des actions de formation mutuelle ci-dessus énumérés, dans les domaines suivants :
a- les contenus de la formation
b- les principes de la formation
c- les durées adéquates des formations, les dates de sortie des promotions...
d- les critères retenus pour la sélection des personnels envoyés en mission dans le pays partenaire.
e- la langue utilisée
f- les sommes et les méthodes de comptabilité des fonds devant être assurés par l'Etat envoyant en mission des personnes en vue de leur formation et d'autres activités, dans le pays partenaire
g- les autres points à prendre en compte
h- la forme d'organisation des activités socio-culturelles
i- les méthodes de cessation des activités de coopération.
3 - les unités échangées, les personnels échangés et les détails relatifs aux formations devront être précisés au pays les recevant en formation chez lui
4 - les deux parties s'attacheront à encourager les visites mutuelles d'avions de combat et de flottilles militaires dans leurs ports et aéroports militaires
5 - les deux parties s'attacheront à développer les rencontres sportives mutuelles entre leurs équipes de leurs différents corps d'armée
6 - les actions de formation seront mises en place, à tour de rôle, par Israël et la Turquie .
Le rapprochement entre la Turquie et Israël ne pouvait manquer d'attirer l'attention du lobby juif des Etats-Unis et de ses différentes organisations vers la Turquie. Le premier ministre turc, Mesut Yilmaz, au cours d'une visite à New York, le 17 décembre 1997, rencontra plusieurs associations juives, et fut honoré, grâce à ces contacts, de recevoir de la part du Congrès Juif américain (AJC) le "Prix International d'Humanité". Il fut gratifié, également, de la part de deux institutions juives, le B'nai Brith et la Ligue Anti-Diffamation, du titre de "Grand Homme d'Etat".
Les Etats-Unis accueillirent l'accord avec la plus grande bienveillance. Le porte-parole du Secrétariat d'Etat, Nicholas Burns, déclara, en mai 1997 : "Que la Turquie et Israël marquent leur volonté de renforcer leur amitié, voilà qui ne saurait nous laisser indifférents" (Turkish Daily News, 11.05.1997).
En septembre 1997, l'ambassade d'Israël à Ankara annonça que des exercices militaires seraient menés en Méditerranée, conjointement par Israël et la Turquie, avec le soutien logistique des Etats-Unis, fournissant tous les détails quant aux dates et aux manoeuvres programmées. Israël pensait que ces exercices auraient lieu, vraisemblablement, en novembre de la même année. Mais, malgré les objections d'Israël, les Etats-Unis exigèrent que ces exercices soient renvoyés à plus tard, jusqu'en 1998. Washington, en effet, tenant compte des protestations que ces exercices conjoints ne manqueraient pas de soulever dans le monde arabe, et afin de tenter de les apaiser, ne serait-ce que très modestement, s'efforçait de convaincre l'un au moins des Etats arabes d'envoyer un observateur participer à ces exercices. (Alain Gresh : "Turkish-Israël-Syrian Relations and Their Impact on the Middle East, The Middle East Journal, vol. 52, n° 2, printemps 1998 - Les relations entre Israël, la Turquie et la Syrie, et leur impact sur le Moyen-Orient).
Les Etats-Unis réussirent, finalement, à convaincre Israël d'accepter que les exercices conjoints aient lieu en janvier 1998, en présence d'un commandant de l'armée de terre jordanienne. (C'est l'amiral de la Marine, Huseyin Ali Muhammed, qui représenta, en fait, la Jordanie, en tant qu'observateur, à ces exercices conjoints israélo-turco-américains, baptisés du nom (poétique, NdT) de "Sirène Digne de Confiance" (Güvenilir Denizkizi)).
L'accord turco-israélien, en particulier dans le domaine de la coopération militaire, allait assez rapidement donner ses fruits. En mars 1996, des sociétés israéliennes remportèrent un marché pour la modernisation de cinquante-quatre avions F-4 de l'Aviation militaire turque, pour une valeur d'un demi-milliard de dollars. Dans le cadre de ses relations avec la Turquie, Israël devait vendre des tanks à ce pays, et, en sus d'une production commune de missiles, la Turquie devait donner à Israël un marché pour la modernisation de 48 de ses avions F-5. C'est d'ailleurs ce qu'elle fit, en signant ce contrat avec Israël, en décembre 1997. (Financial Times, 02.12.1997). Par la suite, les deux pays parvinrent à un accord pour la production commune de missile Arrow à moyenne portée. (Turkish Daily News, 24.12.1997) Ainsi, la coopération et les transferts de technologie, en matière militaire,  constituent les champs les plus profitables du rapprochement turco-israélien. (Ümit Özdag, Turquie, Irak du Nord et PKK, Anatomie d'une guerre irrégulière, Publications du Centre d'Etudes Stratégiques d'Eurasie, Ankara, 1999, p. 197 - Türkiye-Kuzey Irak ve PKK, Bir Gayri Nizami Savasin Anatomisi, Avrasya Stratejik Arastirmalar Merkezi).
La conviction générale prévaut, que sur la base des deux accords déjà conclus, on est en voie de passer à des arrangements sur des sujets généraux, tels que la menée d'exercices aériens et maritimes communs, la possibilité de bénéficier des facilités portuaires mutuelles, de procéder à des vols d'entraînement d'aviateurs turcs en Israël et israéliens, en Turquie, la coopération en matière de lutte contre le terrorisme et la sécurité des frontières, la coopération en matière d'industries de défense, l'échange de personnels spécialisés... (Michael Eisenstadt : La coopération militaire turco-israélienne : évaluation - Turkish-Israeli Military Cooperation : An Assessment. The Washington Insitute for Near East Policy, Policywatch, n° 262, 24.07.1997; http://www.washingtoninstitute.org. Alan Makovsky : La copération militaire turco-israélienne, le processus de paix et la région - The Washington Institute for Near East Policy, Policywatch, n° 195, 26.04.1996. Alain Gresh : op. cit.).
Dans le cadre de l'accord conclu enfévrier 1996, huit F-16 israéliens sont venus se poser en Turquie, sur la base aérienne d'Akinci, dans la région d'Ankara, où ils sont restés une semaine. (Michael Eisenstadt, op. cit.)
FIN DE LA PREMIERE PARTIE
[Birikim Yayinlari, Klodfarer Cad - Iletisim Han, n° 7, Coagaloglu, 34400 Istanbul - TURQUIE]
 
2. Processus de paix ou de guerre ? par Michel Warschawski
[Michel Warschawski est Directeur du Centre d'Informations Alternatives de Jérusalem. Nous vous proposons la retranscription intégrale d'une Conférence qu'il a donné à Grenoble, le 25 janvier 2001, à l'invitation du CCFD, de l'Association Médicale Franco-Palestinienne et de Chrétiens Proche Orient.]
Le conflit, les espoirs au Moyen Orient soulèvent l’intérêt mais aussi l’inquiétude, les interrogations que tout le monde se pose sur le terrain.
Je voudrais commencer par cette question : comment ce qui apparaissait, il y a encore six mois, comme un processus de paix sur le point d’aboutir, et c’est ainsi que les médias en France et en Europe, en Israël même présentaient la situation, comment, alors qu’on était à deux doigts de réussir, qu’on négociait les derniers obstacles, le processus d’Oslo, le processus négocié lui même semble, après ces quelques mois, être parvenu à une impasse
Alors deux questions se posent : qu’est-ce qui s’est passé, pourquoi en est-on là, mais aussi une deuxième question : pourquoi cette mauvaise lecture de la réalité, pourquoi cette surprise ? Je voudrais dire deux mots sur le concept de surprise, parce que je crois qu’il nous permet d’entrer directement dans le cœur du sujet. L’opinion publique israélienne et internationale, mais je parlerai d’abord de l’opinion publique israélienne qui est directement concernée, a été surprise. Un de mes amis palestiniens me disait, il y a quelques semaines : " je ne comprends pas, vous êtes toujours surpris. Il y a eu la guerre du Kippour et vous étiez surpris, votre armée a été prise de court, vos services de sécurité, l’information, le deuxième bureau qui est censé être d’une efficacité rare, ont été surpris par la guerre. Puis il y a eu l’Intifada et vous avez été surpris, vous ne vous y attendiez pas. Et à la guerre du Liban, vous avez été surpris aussi par la résistance libanaise qui semblait pourtant évidente. Et voilà, qu’une fois de plus, vous êtes surpris par le soulèvement palestinien. Alors qu’est-ce qui se passe ? Pourquoi n’êtes vous pas capable de comprendre, d’anticiper ce qui, à nos yeux palestiniens et aux yeux de quelques uns de la communauté israélienne, semble presque inévitable " ? Des Israéliens disaient depuis des années, depuis quatre ans maintenant : " attention ! Ca risque d’exploser ".
Ma surprise à moi, ce n’est pas que ça a explosé, ma surprise est que ça a pris si longtemps, ma surprise est l’étonnante patience des palestiniens qui, dans un cadre qui était censé mener à la réconciliation, un cadre caractérisé par les négociations, la reconnaissance mutuelle, ce cadre établi par la déclaration de principe de Washington, ce qu’on appelle la déclaration d’Oslo, avaient vécu l’humiliation, la poursuite de l’occupation, un élargissement sans précédent de la colonisation et surtout, une humiliation permanente, beaucoup plus difficile à vivre que les coups que l’on reçoit dans le combat. Attraper un coup de poing dans la figure quand on se bagarre, ça fait mal mais ça n’humilie pas. On donne des coups, on attrape des coups et quand on est plus faible, on en attrape plus qu’on en donne. S’attraper une gifle quand on est entrain de construire un bon voisinage et qu’on a tendu la main, ça, c’est humiliant. Ce que les palestiniens ont vécu au cours des sept dernières années, ça a été une innombrable série de gifles, d’accords non respectés, d’accords négociés, re-négociés et re-re-négociés.
Jusqu’à aujourd’hui, une partie substantielle de ce qui a été signé et contre signé et resigné par les différents gouvernements israéliens n’est toujours pas mis en œuvre. Il y a des prisonniers dont le nom apparaît dans les accords signés au début du gouvernement Netagnyahou qui sont encore en prison. Il y a des territoires par rapport auxquels le gouvernement israélien avait annoncé le redéploiement de l’armée israélienne où celle ci se trouve toujours (région d’Hébron par exemple).
Et malgré cela, le processus de négociation continuait, malgré cela les palestiniens étaient prêts à renouveler depuis maintenant sept ans le cessez le feu qu’ils avaient annoncé solennellement à Washington et qu’ils ont tout fait pour respecter et faire respecter, y compris par les courants les plus radicaux souvent opposés à ces négociations, coopérant, certains diraient collaborant avec l’armée israélienne pour empêcher que des actions terroristes comme on dit, ne fasse dérailler ce train de la paix, ce processus qui devait conduire à la paix et à la réconciliation.
Alors pourquoi l’opinion publique israélienne a-t-elle été une fois de plus surprise ? Parce que et c’est peut-être le plus grand paradoxe de ces sept dernières années, israéliens et palestiniens, et quand je dis israéliens, j’y inclus une grande partie du mouvement de la Paix des hommes et des femmes de bonne volonté qui effectivement veulent la paix et qui se déclarent prêts à des compromis importants, israéliens et palestiniens vivent des réalités complètement différentes. Quel paradoxe ! Alors que le soulèvement palestinien de 87 à 91 avait réussi à faire percevoir qu’israéliens et palestiniens parlaient les uns et les autres de la même réalité sans être forcément d’accord sur comment résoudre les problèmes, mais au moins on était conscient du problème lui même et c’était peut être un des grands acquis de l’Intifada, voilà qu’après la signature d’Oslo, la reconnaissance mutuelle entre Israël et l’OLP, israéliens et palestiniens recommencent à vivre deux réalités complètement séparées.
Alors on se rencontre, ce qui est nouveau, officiellement, nos représentants se rencontrent, négocient, discutent, collaborent même au niveau des forces de police, des services de sécurité, du business, mais par contre, au niveau des opinions publiques, nos perceptions se séparent de plus en plus. Alors, on est surpris parce que depuis sept ans, ici, de notre côté de la frontière qui est celle d’un bouclage des territoires occupés et je rappelle que le bouclage n’est pas quelque chose de nouveau, il existe depuis 1992, du côté israélien du bouclage, on vit la paix, c’est à dire la sécurité. Jamais la sécurité collective et individuelle n’avait été si bonne et ce, malgré cette courte période dramatique des attentats, des bus qui sautaient à Tel Aviv ou à Jerusalem. La prospérité aussi. Suite à la déclaration de principe, Israël devient un pays stable, au niveau des investisseurs internationaux et les investissements se multiplient, ce qui provoque un véritable boom économique que nous vivons encore, une réduction du chômage, un taux de croissance appréciable, des investissements.
Alors c’est la sécurité, la prospérité, la reconnaissance internationale et arabe, de nombreux pays musulmans et plusieurs pays arabes qui n’avaient pas de relations diplomatiques avec Israël, sur la lancée de la déclaration de principe d’Oslo, ouvrent des relations diplomatiques et/ou économiques avec Israël, certaines officielles, d’autres officieuses, d’autres plus clandestines, mais qui créent une nouvelle réalité, brisent l’isolement et affirment une reconnaissance d’Israël. C’est la paix avec la Jordanie, et c’est la presque paix avec la Syrie qui a capoté sur les 300 derniers mètres. Donc, c’est la prospérité, la sécurité, la reconnaissance, l’élargissement du cadre de coopération avec Israël et finalement, peut-être le plus important pour les forces progressistes israéliennes, pour les forces de la paix en Israël, la possibilité de se regarder dans un miroir, la bonne conscience. Après avoir signé la paix, on a les mains propres, on se sent libérés de l’accusation, y compris de celle dont on s’accuse soi même, d’être les occupants, de réprimer un mouvement de libération, de réprimer des manifestations d’enfants, de femmes. On se sent enfin un peuple, une nation, un état civilisé, avec un horizon de normalité dans la région.
C’est cela que nous vivons depuis sept ans en Israël : la paix et les fruits de la paix, et les dividendes de la paix. Et on est tellement à notre aise dans cette nouvelle réalité qu’on a cessé d’écouter ce que les pierres de la première Intifada nous avaient fait comprendre. C’est que tant qu’il y aura une occupation, il n’y aura pas la paix, tant qu’il y aura des colonies, il n’y aura pas de normalisation, tant que Jerusalem Est sera aux mains de la souveraineté israélienne, il n’y aura pas de réconciliation. Et cela, petit à petit, on l’oublie. Et on l’oublie à travers les années et on commence à développer une nouvelle philosophie consensuelle en Israël, selon laquelle on peut avoir et la paix et les territoires, au moins une partie d’entre eux, et la sécurité et les colonies, au moins une partie d’entre elles, et la normalité et la poursuite de l’occupation, même si celle-ci sera partielle, comme on dit en français, et le beurre et l’argent du beurre.
Et ce nouveau consensus s’affirme derrière un objectif qui devient prioritaire, surtout depuis l’assassinat d’Ytzahk Rabin : la réconciliation nationale. Si, en 93, avec la déclaration de principe d’Oslo, on parle de réconciliation avec les palestiniens, celle ci semblant acquise, mais pas encore dans les faits, il est temps de se tourner vers la réconciliation nationale et créer un nouveau consensus qui serait la base de ce qui pourrait permettre une réconciliation avec les palestiniens, mais c’est une erreur, une immense erreur parce que le prix nécessaire à se mettre d’accord entre droite et gauche, entre colons et ceux qui s’opposent à cette colonisation est un prix inacceptable par les palestiniens. Mais là, s’affirme l’arrogance d’un pays fort, d’un pays en pleine prospérité, d’un pays qui se sent en sécurité et qui a une armée extrêmement puissante. C’est qu’on est persuadé qu’on arrivera à dicter aux palestiniens les conditions de cette paix. Lorsque les palestiniens disent : " mais non, cette paix exige le démantèlement des colonies ", de plus en plus, il existe un discours en Israël pour dire : " ne vous en faites pas, on arrivera à les convaincre ". Et quand les palestiniens disent : " il n’y aura pas de paix sans souveraineté palestinienne sur Jérusalem Est, " on leur dit : " Mais notre consensus ne le permet pas. Nous sommes tous d’accord pour dire : Jérusalem Est ne sera plus arabe ". Et lorsque les palestiniens disent : " mais c’est le prix ou alors, tout le processus va tomber ", on leur dit : " c’est à prendre ou à laisser ", étant persuadés que les palestiniens feraient marche arrière au moment voulu et accepteraient nos conditions pour la paix.
Alors, on fête la paix, on célèbre, on profite des résultats de la paix qui n’existe pas encore, alors que les palestiniens continuent à vivre l’occupation, à laquelle s’ajoute cette dimension d’humiliation qu’il n’y avait pas avant. Une avocate disait, il y a quelques années, la grande différence entre les procédures des tribunaux militaires, que ce soit au niveau des peines, au niveau des chefs d’accusation, des procédures entre la situation après Oslo et avant Oslo, c’est que, depuis la signature des accords d’Oslo, d’une manière plus précise, depuis 94- 95, s’ajoute la méchanceté gratuite. Avant Oslo, l’appareil de répression, de punition mis en œuvre par la justice militaire, les services de sécurité dans les territoires occupés était motivé par leur conception de la sécurité, par une conception de la sécurité exagérée dont on abusait, qui permettait tout, mais qui avait un objectif : garantir le maximum de sécurité, faire régner l’ordre de l’occupation. Après la signature des accords d’Oslo, s’ajoute une autre dimension, celle de montrer tout simplement qui est le chef. Ce n’est plus une répression fonctionnelle utilisée souvent avec beaucoup d’exagération, que ceux d’entre vous qui avez fait votre service militaire, ou été en prison ou dans toute structure de domination, où il y a un rapport de dominant dominé, connaissent, plus on se rapproche de la fin, plus l’adjudant ou le maton fait preuve de méchanceté pour montrer jusqu’au dernier moment qui est le chef. " demain, tu seras un civil, mais aujourd’hui, tu es encore un soldat sous mes ordres ". C’est un peu ce que les palestiniens ont connu au cours de ces dernières années, " peut-être vous serez indépendants mais tant qu’on sera là, n’oubliez pas que nous ne sommes pas égaux, que c’est nous qui fixons les règles du jeu ", c’est ce que cette amie appelait la méchanceté gratuite, une méchanceté qui n’est plus fonctionnelle, qui n’est plus là pour défendre un certain ordre, celui de l’occupation mais qui est là pour démontrer un supériorité et pour exprimer le refus d’accepter une égalité. Or, précisément, ce que les palestiniens attendaient avant les accords d’Oslo, bien avant de recevoir leur terre, bien avant de gagner la souveraineté, c’était de gagner la dignité. Pour les palestiniens, la signature de la reconnaissance mutuelle impliquait une réciprocité, non pas l’égalité, parce qu’il est évident qu’entre une société comme la société palestinienne qui ne s’est pas encore organisée sous forme d’état, qui a vécu 30 ans d’occupation et de dé-développement face à un état fort, développé, qui a eu le soutien de la communauté internationale pendant 50 ans, il y a une inégalité flagrante. Ce que les palestiniens attendaient au moins, c’est qu’on les traite sur un pied d’égalité, c’est qu’on les regarde comme ils disaient, au niveau des yeux, d’égal à égal, et qu’on négocie d’égal à égal. Mais plus le temps avançait, plus les négociations devenaient des négociations inter-israéliennes entre droite et gauche, entre partisans du Grand Israël et partisans des compromis et le résultat de ces négociations était imposé ou voulait s’imposer aux palestiniens en disant : " de toute façon, c’est la seule option en Israël, il n’y a personne qui vous proposera mieux que çà ".
Et c’est ainsi qu’arrive le grand malentendu de Camp David. Qu’est-ce que c’est que ce malentendu ? Si vous lisez des journaux sérieux comme Le Monde ou Libération, vous voyez et c’est le mot dont on a usé et abusé durant les derniers mois, Barak a fait preuve d’une extrême générosité. Il a vraiment donné beaucoup plus que tout ce qu’on pouvait espérer. Et voilà que les palestiniens, ces ingrats, ceux qui ne loupent jamais une occasion de louper une occasion, ceux qui ne savent jamais comprendre que c’est le moment de dire oui, disent NON. Alors pourquoi ce malentendu, cette surprise qui s’exprime en colère en Israël ? Parce qu’il y avait deux façons de négocier : on négociait, on était très proches, physiquement, à la même table et pourtant, on parlait deux langages complètement séparés, comme deux lignes parallèles, comme deux rails qui ne se rencontrent jamais.
Pour les palestiniens, ce que l’on négociait, c’était leurs droits : le droit, tel qu’il s’exprime dans les résolutions de l’ONU, dans la 4ème convention de Genève, tel qu’il a été affirmé et réaffirmé par la communauté internationale et en particulier l’Europe, le droit à l’autodétermination, le non droit d’acquisition d’un territoire conquis par la guerre, l’illégalité totale, flagrante et considérée comme crime de guerre des colonies de peuplement, le droit des réfugiés à rentrer chez eux. Ce sont des droits, non pas un marchandage et, pour eux, les négociations étaient là pour affirmer le droit et négocier les modalités de leur mise en œuvre.
Pour les israéliens, au contraire, ce qui se négociait, c’était des choses, des sujets. Les territoires n’étaient plus des territoires occupés. Territoire occupé est un concept du droit international, défini très précisément par la 4ème convention de Genève, il donne des droits et des devoirs à la force occupante et aux populations occupées. Sur les cartes du département américain, jusqu’en 1995, cela s’appelait territoires occupés. Depuis, pour les israéliens autant que pour les américains, pas encore pour les européens, j’espère, jamais, ces territoires ne sont plus des territoires occupés mais des territoires en négociation, des régions en conflit, en litige. C’est une région neutre, un peu comme le colonialisme français, anglais considérait l’Afrique au 19ème siècle, comme une jungle neutre qui n’appartient à personne et qu’on se partage en fonction d’un certain rapport de forces, d’une histoire, de qui était le premier, qui était le deuxième et on se le divise. C’est ni à toi, ni à moi, c’est quelque chose qu’on trouve dans la rue et qu’on se partage. Les territoires occupés sont devenus des territoires en litige, ce n’est ni palestinien, ni israélien, ni jordanien, c’est pour l’instant neutre et on négocie combien reçoit chacun. Les colonies ne sont plus des entités illégales, ce qui était admis par le mouvement de la paix israélien, par 50% de la population israélienne au moins, par toute la communauté internationale y compris l’Amérique, les colonies étaient des sujets en litige. Les colonies, ce sont des lieux de peuplement en litige et qui sont l’objet de négociations.
Alors évidemment, si tout est neutre, si tout est en litige, s’il n’y a rien qui soit permis ou interdit, s’il n’y a rien qui est à toi ou à lui, mais que tout est ouvert, alors, quand un gouvernement israélien suggère 90% des territoires, voire 94% des territoires, il est effectivement extrêmement généreux et encore, c’est le plus fort. Le plus fort se contente de 6%, c’est plus que de la générosité, c’est de la charité chrétienne. Lorsque Israël reconnaît qu’il est prêt à ce que 75% ou 80% des colonies soient démantelées, c’est d’une générosité extraordinaire. Et c’est ce que l’opinion publique israélienne a cru et a réussi à faire passer à travers une partie importante de l’opinion publique internationale. Puisqu’il n’y a rien de permis et d’interdit, de légal et d’illégal, 96%, il faut vraiment être obstiné ou vouloir saboter le processus pour dire non. S’il y a un droit, si c’est à moi, c’est à moi, point. Et même si vous me donnez 95%, vous n’avez pas fait acte de très grande générosité, vous êtes encore un voleur qui ne m’avez rendu qu’une partie substantielle de mon du.
Ca, c’est le grand malentendu de Camp David. Ce sont deux conceptions très différentes de quoi on négocie. Non pas que les palestiniens ne soient pas prêts à négocier, tous les dossiers à l’ordre du jour, ils l’ont dit et répété, ils sont prêts à écouter les revendications israéliennes sur le maintien de certaines colonies. Ils sont prêts à entendre parler d’échanges territoriaux, d’annexions d’une partie du territoire, mais ils veulent, et c’est la condition sine qua non sans laquelle il n’y aura pas d’accord et les négociations ne continueront pas, qu’il soit clair qu’on négocie sur une certaine base, que les territoires qui se trouvent à l’est de la ligne verte, des frontières du cessez le feu de 1967 sont occupés et doivent être rétrocédés, que les colonies sont illégales et doivent être démantelées, que Jérusalem Est n’est pas israélienne et doit être rendue. Une fois cela mis au clair sur le papier, on peut négocier les échanges, les exceptions. Les palestiniens disent : " on est prêts à être assez généreux, NOUS sommes prêts à être généreux, NOUS sommes prêts à être compréhensifs mais sur la base de ce qui NOUS revient. Et ce n’est pas à NOUS parce que ça nous revient mais à VOUS à demander et de justifier pourquoi nous devrions renoncer à telle ou telle région, pourquoi ces blocs de colonies devraient être annexés à Israël et qu’est-ce que l’on aurait en échange, pourquoi le mur des lamentations et le quartier juif de Jérusalem Est qui fait partie des territoires occupés depuis 1967 et en conséquence, d’après la résolution du Conseil de Sécurité et de l’Assemblée Générale des Nations Unies doivent être rétrocédées aux palestiniens, pourquoi faire une exception,. Nous ne sommes pas sourds à vos arguments mais c’est à vous à justifier cela, ce n’est pas à nous à justifier pourquoi nous voulons nos territoires.
Il y a là deux conceptions contradictoires et, contrairement à ce que prédisaient certains intellectuels palestiniens, Arafat a été ferme sur ces questions et a surpris l’opinion publique israélienne parce qu’il avait fait preuve d’un extrême souplesse dans les négociations sur les statuts interimaires. Mais il a été d’une extrême rigueur sur le statut définitif. Le statut interimaire était interimaire, comme des acomptes :vous nous avez promis 40%, puis 30%, puis 20%, ce n’est pas tout ce qu’on vous avait promis mais c’est des acomptes. Sur le prix définitif, ce n’est pas la même chose. Là, vous payez cash ce à quoi vous vous êtes engagés et ce à quoi la justice ou, si l’on veut, la légalité vous engage.
Et l’opinion publique a réagi avec une extrême surprise et avec beaucoup de colère. " Comment pouvez vous être aussi ingrats, on vous a donné 40% des territoires occupés, on vous en donne encore 50%, on est même prêts à démanteler une partie importante des colonies, on est même prêts à une forme de compromis sur Jérusalem Est et vous dites non, alors tout est fini entre nous ". Et cette réponse, " tout est fini entre nous ", nous l’avons entendue à droite, ce qui était évident, mais aussi à gauche. Ca a été quasiment à l’unanimité que la population israélienne a accusé le président Arafat, l’autorité palestinienne, le peuple palestinien, d’avoir mis fin au processus négocié, de l’avoir saboté et de l’avoir remplacé par une réouverture du conflit représenté par cette intifada. Les réactions des forces de la paix israéliennes ont été très dures parce que ce sont ceux qui ont le plus profité, le plus intériorisé cette fête de la paix, cette fête dans laquelle on dévorait à pleine bouche les fruits de la paix. Les professeurs de l’université de Tel Aviv ou de Jérusalem pouvaient enfin rencontrer leurs collègues à travers tout le monde et parfois même au Maroc ou en Indonésie où ils étaient persona non grata auparavant : " Voyez, tout s’arrange, nous sommes en paix, nous sommes devenus une nation normale, civilisée et reconnue par nos ennemis les plus immédiats ".
Et tout d’un coup, voilà un doigt accusateur qui vient de Palestine et qui vient aussi de Londres, de Paris, de Bruxelles, en disant :  " Mais qu’est-ce que vous faites ? Vous tirez sur les enfants, vous affamez une population entière, vous n’avez dons pas changé, vous refaites ce que l’on croyait que vous aviez arrêté de faire ". Alors, ils sont très en colère, ils accusent les palestiniens : " vous nous repoussez dans ce rôle que nous ne voulions pas, vous nous obligez à nouveau à être l’occupant et nous ne voulions pas être l’occupant ". Mais les palestiniens ont été extrêmement clairs et très didactiques en disant : " bien sûr, nous ne voulons pas que vous jouiez ce rôle, mais nous vous avions dit dès le premier jour à quelles conditions les rôles changent. Vous n’avez pas voulu entendre. Nous ne l’avons jamais caché, vous n’avez pas voulu écouter. Nous vous avions dit : il s’agit de mettre fin à l’occupation, non pas de renégocier l’occupation. Nous vous avons aussi dit le droit au retour des réfugiés, nous sommes prêts à négocier les modalités, les rythmes, à écouter vos problèmes, mais ne dites pas qu’on n’a jamais parlé du retour, comme si c’était quelque chose de neuf ".
J’ai vu dans certains journaux français : " les soldats ont perdu les pédales, les officiers n’ont pas toujours contrôlé leurs troupes ", non, c’est trop facile et ce n’est pas la vérité. La vérité est que l’usage de la violence a été planifiée bien en avance, a été voulue dans les moindres détails. Je ne prendrai que deux exemples très concrets, des preuves : la première, c’est que dans les plans que le gouvernement israélien, y compris le gouvernement précédent avait demandé à l’armée de préparer au cas où les palestiniens auraient l’audace de déclarer l’état de Palestine d’une façon unilatérale, l’armée devait préparer des plans de riposte. " on ne va pas les laisser faire ce qu’ils veulent sans réagir ". D’après ce que dit la presse quotidienne israélienne, il y a 4 plans, 4 dossiers alternatifs. Dans trois d’entre eux, il y a un chapitre qui s’appelle " la saignée ", (j’ai enfin traduit le mot juste : en hébreu : faire couler le sang). Ce chapitre a été signé par le spécialiste des questions militaires du quotidien Haaretz. Il explique au moins un des plans opératoires suggérés par le département opérationnel de l’armée : dans la mesure où les palestiniens prennent une initiative unilatérale, il faudra vite faire couler beaucoup de sang pour les ramener au bon sens ; une philosophie qui, malheureusement n’est pas unique à Israël, qui est assez classique, assez banale chez les généraux dans toutes les armées du monde, que si on leur en donne les moyens, les militaires peuvent résoudre tous les problèmes. Si ça ne marche pas, c’est qu’on ne leur a pas donné assez de moyens. C’étaient certains généraux français en Algérie, certains généraux portugais en Angola, ce n’est qu’une question de moyens : " laissez nous faire et on résoudra les problèmes ". Ca a toujours été un échec, ça n’a jamais fait ses preuves. Mais ils auront toujours raison car on aurait toujours pu leur donner plus de moyens. Donc, on ne pourra jamais prouver qu’ils n’ont pas eu raison, mais avec tous les moyens qu’on leur a donnés, je rappelle qu’au Vietnam, ils étaient infinis, jusqu’à la bombe atomique exclue, les bombardements massifs, la destruction des digues, qu’est-ce qu’on pouvait faire de plus, le défoliant dans une partie importante du territoire, des millions de morts et de victimes, et malgré tout, ils n’ont pas réussi.
Et l’armée israélienne n’est pas différente de toutes les armées du monde et les généraux israéliens sont les mêmes que partout ailleurs. Ils pensent militairement et ils pensent que la force peut résoudre tout. Et donc, la saignée était quelque chose de planifiée, elle a été immédiatement mise en œuvre. Et pour preuve, et c’est le deuxième exemple que je veux vous donner, les seuls réservistes qui ont été mobilisés, fin septembre, début octobre 2000 ont été des tireurs d’élite. On n’a pas mobilisé les unités de réserve des fantassins, les réservistes, infirmiers, chauffeurs qui sont en général les premiers parce qu’ils sont assez nombreux parmi les appelés, on a appelé les réservistes qui étaient tireurs d’élite. Et on ne mobilise pas les tireurs d’élite uniquement pour disperser les manifestants. Pour ça, il y a la police des frontières qui est extrêmement efficace, ou les soldats du contingent qui sont moins efficaces parce qu’ils sont jeunes et qu’ils perdent un peu les pédales. Les tireurs d’élite sont là pour tirer, pour tuer. C’est leur profession, c’est leur expertise, c’est leur spécialité, c’est leur armement. Ils tirent à travers la lunette et l’armée israélienne d’ailleurs, ne l’a jamais caché, qui a même doté les tireurs d’élite à partir de novembre, de petites mini caméras vidéo pour filmer. On a même eu le plaisir de voir, à la télévision, tous les quelques jours, l’efficacité de nos tireurs d’élite puisque la caméra vidéo était attachée à la lunette à travers laquelle ils visaient. Et, c’était, ce qui était un peu stupide de la part de l’appareil de propagande de l’armée israélienne, pour montrer qu’ils ne tiraient pas n’importe comment. Ils tiraient un objectif précis, un palestinien précis qui s’apprêtait à lancer une pierre ou à tirer sur un soldat. Mais par là même, ils prouvaient une chose, c’est qu’ils étaient là pour tirer, pour tuer.
Et comme dernière preuve, je ne l’ai pas ici, mais lors de mon dernier séjour en Europe, j’en avais besoin pour la présenter devant le Parlement européen, c’est une lettre que nous avons reçue au centre d’information alternative du général commandant le secteur opérationnel de l’armée israélienne, c’est à dire le n° 3 de l’armée israélienne, en réponse à une plainte que nous avons présentée devant la cour suprême sur l’usage excessif de la force, prenant de nombreux exemples y compris le nombre impressionnant de blessés. 80% des blessés le sont dans la partie supérieure du corps et nous savons tous que si l’armée tire parce qu’elle perd les pédales, c’est alors parfois dans les jambes, si les soldats tirent par panique, s’ils sont attaqués ou s’ils se croient attaqués et qu’ils tirent dans le tas, alors les balles sont partout. Logiquement, elles sont dispersées plus ou moins proportionnellement de la tête aux pieds. Or 80% des blessures sont dans la partie supérieure du corps, dans le thorax et dans la tête. Et le général nous répond d’une façon tellement directe que j’ai cru au départ que c’était une réponse ironique et qu’il se moquait de nous. Mais nos avocats nous ont dit : non, il répond tout à fait sincèrement, en disant : " non seulement c’est vrai que nous visions la partie supérieure du corps, mais nous regrettons que les soldats n’aient pas réussi à viser, à savoir à tuer, car leur objectif est de tuer dans de pareils cas ". Donc, ce n’est pas un usage excessif de la force, ce n’est pas une armée mal contrôlée, des soldats qui tirent à tort et à travers, en soi, ce serai déjà assez criminel, c’est un véritable crime de guerre.
Et à nouveau, pour ceux qui ne sont pas convaincus, prenons le dernier exemple, et cela plus personne ne le cache, même les média européens le reconnaissent, c’est la décision d’assassiner les dirigeants politiques, 9 ou 12 dirigeants palestiniens, les chiffres ne sont pas clairs, ont été assassinés de sang froid, l’avant dernier en date étant un docteur, un ami très proche, dentiste, dans la ville de Tul Karem. Il a été un des premiers palestiniens, et je le dis par expérience car je connais très bien ce docteur, qui depuis 1987-88 a été un des premiers dirigeants du Fatah, un des premiers dirigeants de l’organisation d’Arafat, à chercher le dialogue avec les israéliens, à lancer les premières campagnes communes entre la ville de Tul Karem et les militants de la paix de Tel Aviv, à continuer depuis 88 jusqu’à aujourd’hui des rencontres et initiatives pour développer la solidarité, l’idée de réconciliation. Ce docteur n’avait rien à voir avec les militaires, il était un politique qui, plus d’une fois, s’est mis en danger dans sa propre communauté pour revendiquer l’action pour la réconciliation, même dans les moments les plus difficiles où la réconciliation n’était pas une évidence. Eh bien, ce docteur, avec 7 ou 11 autres palestiniens, a été assassiné de sang froid, tiré à bout portant par des tireurs d’élite alors qu’il sortait de sa maison pour aller à son cabinet, parce qu’il fallait se venger d’une opération qui avait eu lieu la veille.
Toutes les autorités israéliennes le reconnaissent, il n’y a aucun lien entre la personne assassinée et l’opération à laquelle elle est censée répondre, si ce n’est un lien dans le temps. " Nous ne laisserons pas passer 24H sans qu’une opération soit impunie et peu importe qui sera puni ". On dit que ce sont les Américains qui ont suggéré cette politique parce que les missiles sur Gaza et Ramallah étaient impopulaires et inefficaces. Pour moi, peu importe si les conseils ou les suggestions venaient de Washington, c’est notre gouvernement, c’est notre armée qui est responsable et qui est passible de fait de la cour pénale internationale pour crime de guerre, un sujet qui tôt ou tard, sera à l’ordre du jour. Tôt ou tard, Israël cessera d’être l’objet d’une impunité permanente, des choses qu’on interdit à juste titre, à Milosevic, qu’on interdit à Saddam Hussein, à toutes les dictateurs et fauteurs de guerre à travers le monde. Il n’y a pas de raison qu’on ferme les yeux, qu’on détourne un regard pudique comme ça, ici, en Europe ou à travers le monde, parce que c’est Israël.
Le premier acquis de l’Intifada a été d’ouvrir les yeux de l’opinion publique israélienne et d’enclencher un processus de remise à l’heure des montres, à savoir que le consensus en Israël éclate et qu’une partie substantielle majoritaire de la population comprenne que l’occupation était un problème, qu’il fallait y mettre fin et comprenne quel était le cadre global des conditions qu’il fallait pour y mettre fin. Cette perception, petit à petit, s’était atténuée depuis la signature des accords d’Oslo, elle avait rejoint un nouveau consensus en Israël, mais il n’a fallu que trois mois de soulèvement palestinien pour qu’à nouveau, une partie de plus en plus grande de l’opinion israélienne retrouve ses repères. On le voit à travers des prises de position d’intellectuels de la gauche israélienne les plus connus, qui, en septembre, début octobre, ont appelé à l’utilisation de la main forte de l’armée pour réprimer les palestiniens ingrats. Dès le mois de novembre, ils changent leur fusil d’épaule et appellent le gouvernement israélien à retourner très vite à la table des négociations, à menacer même de ne pas voter pour Barak si celui-ci ne parvenait pas à obtenir un accord qui nécessite la reconnaissance par Israël de la frontière des lignes de cessez le feu de 1967 et le démantèlement des colonies.
Position qui n’est pas nouvelle : c’était la position des forces de la paix il y a 10 ans mais elle a été un peu oubliée au cours des années passées. Il faut être de retour à la case départ d’il y a 10 ans pour sentir qu’on recommence à aller de l’avant. On a fait 10 ans de détours, on s’est égarés dans les prés de l’illusion, du rêve du beurre et de l’argent du beurre, ce rêve où on peut avoir et les colonies et la paix et la sécurité et les territoires, et la réconciliation nationale et la réconciliation avec les palestiniens, toute cette utopie stupide qui s’est imposée en Israël et qui est tombée comme un château de cartes en deux mois d’Intifada. Et ça, c’est un acquis.
Le problème est que cette polarisation qui se refait en Israël entre une droite et une gauche, entre les extrémistes et les modérés, entre partisans du compromis et de l’intransigeance, ne se retrouve pas derrière le duel électoral auquel la population israélienne est confrontée et par rapport auquel elle devra trancher dans une quinzaine de jours. C’est que les gens ne reconnaissent pas dans Barak Sharon le choix entre la guerre et la paix, les compromis et non compromis. Je ne me souviens pas, depuis 30 ans que je participe au jeu électoral en Israël, d’une élection aussi terne et qui provoque si peu d’intérêt dans l’opinion publique israélienne. Barak Sharon, Sharon Barak, pour une grande partie de l’opinion publique, c’est une question qui, si elle ne nous laisse pas tout à fait indifférent, est tout à fait secondaire. Tout le monde sait que la marge de manœuvre des uns et des autres est très limitée, que la base consensuelle qui les réunit est beaucoup plus grande que ce qui les sépare, que ce n’est pas le choix entre une option résolument pour la paix et une option qui tourne le dos à la paix. C’est le choix entre deux options assez identiques qui voudraient bien la paix mais qui ne sont pas prêts à en payer le prix. Un candidat comme Shimon Peres aurait pu exprimer cette alternative, vue sa trajectoire, vu ce qu’il signifie, vues les positions critiques qu’il a exprimées plusieurs fois autour du règne Barak, de la dictature Barak comme on dit en Israël aujourd’hui, ce pouvoir d’un homme seul qui dirigeait seul, envers et contre son parti, envers et contre sa coalition, envers et contre l’opinion publique qui l’a mis au pouvoir, qui a lamentablement échoué et qui ne sera pas réélu.
Mais entre les deux candidats d’aujourd’hui, cette voix qui s’affirme sur ce qu’on entend à nouveau du côté palestinien et qu’on n’a peut-être pas voulu entendre au cours de ces dernières années, cette voix qui reconnaît ce que veulent les palestiniens sans pour autant toujours l’admettre, mais au moins sont prêts à l’entendre, cette voix ne trouve pas sa traduction dans la scène politique ou dans les candidatures qui se présentent à cette élection, d’où le désintérêt total assez largement partagé. Il y aura un pourcentage apparemment assez élevé et sans précédent, cela ne fait aucun doute, d’abstentions et de bulletins blancs aux prochaines élections, ce qui signifie une victoire certaine pour la droite. Sharon sera perçu comme un feu vert par l’appareil militaire, l’état major israélien dont une partie importante veut pousser à la guerre, parce qu’elle veut mettre fin dans ce qu’elle considère comme une série trop longue de défaites ou de non victoires. La guerre du Golfe, l’armée israélienne n’a pas pu réagir malgré les skuds sur Tel Aviv. Au sud Liban, l’armée israélienne a été mise en déroute et a du se retirer inconditionnellement jusqu’au dernier millimètre. Malgré les méthodes utilisées et le prix énorme payé par les palestiniens, l’armée israélienne n’a pas les moyens de résoudre militairement l’Intifada. Et l’armée veut une victoire comme toutes les armées et veut une redistribution des cartes, globale, pour avoir à nouveau son rôle à jouer et redonner ce qu’ils appellent la supériorité psychologique d’Israël qu’ils croient complètement ébréchée par ces trois défaites ou non victoires.
Personnellement, je suis plus sceptique par rapport à ça. Je crois que les risques qu’implique un nouveau cycle de guerre au Moyen Orient sont trop graves pour que l’Administration américaine donne à Israël le feu vert. Tout le monde est d’accord qu’il y aura une prochaine guerre mais qui sera notre ennemi ? Est-ce la Syrie, l’Irak ou l’Iran ? Il y a trois tendances dans l’état major, chacun est persuadé que celui qui nous menace le plus est différent mais une guerre avec en arrière fond le symbole de Jérusalem risque fort de se transformer rapidement en une guerre de religion. On dit l’Intifada de Jérusalem, je ne le crois pas, je crois que c’est l’Intifada de l’indépendance. C’est aussi l’Intifada de l’humiliation, de mettre fin à cette longue période d’humiliation mais Jérusalem a été la provocation absolue de Barak à Camp David renforcée par cette visite provocatrice d’Ariel Sharon soutenue par Barak sur l’esplanade des mosquées. Alors Jérusalem, dans le cas d’une nouvelle guerre, deviendra la guerre de tous les musulmans, deviendra une guerre qui ira bien au-delà des conflits militaires et d’un échange de coups de feu, qu’une bataille de tanks ou de missiles entre Israël et l’Irak, entre Israël et la Syrie, mais deviendra une guerre généralisée qui mettra à bas, et c’est la raison pour laquelle, je crois, les américains n’y seront pas intéressés, tous les acquis de la guerre du Golfe du point de vue de la stratégie américaine.
En tant qu’israélien ou habitant de cette région, la fenêtre d’opportunité, ouverte à Madrid ou à Oslo mais non ouverte pour l’éternité, qui offrait à Israël la chance de pouvoir s’intégrer, de pouvoir être accepté, malgré le passé, le péché originel qu’a représenté cette création d’Israël sur les ruines de la Palestine, risque alors d’être fermée, le monde arabe disant : "  OK, tournons la page, nous n’oublions pas, nous ne pardonnons pas mais nous tournons la page, on est prêts à ouvrir un nouveau chapitre ". Loin de saisir cette opportunité, Israël a tout fait pour essayer d’ouvrir la fenêtre mais d’y faire ce qu’elle voulait et donc, cette fenêtre, si elle se ferme, risque d’ouvrir la porte à une bourrasque qui entraînera tout le monde. Si la guerre des religions se développe dans cette région, elle aura une caractéristique : il n’y aura pas de vainqueurs, il n’y aura que des vaincus surtout quand on sait qu’Israël est dotée de l’arme nucléaire et qu’elle n’a jamais caché, qu’en dernière analyse, s’il n’y a plus le choix, selon l’expression israélienne consacrée, " nous mourrons avec les Philistins ", référence à Sanson qui s’est tué en faisant tomber les poutres du temple où il se trouvait.
C’est la question pour laquelle il faut faire tout ce qui est en notre pouvoir en Israël mais aussi à travers le monde, pour empêcher que cette dynamique de guerre qui s’est ouverte, avec l’échec des négociations, avec l’échec de Camp David, aille de l’avant, parce que si elle va de l’avant, elle nous mène tous à une catastrophe. Alors, il y a des données pour refermer vite la porte de la guerre, les palestiniens ne l’ont jamais caché : elles sont : le retrait de tous les territoires occupés, le démantèlement des colonies, une souveraineté palestinienne sur tout Jérusalem Est, le droit au retour des réfugiés. Ces données sont claires, simples, elles ont été affirmées en 1988 et depuis, quotidiennement, par tous les portes paroles officiels, officieux et populaires des palestiniens, toutes tendances confondues.
Et c’est à vous, dans une certaine mesure, en France et en Europe, de faire comprendre à nos dirigeants politiques, mais aussi à notre opinion publique, que c’est le prix à payer, que c’est un prix avantageux à payer car l’alternative sera terrible. Plus vite on comprendra que c’est cela ou la catastrophe, plus vite on arrivera à débloquer cette situation et à ouvrir de véritables négociations. C’est là que les négociations commenceront, sur la mise en œuvre de ces résolutions du droit international, de l’ONU, qui sont le seul cadre accepté par les palestiniens et acceptable par la communauté internationale pour que la paix devienne un horizon réaliste dans la région et ouvre la voix vers une véritable réconciliation entre israéliens et palestiniens.